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189225 août 2013 – Il nous paraît bien entendu vain et accessoire de débattre et d’argumenter autour de la très récente “attaque chimique” en Syrie, pour ce qu’elle vaut et pour toutes les manœuvres diverses qui l’accompagnent. On connaît tous les tenants et aboutissants dans le domaine de l’inévitable constat des complaisances, des suspicions, des arrangements, des montages, etc., qui caractérisent ce conflit depuis son origine, et particulièrement dans le chef de la “coalition” formée autour du bloc BAO et à son initiative. Ce qui importe aujourd’hui, c’est de mettre en évidence le sentiment que nous avons pour cet instant du temps de la crise, – qui sera rencontré par les événements à venir ou pas, peu importe pour le propos à ce point ; un sentiment qui, à notre sens, est bien plus que sa fugacité éventuelle, parce qu’il marque une latence fondamentale, essentiellement dans le chef des directions politiques des outils-Système que constituent aujourd’hui les pays du bloc BAO.
Ce “sentiment que nous avons pour cet instant du temps de la crise” est double. Nous le définirions d’une part comme une perception d’inéluctable pour la description objective de la marche des événements immédiats tels qu’ils semblent s’orienter (l’attaque du bloc BAO, courroie de transmission générale du Système, avec son bras armé US en pointe) ; et, d’autre part, comme un “besoin de paroxysme” pour la tentative de décrire et de comprendre l’entraînement des psychologies des principaux figurants et “idiots utiles” de la circonstance, dito les dirigeants du bloc BAO qui déploient au plus fort de toute leur voilure disponible leur démarche d’aveuglement et d’irresponsabilité exécutée comme un des produits de la pensée automatisée suscitée par le Système. (Il s’agit en général de bouffons figurant des dirigeants, mais qui prennent ici une dimension objectivement tragique au regard de ce qui est en jeu, sans qu’eux-mêmes en aient le moindre sentiment puisqu’ils sont totalement étrangers au domaine de la tragédie ; tout juste peut-on parler à leur égard d’affectivité comme inspiratrice de ce qui leur sert de pensée politique. Dans le cadre de cette observation sans complaisance excessive, on dira que les pays du bloc BAO sont regroupés en une horde imposteuse et surtout constamment pressée par une sorte de panique structurelle devant le vide que produit sa politique.)
Les dernières nouvelles, alors que bien entendu tout reste à examiner, à évaluer, à démontrer de ce qui devrait être l’essentiel de la démarche (la réalité, les conditions et les responsabilités de l’“attaque chimique”), laissent percer effectivement l’impression qu’une attaque extérieure, organisée autour des capacités US, semble justement “inéluctable”, comme s’il existait une “logique de l’inéluctabilité” qui serait supérieure. (L’inéluctabilité de la conséquence [l’attaque extérieure] de l’événement devançant la vérité de l’événement [constat circonstancié de l’attaque chimique] censé produire l’inéluctable, habituel sophisme d’inversion chez cette sorte d’esprits affectés par une extrême faiblesse psychologique, sorte de “racaille de l’esprit” si l’on veut.)
On trouve ce sentiment dans les commentaires les plus concis, les plus factuels et les plus sérieux. Mais un tel sentiment après tout n’a nul besoin d’être justifié par des observations et des raisonnements rationnellement et longuement interprétés (soit des analyses stratégiques et moralisatrices à la fois, soit des hypothèses complotistes, etc.) – même si celles-ci existent et même abondent évidemment. Il est du domaine de la perception subtile et demande à être apprécié hypothétiquement à partir d’une très forte base de conviction intuitive enrichissant la psychologie de celui qui observe ce sentiment, éventuellement sans que lui-même ne substantive ni même n’ait conscience de cette perception ... Pour montrer la place que nous accordons à cet aspect d’“inéluctabilité”, ou de “logique de l’inéluctabilité” dans la situation présente, nous irions jusqu’à avancer l’hypothèse que, s’il s’agit d’un montage, même la machination et le plan aboutissant au montage complet d’une attaque chimique et le gain politique qu’en attendraient les instigateurs ne devraient pas être appréciés comme la cause centrale de l’événement, mais serviraient de moteur, de la chose servant d’“idiot utile” à ce qui paraît un enchaînement inéluctable dépassant évidemment même, et surtout, ceux qui le suivent avec enthousiasme ; comme si, pour poursuivre ce cas hypothétique extrême, le montage éventuel qui aurait fourni la source de l’événement, s’avérait être le moyen trouvé par cette logique de l’enchaînement pour se déployer dans toute sa puissance. Par conséquent, tout événement, même s’il n’est pas un montage dans la vérité des situations, devient un montage au service de cette logique supérieure.
