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2219• On admirera, avec réserve et discrétion mais tout de même un certain entêtement, la façon dont les crises, – ou “subcrises” si l’on veut, –s’additionnent sans jamais se clore. • Du vertige ukrainien à l’indifférence iranienne pour nos leçons de morale, de la maîtrise russe à la patience russe (même Netanyahou fait des clins d’yeux à Poutine), notre civilisation sombre avec la majesté et les certitudes du plus grand et plus puissant paquebot du monde. • Le pire nous est promis, des deux côtés, mais personne ne recule ni ne l’emporte. • Bref, “The Harder they Fall”.
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Au plus l’on approche du 5 novembre, au plus les Russes enfoncent les lignes ukrainiennes, au plus la subcrise israélo-toutlemonde s’enlise dans un imbroglio kafkaïen, au plus nous entrons dans cette “salade de crises” (ou de subcrises) pour s’inspirer de l’expression favorites de Kamala, – une “salade de mots” pour caractériser ses discours.
Là-dessus, le débat Trump-Kamala n’a rien démontré à l’avantage de personne sinon l’extraordinaire capacité des journalistes US (les “modérateurs” de ABC) à alimenter le simulacre qui plaît tant à leurs maîtres de Disney et du Complexe Militaro-Industriel.
Ainsi va-t-on tenter de dénouer les fils d’un nœud gordien qui tient le sort du monde, sans beaucoup d’espoir d’y parvenir. Le seul espoir que nous devons entretenir est celui de prier pour que l’effondrement américaniste ne nous fasse pas trop attende. Pendant que les USA s’effondreront dans l’une ou l’autre formule de “guerre civile”, ils auront moins de temps pour produire leur extraordinaire stupidité et en inonder leur pseudo-“politique étrangère”.
Par conséquent, pourvu que Maria Zakharova n’ait pas tort...
« L’Amérique est en marche vers un “désastre total et mondial” et le reste du monde essaie de s’y préparer... »
Dans cette attente, essayons de secouer cette “salade de crises” pour comprendre dans quelle mesure et de quelle façon chacun des ingrédients influence la GrandeCrise.
Les foudres américanistes-occidentalistes du bloc-BAO, c’est-à-dire de la Sainte Alliance transatlantique, ont découvert une fois de plus la perfidie de l’Iran. Les membres du club sont décidés à sévir sous la houlette du plus grand et du plus fort d’entre eux, pris d’une fureur soudaine (« ºUS goes ballistic... », résume dans son titre, grâce à une expression bureaucratique qui demanderait à être rafraîchie [“US goes hypersonic...” ?]), Tyler Durden dans ‘ZeroHedge.com’.
Il parle des missiles de courte portée mais de grande précision et impact explosif que l’Iran aurait livrés à la Russie. C’est le WSJ qui a donné l’information, accompagnée de la courtoisie du Pentagone qui s’est aussitôt appuyé sur cette fuite qu’il avait initiée.
« Le ‘Wall Street Journal’ a été le premier à rapporter vendredi que “l'Iran a envoyé des missiles balistiques à courte portée à la Russie, selon des responsables américains et européens, une mesure qui donne à Moscou un autre outil militaire puissant dans sa guerre contre l'Ukraine et fait suite aux avertissements occidentaux sévères de ne pas fournir ces armes à Moscou”.
» Le Pentagone et les services de renseignement américains mettent en garde depuis des mois contre une telle possibilité et menacent l'Iran à ce sujet, mais un responsable américain a maintenant “confirmé” au WSJ que les missiles “ont finalement été livrés”. La Maison Blanche de Biden a déclaré qu'une “réponse sévère” à Téhéran l'attend. »
Tout le reste suit : la solidarité des petits soldats de l’OTAN, les rodomontades venues de tous les côtés et l’impuissance totale où l’on se trouve de réaliser quelque pressions d’envergure (les sanctions !) tant ces deux pays, l’Iran et la Russie, sont les deux pays les plus sanctionnés du monde et où il n’y a donc plus rien à sanctionner, et qui vivent désormais plutôt bien sans plus rien commercer avec l’Occident-psychotif. Le constat de Durden, qui emprunte des phrases aux communiqué officiel, mélange joliment les complaintes du simulacreSystème et quelques remarques réalistes qu’il fait sans l’aide de personne... Ainsi voit-on côtoyer la menace de « conséquences rapides et graves » et le constat assez simple et de bon sens qu’« il n'y a plus grand-chose à sanctionner ».
