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365Divers échos venus de déclaration de sources semi-officielles russes montrent que les Russes sont satisfaits, voire “surpris” par la position d’Obama sur la question centrale pour les relations USA-Russie du BMDE. C’est le cas de deux déclarations données par Novosti.
• D’abord, celle d’un parlementaire russe, Konstantin Kossatchev, qui préside la commission des affaires internationales de la Douma, interrogé par la chaine de TV Vesti, selon Novosti le 8 juillet 2009:
«“Je perçois des signaux de plus en plus intenses émanant tant du président Obama que de son entourage le plus proche, selon lesquels les Américains ont tempéré la mise en œuvre de leur projet (de déploiement d'éléments ABM en Europe) où même le revoient. J'espère que ce résultat du sommet moscovite sera consacré avec plus de précision à l'avenir”, a déclaré M.Kossatchev, président du Comité pour les Affaires internationales de la Douma (chambre basse du parlement russe) à la chaîne de télévision Vesti.
»Le député russe estime que le président Obama comprend la logique de la Russie et se rend compte que Moscou n'est pas hostile à la mise en place de systèmes de défense antimissile, mais s'oppose aux décisions et démarches unilatérales en la matière. “Nous proposons aux Américains de convenir d'avance de renoncer aux mesures unilatérales”, a indiqué le député, ayant en vue la volonté des Etats-Unis de déployer en Europe Orientale une troisième zone de positionnement ABM.»
• D’autre part, il y a l’analyse, également publiée par Novosti ce même 8 juillet 2009, de Vladimir Evseïev, du Centre de sécurité internationale de l’Institut de l’économie mondiale et des relations internationales, de Moscou bien sûr.
«La première visite du président américain Barack Obama en Russie a apporté beaucoup de surprises. Notamment des progrès, auxquels ne s'attendaient pas vraiment les experts russes, concernant le déploiement du bouclier antimissile américain en Europe. Les parties avaient déjà signé, le 6 juillet, une déclaration commune sur ce sujet prévoyant la création d'un Centre d'échange de données, appelé à servir de fondement à un système multilatéral d'informations sur les lancements de missiles.
»Le président américain a développé davantage ce sujet le 7 juillet, dans son discours à l'Ecole russe d'économie. “S'il n'existe plus de menace de la part des programmes nucléaires et de missiles de l'Iran, il n'y aura aucune raison de créer un système ABM en Europe”, a-t-il déclaré….»
Suit une analyse des positions US face au problème iranien, puis des positions russes elles-mêmes. C’est sur celles-ci que termine Evseïev:
«Aujourd'hui, les relations russo-iraniennes ne suscitent, semble-t-il, aucune inquiétude, mais le régime iranien actuel est imprévisible, son idéologie reposant sur le "khomeynisme" orthodoxe, dont l'une des caractéristiques réside dans le soutien actif aux groupes islamistes radicaux. Qui plus est, plus de 20 millions de Russes résident dans une zone à portée des missiles iraniens Shehab-3, ce qui crée une menace potentielle pour Moscou. C'est pourquoi la Russie s'oppose à la militarisation du programme nucléaire de Téhéran et soutient les efforts de la communauté internationale visant à freiner son programme de missiles.
»Moscou et Washington ont donc tous deux intérêt à ce que soit préservé le statut non nucléaire de l'Iran, ce qui sert de base pour la coopération dans ce domaine. La Russie ne voit cependant pas de lien direct entre les ambitions nucléaires de Téhéran et la nécessité de déployer des éléments du système ABM en Tchéquie et en Pologne. L'Iran n'est qu'un Etat parmi d'autres du Proche et Moyen Orient, qui possèdent des programmes développés de missiles et ne cachent pas qu'ils aspirent à se doter d'une infrastructure nucléaire.
»C'est pourquoi la Russie insiste pour que la priorité soit donnée à l'analyse des menaces de missiles, et qu'ensuite seulement, lors d'une seconde étape, soit prise une décision en commun sur le déploiement de l'ABM. Une telle approche permettrait de réunir facilement les systèmes d'information existants et de trouver des sites optimaux pour l'installation de systèmes de frappe appropriés.»
Ce qui est frappant dans ces diverses remarques, c’est combien le fond du problème (le déploiement du BMDE, son utilité, la crise iranienne et les ambitions de l’Iran en matière d’armement nucléaire, le niveau de réalisation de ces ambitions, etc.) ne constitue pas, justement, le fond du problème de mésentente entre Russie et USA. Sur toutes ces matières, on sent bien qu’il y a de vastes espaces de discussion entre la Russie et les USA, que les positions sont loin d’être tranchées. Ce qui fait tout le problème, – ou ce qui l’a fait, semble-t-il, puisque la chose serait en train d’évoluer, c’est la forme où les USA l’ont posé aux Russes. Le mot “unilatéralisme” ne suffit pas, mot passe-partout qui est réceptacle de tant d’arrière-pensées idéologiques très déformantes. La démarche US était, au départ, illégale dans l’esprit de la chose, agressivement provocatrice, peut-être même dirait-on “barbare” en se référant à cette “barbarie postmoderne” si significative, où les pires infamies sont accomplies au nom de slogans psalmodiés d’une façon mécanique, recouvrant une arrogance et une vanité insupportable et aveugle à la fois. (On connaît la recette “droits de l’homme-démocratie”, assortie dans ce cas des jugements insultants sur les Russes de ce parti de l'extrémisme intolérant de la tolérance occidentale.) En un mot que nous privilégions bien entendu, la forme de la démarche US initiale qui a suscité la colère russe, c’est son aspect absolument déstructurant pour les relations internationales et la sécurité collective, dans une zone qui implique la Russie au premier chef.
Pour le reste, “tout est négociable”, comme on dit, ou paraît être négociable. Ce qui semble un résultat important du sommet, c’est que les Russes semblent avoir admis qu’il existe chez Obama une réelle volonté d’une approche structurante du problème, donc une volonté de coopération avec les Russes pour résoudre le problème du BMDE (et les autres, cela va de soi). C’est là, nous semble-t-il, la principale “surprise” (heureuse) parmi le “beaucoup de surprises“ dont parle Evseïev à propos du sommet de Moscou. Si la chose se confirme, elle aura un effet bénéfique important dans la mesure où elle contribuera fortement à réduire chez les Russes l’impression, souvent justifiée, qu’ils ont d’être constamment l’objet de soupçons, de procès, d’intention ou pas, de condamnation sans autre forme de procès, de la part de la partie occidentaliste et américaniste.
Mis en ligne le 9 juillet 2009 à 08H18