Un exemple de ce constat implicite voire inconscient de ce caractère d'inéluctabilité se trouve dans les deux courtes fiches d’analyse de Jason Ditz de Antiwar.com, sur l’attaque en préparation (voir le 24 août 2013) et sur la détermination des officiels du bloc BAO non seulement d’affirmer la culpabilité d’Assad (et d’y croire littéralement, par nécessité psychologique), mais d’affirmer une culpabilité qui débouchera nécessairement sur une autre nécessité, qui est celle de l’attaque. Ce dernier texte, très court, vaut citation pour rendre compte de ce sentiment du commentateur critique (Ditz) qui connaît bien la réalité des choses, mais qui semble dire pour aller au fond des choses : “Que voulez-vous, ils veulent attaquer parce que cette volonté tient de l’inéluctable, – alors, que peut-on y faire...” (Sur Antiwar.com, le 23 août 2013) :
«There’s still no real proof and UN inspectors haven’t even gotten to the site, but Western officials say they have “little or no doubt” that Wednesday’s Ghouta incident was a chemical weapons attack. They’re not only willing to buy the rebels’ version of events, they went a step further and say that the attack “likely” had direct approval from top officials in the Assad government. [...]
»...Other rebels say they’re trying to smuggle evidence to the UN, but they’re already downplaying the prospect of it amounting to anything, saying they haven’t got much equipment and are constantly fighting the Syrian government so their evidence could be “damaged” en route.
»With Turkey and France already calling for war without the proof and most of the decision-makers already convinced, there’s little reason to think that anyone’s minds will be changed even if the investigation fails to turn up what they’d hoped for. After all, even though the UN investigators said the previous attack was almost certainly launched by the rebels, Western officials continue to present that as the Assad government’s doing as well.»
Le président Obama, sur la décision duquel repose l’enclenchement de la procédure conduisant à une attaque, a bien parlé d’abord de la nécessité de disposer d’un mandat de l’ONU pour le faire. (Le cas US est le plus typique de l’occurrence d’une politique générale marquée par le refus d’un engagement, et le cédant pour ce cas à l’entraînement psychologique de l’inéluctable.) Jason Ditz signale, à ce propos, que des “officiels” savamment dosés commencent désormais à nous rappeler le précédent de l’initiative infâme que fut l’entreprise otanienne contre le Kosovo, qui n’avait pas le sceau de l’ONU et qui s’en passa fort bien, qui s’accomplit jusqu’à son terme en arguant de sa légitimité par le seul fait d’avoir été conduite à son terme. (Antiwar.com, le 23 août 2013.)
«Officials across NATO have been long trying to put together a war in Syria that would mirror the NATO attack on Libya, in which regime change was imposed after a loophole in a UN Security Council resolution was used as an excuse for total war. Russia’s been extremely sensitive about Syria resolutions specifically because of this, however, and the reality is that there isn’t going to be a UN resolution that remotely leaves open a loophole like that. So now officials are turning to Kosovo as a “precedent.”»
L’idée serait alors que le seul argument d’une enquête de l’ONU complaisante aux thèses du bloc BAO suffirait à “légitimer” par avance une attaque type-Kosovo, qui pourrait donc se dérouler sans vote du Conseil de Sécurité. Dans cette hypothèse de l’accomplissement d’une attaque, deux situations spécifiques seraient à suivre, avant les déroulements et les conséquences immédiates qui sont à attendre, sinon à craindre.
