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319On se demande si on pourrait trouver une meilleure chronologie et une meilleure absence de coordination à l’intérieur du gouvernement US, – remarque faite au premier ou un second degré, c’est selon. La rencontre entre le Premier ministre pakistanais, en visite à Washington, et GW Bush a été précédée de quelques heures par une nouvelle attaque US contre un village pakistanais, avec (peut-être) l’habituelle bavure. Ou bien non, il y a une autre façon qu’insister sur la possible bavure, pour présenter la chose: cette attaque a-t-elle été volontairement lancée avant la rencontre pour démontrer au Premier ministre pakistanais l’efficacité des interventions US en coordination ou pas avec le Pakistan, et par conséquent qu'il n'a qu'à se soumettre à ce mode d'action?
• L’attaque a eu lieu le 27 ou le 28 juillet. Une dépêche AFP/Spacewar.com en rend compte le 28 juillet. L’attaque était lancée contre Midhat Mursi al-Sayid Omar, alias Abou Khabab al-Masri, un Egyptien identifié par les services US comme un expert d’Al Qaïda en armements chimiques et biologiques, dont la tête était mise à prix pour $5 millions, qui avait déjà été “tué” en 2006 avant qu’on ne revienne sur l’information. Cette fois, au contraire, Omar aurait été réellement tué, – à moins que cela ne soit pas si sûr, on verra. L’opération aurait été effectuée à partir de renseignements qui semblent avoir été partagées entre Américains et Pakistanais. En réalité, avouons-le, les informations disponibles laissent une impression de grande confusion. Les officiels pakistanais attendent ce qu’ils nomment des “informations authentiques” (nouvelle catégorie journalistique? Nouvel objet jusqu'ici non identifié de la communication et de l'ère géopolitique?); ils attendent cela d’une zone pakistanaise quasiment hors de contrôle, où s'est passée l'attaque.
«Al-Qaeda's top expert on chemical and biological weapons is believed to have been killed Monday in a suspected US missile strike in Pakistan's lawless tribal areas, security officials said. (…)
«Officials earlier said that three Arab militants and three Pakistani boys were killed when missiles fired by a suspected US drone hit a house attached to a mosque in the South Waziristan tribal district. “We believe he was killed in this strike,” a senior intelligence official based in the northwestern city of Peshawar told AFP on condition of anonymity. “It was his hideout and information that has been shared with us says he was targeted in this strike.”
»There was no immediate confirmation from the US-led coalition in Afghanistan or from Washington.
»Umar's wife and children were believed to have been injured in the attack, Pakistani officials said. Residents said the victims of the missile strike were hastily buried in the hours after the attack.»
• Donc, quelques heures après l’attaque, le Premier ministre pakistanais Yousouf Raza Gilani rencontrait Bush, à Washington où il faisait visite. On s’est dit toujours bons alliés, mais sans enthousiasme excessif. Au contraire, l’article du Times de Londres d’aujourd’hui, qui rapporte la rencontre, parle de la tension américano-pakistanaise “apparue au grand jour” à cette occasion. Après sa rencontre avec Bush, Gilani a parlé avec CNN dans un sens qui constitue un avertissement pour les USA. Interrogé à l’occasion de cette attaque, Gilani a dit que cette sorte d’attaque ne devait pas être faite unilatéralement (par les USA), que si l’attaque s’avérait effectivement être une initiative US elle constituerait une violation de la souveraineté du Pakistan. Puis ce commentaire sur l'état bondissant de la psychologie US:
«Basically Americans are a little impatient. Therefore in the future I think we'll have more co-operation on the intelligence side and we'll do the job ourselves.»
On comprendra par conséquent qu'il est difficile de trancher quant aux circonstances de cette opération US d’incursion dans le Pakistan par rapport à la rencontre Gilani-Bush. Etait-elle volontaire ou pas? Quels sont ses résultats opérationnels? Par contre, les résultats politiques ne font pas de doute: un regain des tensions entre les deux pays après une visite qui était censée apaiser les tensions entre les deux pays. L’épisode donne un aperçu, d’une part de la tendance générale des relations entre les USA et le Pakistan, essentiellement à cause des méthodes habituelles des USA (“impatience”, c’est-à-dire brutalité, unilatéralisme, indifférence complète à la souveraineté des autres, etc.) ; d’autre part, des difficultés supplémentaires qui attendent ces relations lorsque l’accent aura été massivement mis sur la guerre en Afghanistan, avec projets d’intervention massive au Pakistan, tout cela, semble-t-il, avec le futur président (sûrement avec Obama, très probablement avec McCain).
Mis en ligne le 29 juillet 2008 à 11H27