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4596D’énormes quantités d’argent public ont été mises à la disposition de nombreuses équipes de recherche pour la mise au point de vaccins contre le Sars-Cov-2. Parmi les cent cinquante candidats, une dizainea franchi l’étape des essais cliniques de phase 1 et pour certains de phase 2.
L’engouement pour la variété en cours d’élaboration par la firme étasunienne Moderna fut bref. La bouffée d’intérêt suscitée sur les marchés financiers par des annonces savamment distillées est vite retombée une fois que les responsables scientifiques se soient délestés des actions de leur propre entreprise. Le pari que la séquence génétique codant pour la protéine d’attachement du virus aux récepteurs cellulaires de l’hôte mise dans un sac de nanoparticules lipidiques une fois injectée puisse induire une réponse immunitaire protectrice semble n’avoir pas donné le résultat escompté. Moderna a déjà pris du retard pour le lancement de la phase 2 du vaccin contre le Cytomégalovirus, fabriqué selon le même principe, de l’ARN dans une enveloppe nanoparticulaire lipidique, un virus responsable de mort et de malformations fœtales, en particulier de surdité chez l’enfant, quand il est contracté par la femme enceinte. Les données intermédiaires de la phase une, vérification de l’innocuité et de l’immunogénicité du produit, datent de septembre 2019. Les résultats de la phase deux attendus pour janvier 2020 sont retardés pour le troisième trimestre2020.
Des changements survenus également dans la chronologie du déroulement des différentes étapes de validation du vaccin présumé contre le COVID-19 ont malmenéla cotation boursière de la firme en ce début juillet.
Une lecture même inattentive du communiqué de presse de Moderna daté du 24 février 2020 faisait état des réalités de ses succès en innovation thérapeutique et vaccinale, une liste d’essaislimités à la phase 1 de vaccins contre 8 virus. Cette publication de la firme de biotechnologie faite à peine quatre semaines après que l’OMS ait lancé l’alerte d’un risque de pandémie mondiale sur le COVID-19 annonçait la mise en orbite du vaccin contre le Sars-Cov-2. L’exaltation des médias pour des prouesses promises rappelle furieusement la passion des investisseurs pour les dot.comde la fin du siècle et du millénaire derniers qui avait amené quelques déconfitures financières cinglantes qui ne sont pas sans rapport avec les aventures impériales étasuniennes en Afghanistan et dans l’Orient arabe.
La passion spéculatrice, insatiable, s’est portée sur un autre objet, le candidat issu de la recherche biologique de l’Université d’Oxford dont la licence a été transférée à une firme anglo-suédoise, AstraZeneca. Le gouvernement britannique a avancé 65,5 millions de livres pour réserver 100 millions de doses. Les Usa ont mis sur la table 1,2 milliardsde US dollars pour se garantir 300 millions de doses, en prévision de la sortie espérée sur le marché du vaccin intitulé pour l’heure AZD1222. La conception du vaccin est dans ce cas moins hasardeuse, un petit bricolage a permis d’intégrer toujours la même séquence de matériel génétique identifiée comme pertinente pour faire produire des anticorps neutralisants dès le Sars-Cov de 2002-2003, celle de la protéine de l’épine d’attachement, à un virus non pathogène, un adénovirus du chimpanzé ayant la propriété d’être réactogène, c’est-à-dire d’exciter le système immunitaire pour fournir une réponse. Alors que les données de la phase 1 n’ont pas été partagées, l’Université d’Oxford et AstraZeneca ont entreprisla phase 2/3 en enrôlant des volontaires sans restriction d’âge, la tranche des plus de 70 ans est en effet pertinente car la plus susceptible de faire des formes graves de Covid-19.
CanSino Biologics a publié des résultatsobtenus en association avec différentes équipes universitaires chinoises pour la phase 1 d’un vaccin qui a emprunté comme vecteur pour la partie codante de la protéine de l’épine l’adénovirus de type 5. Fort commun, 45% des Etasuniens et 90% des Africains ont déjà des anticorps contre cet adénovirus, rendant moins efficace la séroconversion contre la protéine S épine (pour spike) du Sars-Cov-2. Néanmoins, la réponse humorale et cellulaire pour la protéine S du Coivid-19 semble vigoureuse dès la quatrième semaine après l’injection chez la moitié des volontaires ayant reçu une dose vaccinale moyenne, ce qui constitue une réponse médiocre. L’une des difficultés pour comparer l‘efficacité des vaccins entre eux est l’absence de tests standardisé de neutralisation du virus.
