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405On se prépare, à Washington, à une majestueuse bataille, à coups de milliers de $milliards, soit $billions pour nous et $trillion pour les Anglo-Saxons. Parlons donc en $trillion, comme font les commentateurs de la bataille entre le président Obama et les républicains. Dans cette perspective, il s’avère donc que la bataille autour de la fermeture” du gouvernement n’était qu’un avant-goût, une sorte de galop d’échauffement.
Dans le Guardian du 13 avril 2011, Ewen MacAskill donne les principales informations à propos de cette bataille où Obama intervient avec son propre plan de réductions des dépenses publiques ($4 trillion, soit $4.000 milliards), contre les $6,2 trillion qu’exigent les républicains. Ces chiffres sans aucun doute considérables sont néanmoins logiques puisqu’ils se réfèrent à un déficit public qui dépasse les $14 trillion ($14.000 milliards).
«Barack Obama has set the stage for a new and bigger budget showdown with the Republicans, proposing a staggering $4 trillion (£2.4tn) in spending cuts over the next 12 years aimed at reducing America's runaway deficit. Although the cut is enormous, it still falls well short of the $6.2tn the Republicans are demanding.
»The battle is set to dwarf last week's 2011 budget row that came within an hour of seeing the federal government shut down. The size of the deficit, more than $14tn, is one of the biggest political issues in the US, especially with the country in hock to China, which has accumulated a hoard of dollars. The deficit was one of the main reasons for the rise of the Tea Party movement and contributed to the Republican victory in last November's congressional elections.
»Obama has proposed to tackle the deficit by curbing defence spending and ending tax breaks introduced by George W Bush for wealthy Americans – those earning more than $250,000 a year. In a move that will anger the Democratic base, Obama is also suggesting further cuts in the deficit would come from reforms to Medicaid, which provides basic health provision for the poor, and Medicare, which provides health care for those over 65. […]
»The focal point in the next few weeks is the raising of the country's debt limit above $14.3tn. Normally this would be a technical move that would be voted through without much bother but it has become entangled in the battle over spending. If this is not agreed by the Republicans, the country would be in default, which would be embarrasing for Obama and would have implications for economies round the world. The deadline is 16 May.
»Republican leaders said that if Obama did not agree to major debt cuts, they would not vote through the rise in in the debt ceiling from $14.3tn. The Republicans, who have a majority in the House of Representatives, are scheduled to pass a bill later this week to cut $6.2tn over the next decade without raising taxes. But it has no chance of getting through the Senate, where the Democrats have a majority. Even if it did, Obama could use his presidential veto to block it.
»The battle over the deficit has consequences not only for the US as it stumbles out of recession but other economies round the world. Democrats warn that the spending cuts being advocated by the Republicans would send the country back into recession. […]
»…Some economists and political scientists also raise what they see as the danger of Republican cuts slowing or even reversing America's climb out off recession. Thomas Ferguson, professor of politics at the University of Massachusetts, said there was a danger of repeating the mistakes of the Great Depression by chopping spending. “The US would surely take a rather large plunge. They will get Ireland and Greece outcomes. You will crater the US economy if you were to enact the [Republican] bill,” Ferguson said.»
La réaction au discours d’Obama des libéraux (progressistes) soutiens d’Obama, et, ces derniers temps, soutiens plutôt désappointés d’Obama, est variable. On note celle deMichael Tomasky, qu’on a suivi lors de la bataille de la “fermeture” du gouvernement, où il montrait le plus grand désappointement vis-à-vis du président. Cette fois (le 13 avril 2011 dans le Guardian), Tomasky montre une certaine satisfaction concernant le sens des mots prononcés par Obama, avec des réserves concernant ce qu’on perçoit de la volonté du président dans sa façon de les dire...
«There's nothing courageous about asking for sacrifice from those who can least afford it and don't have any clout on Capitol Hill. And this is not a vision of the America I know.
