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56786 septembre 2019 – Il est intéressant de rapprocher plusieurs événements disons des dernières 48 heures, et bien entendu des événements de communication puisque c’est cette force qui aujourd’hui oriente et dynamise les relations internationales. Ces événements sont chacun très inhabituels et très originaux, et ils n’ont pas nécessairement de liens politiques : chacun pourrait être traité et analysé en lui-même, éventuellement dénoncé selon le cortège habituel de FakeNews et de FalseFlags, sans autre référence, dans le but de retrouver une “réalité” qui se déclinerait de toutes les façons en plusieurs versions aussi “satisfaisantes” les unes que les autres, aussi bien du côté du Système que du côté des nombreuses étiquettes “anti-systèmes”. (Pour ces derniers, aucun rapport avec notre antiSystème.) De ce point de vue, sans aucun doute “règne la quantité”…
Nous choisissons une autre approche qui est de les rassembler pour tenter de leur trouver une unité qui les rassemble.
• Il y a d’abord la stimulante polémique sur les tentatives d’“achat” du département d’Etat des Etats-Unis, soit tentative d’“achat” d’un capitaine de pétrolier iranien, soit peut-être bien tentative d’“achat” d’un ministre iranien des affaires étrangères. Quelques remarques détaillées à ce propos :
« Venant confirmer des informations du Financial Times, le département d'Etat américain a confié avoir tenté d'offrir plusieurs millions de dollars au capitaine indien de l'Adrian Darya 1 afin de saisir le pétrolier iranien. En vain.
» Les États-Unis ont offert directement plusieurs millions de dollars au capitaine d'un navire iranien accusé de transporter du pétrole vers la Syrie pour tenter de saisir le tanker, a confirmé le département d'Etat américain le 4 septembre à l'AFP. Cette méthode peu orthodoxe a été dévoilée par le quotidien britannique Financial Times : l'émissaire de la diplomatie américaine pour l'Iran, Brian Hook, a personnellement envoyé des emails au capitaine indien du Adrian Darya 1 (auparavant nommé Grace 1) pour lui proposer l'argent.
» “Je suis Brian Hook [...] je travaille pour le secrétaire d'Etat Mike Pompeo en tant que représentant des États-Unis pour l'Iran”, a-t-il écrit à Akhilesh Kumar le 26 août. “Je suis porteur de bonnes nouvelles”, a-t-il ajouté. En l'occurrence, une récompense s'il acceptait d'acheminer le navire, relâché onze jours plus tôt par Gibraltar qui l'avait un temps saisi, vers un pays qui pourrait l'arraisonner pour le compte de Washington.
» Quatre jours plus tard, visiblement sans réponse positive, le Trésor américain sanctionnait le capitaine. “Ces détails sont exacts”, a confié à l'AFP un responsable du département d'Etat. “Nous sommes entrés en contact avec plusieurs capitaines de navires et avec des compagnies de transport maritime pour les sensibiliser aux conséquences de tout soutien à une organisation terroriste étrangère”, a-t-il ajouté, sous couvert d'anonymat.
» Washington estime que le pétrole était destiné à la Syrie, et que sa vente, interdite par les Etats-Unis, devait servir à financer la Force al-Qods, branche chargée des opérations extérieurs du corps d'élite de l'armée iranienne, les Gardiens de la révolution, et inscrite sur la liste noire américaine des organisations terroristes depuis le mois d'avril dernier.
» Alors que la méthode pourrait être critiquée, Brian Hook a opportunément annoncé le 4 septembre que le département d'Etat offrirait dorénavant de manière officielle des récompenses pouvant atteindre 15 millions de dollars à toute personne qui fournirait des informations susceptibles d'aider à viser “les opérations financières des Gardiens de la révolution et de leur Force al-Qods”. “Cela inclut des informations qui permettent de viser des navires comme l'Adrian Darya”, a-t-il insisté.
