Le tsunami, GW et the rest of the world

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Le tsunami, GW et the rest of the world


31 décembre 2004 — On ne s’étonnera pas que l’attitude des USA et de leur président GW à l’égard de la catastrophe asiatique soit rapidement devenue un cas politique de première importance, — les USA (et GW) ayant décidé que les USA sont le centre du monde, le rest of the world observe chacune de leurs réactions. Comme il était prévisible, car l’homme est sans surprise, la réaction initiale de GW a été naturellement plus que médiocre. Certains mots de la première intervention du président US ont été révélateurs. Le site WSWS.org, très critique de cette réaction, observe justement ceci, — avec quelques mots assez rudes mais bien trouvés (« the moral and intellectual cretinism of Bush and his cohorts »), qui montrent qu’il n’est plus temps aujourd’hui de prendre des gants:


« Bush’s press statement in Crawford did contain one indisputable truth. “This has been a terrible disaster,” Bush said. “It is beyond our comprehension.”

» The speechwriter who crafted those words revealed more about Bush than he perhaps intended. This failure to grasp the dimensions of the south Asian disaster—and anticipate the public reaction to a display of indifference—is a measure of the moral and intellectual cretinism of Bush and his cohorts. »


La faiblesse politique de l’équipe GW est telle qu’une affaire aussi énorme et qui devrait éloigner toute polémique politique au profit de la solidarité globalisatrice, devient une polémique politique de première grandeur. Les articles s’accumulent aujourd’hui, qui définissent les enjeux et les problèmes politiques liés à l’attitude de GW face au tsunami.

• Il s’agit pour GW d’un test de son crédit politique réel dans le monde (« Bush's tsunami aid could help fix U.S. image abroad », par David E. Sanger, dans l’International Herald Tribune d’aujourd’hui).

• Pour beaucoup de commentateurs, l’événement est d’ores et déjà une mesure de son échec avéré dans ce domaine (« Bush Fails a Global Test », de John Nichols, dans The Nation, du 30 décembre, et aussi « Bush’s response to South Asia disaster: indifference compounded by political incompetence » de Patrick Martin, dans le texte de WSWS.org du 30 décembre déjà cité). Ces mêmes commentateurs mettent en évidence la montée des critiques internes à Washington, notamment au Congrès. Parmi les éditoriaux critiques, on retient celui du Star Post de Minneapolis, dans le Minnesota, en date du 30 décembre.


« As the Bush administration is wont to say, actions speak louder than words, and America's actions in recent days have painted the United States as a rich, self-absorbed and uncaring nation that had to be shamed into anything approaching appropriate concern about this catastrophe. The Bush administration's handling of this crisis has been inept beyond belief.

» There's a broader context here that bears consideration. Two days before Christmas, the media reported that unprecedented U.S. deficits — caused substantially by the Iraq war, which most of the world hates, and by Bush's tax cuts for wealthy Americans — had led the Bush administration to cut substantially its previously agreed contributions to world food programs. By going back on its commitments, the Bush administration forced numerous aid agencies to suspend ongoing programs in many impoverished nations — including, ironically as it would turn out, Indonesia.

» Then a day after Christmas came the undersea earthquake and resulting tsunami waves that very likely will end up taking well more than 100,000 lives while putting millions at risk of disease and destroying both their livelihoods and homes. From the very first hours it was apparent this was going to be an almost unprecedented humanitarian crisis. Yet Bush remained at his Texas ranch where, aides said, he spent time cutting brush and bicycle riding. He uttered not a single public word about what had happened in Asia.

» On Monday, the United States announced an initial $5 million in aid, mostly through the Red Cross, to which it said it most likely would add an additional $10 million at some point. Bush still was nowhere to be seen.

» The criticism began almost immediately, and it did not come only from a U.N. official. Comparisons were drawn, for example, to the additional $80 billion that Bush has requested for the war in Iraq and the $30 million to $40 million that his January inauguration will cost.

