Notes sur Fabulation D.C.

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Notes sur Fabulation D.C.

2 juillet 2017 – Notre démarche ici rencontre une obsession qui ne cesse de nous hanter depuis désormais un an, – au point qu’on pourrait souffler la bougie d’un excellent gâteau d’anniversaire sorti pour l’occasion. C’est il y a un an, en juillet 2016, que Trump fut “nominé” candidat républicain, que le Russiagate démarra, que le pouvoir de l’américanisme de Washington D.C. entra dans sa désormais-longue maladie d’une paralysie qui, peut-être, – c’est une hypothèse qui nous semble extrêmement sérieuse, – porte un poison mortel. Notre obsession est bien de tenter de faire partager cette observation fondamentale aux esprits qui sont encore habités par l’idée d’une puissance “exceptionnelle” de l’exceptionnelle Amérique, ditto Washington D.C. Sans qu’il faille prendre parti pour l’un ou l’autre, – sans parler du fait que et “l’un” et “l’autre” sont idéologiquement non identifiables et multiples, – il faut absolument souligner et sans cesse documenter ce fait fondamental en plein développement, ce véritable renversement des choses qui bouleverse toutes les vérités-de-situation de la situation du monde : Washington D.C. n'a plus aucun pouvoir de lui-même et sur lui-même.

Bien peu de chroniqueurs, ceux qui sont lus régulièrement en France mais aussi aux USA même, rendent compte de cette formidable réalité. Nous avons déjà entendu un Peter Lavelle relever l’extraordinaire inconscience du Système, de l’establishment, du Deep State, etc., de laisser s’installer ce désordre sauvage au cœur même du pouvoir, à Washington D.C. Nous pouvons lire dans un excellent texte de Diane Johnstone sur la “mission impossible” de Macron (sur notre site le 1er juillet 2017), ceci sèchement observé en quelques mots : « ...at a time when Washington appears to be paralyzed by deep state efforts to overthrow the President ».

« L’important c’est de participer » (au désordre)

Nous tentons régulièrement de présenter, un peu comme défile un kaléidoscope, une succession d’interventions, d’observations, de déclarations à Washington D.C. et à propos de Washington D.C., qui, additionnées et fusionnées, déterminent un nouveau stade d’avancement de la situation crisique. Leur marque distinctive se résume à un mot que nous ne cessons d’écrire à propos de Washington D.C., – “désordre” bien entendu, – mais porté à un point d’intensité, d’activité, d’effets “collatéraux”, d’un niveau qu’on ne pouvait appréhender ; d’un niveau dont on ne pouvait même faire l’hypothèse.

Ce désordre est à multiple facettes, à impulsions diverses, il a de moins en moins un but bien défini, jusqu’à perdre de vue ce qui devrait être son but essentiel. Il ne s’agit même plus d’affrontements pour le pouvoir principalement, – ce l’est toujours, certes, mais presque secondairement, par le seul fait que tout cela s’exerce entre les protagonistes du pouvoir ou prétendants à son exercice. Le désordre semble désormais une sorte de fusion d’hystéries, de haines, d’égocentrismes, de cloisonnement des perceptions et d’hybris également réparties. Il n’y a pas, – il n’y a plus d’enjeu précisément déterminé, même si le projet de faire tomber Trump subsiste, tout comme celui de manipuler des attaques en Syrie, comme celui de réduire ce qui est perçu comme une “subversion gauchiste”, etc., – mais tout cela, dirait-on, comme du business as usual, appliquant ainsi la célèbre maxime du baron de Coubertin pourtant si étrangère en principe à l’esprit-yankee si sensible au rapport immédiat de toute chose, « l’important c’est de participer ». Pour eux tous, à Washington D.C., l’important c’est d’enlever aussi vite que possible et l’une après l’autre une pierre de plus à cet édifice que le désordre attaque impitoyablement...