» Selon lui, le navire “semble se diriger” vers la Syrie alors que le gouvernement iranien s'était engagé – pour obtenir sa libération par les autorités de Gibraltar – à ne pas livrer son pétrole à Damas. “Ayant échoué avec la piraterie, les Etats-Unis s'en remettent carrément au chantage : livrez-nous le pétrole iranien en échange de plusieurs millions de dollars ou subissez des sanctions”, a réagi sur Twitter le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif. “Cela ressemble fortement à l'invitation que j'avais reçue il y a quelques semaines à me rendre dans le Bureau Ovale”, a-t-il ajouté. Le ministre iranien affirme avoir refusé une invitation à la Maison Blanche avant finalement d’être sanctionné personnellement par Washington.
» La porte-parole de la diplomatie américaine, Morgan Ortagus, lui a répondu en calquant son tweet. “Ayant échoué avec la piraterie, l'Iran s'en remet carrément au chantage: donnez-nous 15 milliards de dollars ou nous allons développer nos activités nucléaires”, a-t-elle écrit, en référence à la ligne de crédit que Téhéran négocie actuellement avec les Européens pour contourner les sanctions américaines. »
On ne recherchera pas nécessairement les responsabilités initiales de cet épisode puisqu’on les connaît depuis l’origine : il s’agit des États-Unis, point final. Il reste que le monde assiste sans commentaire particulier à cette évolution étrange de la crise iranienne, qui représente aujourd’hui le plus grand danger d’une guerre pouvant monter à un niveau conventionnel de grande envergure avec certains des acteurs possédant du nucléaire, qui ne débouche sur aucune issue négociée visible aujourd’hui, qui est marquée par une volonté arrêtée de tenter de provoquer un conflit selon la ligne activiste Bolton/Pompeo-Netanyahou,– et voilà que cette crise se joue donc au niveau de l’emploi affiché, et même satisfait de méthodes du crime organisé : corruption à ciel ouvert, chantage, etc. ; la seule différence est certes que Pompeo a beaucoup moins d’allure qu’un Brando ou un Pacino en Parrain.
…On ignore même si le commentaire ambigu du ministre iranien (« Cela ressemble fortement à l'invitation que j'avais reçue il y a quelques semaines à me rendre dans le Bureau Ovale ») concerne comme il est écrit le refus d’une simple séance de propagande, ou bien l’hypothèse qu’on ait voulu l’“acheter” comme on a voulu “acheter” le capitaine du pétrolier. Rand Paul, qui fut l’intermédiaire entre Trump et Zarif, n’est pourtant pas coutumier des manœuvres de type Bolton/Pompeo, lui qui voulut s’opposer à Bolton lorsqu’il fut question d’en faire un secrétaire d’État… Là aussi, confusion, désordre, insaisissabilité, déstructuration des relations politiques et psychologiques.
… Par ailleurs, et pour compléter ce dossier, on peut y ajouter des confidences de sources européennes selon lesquelles dans les diverses pressions exercées par les USA sur leur “allié” britannique pour empêcher qu’on permette au pétrolier de quitter Gibraltar, – ce qui s’est traduit par un étonnant bras d’honneur britannique, – on trouve des tentatives d’“achat” par les USA de l’un ou l’autre magistrat (britannique) chargé du dossier. La somme reste toujours la même, qui semble effectivement le “tarif” officiel du département d’État, autant pour un capitaine de pétrolier que pour un magistrat britannique, que pour un général vénézuélien, que pour tel ou tel philosophe hongkongais : $15 millions…
• Passons à un tout autre théâtre, celui de Vladivostok où avait lieu un de ces grands séminaires dont les Russes sont désormais très friands. Cette fois, il s’agit de la réunion annuelle, à destination de l’Asie (Eastern Economic Forum). Poutine n’a pas manqué de marquer cette rencontre d’une référence à son ami, le président français Emmanuel M., selon la formule ironique peut-être involontaire de Spoutnik-français d'un Poutine “emboîtant le pas de son “ami” :
« Emboîtant le pas à Emmanuel Macron, Vladimir Poutine a estimé que l’Occident perdait son leadership dans le monde[lors de son intervention au] Forum économique oriental de Vladivostok. “Je pense que tout le monde se rend compte, et le Président Macron l’a récemment dit en public, que le leadership de l’Occident touche à sa fin”, a déclaré Vladimir Poutine.
