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1230Depuis deux jours, c’est une profusion de nouvelles, d’analyses, de commentaires, concernant la concrétisation très forte et très “opérationnelle” des divisions à l’intérieur du camp des rebelles anti-Assad. Les divisions suivent grosso modo la ligne de partage entre la référence religieuse et la référence laïque, avec les liens en conséquence avec les pays du bloc BAO qui soutiennent les rebelles depuis le début. A l’intérieur de cette grande ligne de partage, existe des fluctuation selon les groupes avec des ralliements d’un camp vers l’autre (en général à l’avantage du camp “religieux”), et aussi entre les groupes combattants intérieurs et leurs représentations extérieures, et encore entre ces représentations extérieures. C’est dire s’il est difficile de tracer un tableau précis de la situation, et qu’il est préférable de s’en tenir à l’impression générale qu’il pourrait bien s’agir d’un mouvement décisif de rupture à l’intérieur du camp rebelle.
On trouve notamment des informations et des analyses sur Reuters, le 26 septembre 2013, sur Antiwar.com le 26 septembre 2013, sur IPS (InterPress Service, via Antiwar.com) le 25 septembre 2013, etc. Un texte de Russia Today, le 25 septembre 2013, regroupe toutes les informations essentielles et donne une image assez claire d’une situation assez compliquée, certes ... On notera, soulignée en gras par nous, l’appréciation d’un officiel du département d’État, donnant la mesure des paradoxes qu’on trouve, bien entendu sans surprise excessive, dans cette situation remarquable par sa complexité.
»Key Syrian rebel groups, including members of the Western-backed Free Syrian Army, have rejected the authority of the Turkey-based Syrian National Coalition, a body that the West and some Arab countries hoped would form a government in exile. The coalition this month elected self-described moderate Islamist Ahmad Tumeh to serve as the prime minister of its government, but 13 of the most powerful rebel groups fighting in Syria said neither him nor the coalition represent them. The majority of the rebels denouncing the SNC are radical Islamists such as the notorious terrorist organization Al-Nusra Front. But among them is the 19th Division, a significant but relatively new addition to the mainstream Free Syrian Army, reports AFP.
»These forces call on all military and civilian forces to unite under a clear Islamic framework based on Sharia law [Islamic law], which should be the sole source of legislation," the signatories said. The statement was published on several rebel-related social media pages. It was read by an elderly man shown on a video. [...]
»Meanwhile a senior US State Department official said Tuesday that radical and moderate rebels in Syria are engaged in the fiercest infighting yet, especially in opposition-held territory along Syria's northern and eastern borders. The increased confrontation between the more effective Islamists and the US-backed moderates has undermined their ability to fight against the Syrian army.
»“It's the hardest fighting we have ever seen between Salim Idriss's elements of the Free Syrian Army and the Islamic State of Iraq and the Levant,” said the official, who spoke to reporters after US Secretary of State John Kerry met SNC President Ahmad Jarba. “It's a slog.” “I would even go so far as to say that the extremists are actually doing the government's work now, which was a point that the opposition made in the meeting with the secretary,” said the official, who spoke on condition of anonymity.»
McClatchy.News (le 26 septembre 2013) consacre une longue analyse à la question de la fracture au sein du mouvement rebelle. Il examine les implications diverses, notamment opérationnelles, et tente également d’en apprécier l’importance politique. Ainsi renforce-t-il l’impression que nous nous trouvons devant un événement d’une réelle importance.
«The emergence of the Islamist bloc comes just as U.S. officials were touting more unity and diversity within the Istanbul-based Syrian Opposition Coalition, whose leaders are at the United Nations this week trying to convince world powers to send more money and weapons to the rebel cause. That could become a much harder sale now that the Supreme Military Command has lost its biggest militias. The development also doesn’t bode well for the State Department’s plans for a joint U.S.-Russian peace summit on Syria, or at least a conference that would be viewed as credible by Syrians and regional stakeholders.
»“Here you have radicals doing something that conceivably could give them more of a claim to a seat at the table, while because of their odious ideology and other reasons, these aren’t the people the United States wants to see at the table,” said Paul Pillar, who served as the U.S. intelligence community’s top Middle East analyst and now teaches security studies at Georgetown University. [...]
»... Thirteen rebel factions were signatories to the Islamist alliance’s announcement, which quickly went viral in online Syrian forums and was accompanied by snapshots of members of the different groups posing together as comrades. “To be very open and frank, it is a problem that the opposition counts extremists and terrorist groups, and I don’t shy away from using the word terrorist groups. That’s a fact,” NATO Secretary General Anders Fogh Rasmussen told McClatchy in an interview on the sidelines of the U.N. General Assembly. “And of course it’s weakening – it is weakening – the opposition.”»