« Les pays de l'OTAN dirigés par les États-Unis ont mis en garde contre des conséquences rapides et graves, mais la réalité est qu'à ce stade, il n'y a plus grand-chose à sanctionner, ni en République islamique ni en Russie. Les deux pays font partie des pays les plus lourdement sanctionnés au monde, ce qui n'a fait qu'approfondir leurs relations et les a poussés à se tourner vers les BRICS et les pays du Sud non alignés. Le groupe des 7 pays a déclaré qu'ils se coordonneraient pour punir l'Iran si les livraisons de missiles aux forces armées russes se concrétisaient. »
Les deux compères de ‘TheDuran’, Christoforou et Mercouris, nous racontent les principaux épisodes de cette saga. Ils observent que l’Iran réagit mollement en démentant, à tout hasard, ce qui est déjà fait. Ils confirment les bruits qui bruissent depuis plusieurs semaines sur la livraison de S-400 et de matériels de guerre électroniques qui se sont ajoutés à la livraison de chasseurs Su-35.
« Les Russes attendaient un geste de réciprocité des Iraniens. Ils l’on eut avec autour de 200 missiles balistiques à courte portée, idéalement taillés pour la guerre en Ukraine. »
Les menaces et autres sanctions des pays américanistes-occidentalistes n’ont guère affecté l’Iran. Cet pays a eu surtout des problèmes avec ses alliés des diverses milices islamiques du type-Hezbollah. Elles se plaignent de l’absence de riposte iranienne à Israël après l’assassinat du leader du Hamas à Teheran, et la priorité donnée aux livraisons de missiles à la Russie.
Ce qui nous importe ici, c’est la différence d’attitude de l’Iran et de la Russie vis-à-vis des geignements américanistes-occidentalistes. Sait-on qu’en 2010, les Russes ont suspendu la livraison de S-300 d’ores et déjà payés par l’Iran, sous la pression de l’ONU, de l’OTAN et de toute la bande. Il fallut pas moins de cinq ans pour que les Russes changent leur attitude.
« Si nous regardons quelques années en arrière, il est étonnant de constater que la Russie imposait un embargo à la livraison d’armes à l’Iran et à la Corée du Nord. Maintenant, à cause de la politique occidentale, les Russes travaillent en étroite collaboration avec la Corée et l’Iran. » (Mercouris)
C’est une des grandes réussites américanistes-occidentalistes : agir de façon à ne plus provoquer chez les récalcitrants cette crainte salutaire qui leur fait obéir à l’“ordre international” et à ses “règles”.
L’Iran s’inquiète donc de calmer ses amis des groupes de l’“Axe de la Résistance” plutôt que des menaces étonnantes des dirigeants de l’administration Biden & Cie. D’une certaine façon, Israël, – dans tous les cas Netanyahou, – semble songer à se tourner vers la Mère-Russie qui lui a envoyé beaucoup d’émigrés juifs. Encore un étrange prolongement de cette partie du nœud gordien, où Israël semble benoîtement accepter que Moscou arme l’Iran au nez et à la barbe du bloc-BAO, – donc de lui-même.
Mais, nous explique le Turc Murad Sadygzad, directeur du Middle East Studies Centre temporairement détaché à l’université HSE de Moscou, les nécessités, notamment l’impuissance US, commandent en cette sorte de circonstances. Faudra-t-il demain applaudir Poutine comme faiseur de paix et sauveteur des pauvres Palestiniens encore vivants ? Le nœud gordien fait d’étranges torsions...
« Alors que les négociations menées sous la médiation des États-Unis sont au point mort, Israël s’est apparemment tourné vers la Russie pour obtenir de l’aide afin d’obtenir la libération des otages détenus par le Hamas. Selon un communiqué publié par le bureau du Premier ministre israélien, le secrétaire militaire de Netanyahu est revenu de Moscou le dimanche 1er septembre, après avoir discuté d’un éventuel accord avec le Hamas. Le communiqué ne précise pas si des accords ont été conclus.
