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58527 décembre 2022 (20H25) - Je sais bien que je vais faire une bien étrange démarche, un parallèle à première vue sans queue ni tête, qui paraîtrait absurde à certains, infâme à d’autres. Mais les uns et les autres, qu’avez-vous d’autre à me proposer que ces sortes d’audaces de l’esprit qui, seules, parviennent à donner une mesure de l’extraordinaire infamie dans laquelle nous sommes précipités ? Et ainsi, à nous faire esquisser la mesure que ce qu’il importe de faire, et dans quel sens, et sans s’attarder à des procès inutiles ?
Donc, voici deux nouvelles que je vous offre, toutes fraîches, “du jour” comme on dit “plat du jour” ; et deux pour le prix d’un, une aubaine ma parole...
• Voici d’abord la démarche de révolte du “père de tous les lanceurs d’alerte”, l’héroïque Daniel Ellsberg, l’homme des ‘Pentagon Papers’, qui dit : “vous voulez extrader Assange et le juger aux USA pour ‘trahison’ ? Alors, arrêtez-moi aussi et jugez-moi de même car j’ai reçu et détenu d’Assange des documents pour lesquels Assange est inculpé, avant même qu’il les ait diffusés”... “Et ainsi, moi inculpé, nous irons à la Cour Suprême car l’Espionnage Act au nom duquel est poursuivi Assange ‘est utilisé d’une façon scandaleusement inconstitutionnelle ’”. Ellsberg est le second à poser un tel acte. Si on suit sa logique, ce sont des millions de personnes à travers le monde, plus un certain nombre de journaux parmi lesquels les fleurons de la presseSystème (‘Guardian’, ‘New York Times’, ‘Le Monde’), qui seront inculpés...
L’affaire nous est contée par Joe Lauria, de ‘ConsortiumNews’. En voici quelques mots, qui pourraient bien me faire inculper moi aussi, en quatrième ou cinquième rideau.
« Le dénonciateur des ‘Pentagon Papers’, Daniel Ellsberg, a déclaré au ministère américain de la Justice et au président Joe Biden qu'il était tout aussi condamnable que l'éditeur de WikiLeaks, Julian Assange, pour avoir été en possession sans autorisation de documents classifiés avant leur publication par WikiLeaks et qu'il plaiderait “non coupable” parce que l’Espionage Act est inconstitutionnel.
» Ellsberg a révélé cette semaine à l'émission d'entretiens Hard Talk de la BBC qu'Assange lui avait donné les fichiers divulgués par l'analyste du renseignement de l'armée américaine Chelsea Manning pour qu'il les conserve comme sauvegarde avant leur publication par WikiLeaks en 2010.
» Assange a été accusé d'avoir violé la loi sur l'espionnage pour possession et diffusion d'informations classifiées et risque 175 ans de prison aux États-Unis s'il est extradé de la prison de Belmarsh à Londres. »
• La deuxième affaire vous paraîtra moins sérieuse, – avec raison, quoique..., – et surtout fleurant le bon vieux fascisme d’avant le fascisme, – il faut bien le dire et ainsi le dit-on, – mais je m’en fiche considérablement et, dirais-je, impérialement. Il s’agit d’une tentative de “coup d’État” héroïquement déjouée par les escadrons de pandores (SWAT en yankee) et autres argousins chargés du maintien d’un ordre dispensé par les terribles pieds-nickelés Scholz et Annalena Baerbock
Affaire de grandes dimensions qui, bien que fascistement maladorante, présentait l’originalité de prétendre remplacer l’actuelle régime de la perfection démocratique, non par un caporal à la moustache rasée mais par un Guillaume Ier postmoderne retiré de la naphtaline-1871.
« Des déploiements du groupements policiers d’intervention [SWAT], plus de 130 perquisitions et un total de 25 arrestations ont été effectués en Allemagne et dans plusieurs pays voisins dans le cadre de l'une des plus grandes opérations antiterroristes de l'histoire du pays, selon les médias allemands.
» Parmi les personnes arrêtées figurent d'anciens membres de l'armée et de la police, ainsi qu'un ressortissant russe. Elles sont soupçonnées de conspirer pour déposer le gouvernement actuel de Berlin par la force et rétablir un régime inspiré du Reich allemand de 1871.
» Les autorités ont révélé que quelque 3 000 policiers allemands ont pris d'assaut des appartements dans 11 régions du pays lors de multiples raids menés aux premières heures de mercredi.
» Les membres du groupe seraient des adeptes de l'idéologie QAnon [semi-trumpistes, semi-atltright], qui pensent que l’Allemagne est actuellement contrôlée par l'“État profond”.
