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1082David Walker est un homme sérieux. Directeur du GAO jusqu’en avril dernier, il est notamment fameux pour avoir comparé, dans une intervention en août 2007 les USA à l’empire romain, circa “décadence et chute”. L’article qu’il publie aujourd’hui dans le Financial Times est d’un particulier intérêt.
On retiendra les deux premiers paragraphes de son analyse, parce que cet expert de la comptabilité fiscale et budgétaire, qui ne manque pas de donner une dimension politique à ses appréciations, y pose implicitement la question suprême et que la chose est bien suffisante… En un mot, tout est dans son analogie: on disait que AIG, Bear Stearns, Fannie Mae, Freddie Mac, Lehman Brothers, Merrill Lynch étaient des titans de la finance et du crédit et, en conséquence, “trop gros pour s’effondrer”; ils se sont, d’une manière ou d’une autre, “effondrés”. On dit aussi que “vraiment, le gouvernement américain est ‘trop gros pour s’effondrer’…” Voulez-vous poursuivre l’analogie?
«What do AIG, Bear Stearns, Fannie Mae, Freddie Mac, Lehman Brothers and Merrill Lynch have in common? Some thought that these companies were too big to fail. They were wrong: all of these companies have either filed for bankruptcy, been “bailed out” by the government, or, owing to the sub-prime crisis, have been acquired. Over the weekend, the US government went one step further, with its proposals for an estimated $700bn (€493bn, £391bn) bail-out to ease the credit crisis.
»The US government truly is too big to fail. However, there are disturbing parallels between the factors that led to the sub-prime crisis and the deteriorating financial condition and fiscal foundation of our federal government. These similarities ought to ring an alarm bell for Congress and the presidential candidates. The question is, will they hear it and wake up?»
Walker poursuit par diverses appréciations techniques, comptables et budgétaires. L’important est évidemment qu’il ait posé cette question, qu’il évoque in fine cette hypothèse qui écarte le tabou final de la croyance en l’invincibilité du gouvernement américaniste, perçue comme une donnée absolue. Cette croyance est évidemment un acte de foi, mais l’acte de foi fondamental de la croyance dans le modèle américain, dans la structure anglo-saxonne qui tient tout le système.
Le cas du gouvernement US, par les diverses décisions d’urgence qu’il a été conduit à prendre, est qu’il lie de plus en plus son sort à la stabilité, voire à la survie du système financier. On est de plus en plus conduit à identifier le système en perdition avec le gouvernement US, espérant que ce gouvernement saura redresser ce système. Par là, il établit un lien de responsabilité du gouvernement vis-à-vis du système. On comprend évidemment la substance du lien ainsi établi, puisque tous nos vaillants idéologues du néo-libéralisme n’ont plus peur d’agir en bons vieux socialistes, en acceptant les nationalisations à tour de bras. Mais cette action n’est nullement constructive, bien entendu, mais une action d’urgence entreprise sous l’empire de la nécessité; c’est cette nécessité qui établit un lien organique entre le gouvernement et le système financier en péril. Un effondrement de ce système ferait naître aussitôt une menace vitale contre la stabilité et la structure du gouvernement des Etats-Unis, puisque la responsabilité de ce gouvernement serait engagée. Avant même d’évoquer des hypothèses générales plus précises, on peut envisager qu’une telle situation conduirait immédiatement à des tensions centrifuges très grandes dans la structure même du système américaniste. (Pour illustrer ce propos, on rappellera que la dernière tentative de sécession d’un Etat de l’Union remonte à 1933, de la part de l’Etat du Montana, qui fit voter son Congrès sur une proposition de sécession de la structure fédérale (proposition rejetée), par des adversaires de la politique économique de Washington en pleine Grande Dépression.)
Mis en ligne le 23 septembre 2008 à 09H52