Le président Carlson en pleine action

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Le président Carlson en pleine action

• Quelques considération, d’abord sur l’efficacité et la popularité de la presseSystème par rapport aux avancées de la presse dissidente et indépendante (dont fait partie notre site bien-aimé). • La chute est impressionnante, c’est-à-dire réjouissante. • Sympathique parallèle entre le Walter Cronkite de 1968 et le dynamique Carlson de 2023 qui semble lancé dans une entreprise de réparation et toutes les inexistences et les inefficiences de la diplomatie américaniste. • Ainsi, dit Larry Johnson, règne l’idiocratie dont le principe d’action est l’itération.

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Commençons par quelques considérations générales, montrant que ‘Le règne de la quantité’ lui-même travaille aujourd’hui contre la prépondérance de cette quantité en faveur de sa propre justification qu’est la modernité. Au contraire, la destinée retourne ses propres armes contre ce qui veut la détruire, selon l’enseignement de Sun Tzu,  et la quantité travaille désormais à la destruction de ce qui a installé sa toute-puissance, – parfait et émouvant exemple de l’effet-Janus.

Un excellent exercice général dans ce sens vient de Larry S. Johnson, ancien officier de la CIA et éditeur d’un site de belle audience (‘sonar21’ pour ‘Son of New American Revolution, XXIème siècle’) qui a mis récemment en ligne un article inhabituel (le 27 août) par rapport à la sorte de sujets qu’il traite en général : « Les médias de la presseSystème sont-ils une relique du passé ? ». On comprend que, dans cette allégorie, la presseSystème est considérée comme une des armes favorites du ‘règne de la quantité’.

Johnson voulait mettre en évidence la chute de l’audience de la presseSystème au profit de la presse dissidente et indépendante dont il fait partie. Il nous donne quelques indications d’ordre personnel ainsi qu’une comptabilité de sa méthodologie propre particulièrement marquante, et pourrait-on dire, particulièrement significative du point de vue de l’excitation de l’intelligence et de la force du jugement...

« Une partie de ma motivation pour aborder ce sujet vient d'une réunion hebdomadaire sur Zoom à laquelle j’ai assisté avec un groupe d'hommes et de femmes très intelligents, la plupart âgés de plus de 65 ans. Si je nommais certaines de ces âmes distinguées dans ce groupe, votre prochaine question serait , “Pourquoi diable t'ont-ils laissé entrer dans le groupe ?” Ils se sentaient charitables, je suppose, lorsqu'ils m'ont invité à participer.

» Plusieurs membres de ce groupe ont fait une gymnastique mentale assez intéressante pour tenter d’expliquer l’interview de Tucker Carlson/Donald Trump. Il s'agit d'un phénomène Internet qui a établi un nouveau record en tant que vidéo la plus regardée jamais réalisée sur X (anciennement Twitter). Pourtant, certaines de ces bonnes personnes n’arrivent tout simplement pas à croire que tant de personnes ont réellement regardé l’interview et tentent de rejeter le chiffre de plus de 260 millions comme rien de plus que des clics inutiles. Ce sont ces gens qui regardent encore les informations par câble et passent une grande partie de leur journée avec CNBC, Fox Business et Bloomberg News sur leurs écrans.

» Le secteur de l’information télévisée qui régnait en maître dans les années 1980 et 1990 est mort. J'ai déjà écrit sur la différence entre 1968 et 2016 en termes d'audience et de téléspectateurs. En août 1968, plus de 53 millions d’Américains regardaient les informations du soir sur ABC, CBS et NBC. Walter Cronkite sur CBS a régné en maître avec 28 millions de téléspectateurs. A cette époque, il y avait un peu plus de 200 millions d’Américains. Cela signifie que 14 % de tous les Américains regardaient Walter. J'ai été choqué de découvrir ce qui était arrivé aux audiences lorsque j'ai examiné les chiffres d'août 2016. Tous les principaux réseaux et émissions d'information par câble réunis avaient un total d'environ 28 millions de téléspectateurs. (Oui, j'ai additionné les performances d'ABC, de CBS, de NBC, de CNN, de MSNBC et de Fox News). »

Il est vrai que, voyant et écoutant Cronkite retour d’un reportage au Vietnam après l’offensive du Têt (janvier-février 1968) condamner l’intervention US en affichant sa conviction que les USA ne pouvaient pas gagner, – le président Johnson (Lyndon B.), comme il le révéla plus tard, comprit qu’il avait lui-même perdu et que les USA devraient abandonner la guerre. Il prit alors la décision, annoncée le 31 mars 1968, de ne pas se représenter, d’interrompre les bombardements sur le Nord-Vietnam et d’ouvrir des négociations de paix avec Hanoï.

