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378Il y a un passage très intéressant, pris dans sa spécificité, dans l’article de Zbigniew Brzezinski auquel nous avons consacré une note dans cette même rubrique hier. Le voici, — et nous le donnons à lire, justement, en le détachant du contexte :
«But the little secret here may be that the vagueness of the phrase was deliberately (or instinctively) calculated by its sponsors. Constant reference to a “war on terror” did accomplish one major objective: It stimulated the emergence of a culture of fear. Fear obscures reason, intensifies emotions and makes it easier for demagogic politicians to mobilize the public on behalf of the policies they want to pursue. The war of choice in Iraq could never have gained the congressional support it got without the psychological linkage between the shock of 9/11 and the postulated existence of Iraqi weapons of mass destruction. Support for President Bush in the 2004 elections was also mobilized in part by the notion that “a nation at war” does not change its commander in chief in midstream. The sense of a pervasive but otherwise imprecise danger was thus channeled in a politically expedient direction by the mobilizing appeal of being “at war.”
»To justify the “war on terror,” the administration has lately crafted a false historical narrative that could even become a self-fulfilling prophecy. By claiming that its war is similar to earlier U.S. struggles against Nazism and then Stalinism (while ignoring the fact that both Nazi Germany and Soviet Russia were first-rate military powers, a status al-Qaeda neither has nor can achieve), the administration could be preparing the case for war with Iran. Such war would then plunge America into a protracted conflict spanning Iraq, Iran, Afghanistan and perhaps also Pakistan.»
On trouve dans ce passage tous les éléments permettant une description précise d’une situation qui, plus que de propagande, fait croire au
• Brzezinski évoque justement l’hypothèse que la démarche de l’administration peu après 9/11, reprise par l’essentiel des moyens de communication, est d’avoir affirmé la réalité de la guerre contre la terreur dans sa dimension universelle et indéfinie peut-être “instinctivement” autant sinon plus que par calcul («… the vagueness of the phrase was deliberately (or instinctively) calculated by its sponsors»). Nous avons la conviction dans ce cas que l’“instinct” de la psychologie a joué un rôle plus grand que l’attitude délibérée (machiavélisme).
• Sans cette “création” de la guerre contre la terreur, ni le soutien du Congrès à l’attaque en Irak, ni la réélection de Bush n’auraient été acquis. Nous sommes complètement en accord avec cette analyse, qui renvoie à une “culture de peur” plus qu’au seul effet de la propagande. Seul le virtualisme, par sa dimension ingénue de conviction peut fournir les éléments de la création d’un phénomène tel qu’une culture. («Constant reference to a “war on terror” did accomplish one major objective: It stimulated the emergence of a culture of fear.»)
• La dimension psychologique comme fondement de ce que nous nommons le virtualisme, et non pas seulement l’effet de la propagande, est mise en évidence comme essentielle par Brzezinski. («The war of choice in Iraq could never have gained the congressional support it got without the psychological linkage between the shock of 9/11 and the postulated existence of Iraqi weapons of mass destruction.»)
• Enfin, il y a la fameuse “narrative” (“narration” dans le sens de “fiction”) de l’événement (la guerre contre l’Irak), qui est de placer cet événement dans une histoire générale entièrement reconstruite. Le facteur culturel en est fortement renforcé, et l’aspect psychologique encore plus pressant. «To justify the “war on terror,” the administration has lately crafted a false historical narrative that could even become a self-fulfilling prophecy.»
• Brzezinski implique que cette vaste construction virtualiste est toujours bien vivante malgré l’échec de l’Irak, comme si elle s’était définitivement installée à la place de la réalité dans les psychologies américanistes (surtout washingtoniennes). Aujourd’hui, c’est elle qui mène à la logique d’une éventuelle guerre contre l’Iran («…the administration could be preparing the case for war with Iran.»)
Dans tous les cas, Brzezinski décrit une situation réelle, installée, qui touche peut-être plus qu’il ne croit Washington dans son ensemble. Les déboires irakiens n’y ont rien changé, comme on s’en aperçoit par ailleurs.
Mis en ligne le 27 mars 2007 à 05H26
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