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998L’avantage de WikiLeaks, et de la diffusion des “Wiki-cables”, c’est d’abord la poursuite tranquille du flots de cables officiels dont plus personne ne connaît vraiment la provenance ; c’est ensuite une construction, une structuration de tout un champ de vérités officielles, dissimulées dans l’anonymat des affirmations officieuses, notamment contenues dans les dépêches diplomatiques ; c’est, enfin, la possibilité de réviser radicalement l’Histoire d’une façon générale, bien au-delà des délais de quelques mois ou de un à deux ans sur lesquels travaille en général WikiLeaks.
Voici donc le cas du “massacre de la place Tian’anmen”, dont il s’avère, cables à l’appui, que ce ne fut nullement le “massacre” qu’on a dit, précisément dans son énormité infâme pour qu’il en devienne un immuable symbole de l’infamie. Car la chose, le symbole, est entré dans l’évidence absolument indécrottable de notre mémoire-Système officielle, cette écurie d’Augias du souvenir… Bref et pour redevenir terre-à-terre, quelques “Wiki-cables
Le Daily Telegraph du 4 juin 2011 se fait une gloire de nous rapporter les nouvelles, lui-même publiant les cables en exclusivité.
«The cables, obtained by WikiLeaks and released exclusively by The Daily Telegraph, partly confirm the Chinese government's account of the early hours of June 4, 1989, which has always insisted that soldiers did not massacre demonstrators inside Tiananmen Square. Instead, the cables show that Chinese soldiers opened fire on protesters outside the centre of Beijing, as they fought their way towards the square from the west of the city.
»Three cables were sent from the US embassy on June 3, in the hours leading up to the suppression, as diplomats realised that the final showdown between the protesters and soldiers was looming. The cables described the “10,000 to 15,000 helmeted armed troops” moving into the city, some of whom were “carrying automatic weapons”. […]
»Inside the square itself, a Chilean diplomat was on hand to give his US counterparts an eyewitness account of the final hours of the pro-democracy movement. “He watched the military enter the square and did not observe any mass firing of weapons into the crowds, although sporadic gunfire was heard. He said that most of the troops which entered the square were actually armed only with anti-riot gear – truncheons and wooden clubs; they were backed up by armed soldiers,” a cable from July 1989 said. The diplomat, who was positioned next to a Red Cross station inside Tiananmen Square, said a line of troops surrounded him and “panicked” medical staff into fleeing. However, he said that there was “no mass firing into the crowd of students at the monument”. […]
»Leaders of the protest, including Liu Xiaobo, the winner of last year's Nobel Peace prize, urged the students to depart the square, and the Chilean diplomat relayed that “once agreement was reached for the students to withdraw, linking hands to form a column, the students left the square through the south east corner.” The testimony contradicts the reports of several journalists who were in Beijing at the time, who described soldiers “charging” into unarmed civilians and suggests the death toll on the night may be far lower than the thousands previously thought.
»In 2009, James Miles, who was the BBC correspondent in Beijing at the time, admitted that he had “conveyed the wrong impression” and that “there was no massacre on Tiananmen Square. Protesters who were still in the square when the army reached it were allowed to leave after negotiations with martial law troops [ ...] There was no Tiananmen Square massacre, but there was a Beijing massacre”. Instead, the fiercest fighting took place at Muxidi, around three miles west of the square, where thousands of people had gathered spontaneously on the night of June 3 to halt the advance of the army… […]
»The cables also reveal the extent to which the student democracy protests had won popular support, and how for several weeks the protesters effectively occupied the whole of central Beijing, posing an existential challenge to the Communist party.»
D’une façon générale, il faut savoir et comprendre exactement que Tian’anmen (ou “le massacre de…”) est l’un des épisodes fondateurs de la narrative universelle, peut-être le plus signifiant et le plus symboliquement exploité pour la justification de la chose (la narrative). Sans lui qui soutient la politique humanitariste, ou politique du “droitdel’hommisme” comme “doctrine”, ou politique de l’“interventionnisme humanitariste”, ou encore “droit d’ingérence humanitaire”, – sans lui, que deviendrait toute cette volaille ? La liste des noms trouvés pour définir cette “doctrine” est à mesure inverse de la substance de cette doctrine, exactement, – alors, si vous lui ôtez son principal symbole.
L’“interventionnisme humanitariste” est le faux nez affectionné par les élites postmodernistes pour justifier et peinturlurer d’une couche grossière de vertus la politique expansionniste et belliciste du bloc BAE ; d’ailleurs, beaucoup plus pratiquée par les Européens, l’usage de ce faux nez, que par le côté américaniste qui ne s’embarrasse pas toujours de cette dialectique hypocrite dont le poids est considérable, mais qui l’affectionne certes de plus en plus ces derniers temps, à mesure de son effondrement subreptice... L’usage a fait de l'humanitarisme, vertu included, un argument fondamental de la politique extérieure et de sécurité nationale des pays du bloc BAE, jusqu’à transformer l’argument en substance lorsque la substance a disparu. De quelque côté qu’on la prenne, cette politique est donc une parfaite imposture, un vide peinturlurée en plein, destiné à combler le vide complet de la substance de la politique.
