L’entrisme des islamistes au cœur de l’administration US

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On savait jusqu’ici que les islamistes, et précisément les Frères Musulmans en Egypte, avaient bénéficié, comme à peu près tout le monde d’ailleurs en Egypte, de l’aide de la CIA pendant un nombre divers mais substantiel d’années. La chose s’est généralement traduite, pour une partie de l’effet, par une poussée des islamistes partout, et des Frères Musulmans en Egypte, jusqu’à une position prééminente au niveau politique, avec des prises de position qui contredisent directement les intérêts US. La boucle de l’inversion destructrice de l’influence par la corruption est ainsi bouclée.

Cette fois, on passe à un stade supérieur, comme nous en informe un texte de Russia Today, le 23 février 2012. RT a interviewé un conseiller du gouvernement US pour les affaires antiterroristes, Walid Phares. Il s’agit de parler du rôle des ONG, des activités de lobbying, etc. Ce type d’activités classiques de l’arsenal interventionniste US est cette fois considéré dans son inversion pure, retourné contre les intérêts des USA dans ses effets généraux. Phares parle de la façon dont les Frères Musulmans ont confisqué la “révolution” égyptienne, comment ils ont investi les positions du pouvoir. Il mentionne certes l’aide que les pays du Golfe, financiers obligés de tout ce qui est islamiste, ont apportée aux Frères Musulmans…

«Phares points out that there is one crucial difference between the ordinary people who made the revolution and those who basically hijacked it, namely various Islamist forces, including the Muslim Brotherhood. The difference is that the latter enjoy generous support from the Gulf States in the form of petrodollars, satellite telecommunication and so on. This difference will play a decisive role when the time for the election comes, and those most organized and better funded will take over.»

…Mais ce sont certainement les détails que donne Phares en passant, sur la pénétration de l’administration US par les islamistes sous forme de forces de lobbying, qui retiennent le plus notre attention. Ils sont révélateurs d’une tactique remarquable de retournement d’une méthode contre celui qui l’a développée pour installer des points d’influence extérieurs en son cœur. L’outil est retourné, effectivement, pour installer ces points d’influence au cœur du pouvoir US.

«And yet, perhaps, the most intriguing feature of the ongoing race for power in Egypt is those back-door games that take place as far from Cairo as in Washington. According to Phares, there is a powerful Islamist lobby within the American presidential administration itself. “There are NGOs…known as lobbies, or pressure groups, which are trying to influence the [Obama] administration, so that they would be in line with the interests of the Muslim Brotherhood in Egypt and the Islamists in Libya and in Tunisia, and against the secular and liberal forces in the region,” the advisor explained.»

On comprend parfaitement le mécanisme en action. L’on en voit des résultats chaque jour, aussi bien dans le désordre de la politique des USA soutenant successivement ou parallèlement des forces d’opposition antagonistes des pouvoirs établis il y a longtemps par ces mêmes USA, que dans le soutien apporté à des forces (islamistes) dont la politique finale, une fois investi le pouvoir, ne peut manquer d’évoluer vers des tendances anti-occidentalistes et anti-US.

Ce qui est remarquable dans cette description succincte d’une situation qui ne peut finalement surprendre, c’est combien cette situation s’accorde au désordre du pouvoir US lui-même. Ce désordre est visible aussi bien au Congrès que dans les diverses politiques suivies par les USA, particulièrement dans ces régions stratégiques (le Moyen-Orient, et précisément l’Egypte pour ce qui nous importe). Dans cette situation de désordre, la “porosité” du cœur du pouvoir US (l’administration US) est lui-même un facteur remarquable, découlant de la dissolution de ce pouvoir, de son absence de structures régaliennes, du transfert massif de la puissance vers le système de la communication dont le lobbying est un appendice corrupteur puissant, de la vulnérabilité des services d’élaboration de la politique US à l’influence de ce même lobbying. Tout cela se conjugue bien entendu à une parfaite méconnaissance (plutôt qu’inconnaissance, certes !) des caractéristiques, des psychologies, de la culture, etc., des régions visées, qui rend ce pouvoir US effectivement vulnérable à tous les arguments, même les plus simplistes et les plus sommaires, de l’activité du lobbying.

Il s’agit, dans le chef du pouvoir US, d’un pouvoir d’une extrême puissance, absolument ignorant des choses qu’il doit traiter, suivant une ligne aveugle à cause de la crise de ses structures en complète décomposition. L’influence pénètre dans ce pouvoir comme dans du beurre, pour l’orienter selon les intérêts de celui qui la manipuler ; et l’on ne serait pas étonné, enfin, s’il apparaissait que le lobbying des islamistes commençait à se mesurer au lobbying sioniste (AIPAC) sur son propre terrain, et s’il portait une certaine responsabilité, au moins indirecte, dans les difficultés de plus en plus grandes entre l’administration Obama et Israël. Bien entendu, cette situation mesure avant tout la crise du pouvoir US, qui se dissout complètement par rapport à ses intérêts et à ses objectifs, et transforme évidemment sa surpuissance en autodestruction, sans ralentir en rien la dynamique qui anime le processus.


Mis enligne le 24 février 2012 à 07H01

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