» L’appel d’Israël à la Russie pour l’aider à libérer les otages de Gaza peut sembler inattendu, mais il s’agit d’une démarche logique dans le contexte du conflit prolongé et intense avec le Hamas. Les efforts diplomatiques des États-Unis, du Qatar et de l’Égypte n’ayant donné aucun résultat tangible, Israël a choisi de demander l’aide de Moscou, car il entretient des liens de longue date avec les factions palestiniennes, dont le Hamas. Cet appel souligne l’importance stratégique de la Russie au Moyen-Orient, où elle agit non seulement comme partenaire de divers acteurs, mais aussi comme médiateur capable d’influencer des parties moins accessibles aux diplomates occidentaux. [...]
» Pour Netanyahou, se tourner vers la Russie n’est pas seulement une démarche diplomatique, mais aussi une démarche visant à préserver son influence politique. La pression politique intérieure s’intensifie et chaque jour où les otages restent captifs augmente le risque de son expulsion. L’échec de la résolution de ce problème pourrait conduire à sa démission et même à des poursuites judiciaires pour des affaires de corruption en cours qui continuent de jeter une ombre sur la politique israélienne. Ainsi, demander l’aide de la Russie est une tentative de trouver une issue à une situation critique qui pourrait s’avérer fatale pour la carrière politique de Netanyahou.
» Pour la Russie, cette demande représente une opportunité de renforcer sa position au Moyen-Orient, de consolider ses liens diplomatiques avec Israël et d’affirmer son rôle d’acteur international clé capable de résoudre des conflits régionaux complexes. Les liens étroits de Moscou avec le Hamas en font un partenaire important dans d’éventuelles négociations pour la libération des otages. En outre, la Russie peut utiliser son influence sur le Hamas et d’autres factions palestiniennes pour obtenir un compromis qui était jusqu’ici difficile à atteindre. »
Netanyahou est en lambeaux, avec les deux tiers d’Israël dans la rue, réclamant son départ. L’IDF piétine partout, puisqu’il n’y a rien d’autre à faire. Les avions russes font la navette avec Teheran, amenant des S-400 et repartant avec des missiles iraniens. Ainsi va le monde.
Pour retrouver la recette de cette “salade de crises”, les américanistes et leurs amis Français et Britanniques, piliers du droit par la force, sont, sinon sur le sentier de la guerre, sur la voie de donner aux zélenskistes l’autorisation d’utiliser leurs missiles à “longue-courte” distance (jusque 300-500 km) vers l’intérieur du territoire russe d’avant-2014. La nouvelle date d’hier, avec un Blinken ravi, après un débat d’une longueur admirable qui rend grâce à leur profonde sagesse. S’en doutait-on ? La finesse de la manœuvre est d’origine américaniste, le reste suivant en bon ordre.
• On prendrait cette décision pour montrer aux Russes de quel bois l’on se chauffe ;
• Ils (les Russes) paniqueraient, s’affoleraient et cèderaient sur la principale exigence de la partie d’en face : venir à des négociations avec l’Ukraine et faire des concessions majeures.
• Là-dessus, pour ajouter du sel sur la queue, on y ajouterait l’argument d’une punition de la Russie pour avoir accepté des fusées sol-sol iraniennes.
La finesse est colossale, et la maîtrise psychologique absolument superbe. Qui connaît les Russes sait bien qu’ils n’attendent que cela pour céder : pensez, ils ne cessent de faire reculer les Ukrainiens en leur assénant une rouste mémorable ! C’est donc maintenant qu’ils vont céder, n’est-il pas ? Nous en restons nous-même plume-bée, à cours de commentaire admiratifs : ils ont donc décidé d’être “plus bêtes que bêtes”, un peu comme l’autre lave “plus blanc que blanc” ? Si fait...
Les commentateurs éclairés, indépendants et sans contrainte, en viennent tous à la même conclusion qui est celle de la Troisième dernière (WWIII), alors que les Russes signalent désespérément qu’ils répondront à mesure, et aussi qu’ils disposent bien entendu de bombes nucléaires tactiques prêtes à l’emploi. Des voix dans le désert...
« La Maison-Blanche est prête à donner le feu vert à l’utilisation de missiles américains pour frapper des cibles en profondeur de la Russie. Les Russes ont de nombreux moyens de riposter. Pourquoi prenons-nous ce risque? L’Ukraine n’est ni notre allié par traité et ne représente pas un intérêt vital. Biden lui-même a un jour averti que cela pourrait déclencher une troisième guerre mondiale » (David Sacks, milliardaire, sur tweeterX)
Des ex de la CIA habitués des commentaires stratégiques, Ray McGovern et Larry S. Johnson.
