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1299Il y a toujours des évènements autour d’Internet, qui mettent en valeur l’importance formidable du réseau à l’intérieur du système de la communication, son poids absolument essentiel comme seule force véritable, à la fois humaine et mécanique mais avec la mécanique ainsi humanisée, capable de renverser l’ordre des choses dans son entièreté, c’est-à-dire le Système dans sa totalité. En bref, Internet est l’archétype du système antiSystème, en lui-même et dans toutes les innombrables conséquences, directes et indirectes, qu’il entraîne. Imaginez donc ce monde plongé dans cette crise atroce et sublime sans Internet : la crise serait atroce sans être sublime et nous serions en route vers l’entropie du Grand Rien, sinon déjà dissous là-dedans… Il se fait qu’Internet se trouve, aujourd’hui, symbolisé dans cette fonction unique au travers de deux évènements. (Cela, sans grande surprise d’ailleurs, car chaque jour apporte autant d’évènements essentiels autour du rôle fondamental et du destin d’Internet.)
• Le premier événement se nomme Ron Paul. On sait l’importance que nous attachons à Ron Paul, lui aussi comme système antiSystème, seule “entité” capable de semer au cœur du Système un désordre sans précédent et dont les conséquences sont au-delà de notre raison. Dans le contexte américaniste, l’organisation politique, les us et coutumes du Système, il est absolument évident que Ron Paul n’existerait pas sans Internet, d’ores et déjà dissous dans l’entropie, lui aussi ; parce que, sans argent, Ron Paul ne pourrait faire campagne, et qu’il est un homme sans fortune et sans aucun soutien institutionnel de tous les centres de pouvoir qui sont les relais puissants du Système. Alors, quand Ron Paul n’a plus d’argent pour poursuivre sa campagne électorale, il fait une chose simple : il lance une campagne de communication avec l’Internet comme outil fondamental d’attaque, par l'intermédiaire de tous ses sites… Il l’a fait le 16 décembre 2011 et il avait réuni, le 19 décembre 2011, plus de $4 millions. Ron Paul continue et sème une panique absolument extraordinaire, une panique qui commence à ressembler à celle de leur Fin Dernière, dans l’establishment du Système. Mesurez le poids d'Internet.
• Le second événement est l’attaque conduite contre Internet par le Congrès des Etats-Unis, sous la forme de plusieurs lois, qui reprennent à leur compte toutes les pires tares du système de l’américanisme. Il s’agit des lois dites Protect IP Act au Sénat, et Stop Online Piracy Act (SOPA) et Global Online Freedom Act (GOFA) à la Chambre. Les références sont nombreuses pour dénoncer ces lois, dont l’une (SOPA) tendrait à donner les pouvoirs d’une censure générale et globalisée aux USA contre Internet dans sa globalité, notamment avec fermeture autoritaire de sites. On peut trouver de la documentation sur ces lois sur War on Context, le 19 décembre 2011, relayant trois professeurs de droit publiant un texte commun («Don't Break the Internet»), le même 19 décembre 2011 dans la Stanford Law Review. On peut trouver, venus d’un autre horizon, deux articles sur Russia Today contre ces lois, le 19 décembre 2011 à propos de la loi SOPA, et le même 19 décembre 2011 à propos de la loi GOFA. Le même Russia Today signalait, le 15 décembre 2011, que Wikipedia envisage une “grève symbolique” en mettant systématiquement en ligne ses publications sous une forme symboliquement “censurée” (pages blanches) pour lutter contre la loi SOPA.
…Tout cela, ces deux axes fondamentaux autour d’Internet, pour illustrer la puissance d’Internet, et pour illustrer les menaces que cette puissance suscite contre Internet. On doit mesurer l’importance de ce constat à l’orée d’une année 2012, dont nous avons essayé de mettre en évidence l’importance extrême (voir le 19 décembre 2011). Les deux cas cités précédemment illustrent parfaitement ce propos, extraits du texte référencé, en exposant par ailleurs l’hypothèse que les lois envisagées par le Congrès sont moins d’initiatives et de machinations personnelles que selon un courant général généré par le Système, essentiellement cette fois sous la forme des lobbies du corporate power :
«Jamais, nous semble-t-il, les choses auront été tracée aussi clairement quant à la présence des grandes forces en action, notamment le dessein, la substance et l’essence du Mal si clairement identifiés, et tout le reste obligé de se situer et de se définir par rapport à cela. Il est logique de penser qu’une telle situation sera illustrée par un antagonisme qui aura également la marque de la netteté la plus complète, et dont nous avons largement identifié les prémisses dans les années précédentes, et précisément en 2011, – comme une marée montante...»
Mais tout cela fait-il vraiment un lien pour conduire au propos que nous voulons développer ? (Fameux problème de la transition.) En d’autres termes, comment faire, nous autres, à dedefensa.org, pour passer au problème spécifique de dedefensa.org sans nous sentir, disons, un peu ridicules par rapport aux problèmes évoqués ci-dessus, un peu déplacés dans ce sens, et, tout de même, comme toujours, vastement gênés d’être contraints au rôle de quémandeur, de solliciteur ? Bon, allons-y tout de même, et ces états d’âme suffiront pour la transition.