» “Les règles qui existaient jusqu’ici plaçaient les pays occidentaux dans une situation exclusive en leur accordant pour ainsi dire une énorme rente en déterminant leur leadership. Il ne restait aux autres pays qu’à suivre cette voie”, a déclaré le Président russe. Mais “quand les concurrents ont pris de la force”, ils ”ont commencé à parler le langage des guerres commerciales et des sanctions” »
Mais certainement, le plus intéressant du point de vue du caractère étrange de l’évolution des événements, c’est la révélation faite par Poutine qu’il avait offert aux USA de leur vendre des missiles hypersoniques pour qu’ils (les USA) n’aient pas eux-mêmes à développer leurs propres missiles. Poutine a employé un ton très détendu, presque ironique sinon goguenard, qui a fait naître chez certains l’idée que peut-être il plaisantait :
« Bon, j’ai dit à Donald, si vous le voulez, on vous les vend [des nouvelles armes russes, y compris les systèmes hypersoniques]. Comme cela, on pourrait immédiatement tout rééquilibrer. Cependant, ils disent qu’ils en produiront bientôt eux-mêmes. Peut-être qu’ils en produiront bientôt. Mais à quoi bon dépenser de l’argent, alors que nous en avons déjà dépensé.
» Poutine a fait également savoir que Moscou était prêt à négocier avec Washington au sujet de la prise en compte de l’arme hypersonique russe dans le cadre des pourparlers sur le traité New Start de réduction des armes stratégiques. “Nous pouvons discuter de savoir comment tenir compte[des systèmes hypersoniques], en fonction du nombre de porteurs et d’ogives. C’est une question spéciale, en tout cas la Russie est prête à ce dialogue, à cette discussion. Néanmoins, nous n’avons reçu pour l’instant aucune réponse claire de la part des Américains”. »
Les réactions US ont été variées, comme on les attendait, c’est-à-dire célébrant la puissance, l’avance, la dynamique des technologies et de la puissance (américaniste, pas russe) ; dans le style light (“Mais non, les Russes sont distancés dans ces technologies, nous n’avons pas besoin d’eux”), le style Fast & Furious(“Oh Jésus, on a été juste un peu pris de court, on va mettre le paquet et dans 6 mois-un an nous les aurons dépassés et laissés dans la poussière”), le style ingénu (“mais qu’est-ce que c’est que ces trucs hypersoniques, ils ne servent à rien”) ou bon-enfant (“Sacré Vlad’, toujours le mot pour rire”). On agite le tout en saupoudrant, pour clore le débat, avec quelques tweets du Grand Homme sur l’avance technologique des USA (Business Insider : « On ne sait pas exactement à quelle technologie Trump faisait référence, mais les États-Unis ont déclaré qu'ils travaillaient sur plusieurs nouveaux projets en examinant de plus près les menaces et les défis de la concurrence des grandes puissances. »)
On ne sait pas non plus ce que Poutine a derrière la tête, sinon l’arrangement qu’il espère désespérément mais désormais avec un sourire narquois de la part des “partenaires” du bord du Potomac, mais la somme de mensonges et de n’importe quoi balancée par les experts mis en présence de son offre a de quoi laisser sans voix. Les USA voyagent en mode “D.C.-la-folle”, avec une extraordinaire indifférence pour la réalité désintégrée, et une haine affreuse pour la vérité.
Nous choisissons de traiter ensemble ces événements, exemples parmi d’autres, parce qu’ils sont extraordinairement caractéristiques du désordre, de l’absence totale de logique et de responsabilité, du désintérêt complet pour le moindre crédit qu’on peut accorder à tout ce qui est dit, annoncé, proclamé. Même les mensonges, qui sont en nombre considérable, manque du moindre soin dans la cohérence, dans la manufacture, etc. dans les domaines où on a l’habitude de les classer. On voit même chez les plus réputés sérieux (Poutine et son offre sur l’armement, annoncée sur un ton badin proche de la plaisanterie) une certaine dérision qui classe les échanges internationaux du plus haut niveau sur les problèmes les plus graves, dans le rayon de l’incapacité d’avoir un dialogue normal, – et Dieu sait si l’on est conduit à le comprendre et à partager ses sarcasmes de toutes les façons.