On serait tenté de parler de “victoire” dans ce que nous avons désignée comme une “Grande Guerre postmoderne” de l’une ou l’autre faction, à telle occasion (ébranlement de CNN) ou telle autre (recul momentané d’un projet de false flag d’une attaque chimique type-Assad annoncée comme probable, puis déclarée abandonnée grâce à la magie du tweet-Trump). Il apparaît très vite que la désignation est erronée. La guerre semble bien autre chose qu’une “guerre de communication” dans le sens habituel, et d’ailleurs nous l’avons baptisée pour cela la Grande Guerre postmoderne ; il s’agit d’une sorte de lèpre, d’une déconstruction et d’une dissolution à la fois, qui se font plutôt à l’occasion du grand tumulte du désordre plutôt que directement provoqués par lui. Il s’agit de quelque chose qui est sans fin et ne se satisfait que d’être soi-même (le désordre étant le désordre) et qu’on peut soupçonner de chercher finalement à atteindre un but secret d’autodestruction (la surpuissance du désordre aboutissant à l’autodestruction par le désordre, tout cela afférant au Système).

Trump, ou l'impossibilité de la politique

Bien sûr, il n’est pas question d’oublier qu’il s’agit pour nous d’un simulacre, c’est-à-dire une situation informe, ayant rompu tout lien avec un modèle de situation répondant à des règles de cohérence et structurée pour un but bien précis qui lui donne une essence, une sorte d’être. Ce qui semblait encore avoir un sens, donc ayant encore un lointain rapport avec une représentation du modèle, existait encore dans la période intérimaire entre l’élection et l’installation du vainqueur au pouvoir. On pouvait alors parler d’un “coup silencieux” (contre Trump) d’une façon assez clairement identifiée, et Trump ripostant à cela par un effort d’organisation et de constitution de son administration. Diverses hypothèses étaient évoquées, principalement celle de l’“encadrement” de Trump avec des hommes acquis au Système (Mattis, McMaster, etc.) et ayant pour mission au moins de le contrôler si on ne pouvait l’éliminer. Cette sorte d’hypothèse avait encore du sens parce qu’on distinguait bien sa mise en place et l’évolution prévisible.

Toutes ces projections rationnelles, – qu’on les juge illégales ou non, inadmissibles ou pas, etc., – avaient du sens et semblaient s’emboîter dans certains caractères de la situation intermédiaire élection-installation au pouvoir. Depuis, cette cohérence a semblé se dissoudre complètement, notamment à partir de l’affaire de l’attaque chimique suivie d’un tir de missiles de croisière du 4-6 avril. D’abord, on a pensé que l’opération avait réussi, que nous étions passé d’un Trump 1.0 à un Trump 2.0 complètement sous la coupe du Système ; mais presqu’aussitôt, presqu’aussi vite, il est apparu que ce n’était pas le cas, que 2.0 ne l’était pas tant, qu’on pouvait, à l’occasion d’une querelle absurde entourant une rencontre Trump-Lavrov et à cause du tohu-bohu type-Russiagate de la presseSystème, se demander s’il ne s’agissait pas d’un « Trump 3.0 ou [d’un] retour à 1.0 ? » (le 12 mai 2017), – et l’on sentait bien alors que cette tentative de classification (1.0, 2.0, 3.0) n’avait aucune chance d’aboutir, tout n’ayant plus aucun rapport de cohérence avec rien...

La semaine fut rude...

On peut dire que l’enchaînement noté ces derniers jours de l’effondrement de l’image de CNN dans le camp des anti-Trump, du comportement absurde de Trump lors de “l’attaque-[chimique-syrienne]-qu’on- préparait-et-qui-n’a-finalement-pas-eu-lieu-parce-qu’on-l’a-dénonçée” suivant les révélations de Hersh sur l’affaire du 4-6 avril, ont montré avec une égale intensité que le désordre n’épargnait personne. Les hommes soi-disant mis en place pour contrôler le président dans ses supposées tentatives d’accommodement avec la Russie, se trouvent eux-mêmes pris dans un maelstrom doublé d’un cloaque où ils doivent d’abord songer à se contrôler eux-mêmes pour ne pas s’y noyer (voir Mattis dans l’épisode évoqué)...

Ces deux affaires ont été quasiment parallèles, exactement durant la même semaine (celle qui se termine aujourd’hui, les deux textes référencés étant du 29 et du 30 juin), alimentant la vindicte des divers partis les uns contre les autres, montrant des désordres similaires dans chacun des partis, de cette sorte de désordre dont l’origine et la dynamique sont également hors de tout contrôle possible par ceux qui croient les activer et par ceux qui les subissent, – tous autant braves “idiots utiles” du cycle surpuissance-autodestruction du Système.

Présentation de Fabulation D.C.

