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1091Les républicains US, qui ne sont plus à une avanie près, envisagent-ils de changer complètement d’attitude vis-à-vis de l’Afghanistan? Voici que l’ancien sénateur Fred Thompson, toujours influent dans le parti républicain, annonce que “la guerre est perdue” – à cause d’Obama… Cela fait dire à Ben Smith, sur Politico.com le 19 novembre 2009 que les républicains pourraient ouvrir un nouveau champ tactique en s’opposant à tout nouvel envoi de forces en Afghanistan. (Voir aussi la présentation de Daniel Tencer, le 19 novembre 2009, sur RAW Story.)
• Thompson a notamment déclaré, lors de l’émission radiodiffusée qu’il dirige (The Fred Thompson Show – Thompson avait été acteiur, avant d’être sénateur): «It really doesn't matter how President Obama divides the Afghan baby, how he splits the difference between McChrystal and Biden. Because the war has been lost. I say this because of one sad and simple fact. The president does not have the will and determination to do what's necessary to win it. His heart's not in it, and never has been. The Taliban knows it. Al Qaeda knows it. Our allies know it. And the American people know it.
»Our enemies are now emboldened and our friends are discouraged. We cannot prevail if the American people are not willing to make the sacrifices necessary for an extended effort. The case has not been made to them to justify this effort. The case can only be made by the president. This president is unable or unwilling to make that case…»
• Le commentaire de Ben Smith: «Thompson's words seem to lay the groundwork for Republican opposition to further American engagement in Afghanistan, cast here as halfhearted.»
@PAYANT En douze heures, sur un site d’habitude à l’agitation modérée, Politico.com a rassemblé 180 commentaires presque exclusivement de démocrates absolument stupéfaits, outrés, scandalisés des remarques de l’ancien acteur et ex-sénateur. Il faut dire que Thompson n’y va pas de main morte, lui qui accusait le sénateur démocrate Reid de “trahison” en 2007 parce que Reid observait que la guerre en Afghanistan était perdue, et alors que l’essentiel de la responsabilité de cette guerre et de l’état où elle se trouve revient évidemment à l’action de l’administration Bush. Bien entendu, la principale différence, aujourd’hui, c’est que Thompson est dans l’opposition et que la guerre en Afghanistan est devenue impopulaire. Le calcul politicien est d’une grossièreté aveuglante. Si les républicains adoptent cette ligne de devenir “anti-guerre” à l’égard de l’Afghanistan, tout en faisant porter le chapeau à Obama, ils peuvent espérer des gains électoraux intéressants en novembre 2010.
Les démocrates sont outrés, avec toutes les raisons du monde, à part qu’eux-mêmes n’ont jamais osé lever la moindre objection sérieuse contre les guerres de l’équipe Bush-Cheney, dont évidemment l’Afghanistan, et qu’ils ont au contraire financé rubis sur l’ongle ces conflits, y compris et principalement lorsqu’ils eurent les moyens d’intervenir d’une façon décisive, à partir du moment où ils eurent la majorité à la Chambre et au Sénat en novembre 2006. Les républicains se montrent égaux à eux-mêmes, sans le moindre scrupule ni le moindre intérêt pour les véritables intérêts nationaux des USA, y compris du système américaniste lui-même, dont ils font pourtant partie. Avancer que la guerre est d'ores et déjà perdue parce qu'Obama a hésité trop longtemps à accepter la formule de McChrystal d’expédier 45.000 hommes de plus est grotesque, de toutes les façons qu’on examine le propos, y compris en examinant la proposition de McChrystal elle-même. L’état de la guerre en Afghanistan est telle qu’en faire dépendre son issue, qui serait d'ores et déjà scellée, d’une façon aussi radicale de la seule question de la proposition de McChrystal et de la rapidité d’Obama à se décider constitue une affirmation d'une complète ineptie, une polémique intérieure partisane pure et complètement nihiliste. Le propos de Thompson ne sert qu’à mesurer à quel niveau se fait aujourd’hui la politique des USA, y compris la sacro-sainte politique de sécurité nationale.
Il n’empêche que, d’un point de vue plus objectif, le propos est intéressant, s’il indique la possibilité qu’effectivement les républicains pourraient modifier leur attitude vis-à-vis du conflit afghan. Si les républicains décidaient effectivement de se prononcer contre l’envoi de renforts nouveaux en Afghanistan et entravaient de cette façon d’éventuelles décisions d’Obama, ou interféraient sur ces décisions selon l'argument qu'il est inutile de faire des efforts coûteux supplémentaires pour une guerre d'ores et déjà “perdue”, la situation de la crise afghane à Washington deviendrait brusquement très différente, avec des répercussions immédiates en Afghanistan, mais aussi des répercussions à l’OTAN et chez les alliés des USA qui participent au conflit, le tout faisant passer la crise à un niveau beaucoup plus grave d’intensité. Effectivement et d’un point de vue pratique, un changement d’attitude des républicains peut avoir des conséquences importantes dans la mesure où une fraction importante de parlementaires démocrates est également opposée à une extension de la guerre et que les crédits de la guerre dépendent du Congrès. Cela conduit à l’hypothèse d’un Congrès pouvant envisager de ne pas voter les crédits de la guerre. (Le Représentant démocrate Murtha avait déjà signalé, le 26 juin 2009, qu’on était passé très près d’un vote négatif de la Chambre sur les crédits de guerre, au printemps 2009.)
Ces déclarations de Thompson indiquent dans tous les cas qu’existe la possibilité que la crise afghane de Washington passe à un stade supérieur de désordre, cela en corrélation avec le début de la période pré-électorale pour les élections mid-term. Nous parlons de désordre parce que tous les acteurs de la crise se trouveraient pris dans des positions à contre-pied et contradictoires où leurs attitudes sur cette question extérieure (l’Afghanistan), et d’autres éventuellement, n’auraient plus aucun rapport avec ces crises extérieures mais avec la seule situation politique intérieure. Le désordre entrerait alors dans le stade ultime, où la politique extérieure serait complètement et exclusivement réduite aux aléas d’une situation intérieure de désordre complet. Il s’agirait d’un pas supplémentaire important dans le sens de la paralysie des USA. Les républicains constituent, dans ce cas, la force la plus capable de conduire les USA vers cet état de crise complète, qui se solderait par une paralysie complète de l’administration Obama et la transformation du Congrès en une immense force paralysante pour toute politique incohérente, aux effets imprévisibles. On constaterait alors, simplement, une étape de plus, peut-être l'étape ultime, dans l’effondrement des capacités du centre américaniste à assurer la direction des USA et de leur politique.
Mis en ligne le 20 novembre 2009 à 15H15
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