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18 octobre 2004 — Faisons une hypothèse : si, demain, on faisait passer un examen psychiatrique à GW et que les cinq ou dix psychiatres, psychanalystes, neurologues, etc, rassemblés pour l’occasion, déclaraient “fou” le 43e président des Etats-Unis, que se passerait-il ? Ce formidable événement provoquerait certes une tempête politique mais il serait accompagné, in petto comme l’on dit, d’un formidable soupir de soulagement (d’autant que, jurisprudence établie, certains songeraient à y faire passer Tony Blair). Autour de 80% des peuples du monde entier et presque autant des dirigeants du monde entier (tout cela, hors-USA), quasiment 50% des Américains, et une proportion en formidable augmentation ces dernières semaines de l’establishment américain, se trouveraient radicalement rassurés sur l’avenir du monde.
Il se publie ces derniers jours, devant des sondages électoraux qui ne parviennent pas à nous annoncer la grande nouvelle (GW en chute libre, sûrement battu par Kerry le 2 novembre), une extraordinaire évolution radicale dans ce sens. Désormais, les articles mettent en cause la santé mentale du Président. On peut le lire en filigrane dans le très long article de Ron Suskind, dans le New York Times du 17 octobre. Les partisans de GW Bush eux-mêmes enquêtent sur ce phénomène de “la haine de Bush”, comme Andrew Ferguson, du Weekly Standard.
Le plus frappant dans ce sens est évidemment l’article de Andrew Stephan, dans le très sérieux Observer (du 17 octobre) : « Has Bush lost his reason? », avec ce sous-titre accrocheur comme ultime argument pour ne pas voter GW : « The President’s apparent mental fragility should give US voters pause for thought at the ballot box. » Cet article est bien indicatif de l’exaspération où se trouvent aujourd’hui les très nombreux opposants à GW Bush, aux USA et dans le reste du monde.
« It is thus hard to avoid the conclusion that Bush's cognitive functioning is not, for some reason, what it once was. I am not qualified to say why this is so. It would not be surprising if he was under enormous stress, particularly after the 9/11 atrocities in 2001, and I gather this could explain much, if not everything.
» But I have heard wild speculation in Washington that he is suffering from a neurological disorder, or that the years of alcoholism might finally be taking their toll on his brain.
» I think it unlikely that Bush was wearing a bug so that he could be fed lines in at least one of the debates, but it is indicative of how his capabilities are regarded these days that the suggestion that he needed advice is given credence, as well as passing mentions in the powerful Washington Post and New York Times.
» It does not help that Bush now lives in a positively Nixonian cocoon. He does not read newspapers; he sees television only to watch football; he makes election speeches exclusively at ticket-only events, and his courtiers consciously avoid giving him bad news. When he met John Kerry for their first bout on the debating platform, it was almost a new experience for the President to hear the voice of dissent.
» A senior Republican, experienced and wise in the ways of Washington, told me last Friday that he does not necessarily accept that Bush is unstable, but what is clear, he added, is that he is now manifestly unfit to be President.
» This, too, is a view that is widely felt, but seldom articulated and then only in private, within the Republican as well as Democratic establishments in Washington. Either way, the choice voters make on Tuesday fortnight should be obvious: whether he is unstable or merely unfit to be President - and I would argue that they amount to much the same - he should speedily be turned out of office. »
Il est bien entendu impossible de se prononcer sur le fond (fou ou pas fou ?), et d’ailleurs on peut s’interroger sur l’utilité de cette démarche éventuelle. On peut par contre faire certaines remarques à propos de cette campagne présidentielle en tous points exceptionnelle, lorsqu’on atteint ce point d’interrogation (GW est-il fou ?) qui n’est pas loin d’être le plus exceptionnel de tous.
• La polarisation, aux USA et aussi dans le reste du monde, a atteint une intensité inouïe. Du côté de GW Bush et de ses partisans, on le savait, puisque toute la politique étrangère de l’administration est fondée depuis le 11 septembre sur le thème du Bien et du Mal. Mais l’opposition a atteint, elle aussi, une intensité et un radicalisme similaires, jusqu’à cette extrémité extraordinaire de mettre en cause la santé mentale du Président. On dira qu’un extrémisme répond à l’autre mais on admettra alors que ces deux extrémismes définissent un état général plutôt qu’ils ne décrivent deux réalités situées dans l’hystérie des uns et dans la pathologie des autres. Si ce n’est une crise générale, alors qu’est-ce que c’est qu’une crise.
• On peut alors s’interroger sur ce que risque de devenir l’Amérique, — et, par conséquent, le reste du monde d’une façon ou l’autre — après cette élection du 2 novembre, notamment dans cette hypothèse, aujourd’hui encore complètement acceptable, d’un GW Bush réélu. Comment imaginer des rapports normaux, à l’intérieur des USA comme entre les USA et le reste du monde, avec un président réélu, largement soupçonné d’être un dément ou, dans tous les cas, un instable proche d’être irresponsable ? On se trouverait dans une situation de polarisation et une crise de confiance de l’intensité de celle du Watergate, mais non pas avec le Watergate comme paroxysme (les 6 derniers mois de la présidence Nixon), mais avec l’atmosphère du Watergate devenu le courant normal des relations politiques. Pour autant, l’élection de Kerry ne donnerait pas une situation bien meilleure, car on verrait alors les partisans de GW Bush adopter à leur tour cette position d’opposition extrême et hystérique.