Un autre écueil est l’absence de données concernant l’induction d’une immunité locale, muqueuse, jamais explorée, autrement dit la présence d’anticorps et de cellules dans le rhinopharynx susceptibles d’éliminer le virus dès son entrée dans l’organisme.
CanSino publie ses données et conclue modestement que la présence de cellules T et d’anticorps réactifs avec le Sars-Cov-2 ne signifie pas obligatoirement protection contre une infection virale. Les études menées sur le Sars-Cov de 2002 et le Mers-Cov de 2012 avaient montré le caractère éphémère de la réponse immunitaire, les anticorps spécifiques disparaissent rapidement après la guérison alors que le rôle des cellules T mémoire persistantes semble importantet déterminant pour la protection durable contre le virus.
Ainsi à ce stade, on ignore encore si les anticorps neutralisants que l’on cherche à induire par la vaccination et dont la détection ne se fait pas de façon standardisée d’un laboratoire à un autre sont réellement protecteurs.
Et s’ils l’étaient, combien de temps persisteraient-ils?
Une équipe de l’Université Rockefeller de New York qui avait travaillé quelques années sur l‘évaluation des anticorps neutralisants du VIH a orientésa recherche sur le Sars-Corv-2 quand il a surgi dans l’actualité. Du plasma de patients volontaires guéris du COVID-19, ayant accusé des symptômes modérés ou importants au minimum 40 jours plus tôt, a été recueilli et analysé. La présence d’anticorps neutralisants a été vérifiée en titrant l’activité antivirale sur des cellules d’origine humaine cultivées en plaques.
Le plasma de 118 patients sur 149 (tous guéris) a montré une activité neutralisante des anticorps de faible à modeste. Chez le tiers des patients, elle est même indétectable. Preuve est faite que l’immunité humorale que le vaccin veut promouvoir n’est pas indispensable à la guérison. Par ailleurs l’équipe enrichie par la collaboration avec l’Institut de technologie de Pasadena en Californie a trouvé chez six patients une quarantaine de variétés d’anticorps très puissamment neutralisants, tout en étant présents à des titres très faibles indiquant que l’efficacité n’est pas liée à leur abondance. Ils se lient à des zones particulières de la partie de la protéine S.
Les auteurs concluent à la possibilité de s’aider de ces résultats pour mettre en œuvre la production d’anticorps monoclonaux dirigés contre les épitopes ainsi repérés pour traiter les patients. Pourtant, la réponse polyclonale du système immunitaire des primates n’est pas une dépense énergétique inadaptée et inutile d’une nature imparfaite, elle pourrait attester de la nécessité d’éduquer le système immun pour parer à l’éventualité des mutations virales qui pourraient compromettre l’efficacité d’anticorps ciblant des zones étroites. La souche viralequi circule actuellement au Canada, aux Usa, au Royaume Uni et en Italie a par la vertu d’une infime modification dans la composition de sa protéine S acquis une virulence dix fois supérieureà celle apparue à Yuhan.
La diversité des cibles visées par des anticorps ‘moins efficaces’ est peut-être aussi l’occasion d’une synergie des anticorps qui viennent recouvrir et encombrer les particules virales.
Par ailleurs, une étude chinoises’est intéressée au devenir de la réponse humorale des patients guéris du COVID. 37 patients avaient été symptomatiques, et trente sept autres n’avaient eu aucun symptôme. Plus de 90% des deux groupes montrent une chute drastique des taux des anticorps de type IgG dans les deux à trois mois suivant l’infection apparente ou inapparente. 40% des asymptomatiques ont des taux nuls à 8 semaines après le diagnostic.