Le même article de McClatchy-News s’attache à recueillir les avis d’experts sur l’importance de l’événement général qui est considéré ici. On note particulièrement celui de Charles Lister, de IHS Jane’s, qui avait récemment (voir le 17 septembre 2013) donné des précisions largement répercutées démentant notablement des affirmations de Kerry sur la proportions des islamistes dans la rébellion. Le jugement de Lister est que les péripéties actuelles pourraient sans doute signaler l’importance considérable de l’événement général, jusqu’à en faire potentiellement un tournant pour la rébellion et, partant, pour la crise syrienne...
«Still, analysts of jihadist movements say, the defiantly militant, anti-Western tone of the initial statement signaled a serious shift in the nature of the opposition that’s likely to linger even if groups come and go from the bloc. Charles Lister, who monitors jihadist movements for the London-based defense consultancy IHS Jane’s, called the agreement a potentially pivotal moment for the rebellion. ,“If this new alliance holds, it will likely prove the most significant turning point in the evolution of Syria’s anti-government insurgency to date,” Lister wrote in an analysis sent to journalists. “Having toed politically pragmatic lines since their emergence onto the scene in Syria, the key Islamist middle-ground players – Liwa al Tawheed, Liwa al Islam and Suqor al Sham – have finally made clear where their allegiances lie, with huge implications for the moderate opposition.”»
La thèse d’un tournant capital dans la situation de la rébellion est largement substantivée par les événements, après diverses péripéties dans ces derniers mois qui faisaient envisager de tels prolongements. D’autre part, une analyse plus générale nous conduit à distinguer une réelle concordance entre cette évolution déstructurante de la rébellion, et l’évolution de la position (pour ne pas dire “politique”, mot qui n’a pas sa place ici) du bloc BAO ces dernières semaines. A la lumière de cette méthodologie, on pourrait apprécier que le projet avorté d’attaque US (avec les supplétifs français) contre la Syrie, – même s’il peut potentiellement être réactivé, – constitue une circonstance déstructurante importante pour l’ensemble du mouvement anti-Assad dans sa conformation initiale d’apparence unitaire.
Quelles que soient les attitudes, les attentes, les montages, les ambitions cachées, etc., l’attaque US, dans le degré d’annonce où elle se trouvait au niveau de la communication, était devenue une perspective très forte d’un événement catalyseur, également pour la rébellion, même si chaque fraction en attendait sans doute des effets différents. Son abandon pour la séquence, – abandon temporaire ou pas qu’importe, – constitue un choc considérable pour les psychologies. On ne parle pas nécessairement des enseignements concrets, stratégiques ou tactiques dans une orientation spécifique selon les tendances, mais d’abord du choc psychologique brut ... Quoi qu’on en veuille, la perspective d’une frappe US accompagnée de tout l’apparat de communication qui continue à habiller l’image de la puissance américaniste (malgré son déclin dans la réalité), telle qu’elle se trouvait clamée, voire magnifiée dans le sens d'une capacité exceptionnelle sinon magique par le système de la communication, constituait un événement paroxystique que tout le monde attendait, et qui maintenait, bon gré mal gré, une certaine discipline unitaire chez les rebelles (et dans tous les camps d’ailleurs), quelles que fussent les arrière-pensées. Son abandon a brisé ce cadre psychologique de contrainte et a libéré les ambitions, les dynamiques, etc., pour les exposer à ciel ouvert.
On se garde bien ici de faire quelque prévision que ce soit sur l’évolution de la situation des rebelles. La complication de la situation, désormais multipliée par les nouvelles fractures, interdit un tel exercice. On se contente d’acter l’extrême probabilité qu’il s’agit d’un événement important, couplé avec un choc psychologique qui ne l’est pas moins. Cela signifie que la situation de la crise syrienne se trouve désormais placée à un carrefour de son évolution, avec diverses possibilités de développement, et finalement placée avant tout devant une perspective marquée par l’inconnu et selon des tensions déstabilisatrices importantes. Bien entendu, non seulement la Syrie est concernée, mais la région du Moyen-Orient également et, par voie de conséquence indirecte mais qui peut s’avérer très puissante comme on l’a vu dans l’épisode intérieur US dans la séquence qui vient de se terminer, la situation intérieure des pays du bloc BAO.
Mis en ligne le 26 septembre 2013 à 11H26
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