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11 novembre 2003 — Plusieurs démocrates américains de haut niveau, essentiellement des sénateurs, ont développé ces derniers jours ce qui paraît désormais être la ligne du parti pour les élections présidentielles : l’appel à l’OTAN pour prendre en charge la sécurité de l’Irak, et à l’ONU pour en assurer le contrôle politique. Au-delà, cette évolution marque une très nette volonté des démocrates de faire appel aux pays européens, principalement à ceux qui refusent aujourd’hui toute implication dans la situation irakienne (l’Allemagne et la France principalement).
« Biden, the ranking Democrat on the U.S. Senate Foreign Relations Committee, said Bush must appeal for international assistance by ceding U.S. control in post-war Iraq, where insurgents have now killed 150 American soldiers since the Republican president declared major combat over on May 1.
» “It entails the president, literally, not figuratively, calling a summit with our European friends and saying, 'Look, we got to make three changes,'” Biden said.
» Security should be turned over to a NATO-led force, and a high commissioner appointed like the one that helped Bosnia recover from its 1992-95 ethnic war, not necessarily an American, reporting to NATO and the U.N. Security Council, Biden said.
(...)
» [Sen. John Edwards of North Carolina, a Democratic presidential candidate,] who said he would turn over the Iraqi civilian authority to the United Nations “tomorrow” and make it a NATO security force, said he didn't think allies would rebuff the request “if in fact we give them some decision-making authority.”
» U.S. Rep. Richard Gephardt, a Missouri Democrat also running for president, said Bush should have turned to NATO for security “a long time ago” and to the United Nations for the reconstruction effort.
» “It is incomprehensible to me that he has not done this,” Gephardt told CNN. »
La politique démocrate semble désormais bien définie. Le général Wesley Clark, autre candidat démocrate, a également proposé l’intervention de l’OTAN parmi ses plans, s’il était élu. La demande faite par Biden, outre les propositions OTAN et ONU qu’il fait, de la tenue immédiate d’un sommet sur l’Irak, principalement des USA avec ses alliés européens, principalement l’Allemagne et la France, pour obtenir leur soutien, accroît la pression sur l’administration Bush, et la met dans une position politique antagoniste. Même si la proposition Biden est du pur bon sens, comme on pourrait en juger d’une façon générale, il y a fort peu de chances qu’elle soit seulement envisagée par l’équipe Bush, qui la verrait comme une sorte de capitulation devant les démocrates, avec des effets électoraux désastreux. C’est évidemment dans ce sens qu’il faut voir, dans toutes ces propositions, plus l’annonce d’une politique pour la campagne électorale qu’une réelle proposition d’action immédiate.
Dans tous les cas, il s’agit réellement d’une très nette rupture du “front patriotique” américain qui suivit le 11 septembre 2001, avec un tournant politique très significatif. On observera au moins deux choses, qui caractérisent cette prise de position d’une façon très inhabituelle.
• D’abord, cet appel à des organisations internationales constitue une provocation pour la majorité de la droite soutenant GW Bush. L’appel à l’ONU, surtout, avec transfert de l’autorité politique vers l’Organisation (comme dans les Balkans) sera perçu comme insultant, et comme une attaque contre la souveraineté nationale dont cette droite est férue.
• L’appel direct à des alliés européens, jusqu’ici catalogués comme de quasi-ennemis par ce même électorat de droite, sera perçu comme une invitation faite à ces pays d’entrer dans le débat électoral/présidentiel américain pour y prendre position (contre GW). C’est aussi une “première” dans un temps de guerre. Là aussi, le choc devrait être important.
L’Amérique qui votera en novembre 2004 sera polarisée en deux parties radicalement hostiles, sans doute comme elle ne l’a jamais été depuis la Guerre de Sécession.