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840Un avis intéressant sur l’UPM (Union Pour la Méditerranée) qui vient d’être lancée à Paris est celui, notablement favorable, de Jean-Pierre Chevènement. L’avis est intéressant notamment parce que Chevènement est souverainiste (de gauche) et sourcilleux sur le dogme national français (et gaulliste). Sa courte intervention du 13 juillet (interview du 12 juillet) dans Le Journal Du Dimanche est intéressante également parce que, à côté des félicitations, le Che ne se gêne pas pour critiquer, sinon condamner la position de Sarkozy vis-à-vis de l’armée en France, comme sa politique vis-à-vis de l’OTAN et des interventions extérieures. Il met ainsi en évidence la dualité du personnage (Sarko), entre certains coups heureux et efficaces et certains engagements relevant d’une pensée basse et inconsistante.
(Chevènement n’a plus de poids politique aujourd’hui, ce qui est une autre garantie qu’il puisse dire quelque chose d’intéressant. Les hommes et femmes politiques et de quelque poids politique semblent être frappés, hors de la bouillie pour chat de leur langage médiatique et conformiste, d’une nullité conceptuelle très complète. Avec Villepin et quelques autres laissés sur le côté, Chevènement est l’un des rarissimes dont l’avis importe.)
A une question sur la venue du président syrien à Paris :
«Je ne fais pas partie de ceux qui désapprouvent l'invitation à Paris de Bachar el-Assad. En politique, il faut savoir prendre des risques. En l'occurrence, Nicolas Sarkozy a raison d'en prendre. La Syrie est une pièce stratégique du puzzle du Proche et du Moyen-Orient. Il est utile pour la France d'avoir un contact avec ce pays. Si l'on fait l'Union pour la Méditerranée, il faut le faire avec tous les pays riverains. Sans exception. Mener cette démarche avec des critères uniquement éthiques nous aurait fait courir le risque de nous retrouver dans un cercle plutôt étroit. Et nous aurait conduit à l'impuissance.»
Sur l’UPM, Chevènement est approbateur et réservé (« C'était une bonne idée au départ. Elle est, hélas, largement vidée de son contenu, en raison notamment des exigences de l'Allemagne….»). Il le fait justement, puisqu’effectivement la “bonne idée” tend à être phagocytée par la Commission, qui avait été absolument catastrophée par cette initiative, avec l’Allemagne en flanc-garde. On assiste à cet égard à un conflit classique entre des intérêts régionaux basés sur une logique de civilisation et les intérêts bureaucratique de l’Europe institutionnalisée. L’affaire reste pendante, pour savoir qui imprimera sa marque, entre l’orientation française soutenue par la logique régionale et historique, et la pesanteur bureaucratique de la bureaucratie européenne.
A la troisième question sur les rapports de Sarko et de l’armée française, avec prolongement sur la politique française et de sécurité nationale (OTAN), Chevènement est justement critique. («On est loin de l'inspiration gaulliste de notre politique de défense. Un pays qui remet à d'autres, dans le cas qui nous occupe à l'organisation militaire intégrée de l'Otan, le soin de sa défense, abandonne la maîtrise de sa politique étrangère et de son destin. Je suis très préoccupé par l'abandon du consensus en matière de défense …»)
Ce domaine de la politique de Sarkozy n’a effectivement plus rien à voir avec l’inspiration gaulliste initiale et se place dans un courant de décadence auquel ses prédécesseurs ont également contribué (participation à la guerre du Golfe avec Mitterrand, rapprochement de l’OTAN avec Chirac). Par ailleurs, les craintes de Chevènement pour l’indépendance de la France sont à nuancer. L’appareil occidental sous influence américaniste est dans un tel état catastrophique de délabrement et de désordre qu’il a perdu l’essentiel de sa force subversive d’influence. Cela ne réhabilite pas Sarko, qui est dépendant à cet égard d’une pensée politique primaire, à hauteur de la fascination adolescente pour une Amérique qui n’a jamais existé, mais cela pondère notablement ses effets pervers. On peut même envisager des occurrences où une improvisation française, si elle avait lieu, pourrait rapporter certains avantages à la France sans compromission excessive.
Mis en ligne le 15 juillet 2008 à 09H10
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