» Après avoir commencé à préparer un coup d'État en novembre 2021, les suspects ont formé une “aile militaire” et ont activement tenté de recruter des militaires servant actuellement dans la Bundeswehr. »
On écarte quelques instants nos idéologies à deux balles, s’il vous plaît ! (Il faut dire... J’imagine les fulminations de mes amis trotskistes de ‘WSWS.org’ en parlant des nazzzis-trumpistes de ‘Qanon’ qui auraient mieux fait de choisir ‘Azov’, personne ne les aurait inquiétés, au contraire Annalena leur aurait fait la bise écologiste.) Il faut que vous acceptiez ce parallèle, malgré toutes les pitreries qu’on peut lui opposer, et que vous en tiriez les conséquences qu’il mérite. C’est une question de survie.
Ce qui est étonnant et remarquable dans ces deux tartarinades sans espoir, et pourtant expression d’un immense désarroi, ce sont les similitudes de deux projets si différents, si pleins de nostalgie à côté des élucubrations et des malédictions... D’un côté, la gauche progressiste américaine plus qu’américaniste, qui pensait pouvoir compter sur la restauration de la justice constitutionnelle des Pères Fondateurs ; de l’autre, la droite conservatrice ultra cultivant le souvenir glorieux du projet impérial allemand, vengeant l’infamie d’Iéna par la proclamation de Versailles. Inutile d’évoquer ce que sont tous ces souvenirs devenus, combien ils se sont gâtés, abîmés, dissolus dans l’infamie.
Et là, alors et au contraire, apparaît le point lumineux... Remarquez-vous combien ces deux calembredaines désignent un seul ennemi, l’Ennemi si vous voulez, le Système, ce qu’on nomme le ‘DeepState’ ? C’est lui qui mena Ellsberg devant les tribunaux (il s’en tira, lui), et c’est lui que les complotistes type-1871 mettent en accusation. C’est lui qui est en cause et qui devrait être, dans votre arsenal personnel, immédiatement mis en joue, – l’‘État profond’ planté dans l’abîme infernal des insondables abysses !
D’un côté, l’infamie des tortures et des illégalités barbares, qui traînent un Assange d’une prison l’autre, en jouant le jeu d’une légalité fardée comme une vieille pute usée à arpenter tous les trottoirs du simulacre, exerçant une immonde sarabande de supplices et de parodies d’injustice destinée à rendre fou. De l’autre, l’infamie d’un pays maquillée en une parodie de démocratie, cultivant la servilité et l’avilissement, toujours sur écoutes de la NSA, abritant en son sein les troupes d’occupation de l’Empire et fourguant ses vieux canons aux sémillants ‘Ukronazis’ des oligarques fricotant avec tous les Nuland de Washington D.C.
Oubliez donc toutes vos mélopées bienpensantes concernant un passé disparu et observez combien le désarroi et le désespoir du présent ne trouvent plus de refuge, plus de cette ultime espérance qui vous fait vivre malgré tout, que dans un appel dérisoire à des passés si différents. Ce n’est pas se moquer de leur dérision ni du passé qu’écrire ainsi, mais bien constater que seul les leçons du passé, celles qui contiennent encore un peu de gloire et de tenue à côté d’actes déplorables, sont capables d’esquisser les ultimes espérances possibles.
Croyez-moi, je suis aussi bien capable de reconnaître combien ces évocations du passé ne dissimulent pas combien ces temps anciens portaient de fautes, d’erreurs et de vilenies. Après tout, en tant que Français je ne peux avoir qu’un jugement attristé et sévère sur cette date de 1871 où mon pays subit une si horrible défaite ; et en tant qu’être humain, je ne peux oublier qu’un Ellsberg, avant de se racheter comme il le fit, avait participé à l’effort de guerre de cette infamie inimaginable que fut la guerre du Vietnam. J’ai tous ces souvenirs, mais je les écarte, je les mets sur le côté, à une place qui n’est pas celle de l’oubli mais celle de la mesure des infamies, quelque chose d’encore humain malgré tout.
Rien de tout cela ne peut se comparer à la barbarie totalitaire qui nous écrase tous aujourd’hui, et tout cela passe au second plan, les “leçons du passé” comme le reste, pour constater que ces passés-là permettaient encore l’espérance, comparés à notre présent qui n’est qu’entropie totalitaire, versement dans le Vide du Rien pour n’obtenir que les poussières d’un Rien illustrant le Vide cosmique d’une Chute sans fin et sans fond.
C’est pourquoi, malgré tout et malgré tant de terribles “leçons du passé”, je fais ce constat : seul le passé, aujourd’hui, est capable de nourrir la révolte qui est notre dernier souffle de vie possible. C’est pourquoi j’inscris ton nom sur les souvenirs de ma nostalgie : Résistance. Seuls mon passé et ma nostalgie sont capables de porter et de justifier ton nom : Résistance.
Résistance?... C’est là-dessus seulement que peut se concevoir un avenir qui soit également un destin : en écrasant leur présent comme une Bête Immonde au ventre absolument Infécond, accouchant de monstres sans vie, sans âmes et sans consciences.
Ainsi ne soient-ils pas...