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989Les leçons militaires du conflit de la Géorgie sont diverses et incertaines, tant il est difficile de parfaitement ajuster le facteur de la qualité et de l’efficacité des forces militaires à l’autre facteur des résultats politiques obtenus, tant aussi il apparaît que la crise de Géorgie, qui a commencé par une guerre avec toutes ses caractéristiques, est effectivement d’abord une crise dont l’un des composants est une guerre, – chronologiquement le premier de ses composants mais ni le plus important, ni le plus décisif. Par contre, cette guerre a permis de fixer certaines références nouvelles.
Ce qu’a montré avant toute chose la guerre de Géorgie, ce n’est pas tant la capacité d’une victoire, bien que celle-ci ait été obtenue, que l’existence d’une puissance militaire. (Dans les deux cas, victoire russe et puissance militaire russe.) Et, dans le deuxième cas, l’existence d’une puissance militaire russe effective, face à la non-existence sur le théâtre européen d’une puissance militaire occidentale effective, – comparaison inévitable puisque les Occidentaux, principalement les Anglo-Saxons, ont fait passer le conflit Géorgie-Russie initial au stade de l’affrontement “Ouest” (leur Ouest, aux Anglo-Saxons) versus Russie. (Voir Mary Dejevsky, citée dans notre F&C du 2 septembre: «At which point everything fell apart, and a head of steam built up once again behind the rhetoric – except that this time it was not just Russia and Georgia doing the shouting, but their respective cheerleaders, which meant pretty much everyone against the Russians.»)
Le Washington Times du 2 septembre publie un article UPI de Martin Sieff, sur la performance de la puissance militaire russe en Géorgie. Les équipements, observe Sieff, étaient souvent vieux, notamment les chars T-72 des années 1970 (avec quelques améliorations), mais leur usage, notamment les capacités de concentration, souvent brillamment fait.
«The effective use of decades-old Russian T-72 main battle tanks in the brief conflict with Georgia again shows how supposedly obsolete weapons can still play a potent and even decisive role in modern war.
»The Russian army did not rely exclusively on its 30-year-old T-72s. State-of-the-art T-90 main battle tanks also were identified during Russia's brief but highly effective five-day drive into the former Soviet republic of Georgia last month. But the old T-72s, upgraded with explosive-reactive armor, were there, too.
»The Russians pushed ahead with overwhelming concentration of force, according to classic Carl von Clausewitz principles, using artillery, tactical air support for ground forces and a mix of older T-72 MBTs and modern ones backed up with overwhelming forces of highly mobile infantry.
»Special forces were used effectively to pre-emptively seize potential bottleneck positions in the heavily forested Caucasus Mountains to prevent Georgian forces from slowing down the Russian drive. In all, about 10,000 troops, still a very small proportion of the Russian armed forces, were used in the operation.
»As we have noted before in these columns, supposedly obsolete weapons systems can find surprisingly long leases of renewed life carrying out missions far different from the ones for which they were originally intended.»
La même idée d’un équipement assez vieilli est également présente dans d’autres analyses, certaines un tantinet méprisante comme celle du Times du 22 août, avec le titre «Russian fighting machine is showing its age, say military analysts.» Le premier paragraphe de ce texte vaut citation, comme si caractéristique de la pensée de nos experts en technologisme et en supériorité théorique: «Pictures of triumphant Russian soldiers sitting on armoured personnel carriers as they were driven through towns in Georgia will be among the lasting images of the seven-day war. But the victory did not tell the whole story, analysts said yesterday.»
«[T]he victory did not tell the whole story…», vraiment? Qu’est-ce qui compte dans une crise et dans une guerre qui se place au cœur d’une crise et nourrit cette crise, c’est de disposer de systèmes de très grand avancement technologique et de n’en rien faire puisqu’ils sont occupés ailleurs ou de remporter la victoire? Car le problème, c’est que les armées occidentales si superbement équipées sont en train de se dépenser vainement dans des guerres ingagnables, à des milliers de kilomètres du continent européen où, désormais, tout se passe.
C’est ce que dit Martin Sieff dans sa conclusion. Face à la puissance militaire russe qu’on juge avec condescendance technologiquement dépassée, qu’est-ce qu’il y a en Europe pour faire un contrepoids qui permettrait, sinon de faire la guerre, dans tous les cas de mieux affronter la crise? Les Occidentaux, – mais, décidément, disons plutôt les Anglo-Saxons, – ont oublié ce que c’est que le rapport de force, estimant que la communication virtualiste fait l’affaire à cet égard, que nul n’osera contester cette supériorité virtualiste affirmée comme un dogme. Depuis la Géorgie, nous avons en notre possession bien des signes que cela pourrait fort bien n’être pas le cas.
«…The Russian army today still could prove no match for the U.S. Army and its NATO allies at the peak of their power, but it doesn't have to.
»The U.S. Army and Marines have been exhausted by their ongoing commitment in Iraq fighting a relatively small but ongoing low-intensity counterinsurgency war against Sunni Muslim insurgents over the past 5 1/2 years.
»And the nations of the European Union in general have allowed their conventional forces to run down to an extreme degree since the collapse of communism.»
Mis en ligne le 4 septembre 2008 à 14H59
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