En d’autres mots, si on veut tenter de bien les comprendre, nous dirions que ces événements échappent complètement à la maîtrise humaine, même s’ils sont développés à partir d’initiatives humaines jugées et présentées comme extrêmement importantes, - et qui le seraient en d’autres circonstances, – et qui s’avèrent le plus souvent irresponsables, ou bien extraites de leur contexte et sans appréciation de leurs effets, ou bien expédiées pour la forme sans aucune espérance de rencontrer quelque écho. Toujours “en d’autres mots”, nous dirions encore que ces événements se constituent eux-mêmes dans l’importance et dans la signification qu’ils seraient amenés à prendre, dans le courant général du système de la communication.
Littéralement, ils (les événements) choisissent dans le fourmillement extraordinaire de la communication, dans le “règne de la quantité” dont on voit par ailleurs qu’il est le principal instigateur du système de la communication, les références et les influences qui leur conviennent pour “se constituer eux-mêmes”. Nous voulons dire par là que si l’une ou l’autre de ces péripéties aboutit à quelque chose de sérieux, positivement ou négativement qu’importe, les humains, y compris ceux qui ont le plus de capacités et ont déjà montré leur savoir-faire, n’y auront joué aucun rôle sinon dans l’accessoire des choses.
Les seules choses (“événements” ?) que les humains semblent capables d’organiser semblent complètement marqués par une sorte de folie, de déchaînement de la psychologie (sinon “de la Matière”), comme par exemple lorsqu’on mentionne deux dynamiques actuellement en cours du fait des USA, – entre la folie guerrière et nucléaire de l’équipe Bolton-Pompeo et la folie sociétale de l’ensemble américaniste (peut-on parler de “société américaine” ?), bigarrée et emportée comme l’hôpital psychiatrique en folie de Vol au-dessus d’un nid de coucous.
Cela justifie évidemment entièrement la formule que nous avons déjà offerte à une autre occasion : nous n’avons plus besoin d’un homme providentiel, nous avons besoin d’un événement providentiel !
« … Alors voici : si les choses continuent comme la com’ nous en indiquent le chemin, avec la porte de l’hôpital psychiatrique d’outre-Atlantique qui n’est même pas fermée à clef et qui est même ouverte à tous les vents, – ce sera un événement providentiel, même si Macron n’est pas notre homme providentiel !
»… Car il nous faut un événement providentiel, au risque le plus terrible qu’on puisse imaginer, car il faut que les forces puissantes qui nous accompagnent tranchent enfin le nœud gordien. Car il nous faut ceci : “Levez-vous, orages désirés !” »
Ces séries d’événement décrites, farfelues, grossières, incroyables d’impudences, goguenardes, qui ne soulèvent pas la moindre question dans tous les journaux de référence de la presseSystème qui sont bien assez occupés à réviser à longueur de colonnes leur “Petit-Livre-Rouge” du Politiquement-Correct (PC) avec ajout des dernières révélations de notre-Prophète Lilian Thuram, tout cela n’a guère d’importance en soi. Cette situation permet même aux beaux esprits, y compris et surtout les anti-systèmes, de lâcher leur fameux “Ce n’est que de la com’ !”. Il faut juste savoir que ce n’est certainement pas de sapiens-sapiens que viendra la lumière, y compris et particulièrement celle des « Levez-vous, orages désirés ! ». La collapsologie, fille catastrophique et même pas adultérine de la crisologie, n'est une science des choses du monde que lorsque l’on voit “les choses derrière les choses” comme dit le poète de Quai des brumes ; une science qui doit apprendre absolument et impérativement à se détacher des diktats des sciences de la modernité, les « sciences profanes » de Guénon, – lequel poursuit dans le livre déjà cité du Règne de la Quantité :
« Si nos contemporains, dans leur ensemble, pouvaient voir ce qui les dirige et vers quoi ils tendent réellement, le monde moderne cesserait aussitôt d’exister comme tel, et le “redressement” auquel nous avons fait souvent allusion ne pourrait manquer de s’opérer par là même. » Manifestement, “nos contemporains” ne peuvent pas voir, qui jouent pour la plupart d’entre eux aux gangsters et aux faiseurs de simulacres de bazar. La marche du monde prend le monde en charge et c’est d’elle qu’il faut attendre le providentiel.
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