Le JSF qui transpirait

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Est-ce un nouveau “front” qui s’ouvre dans la guerre du JSF, criblée effectivement de “fronts”, de polémiques, de revendications et de contestations de toutes sortes? Pourquoi pas…Dans tous les cas, il est tentant de l'ajouter, un “front chaud”.

La première salve de l’affaire tombe d’une façon anodine, dans un texte que le journaliste d’Aviation Week & Space Technology (AW&ST) David A. Fulghum met en ligne, le 18 mars 2009, sur son blog. Le texte traite d’hypothèses diverses concernant le budget de l’année fiscale FY2010 aux USA. On y trouve l’affirmation que le JSF sera soutenu par l’administration Obama dans ce budget, – puis, comme par inadvertance, et effectivement de cette façon nous semble-t-il, – ce soutien, “malgré de nouvelles préoccupations”…

«The F-35, despite some new worries about heat buildup in the aircraft in some situations, will be supported vigorously in the 2010 budget, says a long-time Air Force acquisition official. “Thermal problems were first identified in hot-weather ground operations,” he says. “The problem was that the fuel-air heat exchanger was not providing enough cooling. In the short-term, at least, they’ll just limit hot weather activity.”»

Le même jour, ce même 18 mars 2009 par conséquent et si nous comptons bien, Bill Sweetman, que nous connaissons bien, ne laisse pas passer le pauvre canard, – c’est-à-dire le JSF une fois de plus boiteux. Il épingle le texte de Fulghum, sa citation, commence par ironiser puis développe de réelles préoccupations sur la question mise à jour, qui est celle de la température entretenue dans l’avion, dans les circuits ad hoc, pour la bonne marche de l’énorme système électronique dont le JSF est bardé. En effet, l’annonce de l’officiel cité par Fulghum selon lequel il faudrait peut-être limiter les opérations du JSF par temps chaud, ou dans les pays où il fait chaud en général, déchaine l’ironie de Sweetman. Plus loin, il nous propose des réflexions peu encourageantes sur l’emplacement de la tuyère d’éjection du moteur, notamment à partir de photos montrant que l’air chaud des tuyères a entamé la peinture de l’avion – avec l’idée que des changements concernant cette tuyère n’ont pas résolu le problème … Sweetman termine par un “à suivre” soupçonneux, comme il se doit. («Show-stopper? Probably not. A delay factor? Quite possibly, and one to keep an eye on.»)

«This item caught my eye from Dave Fulghum's post, referring to a certain all-singing, all-dancing omnipotent fighter aircraft: “Thermal problems were first identified in hot-weather ground operations,” he says. “The problem was that the fuel-air heat exchanger was not providing enough cooling. In the short-term, at least, they’ll just limit hot weather activity.”

»It's just as well that US forces won't have to operate in hot climates any time soon. According to highly placed sources, the Obama administration expects that the Schleswig-Holstein question, and the assurance of a Protestant successor to the Elector of Hanover, will be the big conflict flashpoints of the next two decades. […]

»In any event, the JSF has a thermal management problem, and one design change – moving the exhaust – hasn't fixed it, since for the time being it appears that hot-weather operations are being restricted.»

L’affaire semble sérieuse puisqu’elle est reprise et très largement développée, par David Fulghum à nouveau, dans le numéro de ce 30 mars 2009 de l’hebdomadaire AW&ST. Cette fois, le bavardage entre confrères et néanmoins amis (Fulghum et Sweetman) à partir d’une remarque anodine est devenu un cas bien précis, un nouveau problème pour le JSF. Dans le texte s’accumulent des explications diverses, nombreuses, complexes, en général fort peu compréhensibles, entrecoupées de détails assez charmants où il semblerait que, tant que le problème n’est pas fixed, il faudra que le JSF vole le plus haut qu’il peut, quand il le peut, parce qu’il fait moins chaud en altitude, qu’il vole plutôt à l’ombre qu’au soleil, qu’on n’oublie pas de bien remuer la glace dans le shaker avant de boire, etc.

Le fait est qu’on envisage, qu’on doit envisager des modifications…

«Upgrades to the Lockheed Martin F-35 Lightning II are being considered to improve the fighter’s ability to absorb heat from its powerful electronics and systems. The aircraft is meeting the specification for thermal management, but the incoming Joint Strike Fighter program executive officer, U.S. Marine Corps Maj. Gen. (sel.) David Heinz, says he is asking contractors to assess the costs of changes to give it a bigger margin over the requirement.

»The stealthy F-35 is designed to keep itself cool by dumping heat from the electronics and systems to its fuel. Under most conditions, that presents no challenge, but at the end of a mission the aircraft will have little fuel left to absorb the heat energy, says Tom Burbage, Lockheed Martin executive vice president for F-35 program integration. The toughest part of the specification is to distribute heat to the remaining fuel while operating in hot conditions.

»“Thermal problems were first identified in hot-weather ground operations,” says a long-time Pentagon acquisition official. “The problem was the fuel-air heat exchanger was not providing enough cooling. In the short term, at least, they’ll just limit hot-weather activity.”» […]

»Aside from potential design changes, there is an operational cooling strategy: fly higher, where the colder airflow over the airframe would help cool it and the fuel. It is not possible to do that on every mission, however, and it is not an option at the end of a flight. This could be a problem for the short-takeoff-and-vertical-landing (Stovl) F-35B, which must be able to hover and land at high power at the end of a mission while keeping fuel temperature within limits.»

Ce qui nous remplit toujours d’un étonnement sans fin accompagné de ce qui pourrait ressembler au sentiment irrésistible d’une certaine satisfaction pour la morale de l’histoire, c’est le contraste parfois hurlant, souvent réconfortant, toujours très “popote”, qui accompagne ces épisodes de la chevauchée des hautes technologies. On vous donne la chose la plus formidable, la plus avancée du monde, qui répond à un claquement de doigt ou à clin d’œil plein de cils sophistiqués pour faire des choses formidables, comme figurer comme une tête d’aiguille sur un écran-radar ou reconnaître une aiguille dans une botte de foin, et puis l’on vous annonce que pour mener à terme votre mission vous devrez emporter votre thermomètre de poche pour trouver l’endroit le plus frais possible pour continuer à voler, éventuellement en maniant l’éventail, tout cela en détruisant quinze villages de talibans par guidage laser et en abattant un moustique suspect par tir de missile beyond visual range.

Cela écrit sans très grand sérieux, voici donc le premier cas sérieux de ce qu’annonce depuis trois ans le GAO. Le JSF n’ayant pas été testé sérieusement (2% seulement des essais en vol de la campagne d’essai seront accomplis fin 2009, si tout marche bien, – dito, s’il ne fait pas trop chaud) et un problème potentiellement sérieux se dessinant, c’est non seulement à des modifications à apporter au système général qui va être produit qu’il faut s’attendre, mais à l’application des mêmes modifications sur les avions déjà fabriqués, eux-mêmes conçus à la fois comme avions pour la campagne d’essais et comme avions devenant avions de production, au statut opérationnel normal.

L’imbroglio JSF se poursuit à bon rythme.


Mis en ligne le 30 mars 2009 à 01H14

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