L’Irak, ou la conquête en partant

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Le vénérable et austère Government Accounting Office (GAO), connu pour le sérieux et la probité de ses travaux, a publié un document qui confirme toutes les évolutions inquiètes qu’on envisageait concernant le retrait US d’Irak. Le document examine essentiellement les coûts de la logistique et les divers coûts associés impliqués par un retrait, notamment les projets d’ores et déjà affirmés de l’administration Obama de rapatrier autour de 140.000 hommes d’ici à la fin de 2011. La principale trouvaille du GAO est notamment mise en évidence par un article du Washington Post du 25 mars 2009, qui démarre sur l’annonce que le retrait coûtera, pendant plusieurs années, plus cher que ce que coûtaient ces forces durant les années de combat.

«The removal of about 140,000 U.S. troops from Iraq by the end of 2011 will be a “massive and expensive effort” that is likely to increase rather than lower Iraq-related expenditures during the withdrawal and for several years after its completion, government investigators said in a report released yesterday.

»“Although reducing troops would appear to lower costs,” the Government Accountability Office said, withdrawals from previous conflicts have shown that costs more often rise in the near term. The price of equipment repairs and replacements, along with closing or turning over 283 U.S. military installations in Iraq, “will likely be significant,” the GAO reported.»

Divers détails donnés par le rapport sont significatifs, dans l’esprit qu’on décrit ici. Le démantèlement des installations les plus minuscules, – puisque le GAO a été jusqu’à mentionner une installation occupée par 16 soldats, – prendra un temps significatif exprimé en mois, ce qui est sans doute impératif pour les faire prendre au sérieux par la bureaucratie: «Even the smallest facilities, with 16 to 200 combat troops, will take up to two months to close, the report said.»

Ces divers détails, ce schéma général qui rend la retraite “en bon ordre” plus coûteuse que la guerre elle-même, celle-ci coûtant déjà un prix astronomique, semble laver de tout soupçon le Pentagone qui avait déjà donné des indications dans ce sens. Quel que soit l’usage politique qu’on puisse faire de la chose, il semble effectivement assuré qu’un retrait d’Irak coûtera plus cher que la guerre et durera, nécessairement, un temps considérable, rendant difficile d'exécuter dans les conditions prévues le retrait ordonné par le pouvoir politique; il semble également assuré qu’il n’y a nul besoin pour cela d’imaginer une machination du Pentagone pour tenter d’empêcher un retrait, tant les pesanteurs de la machinerie suffisent largement à notre compréhension du phénomène.

Il s’agit d’une documentation de plus dans la voie d’une appréciation de plus en plus impérative, selon laquelle la puissance militaire s’est transformée en une monstruosité bureaucratique, entraînant des contraintes de logistique et des contraintes budgétaires complètement paralysantes, qui pèsent avec une force surprenante sur l’équilibre budgétaire et économique d'un pays, notamment de cette puissance que sont les USA. Le destin de l’aventure irakienne des USA montre combien toutes les notions militaires habituelles de “victoire”, de “défaite”, etc., n’ont plus aujourd’hui aucun sens. La seule bataille sérieuse est la bataille bureaucratique, qui se livre avec un système, une machinerie, des mécanismes qui se trouvent hors de tout contrôle humain directif. Le “contrôle humain” ne fait qu’acquiescer aux impératifs du système et de la machine.


Mis en ligne le 25 mars 2009 à 07H31