Il y a 2 commentaires associés à cet article. Vous pouvez les consulter et réagir à votre tour.
852Si l ‘on veut établir une échelle générale de la dynamique de réduction de puissance depuis 2001 par rapport aux moyens initiaux et aux ambitions, il est évident que les USA, sous la direction de GW Bush, sont en tête. Tant du point de vue politique, par l’influence perdue, que du point de vue militaire et économique, avec des crises systémiques dans les deux cas, que du point de vue de la structure du pouvoir. Là-dessus et pour compléter le tableau anglo-saxon, il s’avère que le Royaume-Uni est un indiscutable n°2. Le déclin de la puissance structurelle du Royaume-Uni depuis 2001, essentiellement sous la direction de Tony Blair, est un fait remarquable.
Aujourd’hui, Gordon Brown, par ailleurs bien peu doué pour susciter une mobilisation sinon un sursaut, assume l’héritage et paye l’addition à grands frais et grand fracas. L’effondrement de son autorité est considérable, mise à nu avec une défaite travailliste tonitruante, le 24 juillet, dans une élection locale en Ecosse (commentaire du Scotsman, le 25 juillet: «If the 22 per cent by-election swing was replicated across Scotland in a general election, it would leave just one of Labour's 39 MPs in place – Tom Clarke in Coatbridge – with casualties including Gordon Brown, the Prime Minister, and Chancellor Alistair Darling»).
D’où le commentaire de Bruce Anderson, ce matin dans The Independent:
«Gordon Brown is finished. As the Prime Minister, he is in office, not in power. As a party leader, he is confronted by insubordination on an unprecedented scale; far worse than anything John Major experienced. As an electoral asset, Mr Brown is toxic waste.»
Alors, va-t-on remplacer Gordon Brown? Pas sûr du tout. Il ne veut pas partir et personne ne tient vraiment à le remplacer, par conséquent on laisse aller sans forcer pour des élections anticipées qui devraient être catastrophiques si elles avaient lieu. Le parti travailliste est en complet désarroi; c'en est à un point tel que certains songent à rappeler Tony Blair, l’homme qui est à la base de cette catastrophe, – mais sans véritable espoir, le processus institutionnel le soumettant dans ce cas à des clauses qui épuisent par avance (retrouver un siège de parlementaire).
... D'où la conclusion d'Anderson: «There is a clear conclusion. It is almost impossible for Mr Brown to cling on. It is also almost impossible to displace him. […] So the average Labour MP oscillates between febrility, fantasy, fear and despair.»
Et quelle est l’alternative, au moins pour les élections de 2009? Le parti conservateur, certes. Il a tout un programme: il s’agit de renouveler au niveau social la réussite de Thatcher au niveau économique, car l’état social du Royaume-Uni, entre ses pauvres, sa délinquence, son immigration, ses services publics inexistants ou à la dérive, etc., est à l’image du désordre de la direction politique.
Dito, ce commentaire de The Independent, également aujourd'hui; il nous en dit long sur le rôle de chacun (travaillistes et conservateurs) et ce qu'il est advenu de la cause sociale pour ceux (les travaillistes) qui furent créés pour la défendre, – puisqu'aujourd'hui les conservateurs s'emploient à élaborer un programme social pour balayer les travaillistes: «Despite Tory criticism of Gordon Brown's economic management, the differences between the two main parties on economic policy are not huge. To find his unique selling point, Mr Cameron is attempting a daring raid into Labour's anti-poverty territory. Just as Margaret Thatcher transformed the economy in the 1980s, Mr Cameron's goal is to reshape society, a task regarded by many people as the missing piece of the Thatcher revolution. He argues that, in the global economy, Britain cannot enjoy economic success without social success too.»
“Thatcher revolution”? L’héritage de Thatcher, d’ailleurs largement assumé par Blair, à transférer au niveau social? Etrange idée, comme si la formule Thatcher prévoyait d’être complétée par un programme social gouvernemental, d’ailleurs assuré en toute vertu libérale proclamée. Etrange, étrange. D’ailleurs, se sont-ils avisés qu’entretemps le Royaume-Uni, presque majestueusement, comme une de ces anciennes et puissantes unités fendant les flots dont la Royal Navy ne dispose plus aujourd'hui, est entré en récession, suivant en cela, et fidèlement, la voie américaniste? Le 14 juillet, Ashley Seager, du Guardian, nous annonçait:
«We're going into recession. That's all you need to know.
»Actually, not quite all you need to know. It may be worse than that - we may already be in one. The turn in the economy, although it has been lurking out there for some time, has come swiftly and sharply in the past few weeks, as is often the case with recessions. When the economic history books are written, they will almost certainly say the late-noughties recession began in earnest in the late spring of 2008. »
Tout se passe comme si, en sept ans, à partir de l’étrange “opportunité” de l’attaque du 11 septembre, le couple anglo-saxon avait joué son va-tout, assuré de son succès, pour aboutir au contraire, presque dans une symétrie parfaite, à une déroute qui frappe tous les domaines du système. Pendant ce temps, inlassablement, nos moulins à prière, dans les médias officiels du continent, continuent à égrener leurs cantiques à la gloire du “modèle anglo-saxon”, la plume hébétée, l’encre hagarde, sans songer à dévier d’un pouce de la ligne du Parti.
Mis en ligne le 28 juillet 2008 à 14H21
Forum — Charger les commentaires