• Le premier cas est celui de l’effet sur le terrain qu’aurait une telle attaque. Kurt Nimmo, d’Infowars.com, détaille le même 23 août 2013 les conditions de la situation présente, exactement sur le même ton qu’on a vu avec Jason Ditz, d’une sorte de résignation à l’inéluctable. Son texte signale pourtant cet aspect particulier de la situation sur le terrain, 1) que la résistance anti-Assad est dans une situation “désespérée” (ce qui rend l’attaque chimique extrêmement à-propos, comme dans un film à suspense) ; 2) qu’au sein de cette résistance, pourtant, existe un très fort déséquilibre entre combattants dits “modérés” (euphémisme) et les extrémistes type-al Qaïda, à l’avantage écrasant des seconds ; ce qui fait conclure 3) qu’une attaque, si elle redressait la situation aux dépens des forces syriennes d’Assad, le ferait à l’avantage des extrémistes type-al Qaïda, qui sont de plus en plus identifiés (notamment, récemment par le n°2 de la CIA) comme l'élément le plus dangereux dans la situation syrienne.
«In addition to meeting with top officials at the European Union, the United Nations and in Jordan, Qatar and Turkey, the last two playing instrumental roles in the ongoing attempt to undermine the al-Assad government, Secretary of State John Kerry met with the French Foreign Minister Laurent Fabius and Syrian opposition leader Ahmad Assi Jarba. Ahmad Jarba, who replaced Moaz al-Khatib as president of the National Coalition for Syrian Revolutionary and Opposition Forces, has close ties with the government of Saudi Arabia.
»The timing of the alleged chemical attack and the probability of a Western military response following a cursory investigation and a rubber stamped United Nations imprimatur for an attack on Syria could not have arrived at a more opportune time. “The situation in Syria is now desperate,” declared Jarba during a meeting with Kerry prior to the supposed chemical attack.
»Objective observers admit that the CIA’s proxies, despite their radical Sunni extremism and numerous massacres – in Jisr Al-Shugur, in the Alawi village of Hatla in Deir Al-Zor, the disputed attack in the town of Taldou (known as the Houla massacre), and the horrific massacre at Tal Abyad (450 Kurd civilians, including more than 120 children, murdered by the Turkish supported al-Nusra Front) – are losing the terror war against al-Assad and his highly disciplined military.»
• Le second cas serait celui de la Russie. Dans l’hypothèse extrême qu’on envisage, la Russie-1999 de l’époque de l’attaque du Kosovo n’a rien à voir avec la Russie-2013 d’une éventuelle attaque en Syrie. La Russie et Poutine se trouveraient à une croisée des chemins où la logique de la politique russe suivie jusqu’ici ordonnerait d’envisager très sérieusement d’abandonner la position de recherche d’une négociation, notamment avec les USA et le bloc BAO, au profit d’une attitude clairement antagoniste. Si les Russes sont sérieux en disant qu’ils défendent des principes, ils devraient l’être en présence d’une attaque qui s’en moquerait et les violerait allègrement. On serait alors au point, déjà rencontré, ou dans tous les cas approché (mais peut-être jamais autant qu'aujourd’hui), de ce que nous nommions le 4 juin 2012 (juste après la volte-face sans souci de la parole engagée, de Washington juste après la conférence de Genève-I) «Les méditations de Poutine». Deux extraits de la conclusion du texte peuvent être utilement rappelés.
