Le Verdun de 2016

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Le Verdun de 2016

20 février 2016 – La situation en Syrie s’est une fois de plus clarifiée, et une fois de plus “décisivement”, en se compliquant une fois de plus considérablement. A nouveau, on trouve l’antagonisme entre le bloc-BAO et la Russie, avec les satellites divers comme dans diverses crises dont Syrie-I et Ukraine notamment (la Turquie jouant finalement, sort of, le même rôle que l’Ukraine dans la crise ukrainienne, bien plus que la Syrie qui est un acteur offensif et cohérent [parlant de la Syrie, nous parlons du régime d’Assad, qui est en train de se construire, au travers des combats et de sa résistance avec ses diverses capacités de résilience, une légitimité à laquelle aucun pays du bloc-BAO ne peut prétendre sur ses propres territoires]). De plus en plus, les pays du bloc-BAO, quelles que soient leurs velléités temporaires, jouent un rôle absolument diabolique et totalement inconscient de soumission au Système, bien loin du schéma habituel des “USA tirant les ficelles”.

Les USA, eux, ont absolument confirmé et rempli de joie les antiracistes, — du moins est-on en droit de le supposer, – en montrant bien que l’“égalité des races [et des couleurs]” est un fait absolument acquis : il est avéré désormais qu’un président black (comme l’on dit dans les banlieues et les salons) peut être aussi stupide et de aussi faible de caractère jusqu’à l’envoûtement assumé que ses prédécesseurs de texture blanche. (On dira que c’est une façon de rendre un hommage ambiguë, espèce d’“hommage du vice à la vertu”, à l’avancement de notre posture morale dans le chef de notre contre-civilisation.) Le tout récent (hier) vote au Conseil de Sécurité de l’ONU repoussant (trois vétos, britannique, français et US) une motion russe réaffirmant la souveraineté syrienne en est une preuve à suffisance. Les “nuances” apparues ces deux derniers mois, notamment dans un pays comme la France, tendent à se dissoudre dans la renaissance d’une politique d’entropisation accélérée toujours présente en arrière-plan et prompte à se réactiver après une séquence de repli, et à nouveau une politique dont nul ne peut évidemment dire où elle mènera...

La guerre généralisée, éventuellement mondiale et troisième du nom, est plus que jamais proclamée comme une impensable absurdité, et plus que jamais proclamée comme possible malgré qu’elle soit “impensable absurdité”, – ou parce qu’elle est “impensable absurdité”, c’est selon Cela signifie, plus simplement, que plus que jamais nul ne sait où ce désordre considérable nous mènera et que plus que jamais les événements ont eux-mêmes leur dynamique, et tout cela sur le fond d’une campagne présidentielle aux USA absolument explosive... Il est possible qu’Obama, l’envouteur-envouté circa 2008-2016, puisse se laisser aller, pour laisser une trace historique dans son mandat, à céder aux chants de ses sirènes-R2P (Rice, Power & Cie) et à précipiter enfin une guerre généralisé, et alors comme pourrait dire un personnage qu’on verrait bien dans Docteur Folamour, “notre dernier soupir sera de soulagement. Dans ConsortiumNews, Joe Laura écrit le 15 février : « Obama’s Most Momentous Decision – President Obama must decide if he will let the Syrian civil war come to an end with Russian-backed President Assad still in power or if he will escalate by supporting a Turkish-Saudi invasion, which could push the world to the brink of nuclear war... »

Nous allons ici citer longuement le Weekly Comment d’Alastair Crooke, de Conflict Forum, qui décrit parfaitement la perspective passée de ces quelques derniers mois qui ont conduit le président des USA à s’enfermer lui-même dans une impasse, avec un dilemme impossible à trancher tant les deux termes de l’alternative sont catastrophiques pour lui : « Laisser le conflit en Syrie se terminer avec Damas [Assad] toujours à la tête du pays serait dur à avaler pour Washington ; la chose se coincerait plutôt que passer dans la gorge présidentielle. Mais lâcher la bride à l’armée turque en Syrie serait pire encore. Cela pourrait être catastrophique. »)

