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1972Un article de Slate.fr présente les deux nouveaux types d’électeurs, ceux qui, comme dit Charles Gave, se sentent bien quelque part (les pauvres) et ceux qui se sentent bien partout (les Davos et les bobos sociétaux et friqués). Les deuxièmes adorent les migrants car ils adorent avoir bon cœur et surtout être servis pas cher. Les moyens et les pauvres finissent par voter populiste puisque la fausse droite a trahi la nation et la fausse gauche le peuple (Gave, toujours). En d’autres termes on opposerait les nomades aux sédentaires (Attali, ou les mercuriels aux apolliniens (Zlatkine). Je précise que moi je me suis délocalisé parce que je suis pauvre. Le riche heureux chasse le pauvre ou il l’écœure ; il y a l’électeur-prédateur et l’électeur-gibier, qui a du souci à se faire en occident (voyez ces boers partant en Russie…)
C’est le journaliste David Goodhart qui a mis au point cette distinction permanente : «Les gens qui voient le monde de n'importe où et ceux qui voient le monde de quelque part ».
On prend le texte de Slate.Fr qui chose marrante appartient au groupe de presse Rothschild et dit du mal de moi...
« …David Goodhart formule une autre distinction dans The Road to Somewhere. The Populist Revolt and the Future of Politics, tout juste paru outre-Manche: «Les gens qui voient le monde de n'importe où et ceux qui voient le monde de quelque part.»Anywhere contre Somewhere, deux blocs aux frontières encore instables. Les électeurs les plus diplômés (un chercheur britannique, Vernon Bogdanor, parle de exam-passing classes), mobiles géographiquement et «progressistes» sociétalement, et des électeurs davantage attachés à leur communauté d'origine et aux valeurs traditionnelles (famille, nation), sans forcément rejeter toute évolution de la société. Le financier londonien ou l'étudiant d'Oxbridge contre «le fermier écossais, l'ouvrier du Nord-Est, la femme au foyer des Cornouailles». Les uns ont une identité «acquise», les autres une identité «imposée»; les uns se regroupent en une communauté d'intérêts, les autres en une communauté d'identité.
En dessinant ce nouveau clivage, Goodhart affirme tirer les leçons du Brexit et de l'élection de Donald Trump, «les deux plus importants votes protestataires de l'histoire politique moderne». Et s'il s'estime bien placé pour le faire, c'est parce qu'il se vit comme un «apostat»: un Anywhere qui a fini par comprendre le point de vue des Somewhere. Fils d'un député conservateur qui siégea brièvement dans le premier cabinet de Margaret Thatcher, il fut un jeune étudiant marxiste au sein de la prestigieuse université d'Eton, au milieu des années soixante-dix, avant de travailler douze ans au Financial Times, notamment comme correspondant en Allemagne au moment de la Réunification. Il a ensuite créé en 1995 le magazine Prospect, classé au-centre gauche mais qui s'est distingué par des points de vue souvent en rupture avec la «Troisième voie» blairiste.
En 2004, il a ainsi écrit un article, «Too Diverse?», qui s'inquiétait de ce que la diversité ethnique croissante de son pays puisse devenir un obstacle à son contrat social et au maintien de son État-Providence. Le texte, très controversé, lui a valu, estime-t-il, de «rencontrer pour la première fois l'intolérance de la gauche moderne», et d'être qualifié dans certains médias d'«Enoch Powell de gauche»: une référence au sulfureux député conservateur qui, dans un discours prononcé à Birmingham en 1968, assurait que si l'immigration se poursuivait, son pays verrait couler «des rivières de sang».
Enoch Powell était opposé à l'entrée de la Grande-Bretagne dans la CEE; David Goodhart a fini par voter pour son maintien dans l'Union européenne, avec réticence, après une campagne où il jugeait les positions du «Leave» caricaturées. Il s'est également senti mal à l'aise face aux réactions du camp du «Remain» à sa défaite, comme à celle des partisans d'Hillary Clinton à l'échec de leur candidate. Tous ces gens qui pensaient «être du bon côté de l'histoire tout en étant du mauvais côté du résultat» et qui, quand ils ne traitaient pas une moitié de leur compatriotes d'idiots racistes, optaient pour le paternalisme moqueur: «Quand les habitants de Sunderland votent en faveur du Brexit, apparemment contre leur intérêt matériel, cela est vu comme stupide, déplore Goodhart. Quand les personnes aisées votent pour un alourdissement de la fiscalité, cela est vu comme admirable.» Un discours qu'on pourra rapprocher de celui que tenait en 2012 dans nos colonnes le géographe Christophe Guilluy, déplorant que la gauche considère les électeurs du FN comme «stupides».