«Ainsi se peut-il que la pensée de la direction russe, s’exerçant sur la crise syrienne mais tenant compte de l’ensemble, estime qu’à tout prendre l’usure subie dans la vaine tentative de restaurer la stabilité dans ce pays (la Syrie) devient nettement négative et constitue désormais un grave handicap qui affaiblit la position russe sans renforcer la stabilité (ni Assad par conséquent, mais cela est accessoire). L’alternative, c’est de laisser aller tout en prenant des mesures de prudence et de renforcement des positions acquises, avec la certitude que la crise syrienne éventuellement devenue guerre civile s’étendra nécessairement à la région et impliquera de gré ou de force le bloc BAO, ne serait-ce que par les troubles subis par ses alliés israéliens, saoudiens, qataris. Cela ne signifie pas se retirer du jeu mais refuser un jeu qui revient à faire le jeu de la politique paralysée du bloc BAO, pour occuper une autre position. Il existe un point au-delà duquel la politique de recherche de la stabilité nécessite de laisser faire la dynamique de l’instabilité devenue inarrêtable, pour que les évènements eux-mêmes se chargent de détruire les facteurs d'instabilité et le cadre général qu'ils imposent, et conduisent ainsi à une stabilité nouvelle dans des conditions radicalement différentes, en plaçant tous les acteurs devant leurs vraies responsabilités. Dans le cas qui nous occupe, les choses de la dynamique de l'instabilité ne s’arrêteront pas à la Syrie, ni à la région autour de la Syrie, ni à l’Iran, mais, par les contrecoups déclenchés dans les situations intérieures, notamment celles des pays du bloc BAO, elles iront au cœur du sort du Système dans son entièreté. Elles poseront la question essentielle de l'effondrement du Système. [...]
»…Mais même ce point d’interrogation [la position d’Obama dans cette circonstance] ne doit pas faire trop d’illusion. Il y a des évènements en marche, une dynamique formidable qui nous surpasse et sur laquelle nous n’avons aucune prise ; c’est la dynamique du Système plongé dans les affres de son autodestruction, et la crise syrienne, dans le cadre de la crise haute, en est un des éléments actifs. Dans ce grand trouble en marche, il y a la possibilité désormais bien présente que l’un ou l’autre des acteurs humains mesure l’importance du phénomène et, s’y trouvant évidemment impliqué, éventuellement avec des positions qui ne sont pas mauvaises, conclut que la seule chose à faire est de contribuer autant que possible à cette autodestruction. Il est évident que les Russes, et Poutine à leur tête, sont parmi les mieux placés pour cela. C’est tout le sens de cette hypothèse, qui n’est qu’une hypothèse, – mais à une époque où les évènements vont si vite qu’ils peuvent transformer en quelques semaines une hypothèse en un nouvel élément actif du courant qu’eux-mêmes alimentent. La crise syrienne est donc, une fois de plus, identifiée par nous comme une crise qui peut engager la survie du bloc BAO.»
Bien entendu, on peut sans fin épiloguer sur les causes, les manigances, les manipulations, les montages qui caractérisent cette phase de la crise syrienne. Pour autant, on n’aura rien résolu de l’essentiel et l’on se retrouvera égaré dans les impasses sans nombre de la recherche de l’explication rationnelle d’une situation qui ne l’est pas, par une raison elle-même subvertie par les manigances qu’elle prétendrait décrire alors que sa propre subversion conduit à des entraînements trompeurs... Certes, il y a “manigances, manipulations, montages”, il n’y a même que cela, dans tous les sens, – mais aussi bien, il n’y a “que cela, dans tous les sens”, en permanence dans ce conflit, dans cette situation des relations internationales, dans cette situation du monde complètement dépendante de l’ infrastructure crisique et du système de la communication. Le constater pour la phase actuelle, précisément depuis 72 heures, de la crise syrienne, n’amène donc rien de nouveau rien ni a fortiori de décisif, c’est-à-dire aucune explication nécessaire et suffisante.
Ce qui importe alors est de déterminer pourquoi à ce moment, soudain, s’impose une logique de l’inéluctable, qui laisse à penser ici, maintenant, et sans préjuger de ce qui suivra (attaque ou pas ?), qu’il y a une situation nécessairement caractérisée par le facteur de l’inéluctabilité ? Notre hypothèse est celle du “besoin de paroxysme”, ce deuxième aspect du sentiment double dont nous éprouvons l’existence dans le chef de cet épisode, et qui a été signalé plus haut. Cet autre aspect du sentiment formerait, lui, l’essence même de la situation (une essence subvertie, ou plutôt un simulacre d’essence, qui rend compte de la profonde subversion de la situation, et de l’auto-subversion des esprits des figurants du drame) ; le caractère de l’inéluctabilité n’en serait que l’application opérationnelle.
