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1er juillet 2003 — De tous les côtés affluent les signes d’une inquiétude et d’un agacement considérables des Américains pour l’évolution de la situation en Irak. La chute dans les sondages du soutien à la présence américaine en Irak et significative, d’après un sondage CNN :
ce soutien a évolué de 86% début mai à 70% fin mai, à 56% fin juin.
Il y a aussi quelques indications sur la chute de la confiance dans les actions entreprises et dans l’administration GW, par l’intermédiaire de la question des armes de destruction massive, la cause de la guerre qu’on n’arrive pas à trouver après avoir gagné la guerre.
« Less than half of Americans said they were confident that U.S. forces would capture or kill Saddam, down from 70 percent in March. About 45 percent said they lacked confidence that Iraq's alleged weapons of mass destruction would be found, up from 15 percent in March.
» The poll also found little difference in the number of those who believe the Bush administration deliberately misled the public about Iraqi weapons — 37 percent now, up from 31 percent earlier in June. More than half said it would matter a great deal if they were to become convinced that they were mislead. »
Tous ces résultats statistiques confirment la tendance du public a être “du côté du gagnant” (si la guerre marche bien, on ne s’interroge pas sur ses causes et on applaudit le gouvernement) ; sinon, on commence à avoir des préoccupations, notamment morales car il est de bon ton de solliciter la morale lorsqu’il s’agit d’exprimer un mécontentement. Cette interprétation est singulièrement peu encourageante pour ce qu’on peut juger de l’attitude du public, et de l’espoir qu’on y mettrait qu’il modérât éventuellement les débordements divers de l’administration en place. De même, l’administration n’a aucune illusion à se faire, et particulièrement pas sur le soi-disant patriotisme qu’elle a suscitée chez les Américains : si la situation continue à se dégrader en Irak, sa position politique deviendra de plus en plus problématique et les chances de réélection de GW compromise à mesure.
Du côté politique, les réactions répondent également à l’habituelle attitude d’irresponsabilité et de démagogie, comme on le voit avec les commentaires des sénateurs démocrates Biden et McCain retour d’Irak. Par contre, les propositions qui ressortent de cette attitude et sont émises, notamment par Biden, ont tout de l’inhabituel, y compris dans le ton très “rumsfeldien”. Affirmer “vouloir” voir déployés des Allemands, des Français et des Turcs dans les rues de Bagdad, sans doute très vite, a quelque chose de grotesque qui contribue à discréditer comme d’habitude la classe politicienne washingtonienne, démocrates compris évidemment. Quant à rapporter avec satisfaction, comme le fait Biden, l’ahurissante promesse de Robertson (qui s’en va dans six mois), — « the alliance is “ready to come in large numbers” once given the go-ahead by Washington », — il s’agit de la même irresponsabilité, à la petite semaine.
« Sen. Joseph R. Biden Jr. (Del.), the senior Democrat on the Senate Foreign Relations Committee, told Fox News Sunday that it is important that the United States deal with the NATO problem.
« “I want to see French, German, I want to see Turkish patches on people's arms sitting on the street corners, standing there in Iraq,” Biden said. “That's one way to communicate to the Iraqi people we are not there as occupiers. The international community is there as liberators.”
» He said Lord Robertson, NATO's secretary general, had told him the alliance is “ready to come in large numbers” once given the go-ahead by Washington. »
Beaucoup de détails peuvent être trouvés dans l’excellent texte du colonel Daniel Smith, notamment sur l’avenir de la présence américaine, avec une approche technique fouillée. Le titre dit tout, avec simplicité : « Descending Into the Quagmire. »
Le plus étonnant dans cette aventure irakienne est de voir l’Amérique commettre tous les impairs commis et dénoncés par elle-même dans ses aventures précédentes, et effectivement se plonger dans un guêpier impossible, dans ce qu’elle s’était juré d’éviter à tout prix désormais après avoir identifié le phénomène avec tellement de précisions, d’études, d’analyses, de thèses. A voir cette étrange rupture entre l’enseignement des leçons du passé et les soi-disant nécessités des actes à accomplir, on est saisi comme par un spectacle fascinant à force d’inéluctabilité.