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378A la fin de la semaine dernière, le secrétaire à la défense US Robert Gates faisait visite à Camp Lejeune, une base des Marines. Il y eut un discours, puis un temps de questions-réponses.
Philip Erving, de DoDBuzz.com, a noté, ce 13 mai 2011, cette question et la réponse qui va avec, de la transcription officielle.
Question: «Good morning, sir. Corporal Edwards from 2nd Reconnaissance Battalion. My question is in regards to the conflict in Libya. I read article in the U.K. newspaper the Telegraph a little over a month ago, and it was an interview with one of the rebel leaders. He explicitly said that some of his fighters had fought with the insurgency in Iraq and Afghanistan. I found this to be somewhat disheartening, since we as a country were supporting the rebels militarily and through public opinion. Who are these rebels in Libya? And how do we know that they won’t be like the mujahedeen in Afghanistan, where we’re supporting them today and then getting blown up by them tomorrow?»
Gates: «Well, I think that the honest answer to your question is that with the exception of some of the people at the top of the opposition or the rebels in Libya, we don’t know who they are. And I think this is one of the reasons why there has been such reluctance, at least on our part, to provide any kind of lethal assistance to the opposition.
»Clearly, after the way that Gadhafi has treated his own people, as the president has said, he needs to go. But I think most of us are pretty cautious when it comes to who — who the opposition is. The truth is, my impression is that it’s extraordinarily diverse. We deal with a handful of people in Benghazi, but we forget about those who led the uprisings in cities all over Libya when this whole thing started. And who are they? And are they genuinely anti-Gadhafi? Are they tribal representatives? Are they — kind of who are they? And we have no idea who those people are, but they were the ones that led the major uprisings in Tripoli and a variety of the other cities.
»There are tribal elements to this, and I don’t think we know very much about the tribes that are involved and where their loyalties lie between Gadhafi and between the opposition and so on. So I — and we have seen reports that there are some extremists that are fighting for the opposition. We see information and we hear from the opposition that they’re trying to isolate those people and get them out of the movement because they realize the risks associated with that in terms of international support. But the truth is, I think, frankly, one of the reasons that we have been as cautious as we have in terms of providing other than humanitarian support and some non-lethal assistance to the opposition is because of what we don’t know. And I think we have to keep a wary eye on it in terms of how this thing progresses.»
En une courte phrase : “Non, nous ne savons pas, pour l’essentiel, qui se trouve dans le CNT, qui regroupe la direction des rebelles anti-Kadhafi en Libye.” Là-dessus, Erving, le rédacteur de DoDBuzz.com entonne l’air du “on ne nous la fait pas”. Il estime que les USA, avec leurs capacités de renseignement uniques, notamment exposées lors de l’opération Geronimo, d’autre part l’OTAN, avec ses vertus nombreuses, que tout ce beau monde ne peut pas ne pas savoir aujourd’hui qui sont les gens de CNT. Erving, finaud, en déduit qu’il y a manœuvre habile de Washington : Washington dit qu’il ne connaît pas le Who’s Who du CNT alors qu’il le connaît, et sachant effectivement qu’on y trouve des individus suspects ; alors, Washington laisse faire, accueillant le CNT à Washington mais ne le reconnaissant pas comme représentant légal de la Libye, attendant l’une ou l’autre issue, de façon à faire tout avantage pour lui, selon que le CNT l’emporte et qu’il sera alors facile de marquer les individus suspects, selon que Kadhafi l’emporte et qu’alors le problème sera réglé on imagine comment…
«Here’s a theory: American officials know exactly who the rebels are, which is the actual reason they want to provide only “non-lethal aid.” From a cold-eyed, Eisenhower administration perspective, it could be a good compromise: If the rebels overthrow Libyan strongman Muammar Qaddafi, there’s a bad guy taken care of; the international community can swoop in and make sure the terrorist elements in the rebellion are put in check. If Qaddafi crushes a rebellion riven with al Qaeda fighters or other bad eggs, that takes care of them. Either outcome thins out the world rogue’s gallery.»
Cette théorie a tout le charme des théories du “complot” courant, washingtonien cette fois ; le charme, dans ce que rien ne peut être démontré, ni dans un sens ni dans l’autre, et dans ce que, au contraire, si Washington était exactement dans la situation que décrit Gates, les choses seraient exactement similaires. Pour nous, l’opération Geronimo n’est pas la preuve du génie du renseignement US, mais celle que le génie du renseignement US est bien tardif, et si tardif qu’il est peut être bien manipulé par d’autres. (Théorie pour théorie, n’est-ce pas…) Pour nous encore, et d’après les échos venus de l’OTAN et de l’UE, où flottent, entrecroisés, des échos des capitales impliquées dans l’affaire libyenne, la méconnaissance du Who’s Who du CNT est totale et complète, si l’on veut parler de certitudes ; la question de la présence possible de suspects identifiables comme proches du terrorisme ou d’al Qaïda spécifiquement, reste complètement ouverte et sans réponse. Chacun a ses sources, ses informations, souvent contradictoires, et certains n’ont rien du tout. En ce sens, on pourrait dire que, pour une fois, existe une unanimité transatlantique et partagée, face à une aventure dont le sens, l’ambition et les modalités sont l’objet d’une enquête de plus en plus angoissée de la part de ceux qui l’ont lancée.
Dans tous les cas, et pour en finir sur la politique US à nouveau, il semble bien que l’administration Obama suive la même attitude dubitative que celle que montre implicitement Gates (lequel ne fait que poursuivre l’attitude qu’il avait avant le lancement de l’opération en Libye, lorsqu’il s’opposait de toutes ses forces à l’engagement US). Le fait signalée plus haut, d’une représentation du CNT à Washington mais du refus de donner à l’organisation le statut de représentante légale de la Libye, semble bien montrer que l’analyse de Robert Gates est partagée.
Mis en ligne le 16 mai 2011 à 12H28