Dans une récente tribune publiée dans le Financial Times, Goodhart raconte une anecdote selon lui révélatrice de son itinéraire:
«Je discutais avec un groupe d'amis dans un bar, y compris quelques personnes que je ne connaissais pas, et j'ai dit que je pouvais comprendre le malaise que Nigel Farage avait récemment exprimé en n'entendant aucune personne parlant anglais à bord d'un train à Londres. Une des personnes que je ne connaissais pas a frappé son verre sur la table d'une manière sonore et est partie de manière visible.»
Dans son livre, Goodhart emprunte la formule suivante à un politologue néerlandais, René Cuperus, qui pastiche lui-même une phrase célèbre de Tony Blair: «Nous devons être durs envers le populisme, et durs envers les causes du populisme.» Lui ajoute: «L'une de ces causes a été les excès des Anywhere.»
Excès d'un double libéralisme, économique et sociétal, à son apogée selon lui durant les treize années de règne du New Labour, de 1997 à 2010. En témoigne une ouverture à la mondialisation qui a indéniablement sorti une partie de la planète de la pauvreté, mais a laissé une impression de surplace aux classes moyennes et populaires des pays développés –c'est le constat développé par la «courbe éléphant» des économistes Christoph Lakner et Branko Milanovic, qui montre que la seule catégorie de la population mondiale qui a vu ses revenus baisser depuis trente ans est celle qui se situe entre les 25% et 15% les plus riches. Une ouverture irréfléchie dont Goodhart voit le symbole dans la décision du gouvernement Blair d'autoriser, avant la date prévue, l'accès au marché du travail à l'immigration d'Europe de l'Est: l'ouvrier plombé par la concurrence polonaise est au Brexit ce que le col bleu du Michigan pénalisé par la concurrence chinoise est à la victoire de Trump.
Goodhart estime surtout que la libéralisation sociétale menée depuis les années soixante a déclenché un contrecoup autoritaire: une théorie qu'on retrouvait déjà, dans les années 1980-1990, sous la plume de certains analystes tentant d'expliquer le succès de Jean-Marie Le Pen par les réformes de l'après-68 (libéralisation de l'avortement, du divorce, abolition de la peine de mort, regroupement familial des immigrés...), au point que le chercheur italien Piero Ignazi parlait alors d'une «contre-révolution silencieuse». Peu après le Brexit, Eric Kaufmann, chercheur à l'université de Londres, pointait ainsi comment le positionnement sur certains sujets de société, comme la peine de mort, était un bon indicateur du vote en faveur du «Leave».
Goodhart reproche à la gauche d'avoir négligé le combat en faveur du bien-être économique au profit des seules réformes sociétales: «Cinquante ans plus tôt, la politique identitaire n'existait pas; maintenant, c'est ce qui motive principalement les jeunes Londoniens de gauche. [...] Les comptes Twitter des activistes du Labour parlent davantage de culture du viol et de harcèlement à l'école que d'inégalités économiques.» Une tendance qui a développé en réaction, écrit-il, une nouvelle offre politique «préoccupée par les frontières nationales et le rythme du changement, séduisant des individus qui ne se sentent pas à leur place dans une société plus ouverte, ethniquement plus fluide, dont l'économie favorise les diplômés, façonnée par et pour les nouvelles élites».
Cette nouvelle offre, les élites Anywhere ne la comprennent pas, selon lui, car elles pensent à l'intérieur d'une chambre d'écho caractérisée par des partis politiques repliés sur une base plus étroite et des élus dont la diversité sociale est en baisse (entre 1979 et 2015, le nombre de députés de la Chambre des communes qui ont occupé des professions manuelles est ainsi passé de 16% à 3%, de même qu'en France les députés des classes populaires ont disparu). Et le dialogue entre les deux blocs est encore compliqué par le fait que chacun a son pôle «radical», évalué par l'auteur à 5% de la population, les «villageois globaux» du côté des Anywhere et les «ultra-autoritaires» du côté des Somewhere. Ce que doivent comprendre les premiers, conclut-il, c'est que les Somewhere «ne choisissent pas la fermeture contre l'ouverture, mais veulent une forme d'ouverture qui ne les désavantage pas». Une attitude qu'il qualifie de «populisme décent» –expression qui prouve une nouvelle fois l'abus du terme «populisme» dans la politique contemporaine.