Ainsi mesurera-t-on ce qu’était alors la toute-puissance de la presse (presseSystème). C’est bel et bien Cronkite qui avait pris cette décision de retrait du Vietnam et acte de la défaite américaniste, dans le chef de ses 28 millions d’auditeurs et de téléspectateurs. CBS, le réseau où travaillait Cronkite, ne pouvait que suivre son présentateur-vedette, et tout cela correspondant parfaitement à un tournant du système de l’américanisme qui était alors capable encore de penser et de prendre la mesure de ses intérêts et de ses capacités par rapport au public qui lui était encore fidèle.

Ainsi, sur cet arrière-plan fameux, – politiquement et du point de vue de la communication, – se posent l’une et l’autre questions qu’on résumera brutalement en ces quelques termes qu’une voix amie nous suggère :

« Note de PhG-Bis :“ Tucker Carlson est-il le Cronkite de 2023, ou le super-Cronkite de 2023 par rapport au Cronkite de 1968 ? Et le système de l’américanisme de 1968, qui était une kleptocratie mesurée et prudente, et donc acceptant le verdit de l’évidence de la communication, est-il devenu une ‘conneriecratie’, itération catastrophique de 1968, conduite par un extraordinaire rassemblement de stupidités et d’aveuglements divers ? La brutalité des mots employés, notamment concernant la ‘connerie’, rend compte de l’énormité du problème et du poids de crasse qui accompagne cette bêtise évoluant en essaims de drones aveugles et fanatisés, et par conséquent de la colère que tout cela suscite chez l’observateur...” »

Questions extrêmement brutales parce que Carlson, au contraire de Cronkite, est totalement un dissident, qui a pris son envol de puissance politique d’influence après avoir été, tout aussi brutalement, mis à pied par FoxNews et ostracisé haineusement par toute la presseSystème. On cite ici quelques évènements fameux actuels qui mesurent l’extraordinaire influence de communication de Carlson, c’est-à-dire, – directement parlant par rapport à l’infâme inexistence et la bassesse de l’idiocratie ou “conneriecratie” formant la direction politique faussaire qui nous parasite, – ce qui est en fait l’extraordinaire puissance politique de Tucker Carlson.

• Il y a bien entendu les fameux interviews de Trump par Carlson, en même temps que le débat des candidats républicains pour les primaires auquel Trump avait avec sagesse refusé de s’associer pour ne pas tenir le rôle de punchingball sur laquelle tout le monde, – sauf Vivek Ramaswamy, on s’en doute, – aurait exercé sa vertu de conformisme. Johnson (Larry S.) en parle, on se contente de le rappeler :

« • ...pendant ce temps, Trump, refusant le débat des candidats républicains, débattait avec lui-même, sous le feu amical mais néanmoins sans concessions de Tucker Carlson. Le résultat est, comment dirait-on, – “stupéfiant” par exemple :  250 millions de vues en 24 heures (et toujours en cours) pour la vidéo de la première partie... »

• Actuellement, Carlson est en Hongrie. Il s’est lui-même chargé de plusieurs missions, après avoir constaté que le gouvernement des États-Unis (USG, pour ‘United States Government’) ne se préoccupait pas 1) du travail de ses ambassadeurs, 2) de la réalité (vérité-de-situation) de la situation en Ukraine et 3) des risques découlant du fait de ne rien comprendre à la situation en Russie.

Sur le premier point, Carlson a donné à Budapest une conférence pour rendre publiques ses excuses pour le comportement qu’il a qualifié d’“écœurant” de l’ambassadeur US à Budapest. Cette intervention rompt avec la litanie de l’autosatisfaction US et fait espérer que la diplomatie de ce pays sera renforcée sous l’administrerions Carlson. Pour le reste, Carlson a été reçu par le Premier Ministre Orban, qui lui a exposé ses conceptions et ses perceptions. Ici, un extrait de l’entretien où, rompant là aussi avec l’habitude, la diplomatie US développée par l’administration Carlson a écouté plutôt que chapitré son interlocuteur.

« Orbán, le premier ministre hongrois ayant occupé le plus longtemps cette fonction, connaît bien la Russie (il a grandi sous son occupation et a été arrêté et jeté en prison par la police soutenue par les Russes pour ses efforts de libération du pays) et l'Ukraine (un pays avec lequel il partage une frontière), et Tucker s'est donc assis pour lui demander ce qui se passe exactement en Ukraine en ce moment (étant donné l'opacité propagandiste des informations en Amérique).

» “Ce n'est pas seulement un malentendu, c'est un mensonge”, commence Orban, interrogé sur le fait que les médias américains continuent d'affirmer que "l'Ukraine est en train de gagner" la guerre.

» Il suggère l’idée que l'administration Biden ne comprend pas la Russie et que tenter d'écarter Poutine pourrait conduire à une instabilité dangereuse. “Il est difficile de comprendre les Russes, surtout s'il y a un océan qui vous sépare de la Russie.”

» Orbán souligne que les conversations politiques occidentales sont souvent axées sur la liberté, tandis que les conversations russes se concentrent sur la cohésion du pays, et met en garde contre les implications dangereuses de la stratégie américaine, en particulier pour des pays comme la Hongrie qui sont géographiquement plus proches du conflit.