Cette application opérationnelle (ce qui ressort de la “logique de l’inéluctable”) est elle-même potentiellement très contre-productive. On l’a vu plus haut (Nemmo) et c’est une chose que personne ne cesse de signaler depuis maintenant plusieurs mois, – notamment ce point qu’un affaiblissement d’Assad, ou pire, profiteraient inéluctablement (là aussi) à la partie la plus extrémiste, type-al Qaïda, de la rébellion, produisant potentiellement un danger plus grand que l’adversaire éliminé. Au contraire, si l’on s’attachait à des logiques rationnelles, comme celle du complot/du montage, etc., dans la situation existant e sur le terrain et avec l’intervention de l’ONU, on pourrait imaginer des scénarios beaucoup plus soft, d’occupation du terrain, d’entraves apportées à l’action du régime Assad, etc., jusqu’à des démarches pour instituer des forces d’interposition qui gèleraient la situation et sauveraient les rebelles de la défaite qu’ils jugeaient hier inéluctable, leur permettraient de se réorganiser, voire aux “modérés” de regagner du terrain contre les extrémistes. (Par exemple, M K Bhadrakumar envisageait certains aspects de cette sorte de situation dans son texte du 22 août 2013.)
Mais non, la “logique de l’inéluctable” sembler interdire tout cela. On saute aussitôt à la solution extrême dans son principe, exclusive de tout dialogue, donc de tout compromis éventuellement avantageux. On réclame la frappe immédiate comme un principe, sans envisager une seconde des négociations. On agit comme si l’on attendait que d’un bouleversement considérable devrait naître la lumière. On prend le risque, qui est presque une certitude pour les bureaucraties qui entourent ces chefs d’Etat et de gouvernement, de rendre une situation temporairement incontrôlable par l’action de son adversaire aisément identifiable, – occurrence où l’on peut encore négocier et manœuvrer, – en une situation décisivement incontrôlable à cause de l’action de prétendus “amis” qui se sont découverts comme très dangereux, qu’on ne parvient plus à identifier ni à fixer dans le cadre existant.
... D’où notre hypothèse du “besoin de paroxysme”, qui place la situation et les réactions des dirigeants des pays du bloc BAO sur le terrain psychologique, dans le domaine d’une sorte de réflexe conditionné dans le cadre d’une situation qui les dépasse et exerce sur leurs psychologies une pression constante et contraignante. Dans cette hypothèse, le “besoin de paroxysme” devient un développement opérationnel de rupture, comme si tout pouvait s’achever et s’accomplir avec une attaque brutale, dans une sorte de spasme libérateur, – ou d’orgasme libérateur, pour les philosophes de la chose sociétale, dont on sait l’importance stratégique par les temps qui courent à quel rythme... Comme si la frappe, mythique manifestation de la supériorité de notre contre-civilisation de l’“idéal de puissance” en même temps que le bon vieux carpet bombing, ou écrasement sous les bombes, assez sophistiqué pour faire du prime time à la TV, était l’achèvement, la Fin de Tout (pour Assad, exit Assad, l’homme qui ne “mérite pas d’exister” selon le philosophe sophistiqué Fabius).
(Mais non, certes, ce ne serait pas la “Fin de Tout”, ce serait plutôt le commencement, et peut-être même le commencement d’une aventure aux perspectives inimaginables, selon l’analyse dominante ... Dans cette hypothèse, les dignitaires du bloc BAO regretteraient très vite le confort qui était le leur lorsqu’ils réunissaient les Amis de la Syrie, à côté de ce qu’ils auraient nécessairement déclencher. Si nous disons “nécessairement”, c’est parce que le paradoxe est que tous ces gens qui prônent l’intervention sont persuadés par ailleurs que le risque d’une extension du conflit est énorme... – et ainsi arriveraient-ils à prôner l’intervention pour interrompre ce risque en allant au-devant de lui et en le courant jusqu’au bout, – ce qui est une façon de l’éliminer, certes, par l’absurde, en l'accomplissant complètement et en le transformant en situation opérationnelle. Mais cela n’est que pure spéculation opérationnelle, pour fixer l’enjeu, alors que notre propos nous conduit ailleurs.)
