Les apprentis sorciers de nos grandes crises

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En marge de ces agitations autour de la crise financière, le commentateur britannique George Monbiot juge important de nous exposer comment nous en sommes arrivés là, comment l’hyper-libéralisme, ou néo-libéralisme, s’est imposé à la civilisation occidentale en un gros demi-siècle (Dans un article du Guardian, le 28 août.) Il le juge d’autant plus important que le bilan est remarquable :

«For the first time the UK's consumer debt exceeds the total of its gross national product: a new report shows that we owe £1.35 trillion. Inspectors in the United States have discovered that 77,000 road bridges are in the same perilous state as the one which collapsed into the Mississippi. Two years after Hurricane Katrina struck, 120,000 people from New Orleans are still living in trailer homes and temporary lodgings. As runaway climate change approaches, governments refuse to take the necessary action. Booming inequality threatens to create the most divided societies the world has seen since before the first world war. Now a financial crisis caused by unregulated lending could turf hundreds of thousands out of their homes and trigger a cascade of economic troubles.

»These problems appear unrelated, but they all have something in common…»

…Ce qu’ils ont en commun: le néo-libéralisme. Monbiot propose un historique de l’action d’un petit groupe, le Mount Pelerin Society, animé notamment par l’économiste libéral autrichien Friedrich von Hayeck, qui, à partir du 1947, entreprit de répandre la doctrine néo-libérale. Le processus se trouve renforcé, à partir des années 1970, par l’effort lancé aux USA de privatisation et de libéralisation du système (à partir du “Manifeste Powell”).

La culmination du processus néo-libéral fut la prise en main des médias. Ces moyens de communicaton répandirent la doctrine néo-libérale, ses formules, ses simplismes, jusqu’à changer la psychologie, le mécanisme de la pensée menant au jugement, jusqu’à faire paraître dans le chef de chacun le jugement de conformité au néo-libéralisme comme une chose naturelle.

«But the most powerful promoter of this programme was the media. Most of it is owned by multimillionaires who use it to project the ideas that support their interests. Those ideas which threaten their interests are either ignored or ridiculed. It is through the newspapers and TV channels that the socially destructive notions of a small group of extremists have come to look like common sense. The corporations' tame thinkers sell the project by reframing our political language (for an account of how this happens, see George Lakoff's book, Don't Think of an Elephant!). Nowadays I hear even my progressive friends using terms like wealth creators, tax relief, big government, consumer democracy, red tape, compensation culture, job seekers and benefit cheats. These terms, all invented or promoted by neoliberals, have become so commonplace that they now seem almost neutral.

»Neoliberalism, if unchecked, will catalyse crisis after crisis, all of which can be solved only by greater intervention on the part of the state. In confronting it, we must recognise that we will never be able to mobilise the resources its exponents have been given. But as the disasters they have caused unfold, the public will need ever less persuading that it has been misled.»

Un point important est cette confluence entre le groupe Hayeck (dont Monbiot détaille l’historique), et la structure du système de l’américanisme. L’intérêt de la chose est qu’en faisant la promotion du même système, les deux groupes en arrivent tout de même à des postions contradictoires sur des points non négligeables. Le système de l’américanisme a installé le néo-libéralisme mais en développant le gouvernement et ses moyens de puissance pour établir l’hégémonisme militariste US. Sur ce point, les néo-libéraux US d’obédience Hayeck directe ou indirecte, qui sont souvent des libertariens adversaires de l’Etat, se trouvent en opposition farouche et déterminée au système de l’américanisme. (Par exemple, le chroniqueur et directeur d’Antiwar.com Justin Raimundo est un libertarien adversaire de la puissance publique mais surtout connu pour son opposition à la politique expansionniste US.) Cette contradiction interne est un phénomène important qui n’est pas assez exploité par les adversaires du néo-libéralisme.


Mis en ligne le 29 août 2007 à 09H38