Crooke rapporte notamment la constance avec laquelle Washington et ses tonnes d’analystes ont constamment mesuré faussement la vérité-de-situation en Syrien depuis l’intervention russe, profondément handicapés par les formidables préjugés concernant la Russie. Il rapporte notamment comment les milieux militaires ont constamment sous-estimé les capacités militaires russes, et notamment leurs capacités de rapidité, d’agilité, d’adaptation aux diverses situations. Les explications sont toujours les mêmes, partant de l’hybris et de l’auto-surestimation de la puissance américaniste par les acteurs américanistes, leur complète incompréhension des caractères régionaux du théâtre d’opération, leur complète incapacité d’apprendre quoi que ce soit des expériences passées. (Par exemple, comment apprécier cette sous-estimation constante des capacités opérationnelles russes alors que nombre de commentaires publics de militaires US, y compris les plus hautes autorités comme le SACEUR Breedlove à plusieurs reprises, montrèrent qu'ils avaient pu constater et mesurer en Ukraine, dès mars 2014, les nouvelles capacités opérationnelles russes.)

Tout cela implique, comme il est également noté, d’extraordinaires contradictions dans le comportement US, comme cet affolement qui s’est emparé des bureaucraties militaires US, avec la crainte que les Russes aient pris une avance considérable en matière de capacités militaires... Ainsi a-t-on eu ce spectacle surprenant de voir Washington (les décideurs politiques), depuis septembre 2015, décider de ne rien faire en Syrie sinon attendre l’inéluctable échec des Russes parce que les Russes, considérés à un niveau si bas d’une façon générale et notamment militaire, ne peuvent évidemment pas espérer faire quelque progrès que ce soit là où les USA furent incapables de rien faire de décisif ; tandis que, parallèlement, Washington (la bureaucratie militaire), s’affole et craint d’être militairement distancé selon le spectacle observé en Syrie aussi bien que celui qui a accompagné la crise ukrainienne, d’une armée russe qui a désormais affirmé depuis deux ans, dans des conditions opérationnelles, les qualités qu’on a énumérées plus haut.

« President Obama is cornered:  He faces a decision that, whatever course he opts to pursue, he is pretty sure to anger someone (maybe everyone).  But he cannot – with any justice – just blame Russia (or President Putin).  He, and his advisers, have made the mistake of underestimating a rival - when, as little time ago as as early October 2015, the President himself stated: “An attempt by Russia to prop up Assad and try to pacify the population is just going to get them stuck in a quagmire; and it won’t work.”  And simultaneously the Pentagon pronounced the Russian strategy of airstrikes in support of a coalition of ground forces was “doomed to fail”.

» But Obama put himself in this corner.  When the Russian air campaign was about to begin, ‘the line’ from Washington was that the US would not accept to co-operate with Russia; but rather, the US would withdraw to the sidelines, fold its arms, and await Russia’s fall, flat on its face. It would not take long, US officials foresaw, before the Russians would be back, pleading for American help.  Later, the narrative became that the Syrian Army, in spite of having Russian air support, was proving ineffective on the ground; and then very recently, the meme switched to the (unsubstantiated) claims that Russia was bombing schools, hospitals and civilians (as well as western supported “moderates"), and took on a distinctly R2P tone.  (We suspect that this switching on of this ‘information operation’ was mainly to put pressure on Russia to agree to a ceasefire, i.e. to have a pause that would mitigate the impact of the 4+1 successes on the ground.)

» About two weeks ago, it finally dawned on western leaders that Damascus and its allies were far from being in a quagmire; rather, they were close to achieving a strategic military outcome, (hence the US Administration’s rush to push the ‘pause button’ with a ‘cessation of hostilities’).  The realisation came as a shock. The US (and at least some European) intelligence assessments had got it wrong from the outset:  their underestimation of the 4 + 1 potential for military achievement, unquestionably represents a major cognitive failure.

» Why did they get it so wrong? Michael Kofman has suggested that “since Washington had judged [for itself] that force could not be used to achieve political ends in Syria, [US analysts] assumed the same would be true for Russia. Indeed, why would [Russia] be successful where a super power had decided to stay out, after a careful analysis of the facts”. Yes, that may be so; but the US came to its judgement in respect to America’s use of force from the angle of using force to overthrow the state (a course in which plainly, the US has a less than successful history); whereas Russia was proposing to supplement through military force, an existing state, and its substantive and intact military arms.

