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711Le 29 octobre, la Commission européenne recevait, “en interne”, dans le cadre d’un programme d’information, l’expert “européen” (plutôt que lui donner sa nationalité) Peter Ludlow. (Ce Peter Ludlow, à ne pas confondre avec le philosophe du même nom.) La réunion, qui regroupait un peu plus d’une centaine de fonctionnaires, a soulevé des réactions diverses, dont une source a pu nous rapporter quelques précisions. «Il s’agit d’un état d’esprit vraiment très particulier, qui a été exposé devant des officiels européens en tant que tels, ce qui impliquait une sorte d’officialisation des propos qui furent prononcés.» Deux points ont surtout été remarquées: les conceptions démocratiques de l’expert et son appréciation du président français…
@PAYANT Peter Ludlow devait parler des perspectives politiques de l’Europe, c’est-à-dire des perspectives d’une politique européenne. Il n’en fut guère question, observe notre source. Ce fut un panégyrique fleuri à la gloire des institutions européennes, avec les citations diplomatiques et personnalisées pour s’attirer les bonnes grâces de l’assemblée et des autorités diverses, tout cela entraînant par ailleurs un mépris particulièrement remarquable et parfois abrupt pour les pratiques démocratiques et telle ou telle autorité des Etats-membres. Il s’agit en effet de ces deux points, qui méritent d’être mis en exergue.
• Une des grandes trouvailles de Ludlow, explique notre source, a été d’annoncer que, «plus jamais, durant les prochaines décennies, l’UE ne s’offrira le risque d’un traité, qui impliquerait la possibilité que la marche en avant européenne soit interrompue ou ralentie par un processus démocratique fondamental, en l’occurrence la pratique du référendum…» Curieusement, ou par inattention, ou simplement parce qu’il se fout de la précision des mots, Ludlow préféra parler de “plébiscites” en référence aux consultations passées de cette sorte, ce qui est à la fois absurde et contradictoire puisqu’il faisait allusion à des consultations populaires où les dirigeants et les élites avaient été désavoués démocratiquement par leurs mandants. «En d’autres mots, Ludlow nous annonçait qu’il était essentiel, et présent dans la résolution politique des institutions européennes, de ne tenir aucun compte de la volonté démocratique des peuples.»
• Ludlow affirma implicitement la toute puissance de l’Allemagne et parla, en termes explicites, d’un président d’un Etat-membre, en l’occurrence le président français Sarkozy, en des termes stupéfiants de grossièreté. «Les termes exacts employés par Ludlow, alors qu’il parlait de Merkel et de Sarkozy, fut de désigner le second par des mots qu’on peut traduire par l’expression “une mouche puante”, en faisant le geste de s’en débarrasser d’un revers de la main. Ce fut un moment assez étonnant, cette façon de faire, dans une enceinte officielle.» Notre source précise que c’est sans doute l’expression “dirty fly” qui fut employée, ce qui peut donner effectivement ”mouche puante”, ou bien, plus exotique, “mouche à merde”…
Peter Ludlow est un personnage, comment dit-on? – emblématique – c’est-à-dire très à l’aise dans les milieux dont il attend soutiens affectueux et matériels en échange de ses bonnes dispositions, attentif à débusquer avec habileté les vertus évidentes des dirigeants et des influences dans les institutions européennes pour mieux plaider sa cause et ses intérêts propres. «Dans les années 1990, dit une autre source européenne, il avait l’habitude d’obtenir des subventions à la Commission en cloisonnant soigneusement ses démarches, si bien que chaque direction ignorait que l’autre l’avait déjà subventionné, si bien que la récolte était toujours fructueuse…» Son intervention, contrairement à l’annonce qui était faite, constitua effectivement ce panégyrique des institutions européennes et de ses principaux dirigeants dont on a parlé. Sur la “politique européenne” qu’on nous promet après le traité de Lisbonne, surtout rien de précis sinon l’affirmation pas vraiment étonnante de la part d’un tel “expert” que le traité de Lisbonne sera “un succès complet” et l’affirmation complètement étonnante si elle avait été faite par un véritable expert que les Etats n’auront plus aucun rôle à jouer.
Notre source observe que de telles interventions, qui peuvent avoir des échos à l’extérieur (la preuve), «risquent d’avoir des conséquences très désagréables pour la Commission, pour sa réputation, pour ses rapports avec les Etats-membres, et Dieu sait si elle n’en a pas besoin».
Mis en ligne le 9 novembre 2009 à 06H08