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965Hier, le 26 août 2012 (voir PressTV.com), un parlementaire iranien a annoncé que l’une des excursions offertes par le gouvernement iranien à ses invités chefs d’État et de gouvernement qui seront à la tête de leurs délégations (autour d’une cinquantaine, les autres étant à un niveau moins élevé) pour le sommet du NAM, serait la visite des installations nucléaires iraniennes. On n’est pas plus aimable, ni ouvert… Il y a ceci de particulier dans la dépêche de PressTV.com que la nouvelle est annoncée en la concentrant uniquement sur le nom du président égyptien Morsi («Egypt president to visit Bushehr nuclear plant: Iran lawmaker»), alors qu’il n’est évidemment pas la seule personnalité participant à l’excursion :
«A senior Iranian lawmaker says Egyptian President Mohamed Morsi will visit Bushehr nuclear facilities on the sideline of the Non-Aligned Movement (NAM) summit. Mansour Haqiqatpour, member of Iran's Majlis Committee on National Security and Foreign Policy, said on Sunday that Tehran was prepared for a visit by the NAM heads of state to Natanz, Isfahan and Bushehr nuclear facitlites. “One of Iran's programs on the sidelines of the NAM summit is inviting heads of state to visit Iran's nuclear facilities,” Haqiqatpour said.»
L’expert Mahdi Darius Nazemroaya publie, sur le même site PressTV.com (ce 25 août 2012), une très longue et très instructive analyse du sommet du NAM à Téhéran. L’article reprend l’historique du Mouvement, son effacement progressif jusqu’à la fin de la guerre froide, puis complet avec la fin de la guerre froide, puis sa très probable renaissance soudaine avec ce Sommet de Téhéran. Parmi les divers sujets abordés, il y a bien sûr celui de la présence de Morsi à Téhéran. Quelques extraits à ce propos…
«An important event at the NAM summit will be the arrival of Morsi in Tehran as a sign of warming relations. Ties between Cairo and Tehran will not be restored overnight either, because there are restrictions on Morsi. Whatever happens between Egypt and Iran at the NAM summit in Tehran will be just steps in an unrushed process. The Egyptians are taking pains not to antagonize their Western and Arab paymasters and the Iranians have opted to be patient. Morsi’s presence in Iran, however, is still symbolically very important. Tehran indeed has reason to be very optimistic as all its stars are aligning at its NAM gala. […]
»Some analysts are asserting that Egypt’s stance could “make or break” the project to isolate Iran, especially in sectarian terms involving a Shiite-Sunni divide. This is actually wrong, because there is nothing specifically significant that Egypt can do to break or isolate Iran. After all, Cairo and Tehran have essentially had no ties since 1980 and Mubarak was a staunch ally of the US who put Egypt to work with Saudi Arabia and Israel to curve Iranian influence. In the worst case scenario the relationship between the two countries will stay as it was during the Mubarak era. This is not a losing situation for Iran, albeit the situation in Syria has catalyzed the Iranian desire for faster rapprochement. Egyptian-Iranian relations have nowhere to go except upward.
»The Tahrir (Liberation) Square protests that dethroned Mubarak and helped bring about the elections that brought the Egyptian Muslim Brotherhood into power are part of what Iranian officials call an “Islamic Awakening” in contrast to an “Arab Spring.” Iran did not hide its belief either that Egypt and it could eventually form a new regional axis after dictator-for-life Mubarak was booted out from power. If there is any man that can make the leap from the conception of an Arab Spring to an Islamic Awakening, at least publicly, it is President Morsi through an alliance with Iran.»
…Gardons cela en mémoire, que Morsi est bien entendu l’une des vedettes du Sommet, que d’autre part voici son nom associé au nucléaire (iranien, certes, mais au nucléaire tout court, après tout…). Une autre nouvelle est l’annonce de la venue d’une délégation d’Arabie Saoudite, qui sera menée par le vice-ministre des affaires étrangères, un des nombreux princes disponibles de la maison des Saoud. C’est toujours PressTV.com, le 25 août 2012, qui annonce la nouvelle, et qui ne manque pas de mettre en évidence que cette décision saoudienne implique une haute considération du Sommet de Téhéran par la direction saoudienne : «Iran’s Foreign Ministry Spokesman Ramin Mehmanparast says Prince Abdulaziz bin Abdullah will represent Saudi Arabia… […] Mehmanparast announced on Saturday that the Saudi prince, who serves as the kingdom’s deputy foreign minister, will take part in the event on behalf of Saudi King Abdullah bin Abdul Aziz Al Saud. He also noted that considering the importance of Tehran summit, the Saudi King is sending Abdulaziz bin Abdullah as his special envoy.»
