Les primaires US en état d’“inconnaissance” objective

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Les choses vues d’Europe, le Système peut dormir sur ses deux oreilles. Les primaires du parti républicain ont quasiment tranché en faveur de Mitt Romney, candidat standard et stéréotype du Système qui sera bien l’adversaire d’Obama. (La victoire “décisive” de Romney dans l’Illinois, décrite comme lui assurant sa nomination, comme par exemple selon le Guardian du 21 mars 2012.)

Dans la réalité, il semble qu’il n’en est rien… D’ailleurs, personne ne peut rien dire, parce que personne ne sait rien, et même ceci : personne ne comprend rien. Ainsi Thomas Mullen, du Washington Times (de la droite républicaine), peut-il écrire, le 21 mars 2012, en citant notamment Rachel Maddows, de MSNBC, une des chroniqueuses les plus à gauche des médias US mais qui n’a pas manqué de montrer des signes de connivence avec Ron Paul, essentiellement dus à leur dégoût commun pour l’establishment républicain… (Et, justement, et bien entendu, dans la chronique citée de Mullen, il est question de Ron Paul, qui vient pour la deuxième fois en trois mois d’être accueilli dans le fameux show télévisé de Jay Leno, où il a exposé sa stratégie.)

«Several media outlets report that Paul has only secured one tenth of the delegates that Romney has secured. This presumably rests upon the assumption that the percentage of delegates each will eventually secure will mirror his percentage of the popular vote. However, Paul’s campaign maintains that they expect to control a majority of the delegates in Iowa, Maine, and possibly several other states.

»Why the disconnect? Is this evidence of the media treating Paul’s campaign unfairly? Probably not. It is much more likely that most do not fully understand the caucus process. Rachel Maddow admits that she doesn’t and suggested that even the Republican Party doesn’t know the delegate count for any candidate at this point. She’s right.»

Suit une tentative d’explication de ce labyrinthe kafkaïen qu’est la processus des primaires, et qui joue un rôle essentiel cette année à cause de l’intensité de la situation, de la présence entêtée de Ron Paul et du refus d’aucun des quatre candidat d’abandonner. Ce dernier point permet en effet au labyrinthe de donner tous ses effets….

«[T]he process is not that simple. A popular vote is held, but it’s really no more than a preference poll or “straw poll.” After the straw poll is closed, a series of meetings commence in which delegates are elected from a precinct, district or county, which then elect delegates to a state convention, which then elect the delegates to represent that state at the RNC. This process typically takes months after the straw poll is over and the resulting delegates for each candidate may bear little resemblance to the vote percentage that candidate won in the straw poll.

»Paul’s campaign believes that his supporters, typically more enthusiastic and devoted to his candidacy, are more likely to remain after the straw poll and participate in the delegate selection process. There is some evidence that they are correct. For example, the Iowa Republican Party confirms that delegate assignment has nothing to do with the straw poll and that Paul may secure the most delegates from Iowa.

»Implicit in much of the coverage of the delegate selection process is that it somehow disenfranchises those who only vote in the straw poll. Not so. All Republican Party members have an equal opportunity to become delegates. That they choose not to merely reflects their level of commitment to their candidate.

»Nor does the process render the straw poll meaningless. Its purpose is to inform those seeking a delegate slot what the majority of voters in their state prefer. This can have profound influence on how they eventually vote in the ensuing conventions. A delegate may initially support Mitt Romney, but change his or her mind after learning that a majority of voters in their state, including independents or Democrats in some states, preferred Rick Santorum.»

Résultat (pour le moment) ?

«So how many delegates does Ron Paul or any of the other candidates have? No one knows. There are some delegates that are bound to vote for primary winners during the first round at the RNC, but that’s all that has been decided. Hundreds of other delegates in states that have already held their primaries/caucuses are still up for grabs. “First in the nation” Iowa is actually last in the nation to select its delegates. That won’t happen until June.

»At the end of the process, the delegates from each state will meet at the RNC and an initial vote will be taken. If after that vote no candidate has the 1,144 delegates necessary to secure the nomination, a brokered convention begins. Paul reminded Leno that under those circumstances, even bound delegates from primary states become unbound and can “vote their conscience.” Paul believes he has a real shot to win in that scenario.»

En d’autres termes, et si la campagne continue comme elle se fait actuellement, l’hypothèse principale est qu’il y aurait effectivement une situation de blocage à Tampa, en Floride, lors de la convention du parti républicain, en août prochain. (Cette situation d’“inconnaissance“ objective explique notamment que les rumeurs et les pressions continuent à aller bon train sur un “accord secret” Paul-Romney pour que le premier se désiste en faveur du second à l’issie de la campagne, en échange de l’une ou l’autre concession. Ron Paul dément régulièrement ces affirmations comme une manœuvre du Système, même si certains des dirigeants de sa campagne se laissent parfois aller à évoquer l’hypothèse, – ce qui pose un réel problème de cohésion, voire de loyauté, à l’intérieur du camp Ron Paul.)

…Si cette situation de blocage résiste aux manœuvres, on peut envisager l’hypothèse extrême d’un désordre complet, aboutissant à des positions antagonistes aussi puissantes l’une que l’autre, à une majorité-surprise de Paul, etc., et à un champ ouvert à l’affrontement. En effet, on peut tenir comme raisonnablement acquis deux facteurs extrêmes et totalement antagonistes : le refus de Ron Paul d’un compromis du genre évoqué, qui réduirait à rien son programme radical ; le refus sans aucune nuance de l’establishment du parti d’une nomination de Ron Paul comme candidat républicain. Tous ces cas, qui semblent ne pas être impensables du tout, conduisent à des probabilités de rupture et de scission à l’intérieur du parti, à la convention elle-même ; la violence de l’événement réduirait à rien les effets des manœuvres en coulisse. On en conclura sobrement que, dans ce contexte, la perspective des élections présidentielles US restent ouvertes à un désordre considérable, qui pourrait être dans le meilleur des cas un “désordre destructeur” des processus du Système, c’est-à-dire objectivement un “désordre créateur”.


Mis en ligne le 24 mars 2012 à 06H18