» The cognitive shortcoming though, perhaps is more than just a projection of US experience, as Kofman implies: It owes more to other deeper conceptualisations that ‘hover’ behind the ‘pre-ordained to failure’ label slapped on the Russian initiative, even as it began.  One is the lingering prejudice that was present in western circles, that Russian military technology was ‘old’, and its armed forces still somewhat unable to operate in an integrated way. Syria has demonstrated just how wrong NATO was on that score: NATO officials have been shocked, and the Pentagon now is scrambling – in association with Silicon Valley – to uprate its technology capabilities, fearing that Russia has taken several steps ahead of NATO.  In any event, Russia has displayed a notable military effectiveness in Syria, using relatively few resources.

» Another conceptual blinker has been the binary understanding of Islam which Americans and Europeans have absorbed (mainly from their Gulf state allies, with their anti-Iranian agenda), that if the Shi’a are, in any way, involved in military action in the region, their partners in arms (i.e. Russia), will immediately be treated as pariahs and enemies by all Sunnis everywhere.  This binary optic, however, ignores the fact that Wahhabism is a very recent blow-in to the Levant (circa 1947). Being Sunni, per se, does not (and never did) at all equate to being sympathetic to the various orientations of Wahhabism – rather the contrary: Levantine Sunnism is poles apart from this intolerant, narrow, Gulf import.

» This is why the Sunni inhabitants of northern Syrian villages (and of course the Christians, Druze, Kurds, etc.,) liberated from An Nusra and ISIS, on occasion by Iranian and Hizbullah led forces, have been as rapturous in their welcome for their Shi’i liberators (as they would had it been the mainly Sunni Syrian Army that had expelled the jihadists). The US and some of its allies never ‘got’ this understanding, whereas Russia with its Orthodox background, which has always been more close to traditional Islam (than Latin Christianity), did.

» A further ‘blinder’ to the American seeing of any possibility that Russia and Iran might have military success in Syria undoubtedly came from the R2P lobby, led by Susan Rice and Samantha Powers. Both of these ladies are close to President Obama – and are staunch liberal intervention ideologues (in their eyes, only the West of course has the moral authority to undertake interventions). In their 'End of History' vision of a world converging to a global liberal community, any other outcome is simply regressive, and counter to the grain of history.

» The global American-led liberal sphere is held to be somehow essentially democratic and peaceful, whereas those who insist to be outside it, ‘threaten' the peace. In this optic, Russia's military response in Syria simply goes against this 'natural' global ‘order', and is therefore 'pre-destined to fail'. Obama spoke very much in this line at his press conference at the ASEAN summit (see here). It is the insistence that the forces of global convergence are so compelling that they are bound, ultimately to prevail.  The Israeli-Palestinian ‘negotiations’ were founded on a somewhat similar premise: that Israel ultimately would recognise that demography must prevail. The problem here is that the 'End of History' meme is rejected by almost the whole of the 'non-West' who would prefer to live by their own cultural values, and regain their sovereignty. »

...En attendant The Donald ?

Parmi les scénarios de l’évolution de l’affrontement “tourbillonnaire” de la crise Syrie-II que l’excellent journaliste et bloger Elijah J. Magnier, qui travaille depuis le Koweït, envisage pour les semaines et mois à venir, on trouve ceci dans son texte « The “Gates of hell” will be open in the coming months in Syria », à la date du 14 février, avec en gras le passage qui nous intéresse :

« According to the source [a high-ranking officer within the joint operations room in Damascus, which includes Russia, Iran and Syria and Hezbollah], human and signal intelligence confirmed that “Saudi Arabia has asked Syrian opposition associated and not-associated with al-Qaeda not to waive any proposition in the Geneva negotiations and not to hand over any city in Syria without fighting. Time is crucial and Saudi Arabia will continue its military support to the opposition, waiting for a new U.S. [President] to be elected. The battle is expected to be more intense where everybody is holding the ground which indicates that the war is still far form being over” »

Il s’agit d’une des premières mentions que nous rencontrons, selon une source sérieuse, de l’irruption de l’influence de l’élection présidentielle dans la crise syrienne, c’est-à-dire dans la marche des affaires du monde. La prise en considération de l’influence de l’élection est en soi un événement important et complètement inédit, notamment parce que c’est la première fois que cet événement intérieur fondamental des USA pourrait jouer un rôle sérieux depuis le début de la vague de déstructuration et de dissolution lancée par le “printemps arabe”, en 2010, et bien entendu, depuis cette nouvelle époque où nous sommes entrés avec “le coup de Kiev” de février 2014. (En effet, l’élection US de 2012 n’a quasiment eu aucun effet sur les affaires troublées du monde. La réélection d’Obama était partout considérée comme acquise et elle ne fut à aucun moment remise en question. De toutes les façons, il ne semblait pas une seconde qu’on pût envisager que la politique-Système suivie fût modifiée par son rival républicain, Mitt Romney.)