Cette imposture est activée depuis la fin de la Guerre froide, et son premier champ d’application fut la guerre en ex-Yougoslavie, où elle participa activement à tous les montages, manipulation, dissimulations de ce conflit. Dans cette perspective chronologique, le “massacre de la place Tian’anmen” est effectivement le bloc fondateur, la justification morale et théorique absolue de cette politique. La narrative du “massacre de la place Tian’anmen” a largement survécu jusqu’ici comme l’archétype de la cruauté, de l’oppression, de la “contre-civilisation” selon les moralistes du Système, parlant eux-mêmes sans qu’ils s’en avisent au nom de la vraie “contre-civilisation”. Aujourd’hui encore, cette narrative conduit nombre d’analyses officielles des bureaucraties américanistes-occidentalistes sur l’évaluation de la position et du crédit de la Chine, et la mention du “massacre…” figure en bonne place dans les fiches de la Commission européenne lorsqu’on veut définir la position convenable à tenir face à la Chine. Les “Wiki-cables” nous indiquent donc que l’essentiel, le pire, l’“indicible” comme ils disent, de ce qui fut rapporté du temps du “massacre de la place Tian’anmen”, avaient été complètement construit et structuré par des rapports faussaires de la presse américaniste-occidentaliste (chose d’ailleurs mise à jour par des témoignages, dont celui de James Miles, de la BBC, en 2009). Par conséquent, une part importante, voire essentielle dans le contexte du système de la communication, de la démarche du bloc BAO par rapport à la Chine repose sur une imposture de ce même système de la communication, dont les diplomates des puissances savaient parfaitement qu’il s’agissait d’une imposture. Tout cela conduit pour une bonne part, encore et toujours aujourd’hui, aux postures agressives et antagonistes qu’on constate aujourd’hui entre la Chine et les pays du bloc, l’UE et les USA notamment. Contrairement aux arguments archaïques qu’on pourrait avancer sur le réalisme et les intérêts des forces en présence, cette réputation de la Chine fondée sur l’imposture occidentale au nom de la vertu utilisée comme faux-nez joue un rôle important dans une politique absolument gangrenée par le système de la communication et les échos des divers partis des salonnards.
Ce que nous révèlent les “Wiki-cables”, cette fois d’une façon quasiment “officielle” bien que cela soit de l’“officiel” confisqué, ce n’est pas qu’il n’y a pas eu des morts, mais bien que le “massacre de la place Tian’anmen” en tant que tel, dans sa grandeur infâme d’une fusillade systématique et froidement ordonnée de la foule estudiantine et pacifique, n’a pas eu lieu. Le symbole s’effondre, car le symbole est un bloc qui ne tolère pas la moindre contestation de toute sa substance si médiocre pour ce cas, de sa comptabilité établie comme sacrée, de sa forme même, jusqu’à ses moindres détails. Le symbole s’effondre parce que disparaît le signe de l’infamie volontaire, du massacre délibérée. Le reste, les escarmouches, les morts dans des accrochages dans cette période agitée de la Chine où le pouvoir trembla sur ses bases, bien d’autres pays que la Chine, y compris chez ses accusateurs, en portent le même fardeau dans ce qui est la tragédie sans fin de l’Histoire. Ce qui meurt avec cette mise à jour du montage de l’infamie du “massacre de la place Tian’anmen” ayant pris forme de symbole, c’est justement le symbole indiscutable où la Chine est enfermée depuis près d’un quart de siècle comme un monstre difforme et infâme dans une cage.
Là-dessus, nous ajouterons que nous sommes persuadés qu’il n’y eut aucun montage, aucun mot d’ordre, pour toute cette presse sous influence automatique et fascinatoire de cette conception du monde qu’est l’“anglosaxonisme”, s’exerçant essentiellement par sa puissance au travers du système de la communication, mais qu’il y eut plus simplement un réflexe commun, type réflexe-Système. Ce réflexe visait au discrédit d’une puissance hors du Système et dont on pouvait craindre qu’elle devint un jour une concurrente du Système, mais surtout une puissance qui était par sa nature une réfutation du Système ; cette cause essentielle du “réflexe” fait effectivement de cet “acte” du montage du “massacre de la place Tian’anmen” un acte complètement réflexe, inconscient, non élaboré, qu’on est donc parfaitement justifié de nommer “réflexe-Système”. L’attaque par le biais moral, par le biais de l’archétype du “massacre de la place Tian’anmen” arrangé comme on le voit, renvoie à la schizophrénie anglo-saxonne et occidentaliste, indirectement et par contraste suggéré, à l’“inculpabilité” américaniste et ainsi de suite. Ainsi l’Histoire n’a-t-elle pas été réécrite d’une façon faussaire mais, plus simplement, écrite et fabriquée d’une façon absolument faussaire dès l’origine, et cela du point de vue des faits, et cela alors que les faits se déroulaient à ciel ouvert, littéralement justifiable d’une comptabilité évidente. Ainsi en est-il de notre vertueuse “contre-civilisation”, – et ainsi soit-il de notre Chute, par conséquent.
Mis en ligne le 6 juin 2011 à 10H46
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