Le JSF s’inquiète de la fidélité des amis britanniques

Bloc-Notes

   Forum

Il y a 2 commentaires associés à cet article. Vous pouvez les consulter et réagir à votre tour.

   Imprimer

 1366

Il y a une réaction perceptible immédiate, nettement marquée quoiqu’encore limitée aux canaux spécialisées, de “la maison JSF” concernant ce que pourrait être l'attitude britannique vis-à-vis de son engagement dans le programme JSF, pour ce qu'en dit le rapport IPPR publié le 30 juin. La réaction vient notamment par le biais d’un article d’Aviation Week & Space Technology (et de la lettre d’information Aerospace Daily, du même groupe), repris intégralement dans un article de Colin Clark, de DoDBuzz.com, le 2 juillet 2009.

Nous mentionnons ces deux canaux parce que leur importance d’influence dans les milieux concernés est acquise. Par conséquent, leurs réactions, si spécifiques dans ce cas, par la forme et par le fond, reflètent une inquiétude qui vient aussi bien du Pentagone que de Lockheed Martin (LM).

Aviation Week & Space Technology (AW&ST), on connaît son influence et son poids dans l’activité d’influence du monde aéronautique et de la défense aux USA, donc son importance stratégique.

• Bien qu’éditant sur un site encore mal connu hors-USA, mais qui a son influence à Washington, Colin Clark est un chroniqueur respecté et assez apprécié du Pentagone (et de LM). D’une façon générale, Clark suit la position officielle Gates-LM dans l’affaire du F-22 versus F-35/JSF: plutôt pour l’élimination du F-22 et en avant toute pour le F-35.

Clark présente sans détours ni commentaires excessifs l’article de AW&ST, ce qui montre que le but recherché à cet égard est la diffusion maximale de l’article pour sonner l’alarme. Il l’assortit d’une observation significative (soulignée en gras de notre fait) reflétant l’inquiétude à propos de l’engagement UK dans le JSF et le sérieux que les milieux proches du JSF accordent à cette affaire:

«A left-leaning British thinktank is urging the Labour Party government to consider pulling out of the F-35 as that country combs through all its defense acquisition programs. The inimitable Doug Barrie at AvWeek broke the story about the report, authored by several respected British defense experts. While the Brits have shown few signs of anything but complete commitment to the F-35, this is a story to watch over the next few months as the government stares deep into its dwindling purse.»

L’article de AW&ST reprend la nouvelle du rapport IPPR en axant sa présentation quasi-exclusivement sur la question du JSF, alors que l’ambition du rapport, on l’a vue et détaillée ici, est beaucoup plus large.

«The U.K. should re-examine its commitment to the Lockheed Martin F-35, a left-leaning think tank suggests, as part of a broader review of defense procurements. The Institute for Public Policy Research (IPPR) says that as part of a “Strategic Security Review” the U.K. government should “re-examine … its defense equipment requirements. This re-examination should explore all viable options for capability downgrading and quantity reductions, as well as for complete cancellation of some equipment programs.”

»The IPPR’s Commission on National Security in the 21st Century’s final report, “Shared Responsibilities, A National Security Strategy For The United Kingdom,” published June 30, argues that given the pressure on defense procurement and the need for savings, these would best be made in areas “where we are members of an alliance that already possesses the relevant capabilities in abundance.” Such an approach, it contends, “puts certain capabilities in the frame for reconsideration. For illustrative rather than comprehensive purposes, these might be said to include: The Future (Aircraft) Carrier program [and] … The F-35.”

»The report is given weight by the members of the commission, which include co-chairman George Robertson, a former NATO Secretary General. Gen. Charles Guthrie, a former chief of the defense staff, and David Omand, a former security and intelligence coordinator in the Cabinet Office, also were members of the commission…»

La présentation du rapport dans les deux cas montre une préoccupation américano-centrique sur le seul domaine du JSF. La remarque de Clark selon laquelle «Doug Barrie at AvWeek broke the story about the report» le confirme; ces articles ont été mis en ligne alors que le rapport IPPR était déjà signalé puis présenté dans la presse britannique depuis le 28 juin (observations de pré-publication du rapport, suivies de commentaires le jour de sa publication, le 30 juin). Mais dans ce cas des Britanniques, l'attention était concentrée sur l'essentiel du rapport, qui est son appel à une révision stratégique complète.

La même présentation montre une orientation idéologique de forme, qui tend à chercher à réduire ou à discréditer son impact. La formule “left-lining” (d’orientation de gauche), employé par Clark aussi bien que par AW&ST, pour définir l’IPPR est un peu expéditive, certainement très significative et éventuellement malveillante, à l’intention des milieux washingtoniens du domaine. Ce n’est qu’un stéréotype de circonstance, ridiculisé par les noms des participants à la commission qui a produit le rapport. Robertson, plus caractérisé par son passé de ministre de la défense et de secrétaire général de l’OTAN que par son étiquette de “travailliste”, le général Guthrie, ancien chef d’état-major UK, Clarke, professeur au RUSI, peuvent difficilement être soupçonnés de cultiver une “orientation de gauche”, même modérée ou mondaine.

C’est la première fois qu’une prise de position, somme toute encore marginale, mettant en question l’engagement dans le JSF d’une façon assez modérée, d’un pays engagé dans ce programme, provoque une réaction aussi rapide et manifestement une telle inquiétude. Bien entendu, c’est le signe que le Royaume-Uni est perçu comme le pivot fondamental du programme JSF pour sa branche extérieure, à côté du pivot qu’est l’USAF dans le domaine intérieur, et qu’il n’est pas temps que le Royaume-Uni donne des signes d’hésitation en ce moment où le F-35 traverse une passe difficile avec son affrontement contre le F-22, au Congrès notamment. D’autre part, il ne faut pas écarter l’hypothèse que la direction du Pentagone et LM estiment, ou soient informés dans ce sens, que le rapport n’est que la première manifestation d’une situation extrêmement critique du Royaume-Uni pour sa défense, dont la commande d JSF serait amenée à pâtir d’une façon ou une autre, dans une mesure plus ou moins importante. Cela signifierait que les milieux US/JSF croient, ou/et sont informés dans ce sens, que l’évolution implique effectivement des réductions budgétaires radicales qui mettront l’engagement dans le JSF en grand danger. Le rapport du RUSI, qui suit celui de l’IPPR, ne les dément pas, essentiellement pour la question budgétaire qui détermine le reste.


Mis en ligne le 3 juillet 2009 à 08H51