Dans ce gigantesque simulacre qui ressemble à un immense calamar géant, – ou bien “canular géant”, si l’on le goût des jeux de mots qui seraient aussi des jeux d’eau, – hurlant à des milliers de mètres de profondeur en agitant ses tentacules multiples et se déplaçant à cette vitesse qui le rend insaisissable, dans l’ombre absolue des grands fonds, on entend un tourbillon vertigineux de fausses-vraies et de vraies-fausses nouvelles, d’inventions totales et d’inventions improvisées. Il est difficile de parler de “mensonges” parce que cela signifierait qu’il y a quelque part à Washington D.C. une référence qui dit une sorte de “vérité” objective, une vérité-de-situation mise à jour et acceptée, ce qui n’est pas, ce qui ne peut plus être le cas désormais à Washington D.C. absolument enfermé dans son simulacre. On dira donc qu’ils “fabulent” pour rester dans le seul registre permis par le simulacre, qui est la narrative ou fabulation.

(Au contraire de narrative, qui est pour nous un terme standard et immuable, le terme français initial [“fable”] qui permet de parler de “fabulation” fournit une racine pour nombre d’autres termes utilisables dans les circonstances de cette situation où l’on ne peut parler de “mensonges” mais où rien n’existe au grand jour et dans le flux de la communication-Système qui ait un rapport avec la vérité et le sens.)

Nous tentons ici d’établir une situation à Washington D.C. du point de vue de la fabulation (Fabulation D.C.) selon les acteurs impliqués pour tenter de donner une description cohérente du désordre. En effet, si le désordre est incohérence et absence de sens, son importance, ses effets, nécessitent qu’on en recherche une évaluation générale par rapport à la situation du Système qui ait, elle, une cohérence et un sens. La crise est trop importante pour être désormais définie par le seul mot de “désordre” sans autre précision.

Le “tourbillon crisique” animant ce simulacre, à Washington D.C. où tout se passe et qui est la matrice de la crise, dure depuis assez longtemps pour qu’on puisse lui accorder la “forme” d’une sorte de structuration qui permettrait de fixer certaines constantes. Ainsi, l’on peut affirmer que le désordre que ce “tourbillon crisique” anime implique trois acteurs quasiment institutionnalisés dans cette fonction, dont on sait qu’ils fabulent de façon délibérée pour pouvoir tenir leurs rangs, leurs positions, leurs réputations, et aussi pour assouvir les haines irrationnelles qui les animent. Ainsi pourrait-on avancer que le désordre lui-même est désormais institutionnalisé à Fabulation D.C. Nous passons en revue ces trois acteurs qui doivent être considérés comme des producteurs directs de désordre, comme Lockheed Martin fabriquent ses F-35 (alias JSF, simulacre parfait de l’avion de combat du siècle, sinon du millénaire).

1). Le président

Donald Trump, qui croit à la dimension quasiment impériale que la campagne présidentielle a semblé lui donner, se débat pour affirmer un pouvoir dont il ne saurait quoi faire, mais dont la privation dans tous ses privilèges et ses capacités lui inflige d’épouvantables blessures d’amour-propre. Son comportement est à mesure de cette horrible frustration, et accordé à un caractère absolument imprévisible et incontrôlable.

Qui plus est mais dans la logique de ce cas absolument illogique par rapport aux nécessités de sa fonction et de la politique qui est le sien, la principale préoccupation de Trump est la guerre sans merci qu’il mène pour ce qu’il croit être son “image”, principalement contre la presseSystème. Ce comportement est marqué par une haine extrême et par l’usage de tous les moyens possibles pourvu qu’ils soient publics et qu’ils aient un fort écho médiatique. Le plus récent exemple de la chose est le tweet particulièrement venimeux et grossier qu’il a lancé contre le couple Brzezinski (Mika)-Scarborough, présentateurs associés de MSNBC, qui a engagé une polémique toujours en cours. (L’affaire est devenue d’une telle importance à Fabulation D.C. qu’elle permet à l’excellent Adam Garrie de développer une réflexion rapide mais tranchante sur l’“hypocalypse, ou Apocalypse Now revue par l’hypocrisie de l’américanisme comme instrument efficace de l’effondrement de notre-civilisation, ou de la contre-civilisation : on s'affronte à mort pour la grossièreté d'un [de deux] tweets et l'on bombarde et agresse des pays faibles et pauvres depuis des années et des décennies, avec des milliers, des dizaines, des centaines de milliers de morts sans que les grands esprits ne se révoltent le moins du monde du quart ou du dixième de l'indignation qu'ils montrent actuellement.)