Gardons donc également à l’esprit que l’Arabie, bien qu’en guerre ouverte doublement avec l’Iran (à propos de la Syrie et à propos du nucléaire selon le catéchisme du bloc BAO), sera à Téhéran en assez grandes pompes et s’y trouvera bien. Cela mesure la popularité du Sommet, qui ne cesse de grandir, malgré les anathèmes lancées par la porte-parole d’Hillary, Virginia Noland (pardon, Victoria Nuland).
…Mais peut-être y a-t-il plus intéressant encore, ou dans la même veine d’intérêt mais en grandissant, avec l’analyse que nous livre DEBKAFiles, le 25 août 2012. L’humeur de DEBKAFiles varie souvent, en ce moment, et, avec elle, pourraient supposer certains, la véracité de ses informations. Le problème est de déterminer s’il y a un rapport et quel rapport entre les deux (l’humeur et la véracité), dans quelles mesures et dans quelles circonstances les intentions du site influe sur la véracité de ses informations selon l’effet qu’on en veut obtenir. C’est un exercice de logique et d’intuition difficile à conduire à un terme satisfaisant, dans cette époque où la “véracité” est une chose taillable et corvéable à merci. Aussi est-il justifié de faire intervenir un troisième élément, en plus de la logique et de l’intuition, qui est le “climat” des situations au Moyen-Orient.
Dans le texte cité, il est question du sommet de Téhéran en toile de fond, mais, surtout, au premier plan, des intentions nucléaires de l’Égypte et de l’Arabie dans le cadre de la connexion chinoise, et du bouleversement des relations qu’implique ce “fait” (?) et d’autres, dans ce cas bien sûr en fonction du sommet de Téhéran ; et il est aussi question, et là l’humeur de DEBKAFiles est amère et furieuse, de l’impasse où s’est enfermé le “couple” Obama-Netanyahou avec son tango sans fin sur le thème de l’interminable attaque-surprise annoncée du nucléaire iranien… (Au moins peut-on vous jurer que, pendant quatre-cinq jours, d’ici la fin du sommet de Téhéran, l’attaque n’aura pas lieu.)
Après avoir rapporté un épisode de plus de l’histoire, désormais interminable d’ennui, sur les relations/rencontres/marchés entre Obama et Netanyahou concernant l’attaque, DEBKAFiles nous balance tranquillement que “depuis quelques semaines”, l’Arabie et l’Iran négocient secrètement un accord de non-agression et un accord de règlement de la crise syrienne, dans le dos et sans consultation du couple Obama-Netanyahou occupé, comme l’on sait, à des choses bien plus intéressantes. Il est rappelé que des bruits avaient couru il y a quelques mois sur des négociations entre l’Arabie et la Chine (les deux pays ont de bonnes relations malgré leurs positions différentes sur nombre de problèmes) pour une coopération sur le nucléaire militaire et l’acquisition par l'Arabie de missiles chinois à capacités stratégiques, et il est affirmé que ces négociations sont passées au stade du développement de la coopération envisagée. Puis un autre coup de massue : “Mais il y a plus…”, ou plutôt “pire” puisqu’il s’agit de l’Égypte qui suivrait la même voie que l’Arabie.
«After less than three months in office, the Egyptian President Mohamed Morsi is following in Saudi footsteps: He will kick off his first foreign trips next week with a visit to Beijing, where he hopes to take a leaf out of the Saudi nuclear book. He then touches down in Tehran, ostensibly to attend the Non-Aligned Organization’s summit opening there on Aug. 26, but meanwhile to cultivate ties with Tehran for common action in the Middle East.
»He has laid the ground for this by proposing the creation of a new “contact group” composed of Egypt, Saudi Arabia, Iran and Turkey to disentangle the Syrian conflict – again behind America’s back. The optimistic presumption that the Egyptian president will have to dance to Washington’s tune to win economic assistance is proving unfounded.»
