L’Irak plus cher que la Deuxième Guerre mondiale

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L’Irak plus cher que la Deuxième Guerre mondiale

Au moment où le président Obama annonce le retrait “complet” des forces US d’Irak pour la fin 2011, – retrait “complet” tout relatif, comme il s’entend avec le Système qui garde toujours une tentacule de réserve (celle de la CIA en l’occurrence), – certains ont l’idée de faire les comptes. Ils découvrent, comme David R. Francis, du Christian Science Monitor (le 25 octobre 2011), que la guerre d’Irak coûtera certainement plus cher pour les USA que la Deuxième Guerre mondiale. (Donc, pour les USA, la guerre la plus coûteuse de son histoire.)

«Anyone curious about the cost of America’s wars in Iraq and Afghanistan can look it up on costofwar.com, up to the latest fraction of a second. Last weekend, the Iraq war had cost more than $800 billion since 2001; the Afghan war, $467 billion plus. So President Obama’s announcement that all US troops will be out of Iraq by year end should mean some drop in ongoing military spending. But the budget relief probably won’t be as much as you might expect.

»Tragically, beside the financial cost, there is the human toll. The war in Iraq has resulted in some 4,480 US troops killed and more than 32,000 wounded. (The Iraqis have suffered far more fatalities, about 654,965, according to the British medical journal The Lancet.) Thus, ongoing medical and disability claims and treatment of US veterans will boost the costs of the Iraq war even more.

»Throw in the replacement of vehicles, weapons, equipment, etc., and the eventual tab for the United States could reach $4 trillion to $6 trillion, according to University of Columbia economist Joseph Stiglitz and Harvard University budget expert Linda Bilmes. Those are big numbers.

»They would be on par with the $4.6 trillion the US spent on the recent financial bailouts, according to Barry Ritholtz, CEO of Wall Street research firm Fusion IQ and author of the popular blog The Big Picture. (Another estimate puts the bailout cost at $8.7 trillion.) The sum spent on the Iraq war could pay for a good chunk of Obamacare, professor Bilnes estimates. It’s more than the $3.6 trillion the US spent to fight World War II, even after adjusting for inflation, Mr. Ritholtz estimates. […]

»When President George W. Bush launched the war, charging incorrectly that Iraq had weapons of mass destruction, the Pentagon estimated its cost at $50 billion to $60 billion. Economic adviser Lawrence Lindsey got in hot water at the White House when he guessed in public the war could cost as much as $200 billion.

»One oddity of the Iraq and Afghanistan wars is that even as military preparations were under way, Congress cut taxes in 2001 and again in 2003. These Bush tax cuts meant in effect that the wars were financed by adding to federal debt, rather than paid for from revenues. US outstanding debt zoomed from $5.7 trillion when Mr. Bush took office to $10.6 trillion when he left. And all but $700 billion of that debt was accumulated before the Wall Street bailouts began under the Troubled Asset Relief Program in October 2008.»

Encore, comme le fait remarquer Philip Erwing de DoD.Buzz (le 25 octobre 2011), Francis ne prend-il pas en compte les coûts “résiduels” depuis l’arrivée de Obama, dont on sait qu’il s’est montré un “chef de guerre” au moins aussi entreprenant que son prédécesseur GW. D’autre part, ces dépenses sont parfois parcourues d’épisodes époustouflants, comme les plus de $40 milliards en cash (pour un poids de 369 tonnes de billets de banque) livrés quasi clandestinement de la Federal Reserve de New York vers la Banque centrale irakienne et dont on n’a plus jamais trouvé la moindre trace. Antiwar.com rapporte l’épisode, le 26 octobre 2011, et quelques détails illustrant le sérieux du fonctionnement du Système méritent citation…

«Since the beginning of the Iraq War in 2003, the New York Federal Reserve has been shipping tens of billions of dollars to the government and central bank of Iraq, ostensibly for reconstruction and resumption of governmental services after the fall of Saddam Hussein. Between 2003 and 2008, over $40 billion in cash was secretly shipped in trucks from the New York Federal Reserve compound in East Rutherford, New Jersey to Andrews Air Force Base outside of Washington, where they were then flown by military aircraft to Baghdad International Airport. In just the first two years, the shipments of dollar bills weighed a total of 363 tons.