»Pretty astonishingly direct stuff, coming from the man who likes to lay back. The one-sentence takeaway on this speech: he showed today that is willing to fight the GOP on straightforward ideological grounds, and not just by saying “hey, my numbers aren't quite as severe as theirs.” So I give him credit for that. This is a fight this country has to have. He obviously decided somewhere in there, since the last election and since extending the Bush tax cuts, that he just couldn't play around anymore.
»It was a tub-thumper of a speech, on paper. And yet, no tubs were thumped. He delivered it (usually) as if he was reading an annual report. I kept wondering how those words would have sounded coming out of the mouth of, say, Bill Clinton, who liked his fire and brimstone. Obama seemed almost afraid of his own words, as if those strong words and a fiery delivery would have been too much.»
…Tout de même, on retient cette réserve qui paraîtrait formelle, qui est en fait fondamentale, de la part de Tomasky, pourtant prêt à tous les sacrifices intellectuels pour avoir encore l’occasion de soutenir “son” président Obama : «Obama seemed almost afraid of his own words…» Certes, pour beaucopup, de tels reproches n’ont guère de substance puisqu’ils ne portent pas sur la substance, justement, du débat. C’est n’y rien entendre… La “substance du débat”, dans ce cas, c’est la question de la confiance qu’on peut avoir dans Obama. Le président US a tellement déçu ses soutiens essentiels, le parti démocrate en général, tout ce qui compte de libéraux (progressistes) de gauche modérée, etc., qu’il y a désormais en formation, on s’en aperçoit, une véritable et très profonde “crise de confiance” psychologique vis-à-vis de ce président. Un peu comme dans le cas des Noirs US, il y a la question de plus en plus pressante de savoir si cet homme, ce président, a les tripes et la conviction pour soutenir sa position, même si celle-ci est complètement fondée. Sa propension presque obsessionnelle pour le compromis, pour l’accord bipartisan, pour un homme qui avait basé toute sa rhétorique de campagne sur le changement à un point tel que certains croyaient entendre “rupture”, a fini par éroder, peut-être saper la confiance fondamentale de ses principaux partisans. Cela n’a rien à voir avec le soupçon d’intégrité douteuse, de manipulation, de corruption, etc., qui n’a pas vraiment lieu d’être considéré comme essentiel dans un système où tout le monde l’est peu ou prou, douteux, corrompu et manipulé, et cela a tout à voir avec quelque chose de plus fondamental qui est simplement la confiance de ses partisans. Ce n’est pas une question de vertu mais une question de conviction et de fermeté psychologiques, fussent-elles partisanes et détestables. Enfin, cet homme a-t-il quelque chose en lui qui ressemble à la fermeté de caractère, qui est nécessaire même pour la défense d’intérêts douteux et critiquable ?
La bataille qui s’annonce, à laquelle BHO a été contraint plus qu’il ne l’a voulue, risque évidemment de secouer terriblement le “centre” du Système, et le Système tout court, lorsqu’on mesure le poids formidable des sommes en jeu. Elle risque aussi de secouer violemment la stabilité de la position d’Obama, et Obama lui-même. Nous irions jusqu’à dire qu’il y a dans cette affaire deux batailles qui se profilent, aussi importantes l’une que l’autre : d’une part, la bataille du déficit, dont les enjeux, selon certains, sont capitaux, avec le plan républicain violemment dénoncé par les économistes les moins orthodoxes par rapport au carcan financier du capitalisme US, qui y voient une nouvelle version des erreurs de Roosevelt de 1937, lorsque les contraintes des dépenses publiques précipitèrent une rechute dans la dépression avec une relance dramatique du chômage. Bien entendu, une telle perspective toucherait de plein fouet, non seulement l’économie US mais l’économie mondiale, toujourts engluées dans une crise profonde.
L’autre bataille, c’est peut-être celle de la réélection d’Obama. Si le président ne tient pas ses positions face aux républicains, s’il cède une fois de plus, les ravages dans les rangs de ses partisans seront terribles. Dans ce cas, sa réélection serait sans aucun doute en jeu.
Mis en ligne le 14 avril 2011 à 15H24
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