Alors, que dire de cette indication que nous donne Magnier concernant les manœuvres des Saoud, qui ne supportent plus Obama (comme les Israéliens et les Turcs, d’une certaine façon) à cause de ses hésitations à être l’extrémiste qu’on attend qu’il soit jusqu’à lancer ou à “sponsoriser” une grande et belle guerre, quand l’on observe l’autre champ de bataille, des primaires US ? Que dire de cette éventuelle manœuvre des Saoud au regard de la possibilité qu’un Donald Trump soit élu, lui qui veut déclassifier les 28 pages du rapport secret du gouvernement sur l’attaque 9/11, dont nul n’ignore officieusement qu’elle impliquent directement l’Arabie Saoudite dans l’attaque, et The Donald ayant alors la considération qu’on imagine pour les Saoud ?

(On ajoutera sans s’attarder sur le cas que l’estime que Trump porte à Poutine et le peu d’intérêt qu’il montre pour l’engagement en Syrie vont dans le même sens... L’une des interprétations qu’on développe à propos de ce que serait une politique étrangère “trumpienne” est celle-ci, telle que nous la mentionnons par ailleurs : « ...C’est ce que semble suggérer un journaliste “mainstream“ mais avec une plume d’une certaine acerbité, Thimothy P. Cartney du Washington Examiner le 18 février 2016, lorsqu’il signe un texte surmonté du titre « Does Trump spell the end of our brief era of ideology? » [brief étant un terme à pondérer puisqu’il s’agit tout de même d’un gros demi-siècle, englobant la Guerre froide et l’après-Guerre froide]. Avec Trump, ou avec la tendance que Trump représente, les USA seraient sur le point d’abandonner l’idéologie de l’exceptionnalisme d’inspiration wilsonienne, devenue à la fois expansionniste et belliciste mais se heurtant au syndrome terrible de l’“impuissance de la puissance”, pour en revenir à la posture classique et traditionnelle des USA, mélange d’isolationnisme washingtonien [président George Washington] et de populisme jacksonien [président Andrew Jackson]. »)

Il ne s’agit ni d’un pronostic, ni d’une prospective, ni d’un pari, ni d’une prévision (concernant le sort de Donald Trump, par exemple, mais aussi concernant la valeur des espérances saoudiennes dans l’attente du nouveau président) ; il s’agit d’observer qu’effectivement cette élection, comme l’espèrent les Saoudiens, pourrait introduire un élément nouveau, mais que ce pourrait être un élément exactement inverse à celui qu’espèrent les Saoudiens... Enfin, il s’agit de la simple esquisse d’un résumé de l’extraordinaire complexité de la situation, maintenant en Syrie et autour, et demain, dans les mois qui viennent de l’année 2016, au regard des attentes et des espoirs de chacun. Jamais une telle hypothèque n’a pesé sur une situation de la gravité de la crise Syrie-II, au regard de la situation et de l’orientation du pouvoir placée à la tête de la superpuissance américaniste, dont on attend tout de sa puissance tout en constatant qu’il s’agit d’ores et déjà d’une sorte de “surpuissance impuissante”... Pourtant, il faudra bien faire avec, c’est-à-dire prendre des décisions dans l’un ou l’autre sens d’ici novembre 2016.

Le président Obama, lui, est un lame-duck qui ne vaut plus rien et n’a plus guère d’autorité selon la tradition de la politique américaniste à propos d’un président entrant dans sa huitième année de mandature, donc assuré d’être sans pouvoir dès novembre 2016 et d’être parti en janvier 2017. Les princes-pullulants de la maison-Saoud qui attendent son départ sont-ils bien sûrs qu’ils ne regretteront pas cette poule-mouillée (chickenhawk) de BHO courant septembre-octobre 2016, une fois les deux compétiteurs ultimes désignés, et alors que les sondages désigneront un vainqueur probable ? Jamais l’incertitude n’a été aussi forte et pourtant aucun des princes ne s’en avise.