» “Ne vous méprenez pas sur les Russes. Ils ne vont pas en avoir marre de Poutine et le mettre à la porte, c'est une blague.”... »

Carlson a donc poursuivi son travail en continuant à questionner le Premier Ministre sur tous les aspects du conflit ukrainien. Toujours cette attitude si étrange, presque pathologique pour un observateur-Système, d’écouter les réponses faites aux questions qu’on a posées. Enfin, jugez par vous-même, pour la dernière question avec l’URL qui visionne cet entretien.

« Son avertissement le plus inquiétant arrive en dernier :“Nous vivons un moment très dangereux”, conclut-il, ajoutant qu'il devrait être évident pour tout le monde que “la troisième guerre mondiale frappe à notre porte”.

» Regardez l'intégralité de l'interview : “Ep. 20 La Hongrie a une frontière commune avec l'Ukraine. Nous nous sommes rendus à Budapest pour nous entretenir avec le Premier ministre, Viktor Orbán. pic.twitter.com/LOzpMrQNIz” »

• Il y a enfin la demande qui a été faite par Carlson de réaliser une interview du président Poutine. On ne peut rien de dire de plus pour l’instant à propos de cette extraordinaire folie, de cette épouvantable trahison, de ce comportement de terroriste et de barbare... La nouvelle est lancée, reste à voir son cheminement et son aboutissement. RT.com est derrière tout cela et pousse à la roue : qui cela étonnera de la part de ces fauteurs de guerre ?

« L'ancien présentateur de Fox News, Tucker Carlson, cherche à obtenir une interview du président russe Vladimir Poutine, a déclaré dimanche la rédactrice en chef de RT, Margarita Simonyan. “Carlson demande avec insistance un entretien avec Vladimir Poutine”, a déclaré Mme Simonyan lors d'un talk-show diffusé par la chaîne de télévision Rossiya-1. “Ce serait formidable si quelqu'un écoutait et informait le président à ce sujet...” »

Voilà le travail... Que font pendant ce temps où avance la diplomatie carlsonienne, les innombrables diplomates en place au premier rang  et les diverses nuées de fonctionnaires déguisés en drones des institutions démocratiques ? Eux dont la tâche est de travailler pour faire, disons, “avancer les choses”, disons, “du point de vue de la démocratie” ? Eh bien, ils sont en pleine itération, nous dit Alastair Crooke ; il s’agit, semble-t-il, de la transcription mathématique de cet épisode fameux de la Grande Guerre de la narrative américaniste-occidentaliste, où les soldats de la fameuse expédition conduite par un cheval géant-quatre étoiles nommé Achille font un formidable sur-place sans avancer d’un cil vers la ville de Troyes, en hurlant avec une énergie extraordinaire “En avant ! Marchons ! Avançons ! Passons à autre chose ! Faisons avancer les choses !”

« Tout ce gâchis [ukrainien notamment] est parfois expliqué comme le résultat d'une erreur de calcul des élites occidentales. La situation est cependant bien pire que cela : Le dysfonctionnement pur et simple et la prévalence de l'entropie institutionnelle sont si évidents qu'il n'est pas nécessaire d'en dire plus.

» Le dysfonctionnement de l'Occident est bien plus profond que la situation autour du projet ukrainien. Il est absolument partout. Les institutions publiques et privées, en particulier celles de l'État, ont du mal à faire avancer les choses ; les politiques gouvernementales ressemblent à des listes de souhaits rédigées à la hâte, dont tout le monde sait qu'elles n'auront que peu d'effets pratiques. C'est pourquoi les décideurs politiques ont une nouvelle priorité : “ne pas perdre le contrôle de la narrative”.

» La “trouvaille” de Hartmut Rosa, – L’immobilisme frénétique, – semble particulièrement appropriée.

» En d'autres termes, nous sommes pris dans une nouvelle itération de la politique de 1968. »

Et c’est ainsi que Tucker Carlson s’est décidé à prendre les choses en main. FoxNews en reste coi, avec ses formidables installations et ses salaires comme on n’imagine pas, à peu près comme la NASA par rapport aux entreprises d’Elon Musk, ou comme le F-35 que nul n’ose envoyer en mission par rapport au Su-35 russe attaquant les lignes ukrainiennes. L’Occident-résolutif, par la voix de Joe Biden, va sans doute décider de faire voter la destitution du président Carlson ; il faudra alors, mille sabords, que quelqu’un aille chuchoter à l’oreille gauche (la meilleure) de Joe Biden : “Non, monsieur le Président, excusez-moi, ce n’est pas possible monsieur le Président, monsieur Carlson n’est pas monsieur le Président... enfin, il n’est pas encore monsieur le Président veux-je dire, monsieur le Président, euh dans tous les cas... Par conséquent, ça c’est sûr, impossible de le destituer...”.

Et c’est ainsi que Tucker Carlson poursuivit sa chevauchée.
 

Mis en ligne le 30 août 2023 à 15H50