Comme redouté, la maladie ne semble pas conférer d’immunité durable. Cette hypothèse a été soulevée en raison de l’observation faite sur les coronavirus à l’origine des rhumes saisonniers bénins, une souche peut infecter le même individu deux ou trois fois dans l’année. Cette constatation invalide l’idée d’une immunité acquise par un groupe humain, elle rend inutile voire dangereux le ‘passeport’ notifiant la détection d’anticorps chez son porteur. Ce travail a aussi montré que la baisse des anticorps neutralisants est observée chez 81% des asymptomatiques et 32% des symptomatiques. Le virus est par ailleurs détecté plus longtemps (19 jours) chez les symptomatiques versus les sans symptômes (14 jours) sans pour autant que l’on sache si ces virus sont infectants ou non.
La brièveté de la réponse humorale au Sars-Cov-2 (2 à 3 mois) contraste avec la durée plus importante, plus d’une année voire deux, de celle provoquée par le Sars-Cov et le Mers-Cov.
Cette disparition des anticorps ne préjuge pas de celle de l’immunité cellulaire acquise au décours de l’infection, laquelle semble déterminante dans la défense contre le virus.
Elle remet en cause le critère d’évaluation des vaccins en cours de développement. Toute l’ingénierie vaccinale est susceptible d’être revue et corrigée.
Jusqu’ici, un vaccin de qualité immunise au mieux comme le ferait la maladie naturelle.
Ira-t-on jusqu’à vacciner toute la population deux à trois fois par an ?
L’annonce faitepar Bharat Biotech International Ltd, une firme indienne, de fournir un vaccin contre le COVID-19 dès le 15 août de cette année, semble être un engagement impossible à tenir même si deux facteurs militent en sa faveur. Le fabricant dispose d’un réservoir abondant de volontaires. Le vaccin candidat a été conçu à l’ancienne, il s’agit tout bonnement du virus inactivé, recette qui a fait ses preuves, avec un adjuvant. La technologie est déjà éprouvée et il suffit de changer le substrat qui alimente les chaînes de production déjà existantes pour démarrer une production industrielle de masse, opportunité inexistante pour les vaccins type Moderna pour lesquels doivent être imaginées puis créées des unités de productions spécifiquement dédiées.
Pour l’heure, les antivaxx peuvent être rassurés, raisonnablement, aucune firme ne pourra présenter un vaccin efficace avant plus d’une une année. Il faudra que quelqu’un s’avise à les renseigner sur l’épigénétique. Notre patrimoine génétique subit un remaniement constant par notre environnement. La rencontre avec un virus fait partie des évènements qui nous transforment ‘naturellement’. Il est probable que notre ADN a évolué en intégrant des bouts de matériel génétique pris ça et là à des virusun peu à la manière de bactériophages insérés dans des bactéries de même les bactériophages ‘volent’de l’ADN à des bactéries ou des animaux.
Notre stabilité dépend étroitement de notre capacité à évoluer, aucune espèce n’est ‘pure’ ! Vacciner ce n’est pas rien d’autre qu’essayer d’organiser une rencontre avec la forme la moins dommageable d’un étranger auquel nous serons de toutes les façons exposés. Avant d’être devenue une activité génératrice de gros profits, les fabrications premières de vaccins faisaient figure de secteurs vieillots, un peu jaunis, peu rentables. La modernité leur a sauté au visage en même temps que l’épidémie de l’HIV et les développements de la biologie moléculaire transcrites en occupation sexy intéressant la gourmandise des marchés spéculatifs. Cette focalisation récente des sceptiques de la science date du vaccin de l’hépatite B accusé à tort d’être à l’origine comme le ROR d’autisme et de sclérose en plaques par des scientologues britanniques dissimulés parmi les députés et les membres de gouvernement qui ont su mener des campagnes souterraines efficaces.
Il faudra panser sereinement les blessures d’un certain narcissisme qui fait placer l’espèce humaine étanche, à part et au-dessus des autres et accepter sa nécessaire interaction- collaboration, lutte, rejet, intégration partielle- avec le reste du règne animal.
En attendant de trouver une parade au pathogène qui a émergé d’écosystèmes jusque-là inconnus perturbés par une activité prédatrice envahissante, le port de la voilette, de la bavette sous la forme d’un masque respiratoire nous en isole, un peu à la manière des Hommes Bleus du Sahara qui rabattent les pans de leur coiffe teintés sur leur bouche pour filtrer l’air sec et chaud chargé de sable.