Dans ce contexte, la “politique” de Trump est complètement erratique, incontrôlable, à la fois incompréhensible et illisible, – parce qu’il n’y a rien à comprendre et rien à lire. Tantôt, on le retrouve à l’extrême de l’avant-garde des plus bellicistes, laissant les neocons vieillissants et anti-Trump pantois avec ses menaces d’attaque contre Assad et ses dénonciations faisant présager l’attaque, – au choix, – de l’Iran ou de la Corée du Nord ; tantôt il s’affiche America-Firster, populiste, poursuivant de sa vindicte tous les sacrés bon vieux et fidèles alliés de l’OTAN et de l’UE. Si sa mission métahistorique est d’introduire la plaie affreuse du désordre au cœur du Système, la réussite est complète. (L’on sait que, de ce point de vue, nous serions tentés de célébrer Trump comme un véritable héros, le pur antiSystème parce qu’antiSystème complètement par inadvertance.).

2). Les démocrates

Le parti démocrate est à l’origine l’une des forces les plus actives du désordre. Engagé derrière Hillary bien sûr, principal machiniste du montage Russiagate, le parti a déployé une rage anti-Trump comme on n’en vit quasiment jamais dans une campagne présidentielle de la part d’un parti pour le candidat du parti adverse. Stratégiquement, le parti démocrate a, pour la première fois d’une façon aussi affirmée, mis tout son va-tout dans les grandes causes progressistes-sociétales et postmodernistes (LGTBQ, minorités, etc.), avec un engagement sans faille du côté des regroupements les plus extrémistes et les mieux subventionnés (Soros & Cie) de la communauté noire, type-BLM (Black Live Matter).

A côté de cela, le parti démocrate montre un goût effréné pour la corruption, dans une mesure qui dépasse largement les républicains qui y ont pourtant toujours été excellents ; à côté de cela encore, une petite touche de satanisme qui en dit long sur les causes profondes et métahistoriques de cette crise quasiment suprahumaine n’est pas malvenue, et l’on comprend alors que le parti démocrate a complètement rompu les amarres avec son électorat naturel (la classe moyenne et les “petits blancs”). Bien entendu, Clinton, à la fois féministe, corrompue et elle-même un tantinet sataniste, est pour beaucoup dans ces orientations ; c’est-à-dire que, pour bien faire et justifier ces engagements, il fallait qu’elle soit élue et elle ne le fut pas...

Aujourd’hui, le parti démocrate est plutôt en grand désarroi, alors que le Russiagate prend eau de toutes parts. Quatre récentes élections de complément (remplacement de parlementaires passant au gouvernement) ont vu des victoires républicaines alors que les démocrates comptaient bien démontrer la légitimité de leur contestation par des victoires. Une poussée existe dans le parti pour un réalignement vers le centre, moins gauchiste ; mais elle se heurte à la guérilla permanente de Trump sur sa droite et à la pression extrémiste de ses gauchistes sociétaux-progressistes sur sa gauche. Le parti démocrate va mal mais il est otage de nombre de ses engagements et ne peut se sortir de cette guerre devenue sans grand espoir pour lui, en tant que force parlementaire, dès lors que Trump était élu. Il reste donc, plus que jamais, une force de désordre à tendance autodestructrice, comme le montre la proposition parrainée par 25 députés démocrates d’installer une commission pour étudier la possibilité d’une procédure de destitution du président pour “incapacité mentale”, – une accusation dont on mesure la vaste extension de l’interprétation qu’on peut lui donner.

3). La presseSystème

La presseSystème, complètement acquise au Système sans pour autant déterminer ce qui est objectivement à l'avantage du Système, ne cesse d’évoluer dans son propre simulacre aux dimensions et aux représentations colossales depuis des mois et des mois, on dira même depuis trois ans et demi (depuis le “coup de Kiev” de février 2014). Actuellement, le simulacre montre des signes de fatigue du fait du poids du mensonge auquel il faut raccorder les innombrables tentacules des mensonges annexes. (Parmi ces signes d’épuisement, on signale bien entendu la crise profonde dans laquelle est plongé le réseau CNN, le plus anti-Trump, antirusse, etc., de tous les membres de la confrérie. Il y a d’autres avatars actuellement, notamment de la part du New York Times qui a été forcé de revenir sur une de ses principales narrative dans le cadre du Russiagate.)

