Le dilemme démocrate et l’ombre de Chicago-1968

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Pour l’heure et en fonction des sondages existants, il semble que l’issue probable des primaires démocrates ne désignera pas le candidat démocrate d’une façon directe. Les porte-paroles de Clinton et d’Obama reconnaissent pour l’instant que cette issue est probable. Obama a pris la tête du nombre de délégués avec 1.280 contre 1.212, selon un décompte d’Associated Press. Pour l’emporter avec 2.025 délégués, l’un ou l’autre des candidats devraient emporter 75% à 80% des délégués restants. A moins de l’effondrement de l’un des deux candidats, cela paraît improbable. Il existe déjà des polémiques vicieuses qui promettent des querelles difficiles à la convention, comme le cas des deux Etats de Floride et du Michigan. (Ces deux très importants Etats ont été écartés du décompte final par la direction du parti, à la suite de leur refus d’accepter la chronologie des primaires pour leur compte; les primaires y ont pourtant eu lieu mais le parti a annoncé que leurs résultats ne seraient pas pris en compte; Hillary a gagné dans des conditions de ce fait discutables, – par exemple avec un Obama qui n’a pas fait campagne dans les deux Etats et n'était même pas inscrit en Floride, – et elle réclame que ces résultats soient pris en compte en arguant notamment du fait qu’il y a eu énormément de votants.).

Cette hypothèse actuellement jugée probable (les choses peuvent changer) d’une désignation à la convention autrement que par le résultat direct des primaires conduit à une perspective particulièrement déstabilisante. Il s’agirait de la situation d’un candidat désigné selon des procédures largement mises en question par rapport à la procédure normale du vote populaire. Toutes les contestations sont possibles et la situation de la légitimité du processus serait fortement aggravée.

Le site WSWS.org publie une analyse de cette situation le 18 février. En voici quelques extraits.

«Even if Clinton succeeds in winning the three large-state primaries that remain—Ohio and Texas on March 4, and Pennsylvania on April 22—Obama is considered likely to emerge with a lead of perhaps 100 delegates.

»This would leave the final decision in the hands of so-called superdelegates, the 795 people who are automatic delegates thanks to their holding current or past elective office, or membership in the Democratic National Committee. About 400 of these delegates have publicly committed themselves to Obama or Clinton, a majority of them for Clinton.

»The remaining delegates—as well as any of those committed who decide to change their minds—could have decisive weight in the contest. Most of them are members of the DNC or the chairmen of state Democratic parties, part of the Democratic Party apparatus concerned primarily about the assistance that the presidential candidate could provide in winning local, state and congressional offices.

(...)

»The most likely scenario for a Clinton victory depends on achieving a sufficiently large majority among the superdelegates to overturn Obama’s margin among the pledged delegates. This edge would then allow Clinton’s forces to control the credentials committee at the Democratic National Convention in August and approve the seating of delegates from two states, Michigan and Florida, which were stripped of their votes for violating national Democratic Party rules by moving their primaries up to January.

(...)

» Much of the Democratic Party establishment fears that a Clinton victory through maneuvers with superdelegates and rules changes on Michigan and Florida would create explosive conditions on the floor of the national convention and discredit the entire process. There has been open discussion of the precedent of the 1968 Democratic convention in Chicago, where police violence against antiwar demonstrators outside the convention and crass antidemocratic maneuvers inside produced a political debacle and contributed to the defeat of the eventual nominee, Hubert Humphrey.

»A key group of superdelegates is being organized to try to forestall such an eventuality. According to press reports over the weekend, former vice president Al Gore, House Speaker Nancy Pelosi and three former candidates in the current contest, Senator Joseph Biden, Governor Bill Richardson of New Mexico and former senator John Edwards, have held talks on the danger of allowing the nomination fight to continue into August.»

Le souvenir de Chicago-1968 (la convention du parti démocrate de cette année électorale) est particulièrement effrayant. La convention démocrate de Chicago fut l’occasion d’un des sommets de l’affrontement qui opposa les groupes contestataires de l’époque et les forces de l’ordre dans les annés 1960. Le souvenir rappelle une période particulièrement instable, révolutionnaire, avec ces affrontements sanglants entre des manifestants contestataires et la police de Chicago en marge de la convention qui prirent une allure d’émeutes et au cours desquels les forces de l’ordre se conduisirent d’une façon particulièrement brutale. Comme on peut le noter, il s’agit, avec le cas évoqué, d’une occurrence où se produirait cet événement rarissime de la rencontre entre le public (les militants de base, des contstataires) et la direction du parti qui est le coeur de la bureaucratie du système. On voit également que les tendances identifiées durant les élections placent Hillary Clinton du côté de l’establishment et Obama du côté de la contestation, ce qui correspond bien à la perception générale et renforce ainsi les tendances antagonistes en cours.

La nécessité d’une désignation bureaucratique à la convention démocrate introduirait un formidable facteur de déstabilisation dans le processus en cours, déjà largement contesté.


Mis en ligne le 20 février 2008 à 05H36