Pendant ce temps, poursuit le raisonnement, Washington ne peut rien faire parce qu’Obama s’est engagé depuis 2009 dans un soutien inconditionnel des Frères Musulmans… Et, poursuit DEBKAFiles, l’Égypte et l’Iran pourraient bien annoncer, à la fin du sommet, un rétablissement complet de leurs liens diplomatiques. Ce qui laisserait le couple Obama-Netanyahou devant une bien triste perspective, – en trois points, pour faire bref : «1.) Even if Riyadh, Cairo and Tehran are unable to come to terms in their first efforts at understanding, the fact remains that Saudi Arabia and Egypt have set their faces toward détente with Iran. 2.) Saudi Arabia and Egypt are on the road to a nuclear weapon although Egypt is still trailing far behind. 3.) In the five weeks remaining before the Obama-Netanyahu meeting, Iran, Egypt, Saudi Arabia and China will be moving forward vigorously toward their strategic, military and nuclear goals, while the US and Israel will be stuck in the doldrums of their interminable argument over who goes first against Iran – if at all.»
Impossible de trancher et inutile du supputer, car c’est bien dans de tels cas qu’il faut se garder d’en appeler à une raison soumise à tant de pressions et de tensions, et de secrets “désirs rationnels” que l’on habillerait d’une apparence de logique. Là encore, la vertu de l’inconnaissance doit être sollicitée.
…Le “climat” disions-nous plus haut, certes, alimenté, dans ce cas, par des faits incontestables. Le succès annoncé du sommet du NAM, avec le renforcement de la position internationale de l’Iran, en est un. L’évolution ultra-rapide de Morsi est un autre, extrêmement impressionnant ; on y ajouterait, en passant, la réaffirmation officielle par l’Égypte, hier 26 août 2012, que l’Iran doit faire partie de ce “groupe de contact” sur la crise syrienne proposé par Morsi le 15 août dernier, et alors que cette crise syrienne est de moins en moins à l’avantage du bloc BAO et de ses diverses manigances. La situation de l’Arabie est beaucoup moins claire, mais il est logique de penser que ce pays, dont la politique est conduite par une peur (nous disons même “trouille”) sans mesure de tout ce qui peut le menacer, et notamment les situations de changement dont il ne serait pas partie prenante pour en éviter les effets menaçants, est aujourd’hui sur le qui-vive et prêt à suivre de nouvelles orientations dans cette situation qu’il juge effectivement si changée par rapport à ce qu’il en était il y a quatre ou six mois. A l’inverse, les palinodies extraordinaires des menaces, arrangements, marchés, etc., entre Israël et les USA pour une attaque imminente depuis 7 ans de l’Iran, finissent par donner l’impression d’un dialogue de sourds (de malentendants) entre deux paralytiques dont les chaises roulantes seraient liées entre elles par une chaîne que certains jugeaient habile de verrouiller et qui s’avère complètement débilitante ; comme si cette “alliance” forcée de deux puissances si sûres d’elles-mêmes et si méfiantes l’une de l’autre créaient une curieuse pathologie où l’on ne sait si c’est la paralysie qui domine l’impuissance, ou le contraire, mais où les deux affections sont bien présentes pour nous assurer le débilité politique… D’où l’humeur de DEBKAFiles, qui ne rêve que d’une attaque massive, déstructurante et dissolvante de l’Iran. Cela montre que l’humeur n’est pas toujours mauvaise conseillère, car le mépris et la fureur qu’exsude son analyse à propos de la paralysie-impuissance d’Obama-Netanyahou sont largement justifiées, du point de vue des partisans de l'attaque et, objectivement, de la politique de force anti-iranienne des compères.
Alors, que valent ces annonces ? “Si non è vero, è ben trovato” ? Un petit plus tout de même… La question générale du développement nucléaire dans la région qui se ferait évidemment toujours au détriment du monopole israélien, les ambitions nucléaires de l’Égypte, sont des choses connues. Il y a beaucoup de signes, en ce moment, d’une situation caractérisée par le tourbillon de la “deuxième chaîne crisique” qui ne cesse de tourbillonner toujours plus vite. Si ceci ou cela qu’annonce DEBKAFiles n’est pas concrétisé, ou pas encore, on peut gager que nombre d’esprits doivent y songer. A l’heure du sommet du NAM, la région la plus volatile du monde est l’objet de toutes les supputations du monde.
Mis en ligne le 27 août 2012 à 09H07
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