Legs et mémoires du “chevalier du déclin”

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Que nous laissera donc GW Bush? Vous verrez, cet homme insignifiant, qui a semblé ne plus exister durant ces derniers mois à l’ombre puissante de son successeur, sera pourtant l’objet de nombreux débats. Que nous a donc laissé GW? Quel est “the Bush’s legacy”?

Steve Clemons a, nous semble-t-il, trouvé des mots excellents (le 15 janvier 2009 sur son site The Washington Note), dans tous les cas celui-ci, qui nous est suggéré par sa tournure de phrase (“flamboyantly hastened America's global decline”): “flamboyant”; mot excellent puisqu’il est utilisé d’une façon extrêmement paradoxale, par rapport à son sens, pour qualifier une évolution qui ne devrait pourtant pas susciter de telles appréciations: un “flamboyant déclin”…

«In considering George W. Bush's legacy, I would suggest that Bush flamboyantly hastened America's global decline – a decline that might have otherwise been stretched out over many decades and happened anyway.

»Bush sped up history and punctured America's mystique as a superpower by showing key fundamental limits. Being a superpower is more spin and more sleight-of-hand than real. The rest of the world has to believe that a superpower has few constraints and can tackle nearly any problem. Once limits became exposed, allies counted on America less and foes pushed their agendas forward.»

… Puis Clemons développe divers aspects de la présidence GW Bush, dans le rayon extrêmement fourni des échecs, des catastrophes et autres. L’inventaire est solide, comme chacun devrait le savoir. Il n’est pas utile de s’y étendre car on en connaît bien les étapes.

Mais il nous paraît tout à fait approprié, de la part de Clemons, d’écrire que Bush “a accéléré l’Histoire” et qu’il a “pulvérisé la mystique de l’Amérique représentée comme une superpuissance”. Le legs n’est pas mince et l’homme mérite une considération tout à fait exceptionnelle de l’historien. Personne, certainement aucun adversaire de l’Amérique, n’aurait été capable d’un tel exploit, si l’on prend en considération l’ébahissement fasciné pour l’American Dream dans lequel baignait couramment le monde d’après la Guerre froide. On trouve rarement, assemblée en une seule psychologie, celle de GW Bush, une recette aussi savamment dosée de médiocrité, d’inculture, de simplicité ébahie, d’ingénuité sympathique, d’entêtement dans l’erreur et d’alacrité roborative, de croyance aussi assurée que fausse, de foi du charbonnier texan et ainsi de suite. Il est assurément faux de dire que GW Bush fut une marionnette, – tout comme il est faux et risible d’en avoir fait un noir comploteur aux desseins terribles de subversion (fasciste, pendant qu’on y est) de la Grande Amérique. Au contraire, cet homme assura effectivement un empire ébahi sur ses concitoyens, et particulièrement sur l’establishment washingtonien, qu’il conduisit sans coup férir, sans dissimuler une seconde ses ambitions et ses desseins. Il fut d’une franchise complète et mentit plus d’une fois en toute bonne foi. Cet avorton politique a déplacé des montagnes, sous nos yeux médusés et en nous forçant à nous pincer pour savoir si nous ne rêvions pas.

Bien sûr, comme le suggérait un de nos lecteurs encore récemment, comme nous l’avons nous-mêmes suggéré souvent, GW Bush fut absolument “maistrien”. Il fut placé là où il fut, par quelque main caché et certainement habile, sinon diabolique ou le contraire c’est selon, pour assurer un rôle historique sans précédent: assurer le “déclin flamboyant” de la plus grande et formidable “superpuissance” que le monde ait jamais osé imaginer. Il a mené sa tâche à bien avec une alacrité peu ordinaire, une conviction trempée dans le bronze. Bien plus qu’être manipulé par les autres, c’est lui qui les manipula; c’est-à-dire qu’il fut manipulé “tactiquement”, dans telle ou telle occurrence, par tel ou tel groupe, dont ses joyeux “neocons” qui sont de la sorte classique des “idiots utiles”; mais stratégiquement c’est lui qui les manipula… Tous, ils croyaient le conduire sur le chemin de la domination absolue des USA au profit de leurs intérêts mais lui avançait avec entêtement et certitude sur la voie où il en manigançait le “flamboyant déclin” en accélérant l’Histoire.

Cet homme a bien mérité un peu de repos dans ses grandes étendues solitaires et arides du Texas. Il y méditera en paix et, un jour, nous donnera un ouvrage dignes des anciens qu’il baptisera, sans souci des jeux de mots et rapprochements historiques : Les mémoires du chevalier du déclin.


Mis en ligne le 16 janvier 2009 à 13H37