La question centrale est évidemment de savoir d’où vient ce “besoin de paroxysme”. Poursuivant notre hypothèse, nous avançons cette explication qu’il s’agit d’un besoin de psychologies qui subissent une pression extrême du fait des crises sectorielles sans fin, et, pour la séquence présente, des crises égyptiennes et Snowden/NSA qui constituent de terribles revers pour la stabilité du Système quelle que soit l'analyse de circonstance qu'on en fait. La crise Snowden/NSA, surtout, représente une menace d’effondrement d’une structure fondamentale du Système, c’est-à-dire une menace sans précédent affectant le cœur du Système. Cette pression constante de l’infrastructure crisique depuis 2008, particulièrement sensible en ce moment, fait craindre aux directions politiques à la psychologie si fragile que le Système lui-même finisse par céder. Cette sorte de pression exercée au niveau des psychologies, et souvent d'une manière inconsciente qui est la plus dévastatrice, pousse effectivement à rechercher presque instinctivement des issues de rupture, y compris avec des dimensions symboliques et selon une narrative à forte puissance allégorique. La crise syrienne est le terrain d'élection de cette quête sans fin d'une rupture depuis le début 2012 et le début du blocage par les Russes et les Chinois d’un processus normal d’intervention ; de ce fait, cette crise syrienne est devenu une sorte de voie déviationniste qui permet de s’installer dans le négationnisme de la crise générale, d’écarter le spectre de la crise d’effondrement qu’ils ne peuvent supporter d’imaginer, encore moins de voir.
Bien entendu, ce chemin déviationniste est un leurre et une impasse, simple chemin de traverse qui, par un autre biais, les ramène à la crise d’effondrement du système, par les conséquences déstructurantes, immédiates ou à terme, si effectivement on menait à bien le schéma de l’intervention. Comme tous les chemins mènent à Rome, toutes les initiatives à prétention de transformation d’une crise incontrôlable en une crise qu’on prétendrait contrôler par effets de rupture rapprochent un peu plus de la crise d’effondrement du Système.
Nous le répétons, ce n’est là qu’une hypothèse et elle n’est permise que l’espace d’un instant de temps ... Ou bien elle se vérifiera dans quelques jours, dans une semaine, dans un mois qui sait, si l’actuel rythme de l’inéluctabilité qui s’est imposé se poursuit, et si le “besoin de paroxysme” devient absolument impératif ; ou bien nous devrons attendre la séquence suivante. Donc, contentons-nous pour l’instant d’un instant, en admettant que tout ce qui a été passé en revue est plongé dans l’incertitude dès lors que cela est étendu sur la perspective. Mais ce qui nous importe est bien, d’abord, de constater l’état de la psychologie des directions des pays du bloc BAO, qui est effectivement marqué lui aussi dans ce même instant, mais qui, lui, se poursuivra et s’accentuera quoi qu’il se passe en Syrie ; ensuite, de bien fixer l’idée que cet état psychologique est dû à la pression du défilement continuel de la crise d’effondrement du Système ; enfin, que d'observer évidemment que l’actuel paroxysme de la crise syrienne est bien, en plus de toutes les considérations opérationnelles, une manifestation de l’un et de l’autre phénomènes (état psychologique et avancement de la crise d’effondrement du Système).
Les deux phénomènes se frôlent continuellement. A certains moments, ils doivent se rencontrer dans une sorte de fusion décisive, qu'on n'identifierait pas pas nécessairement comme une déflagration bruyante mais qui modifierait la situation dans sa profondeur ultime, accélérant également de façon décisive le processus d’enchaînement des crises et d’aggravation de la crise centrale (crise d’effondrement du Système). Cette occurrence d’une fusion, c’est le cas aujourd’hui en Syrie ou cela ne l’est pas, selon la persistance du processus d’inéluctabilité. Mais ce qui apparaît comme beaucoup plus important est l'hypothèse pour nous avérée que ce processus d’inéluctabilité qu’on évoque pour la Syrie existe également pour le cas de la rencontre fusionnelle entre les deux phénomènes (état psychologique et avancement de la crise d’effondrement du Système), et là d’une façon beaucoup plus décisive et, pour dire encore plus, irrémédiable puisque tenant à leur nature même.
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