»But much of that money was stolen, misappropriated, and simply lost. Despite Congressional hearings and reports, official inquiries from Washington to Baghdad, an investigating special inspector general’s office and Department of Defense, nobody knows exactly what happened to the bulk of the money. Likely destinations of the stolen fiat, secretly printed out of thin air to fund the US government’s illegal war and occupation in Iraq, went towards intricate contracting schemes, corrupt Iraqi and American officials, and brash, blanket appropriations in war torn Iraq.

»The shipments followed a detailed route, documenting by the minute who was in custody of the money, until it reached the Coalition Provisional Authority (CPA) official in Baghdad who arranged for them to get to the Central Bank of Iraq in downtown Baghdad. That responsibility was fulfilled by one man, a naturalized American citizen of Lebanese descent who was born in Saudi Arabia working as a civilian contractor for the US military. Only his first name has been released: Basel. He was the last to see the bales of cash before they entered the Central Bank of Iraq.»

Il faut comprendre cela, – le dépassement du coût de la Seconde Guerre mondiale par le coût de la guerre en Irak, – en ayant à l’esprit les différences extraordinaires d'ampleur des théâtres d'opération, de stratégie, d'effectifs et d'abondance de matériels, d’ambitions politico-militaires, d’enjeux et d’importance réelle des conflits, d’ampleurs géographiques et de fondement historiques, bref de substance fondamentale, entre les deux conflits. Certains, comme Erwing (déjà cité), estiment que “la guerre est devenue plus chère”. Nous dirions, nous, qu’il s’agit plutôt d’une complète dégénérescence de la guerre, qui devient absolument futile, sans la moindre utilité, sans le moindre apport politique, tout en devenant plus destructrice, plus cruelle, plus immorale et illégale, voire même complètement entropique dans les sens physique autant que spirituel. C’est-à-dire qu’une guère comme celle de l’Irak, comme les autres en cours de la période, correspondent parfaitement à la barbarie moderniste parvenue à son terme entropique et nihiliste. On ajoute, bien entendu, triste cerise sur la gâteau et cerise sans surprise, la multiplication des coûts, de la corruption, du gaspillage, dans des proportions absolument inimaginables. Dit autrement, la guerre a suivi absolument l’évolution du Système, jusqu’à en devenir son double à la fois inutile et absolument prédateur de toutes les structures de civilisation. La guerre en Irak restera archétypique de l'emploi de la force dans le cadre complètement subversif du Système, comme l’un des plus beaux fleurons de l’effondrement de notre contre-civilisation.

La différence entre les deux conflits est également et finalement dans son effet de civilisation, ou de contre-civilisation, dans le processus d’effondrement du Système. La Deuxième Guerre mondiale est venue après la Grande Dépression et a sauvé (temporairement, certes, comme on le voit aujourd’hui), le capitalisme et le Système en général. La guerre en Irak (avec d’autres) est survenue avant la crise de 2008, en provoquant et en accélérant la phase finale de la crise de l’effondrement, qu’elle a nourrie abondamment, sinon provoquée complètement dans sa partie la plus dynamique. Toute l’histoire de ce Système est résumé par ce renversement, cette inversion, – ce qui nous fait grandement présumer que ceux qui annoncent une grande guerre pour que le Système se sorte de sa crise terminale, si la crise n’a pas eu raison de lui auparavant, ce qui est probable, – ceux-là ne font que fixer par avance le moment de son oraison funèbre. Personne ne regrettera une telle usine à gaz.

 

Mis en ligne le 26 octobre 2011 à 12H11