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16321er septembre 2002 — le rapport du 28 août de l'institut d'analyse Stratfor sur la situation en Afghanistan est impressionnant. Le titre nous renseigne sur des perspectives jugées peu encourageantes (« Situation Deteriorating Rapidly in Afghanistan »). Stratfor cite diverses sources, notamment “étrangères”, soit afghanes, soit pakistanaises, soit indiennes et russes.
Plusieurs éléments sont avancés :
• Un regroupement des forces talibans et d'Al Qaïda, une fois absorbé le choc des opérations américaines et alliées de l'automne 2001.
• Une augmentation des accrochages, des harcèlements, contre des forces américaines, soit en opération, soit dans leurs cantonnements.
• Des pertes significatives (depuis octobre-novembre 2001) pour une situation perçue officiellement comme complètement sous contrôle à cet égard, et considérée désormais comme significatives d'une phase de “pré-guérilla” : 110 tués US selon des sources afghanes, 300-400 selon des sources indiennes/russes. (Officiellement, pour Washington, les pertes sont nettement inférieures à 100.)
La situation générale est perçue comme en pleine détérioration, selon Stratfor, en fonction de deux facteurs importants sur le terrain :
« Sources in the Afghan government report two worrisome trends. First, resistance to U.S. forces and the Karzai government, previously confined to Kandahar, Khost, Paktia and Paktika provinces, has spread over the summer to nearly all majority Pushtun provinces. [...]
» Second, some Tajik, Uzbek and Hazara field commanders are reportedly seriously considering targeting U.S. forces. Additionally Afghan sources confirm that the Taliban has sealed a partnership with militant group Hezb-i-Islami, and the two groups' forces began operating together this month.
» The result of all this is an accelerating deterioration of the U.S. experience in Afghanistan toward that of the Soviet Union in the 1980s. As in the Soviet case, it took a year for the opposition to coalesce, spreading slowly across the country's various factions. The gradual strengthening of the rebel forces was then followed by attacks on the Soviets' Afghan allies, who presented soft targets. This forced the Soviet troops to take charge of security operations themselves, destroying the illusion of partnership with a local regime. The pattern is repeating itself. »
Notons que cette situation, telle qu'elle est rapportée ici, correspond aux échos que nous avons de sources européennes, à partir de l'expérience des détachements européens pour la gestion et le contrôle de l'aide européenne. C'est notamment l'expérience de l'impossibilité d'opérer hors de Kaboul, voire hors de certains quartiers de Kaboul strictement soumis au contrôle occidental.
Stratfor prévoit un enlisement US « pour des années » en Afghanistan. Si c'était le cas, ce que d'aucuns jugent être le “piège” tendu par Al Qaïda aurait fonctionné : à partir de l'attaque du 11 septembre 2001, attirer les Américains dans un bourbier afghan, notamment par une approche initiale qui semble très facile, voire triomphante, mais qui met en place les conditions mêmes de ce piège. On précisera deux autres aspects caractérisant la position américaine :
• La dégradation de l'engagement US quant à la forme même de la guerre. Au début, les USA ont imposé leur type de guerre de haute technologie. Ce modèle s'est rapidement dégradé. Désormais, les Américains en viennent aux termes voulus par leurs adversaires : une guerre-bourbier de type guérilla.
• La guerre offensive d'octobre-novembre 2001 s'avère finalement être une guerre de type « offensive de défense » (terme ironiquement employé par un diplomate britannique pour qualifier l'offensive soviétique en Afghanistan, en décembre 1979). Les Américains ont préféré transporter leurs capacités offensives, ou leurs stratégie générale offensive, vers l'Irak, considérant le problème afghan comme réglé. Cela n'est semble-t-il pas le cas, et ils se retrouvent sur la défensive, comme les Soviétiques.