Par ailleurs, est-il assuré qu’Obama, de plus en plus cornaqué par les diverses harpies-R2P (Rice, Power & Cie), ne se mette pas à juger qu’un soudain extrémisme de sa politique en Syrie, pour tenter le coup pour le coup (plutôt que le tout pour le tout), lui assurerait une place de choix dans l’Histoire ? Le président des USA n’est-il pas au bout de sa narrative en continuant à nous assurer de la faiblesse formidable des Russes, de l’infamie du “boucher Assad”, etc., et de la puissance incomparable par son exceptionnalité des USA par conséquent, pour laisser s’afficher sur le terrain une victoire complète des Russes et d’Assad, et ne peut-il craindre d’entacher son “legs historique” par ce piétinement de toute la floraison de rhétorique dont il nous abreuve depuis près de cinq ans ? Au contraire, a-t-il encore les forces d’un cynisme assez grand pour laisser se développer un grand courant guerrier, en y prêtant la main, et en nous ouvrant les portes des possibilités du conflit suprême, en arguant qu’il est et reste plus que jamais le président du Prix Nobel de la Paix, qui a atteint la tâche de restaurer l’ordre dans les relations internationales après le chaos laissé par GW Bush ? Dans tous les cas, est-il assuré, BHO, de la loyauté et de l’obéissance de tous les centres de pouvoir de Washington impliqués en cas de décision décisive de sa part ?

Jamais, là aussi, l’incertitude n’a été aussi forte, et jamais la crise syrienne n’a autant menacé d’échapper complètement, alors qu’elle se trouve à un paroxysme et parce qu’elle se trouve à ce paroxysme, du contrôle de tous ses acteurs. L’on comprend bien que ce qui menace ici, ce sont beaucoup moins les intentions, les plans, les ambitions, les calculs, etc., que l’intensité des événements et leur poids considérable sur des psychologies que l’on découvre de plus en plus faibles et de plus en plus fébriles et énervéesla mégalomanie ou l’instabilité mentale d’Erdogan et l’agressivité et l’inexpérience du prince saoudien Mohammad ben Salman [ministre de la défense et fils du roi Salman] », selon Parry, – pour ne parler que des plus voyants et des plus bruyants).

Demain matin, très tôt et il y a un siècle exactement, les Allemands du chef de l’état-major impérial Erich von Falkenhayn écrasaient les défenses avancées de Verdun sous un déluge d’obus sans précédent, marquant  l’avancement industriel du Progrès et des technologies comme manifestation suprême du “déchaînement de la Matière”. Cette bataille immense de 300 jours, fut moins sanglante qu’on ne le laisse etendre en en faisant souvent le symbole et l'archétype de la “boucherie de 14-18”, selon les normes catastrophiques de la Grande Guerre (comparez les 300.000 morts et disparus de Verdun en 300 jours avec les 442.000 morts et disparus pour les 141 jours de la bataille de la Somme, ou bien les 70.000 morts et disparus durant le seul jour de la bataille de la Moskova/Borodino) ;  contrairement à nombre d’autres batailles du même conflit, elle eut un sens stratégique décisif alors que l’unanimité du jugement convenu la juge insensée et archétypique de la “guerre absurde” (si les Allemands avaient pris Verdun, il s’ouvrait un couloir stratégique qui enveloppait Paris et prenait à revers toutes les forces alliées, avec la possibilité très forte de terminer la guerre par une victoire stratégique déterminante qui aurait scellé le sort existentiel de la France) ; elle fut une bataille constamment mobile sur un territoire très étendu et nullement une bataille “de ligne” dans l’enfouissement des tranchées. Bref, Verdun, dont on fit la bataille du seul Pétain alors que de nombreux autres chefs y eurent une part importante (Mangin, Nivelle) sinon essentielle (Castelnau, dans les trois premiers jours de la bataille), est l’archétype d’un terrible affrontement surchargé de narrative et d’exploitation idéologique : c’est en cela que cette bataille présente une similitude remarquable et inattendue avec la crise Syrie-II, avec comme différence la vitesse de la communication pour déformer les événements à la mesure des narrative de chacun, beaucoup plus rapide parce qu’instantanée dans le cas syrien. Enfin, outre ce qu’on a dit, les deux événements ont cette proximité peut-être prémonitoire et dans tous les cas symbolique dans l’ordre de la durée de la séquence, pour Verdun de se termines en décembre 1916 alors que les élections présidentielles US se concluront en novembre 2016.