Pour autant, il ne nous semble nullement, bien au contraire, que la presseSystème soit prête à abandonne sa guerre anti-Trump, exactement comme le président lui-même n’est pas prêt une seconde à abandonner sa propre guerre contre les médias de la presseSystème. Cette guerre à mort constitue une agitation permanente qui interdit d’espérer le retour à un climat de calme. Les relations entre les différents centres de pouvoir n’ont jamais été tendres à Washington D.C. mais elles s’exerçaient dans une concurrence pour acquérir des points d’appui et des avantages sur la vérité desquels tout le monde s’entendait. Cette unité de perception, même pour alimenter des querelles, a complètement disparu. Les haine que s’échangent les uns et les autres portent désormais sur des perceptions différentes des uns et des autres, elles opposent des simulacres de réalité, c’est-à-dire qu’elle s’exercent dans des mondes différents et le seul lien entre les et les autres est bien ce seul sentiment de la haine... La “seconde Guerre Civile” est une guerre d’attrition de la communication : Washington D.C. est tellement devenu Fabulation D.C. qu’on ne voit pas ce qui pourrait l’en faire sortir, et l’on est conduit à penser à un événement extraordinaire, extérieur à Washington D.C., complètement imprévisible pour l’instant.

Un désordre verrouillé

... Dans ce “rangement du désordre” qu’on a tenté d’esquisser, il n’existe aucune force qui puisse prétendre qu’elle recherche l’apaisement. Chacun attaque, ou se trouve dans une position d’attaque même s’il est dans une situation de faiblesse qui nécessiterait normalement une défensive ; mais l’antagonisme et la haine sont trop forts, à ce point qu’aucun de ces trois principaux acteurs ne peut envisager un armistice, encore moins une paix... Le Deep State, qu’on jugeait être le principal acteur, le véritable juge et deus ex machina, et naturellement conduit à liquider Trump ou à le neutraliser complètement, ne parvient à rien de sérieux, et nul ne sait s’il n’est pas lui-même fragmenté. Dans ce désordre, le Deep State ne sait plus qui il est vraiment et quelle est son utilité, et pour quoi, et pour qui il doit agir, et donc il agit en aveugle et souvent contradictoirement.

Les autres, les acteurs accessoires, fabulent aussi, nécessairement dirions-nous, parce qu’ils évoluent dans la logique infernale de ce même simulacre. Ils fabulent indirectement, parce qu’il faut bien réagir à des fabulations qui n’ont par définition aucun rapport avec quelque vérité-de-situation que ce soit ; disons qu’ils fabulent comme on respire, pour ne pas étouffer, tout simplement, puisqu’ils se trouvent à Fabulation D.C.... Dans de telles conditions générales, on ne peut dire que Washington D.C. s’est replié sur lui ou n’est plus une puissance du jeu mondial ; il est devenu un énorme facteur de désordre dans le rangement pourtant en crise du bloc-BAO, et un formidable facteur d’incertitude et de déséquilibre constant. (Même lorsqu’on parvient à sortir du trio infernal Trump-démocrates-presseSystème, on tombe sur un intellectuel du calibre de Chomsky qui vous dit que le parti républicain, au travers de la poussée qu’il exerce pour l’extension du néolibéralisme, “se précipite vers l’abîme” et peut être considéré comme poussant l’espèce [humaine] vers rien de moins que son extinction.) Rien ne nous dit quand cette situation cessera et si seulement elle peut cesser, si elle n’est pas devenue l’essence même du pouvoir de l’américanisme réduit à son simulacre complètement absurde du simple point de vue du fonctionnement.

Il est vrai que dans ces conditions générales, lorsqu’on entend un Macron nous dire que sur tel ou tel problème (la fameuse “ligne rouge” de l’attaque chimique en Syrie, notion de pure communication faussaire et pourrie de manipulations sans fin et réalisées quasiment à ciel ouvert) on le retrouvera toujours “aligné sur les États-Unis”, on a du mal à conserver assez de sérieux pour examiner précisément le fondement et la signification de l’affirmation ; car, qui peut prétendre avoir la capacité de s’aligner, en quoi que ce soit, sur qui si ce soit dans Fabulation D.C. ? On sait qu’il est tout à fait possible que le président Macron soit capable de marcher sur l’eau, mais s’aligner sur Trump, – non, ça jamais il ne le pourra... Pour autant, on ne songera  certainement pas à lui en faire le reproche.