• « “Je crains que [les États-Unis] ne tentent quelque chose de vraiment drastique comme une attaque sous fausse bannière ou peut-être même une mini-arme nucléaire”, a déclaré McGovern, inquiet que les États-Unis puissent inventer un épisode tel que l’incident du golfe du Tonkin qui a entraîné le pays dans la guerre du Vietnam. “Voyons ce qui se passera dans les prochaines semaines. Je pense que Poutine a raison. Il est seulement intelligent de voir qui gagnera le 5 novembre. D’ici là, je retiens encore mon souffle”.
» “Il est vraiment difficile de savoir ce que Biden et Sullivan, qui dirigent les choses, pensent vraiment”, a-t-il affirmé. “Certains de mes meilleurs amis et analystes pensent qu’ils sont fous. Et il est vraiment très difficile de prédire ce qu’ils vont faire s’ils sont fous”.
» “Les Russes disent aux Européens : ‘Écoutez, si Biden, Blinken et Sullivan optent pour une arme nucléaire tactique, pour l’amour de Dieu, s’il vous plaît, souvenez-vous que nous en avons aussi. Et où les utiliserons-nous ? Nous les utiliserons en Europe’”, a déclaré McGovern, résumant la réponse possible de la Russie.
• « “En ce qui concerne ces discussions sur l’Ukraine et la Russie, l’approche de Kamala Harris est celle d’Hillary Clinton en 2016, selon laquelle Donald Trump est un ‘instrument de la Russie’, ‘un singe qui capitule’, ‘il va donner à Vladimir Poutine tout ce qu’il veut’. Et Kamala Harris et les démocrates ‘vont combattre les Russes bec et ongles’. Cela souligne simplement qu’il n’y a pas de place aux États-Unis en ce moment pour un politicien de l’opposition qui puisse faire valoir que nous devons parler à la Russie, que nous devons traiter la Russie comme des adultes et avoir un respect mutuel”, a déclaré Johnson. “Le seul changement de politique possible est que Trump soit élu et qu’il y ait un effort pour arrêter la guerre. Si ce sont les démocrates, alors la guerre continuera. Elle continue pour une bonne raison : elle rapporte beaucoup d’argent aux gens. Si vous regardez les cours des actions de Raytheon, General Dynamics, Lockheed Martin, ils ont doublé et même triplé dans certains cas depuis le début de l’opération militaire spéciale”. “Nous parlons donc littéralement de milliards, de dizaines de milliards de dollars qui sont en train d'être créés”, a souligné l'observateur. »
La perspective d’une Troisième Guerre mondiale est notre quotidien depuis trois ans, et même dix, et même plus encore. Elle n’a absolument rien changé de la perception générale que nous avons du conflit ukrainien, malgré son évolution qui est actée par ailleurs telle qu’elle se dessine comme une superbe défaite de qui-l’on-sait, comme une réalité parallèle à la réalité, avec choix laissé à chacun de désigner la vraie et la bonne. Cela se passe à peu près comme le débat Trump-Kamala, qui était vraiment un débat à trois contre un, sous le regard impavide et indifférent, ravi et consterné des uns et des autres. Là aussi, les deux parallèles progressent parallèlement (c’est assez logique) sans qu’aucun choix ne nous soit vraiment imposé.
Aujourd’hui est si différent d’hier, mais qui s’en avise ? Les Russes ont hésité pendant cinq ans avant de livrer des S-300 qui leur avaient été payés par les Iraniens, au très-grand dam de toutes les élites du Système. Aujourd’hui, ils livrent des S-400, et nul ne s’en avise vraiment. La perception affecte autant les amateurs des deux réalités, démentant aussi bien les catastrophistes de la WWIII que ceux qui nous annoncent le triomphe écrasant du Système jusqu’à la réduction totale des opposants : les deux perceptions avancent de pair et aucune n’est totalement stoppée ou annihilée. Ce n’est pas notre patience ni notre entêtement, de l’un ou l’autre bord, qui parviennent à ce résultat mais bien l’énorme opiniâtreté et l’incroyable ténacité des courants qui s’affrontent. Bien que l’un soit du parti du vrai et l’autre de celui du simulacre, rien ni personne n’est aujourd’hui capable de les départager. Alors, on laisse faire le Ciel et les dieux.
Mis en ligne le 12 septembre 2024 à 18H00