» The criticism had an effect. While responding angrily to accusations of stinginess, the administration on Tuesday added an additional $20 million to the $15 million it had announced on Monday. The appearance was clearly that Washington had been shamed into the larger contribution. Bush was still in Texas with his brush piles and mountain bike.

» But his absence had been noticed, and numerous reporters in Crawford were pressing Bush aides on why he was invisible in this crisis. Late Tuesday, in response to the questions, it was announced that he would have a public statement Wednesday. Again, the appearance was that he was shamed into it. »


• On a aussi une indication de l’affolement soudain de GW et de son équipe devant les premières réactions très négatives à l’égard de ses premières réactions, avec, pour tenter d’endiguer ce mauvais effet, des promesses d’intervention majeure («  Bush Promises Long-Term Aid for Asia », de Deb Riechmann, de Associated Press, du 30 décembre).

• Enfin, et c’est le plus inattendu, la crise a donné une indication de ce qui pourrait s’avérer être un éloignement très net des positions de GW et de son allié Blair. Comme l’observe The Independent d’aujourd’hui, Blair, dont le pays assure la présidence à partir de demain, a refusé la demande de Berlusconi de réunir le G8 pour que cet organisme prenne la crise en main. La manœuvre italienne est limpide: les Italiens sont obsédés par ce qu’ils croient être la perspective d’une Allemagne qui se verrait offrir un siège permanent (avec droit de veto) au Conseil de Sécurité, alors qu’eux-mêmes resteraient dans l’anonymat d’un siège normal. Cette crainte explique en bonne partie toute la politique pro-américaine de Berlusconi depuis trois ans (pour obtenir le soutien américain dans cette affaire). En obtenant la réunion du G8 qui substituerait cette organisation (où les Italiens sont présents à égalité avec les Allemands) à l’ONU, Berlusconi ferait largement avancer son argument. Mais Blair tient à renforcer le soutien de son parti, si largement érodé par l’affaire irakienne, en réhabilitant l’ONU dont la position internationaliste rencontre les grandes tendances idéalistes des travaillistes. Du coup, il se trouve en confrontation avec GW Bush, dont l’idée farfelue d’une “coalition des pays donateurs” qui aurait supplanté l’ONU dans le rôle de leader international dans la catastrophe asiatique a rencontré scepticisme, ironie et sarcasme.


« A Downing Street spokesman said: “The Prime Minister said he will contact the other G8 members about assistance that we might be able to give to the United Nations. But we are confident G8 members will agree it is right that the UN should continue to take the lead role in co-ordinating the relief effort.”

» Mr Blair's support for the UN is in marked contrast to President George Bush's announcement yesterday that a core group of donor countries — the US, India, Australia and Japan — would co-ordinate the effort. The US belatedly added the UN to that group last night. »


Grosso modo, la catastrophe asiatique, qui est évidemment un enjeu politique par son énormité, l’effet public et les implications diverses qu’elle recèle, est aussi une catastrophe diplomatique pour les USA. Toute surprise à cet égard est déplacée. On voit confirmée l’absence complète d’intérêt pour l’extérieur des actuels dirigeants américanistes, dont la vision du monde semble bornée aux collines du Texas ; confirmé également, l’état épouvantable de la diplomatie américaine, complètement militarisée et tournée vers la seule perspective guerrière de la guerre en Irak et de la guerre contre la Terreur. L’initiative US de former une “coalition des pays donateurs” porte involontairement la marque de l’obsession américaine. Sans doute a-t-il fallu expliquer à GW qu’il s’agissait moins d’attaquer l’Indonésie que de lui venir en aide.

D’ores et déjà l’initiative américaine s’est trouvée largement réduite en ambitions par les Américains, devant la position naturelle de coordination des opérations adoptée par l’ONU. Aujourd’hui, BBC News notait: « Mr Powell agreed the UN had chief responsibility for co-ordinating the aid effort, despite a move by Washington to set up a core group of donor countries with India, Australia and Japan. » L’un des effets inattendus de l’immense catastrophe sera donc d’isoler encore plus les États-Unis, et d’accroître la rupture de sa politique avec les préoccupations du reste du monde.