Le tableau que dresse Goodhart des nouveaux clivages qui traversent l'électorat semble pertinent. En France aussi, l'éducation et la mobilité sont devenus des déterminants essentiels du vote. En 2005, ainsi, le «non» à la Constitution européenne atteignait son apogée (près de 60%) dans les communes de moins de 500 habitants, et n'était minoritaire que dans celle de plus de 100.000 habitants. De la même façon, la seule catégorie éducative à avoir voté majoritairement «oui» était les diplômés du supérieur. Plus récemment, une note de la Fondation Jean-Jaurès montrait un fort survote FN dans les populations «sédentaires» par rapport aux populations «nomades».
Certains des constats de l'auteur semblent eux plus nettement spécifiques à l'Angleterre, par exemple sur la séparation entre Londres et le reste du pays, qui ne peut pas être totalement comparée à celle entre Paris et le reste de la France: depuis 2011, Londres est une ville majority-minority (où les minorités ethniques représentent plus de 50%), elle est huit fois plus grande que la deuxième ville du pays, et seule une autre des dix plus grandes villes britanniques, Bristol, affiche un PIB par tête supérieur à la moyenne nationale!
Par ailleurs, sa tentative de catégorisation, comme souvent dans ce genre d'exercice, le conduit à des raccourcis et simplifications. Il passe un peu vite, par exemple, sur le fait que l'Écosse, nation Somewhere car dotée d'une très forte identité, a voté aux côtés des Anywhere en se prononçant en faveur du «Remain». Et si son souci de rabattre le caquet des Anywhereméprisants qui privent les Somewhere de la parole est justifié, il se voit quand même forcé de rappeler au passage que les deux journaux les plus vendus du pays, le Sun et le Daily Mail, s'étaient prononcés pour le Brexit... Son ouvrage, au final, se lit surtout comme une prise de position dans la bataille que se livrent les tenants de l'explication culturelle et ceux de l'explication économique: en très mauvaise posture actuellement, le Labour tente d'ailleurs d'imposer un récit alternatif, à l'image de sa ministre «fantôme» du Travail et des Retraites, Debbie Abrahams, qui écrivait récemment qu'«accuser les immigrés de quasiment sept années gâchées d'austérité sous les conservateurs alors qu'ils sont contributeurs netsà l'économie de 2 milliards de livres par an est pervers».
The Road to Somewhere s'avère plus convaincant sur son constat global, celui d'une rupture amère entre les électorats, que sur les réponses, forcément compliquées et longues à mettre en œuvre, mais se termine sur un chapitre listant quelques «remèdes» qui entrent parfois en résonance avec nos débats hexagonaux, comme une meilleure valorisation de l'enseignement technique et de l'apprentissage pour que les jeunes quittant le système scolaire avant le supérieur aient une vraie qualification, ou l'introduction de la proportionnelle pour mieux représenter les différents courants d'opinion. Goodhart espère, à terme, un «nouveau compromis» entre les Anywhere et les Somewhere, «ces deux moitiés de l'âme politique de l'humanité». »
Goodhart cherche ici à se faire bien voir !
Je n’attends bien sûr aucun compromis, aucune pitié ou commisération dans la marche milliardaire éclairée des Soros-Macron-Attali-Sanchez-Merkel-Clinton-Rockefeller. La démocratie-spectacle-marché ne finira pas en despotisme éclairé (Debord). Ils nous éradiquent rapidement, physiquement, racialement, socialement, culturellement, même sexuellement. Les solides s’effaceront devant les liquides. Ce sera scientifique et juste, dirait mon regretté ami Vladimir Volkoff. Il ne fallait pas se trouver là… C’est comme le paysan ukrainien de 1933 face aux élites communistes au moment de l’Holodomor. Nos exterminateurs stylés et mondains prennent plus leur temps, laissant à leurs chaînes-infos le soin de nous lessiver d’abord le cerveau.
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