…Disons alors que nous peinons parfois, nous autres à dedefensa.org, à ressentir la conscience de cet enjeu considérable exposé plus haut, pour ce qui concerne Internet et par conséquent dedefensa.org, dans le chef de nombre de nos lecteurs. (Pas tous nos lecteurs, sacrebleu ; comme toujours, mettant à part ceux-là même dont nous savons qu’ils ont cette conscience puisqu’ils la manifestent, par ce qu’ils peuvent faire dans ce sens…) Peut-être nous trompons-nous, car nous n’avons pas le pouvoir de sonder les âmes, mais il nous semble tout de même mesurer une certaine indifférence pour la solidarité et le soutien qui nous sont diablement nécessaires, – une nécessité pour nous comme celle que l’on a de respirer, – et cette solidarité et ce soutien passant notamment, et parce qu’il en est question (voir notre “Appel du 19 courant…” en tête de la page d’accueil, et son évolution par rapport à nos besoins), par le moyen le moins glorieux et le plus inévitable des donations. Certes, nous ne sommes pas un Ron Paul, et il semble bien que l’“activiste” d’Internet francophone ne soit pas celui qu’on rencontre couramment aux USA… (Cela n’est pas le moindre des paradoxes pour nous, Européens, qui connaissons paraît-il bien mieux l’essentiel des conditions de la crise que les citoyens des Etats-Unis, et qui n’hésitons pas à leur faire la leçon.) Tant pis pour nous tous, au point que nous nous demandons si, dans certains cas, les lois du Congrès sont nécessaires pour exercer la pire des censures, effectivement celle de l’indifférence.
Il nous semble que par “indifférence”, il faut comprendre, outre ce que le terme lui-même nous dit, le fait que l’accoutumance de la fréquentation d’un site semble créer le constat inconscient que les choses sont ainsi sans autre nécessité, que puisque ce site est là et ouvert à tous tel qu’il est, c’est qu’il fonctionne sans intervention effective nécessaire. Il nous semble que l’on devrait pouvoir aborder cette question, lorsqu’on accepte de l’envisager, voire de se la poser, selon l’hypothèse somme toute terrifiante de l’équivalence entre cette indifférence et la censure. Il nous semble que ce n’est pas un exercice inutile, effectivement, d’aborder cette question pour soi-même, sinon de se la poser, selon cette course de réflexion. Il nous semble que l’on pourrait en venir à la conclusion qu’il n’y a rien de plus subversif, de plus dissolvant, à la fois pour l’objet de cette indifférence et pour soi-même, qu’une telle indifférence dont l’effet ultime est effectivement d’équivaloir à une censure à laquelle s’ajouterait le jugement inconscient et certainement involontaire que celui qui en est l’objet (le site, en l’occurrence) ne mérite aucun effort autre que celui de le lire, – et encore, pas toujours avec l’attention qu’il faut.
Il nous semble également (nous avions oublié cela) que nous sommes, une fois de plus, gênés d’avoir à lancer cet appel parce que nous n’y voyons ni un automatisme qui nous indiffère ni une démarche naturelle, mais un acte contraint qui nous pèse et ne nous grandit pas à nos propres yeux… Tiens ! Si, au moins, nous lancions cet appel dans le désert, sans la moindre réponse, alors nous aurions pour nous la gloire et la force psychologique du solitaire, et d’ailleurs il y a longtemps que nous aurions abandonné cette obligation de demander cette sorte de soutien, qui nous coûte beaucoup en contraintes psychologiques, pour d'autres voies. Mais on nous aide tout de même un peu, – et à ceux-là, plus que jamais, nous ne cesserons jamais de leur dire notre reconnaissance ; et cela fait que c’est, pour le temps présent et sans garantie pour au-delà, juste assez pour nous interdire de nous décider pour d’autres voies, et certainement pas assez pour le faire avec une assurance minimale ; et tandis qu’on nous aide un peu, on nous lit beaucoup, et c’est à l’“indifférence” de ces “beaucoup-là” que nous nous adressons. (Sur ce dernier point de “nous lire beaucoup”, qui, en d’autres temps, nous faisait une obligation aveugle de continuer coûte que coûte, nous aurions beaucoup à dire, et de plus en plus, et nous y reviendrons sans doute sous peu.)
Encore une chose : lorsque nous en appelons à votre soutien et à votre solidarité, c’est que nous en avons besoin pour l’argent qui nous permet de continuer à faire fonctionner ce site, mais aussi pour bien d’autres causes qui sont bien plus hautes et bien plus nobles. A vous, à ceux qui sont “indifférents”, de comprendre ce que nous voulons dire par là… L’indifférence censure, mais elle tue également, au sens symbolique de l’expression, et certainement au sens psychologique. Pour l’instant, nous ne sommes pas prêts à mourir, – et entendez cette conclusion comme il vous plaira, mais, pour nous, elle a un sens.
Mis en ligne le 21 décembre 2011 à 09H46