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3200• Malgré les pressions extrêmement fortes qu’il subit, Orban a sauvegardé l’essentiel de ses intérêts nationaux à l’issue d’une rencontre avec le Secrétaire Général de l’OTAN. • Avec un texte d’Andrew Korybko.
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On lit ci-dessous le commentaire d’Andrew Korybko sur les résultats de la rencontre entre Viktor Orban et le secrétaire général de l’OTAN Stoltenberg. L’OTAN aurait voulu que la Hongrie rentre dans le rang, c’est-à-dire adopte une position conforme à la majorité pour que celle-ci devienne unanimité, et écarte ainsi définitivement la possibilité d’un veto dans une décision vis-à-vis de l’Ukraine (les règles de l’OTAN exige l’unanimité de ses membres pour toute décision politique d’importance).
En réalité, comme le souligne Korybko, nul n’a jamais raisonnablement cru que la petite Hongrie puisse, toute seule, arrêter la marche de l’OTAN. Ce qui intéressait Orban, c’était de négocier son acceptation d’un certain apaisement, c’est-à-dire que son pays ne soit impliqué en rien, ni dans la décision, ni dans le financement, ni dans les manœuvres avant et dans l’éventuelle entrée de l’OTAN en Ukraine. La seule concession qu’il a faite est de modérer son opposition publique aux actes de l’OTAN dans ce domaine. Pour le reste, la Hongrie a obtenu ce qu’elle voulait et “pouvait vouloir” selon le rapport des forces, c’est-à-dire rester sur ses positions hostiles à l‘aide apportée à l’Ukraine.
De ce point de vue, le commentaire de Korybko est parfaitement approprié. Orban a eu l’essentiel de ce qu’il pouvait avoir et l’OTAN ne sort pas très glorieusement de cet “affrontement” en acceptant de garder dans ses rangs un dissident affirmé sur ce qui fait l’essentiel de la politique de l’Organisation. Orban confirme sa position extrêmement courageuse en tenant à distance l’entité monstrueuse que représente Stoltenberg. Effectivement, comme le dit Korybko, l’énorme OTAN reste fragile du côté de son image : elle ne veut pas trop ressembler au Pacte de Varsovie et s’abstient de nous refaire Budapest-1956 en envahissant la Hongrie pour dissidence avérée.
Le texte de Korybko parait sur son site ce jour même.
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La rencontre de mercredi entre le Premier ministre hongrois Viktor Orban et le chef de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a permis aux deux dirigeants de parvenir à un accord sur l’aide militaire du bloc à l’Ukraine. La Hongrie ne s’opposera pas aux décisions de l’OTAN à cet égard comme elle l’a brièvement fait avec celle de l’UE en échange de ce que l’OTAN ne force pas la Hongrie à participer à une intervention conventionnelle là-bas, à finance les forces armées ukrainiennes et à autoriser que son territoire soit utilisé pour faciliter ces projets. En termes simples, ils ont convenu d’être en désaccord et de ne pas s’immiscer dans les affaires de l’autre.
Même si certains observateurs étrangers favorables à Orban pourraient en être déçus, ils feraient bien de réfléchir à quel point il était irréaliste pour eux d’imaginer que lui seul pourrait arrêter les plans de l’OTAN. Le dirigeant hongrois est devenu un héros culte parmi les dissidents occidentaux qui s’opposent à la guerre par procuration menée par le bloc contre la Russie via l’Ukraine, après avoir courageusement mis en garde au cours des deux dernières années contre le caractère irresponsable et dangereux de cette politique. Ses déclarations fermes traduisaient parfaitement leurs points de vue sur cette question.
Néanmoins, il n’est en fin de compte qu’un homme à la tête d’un pays relativement petit dont le rôle dans cette guerre par procuration est éclipsé par celui de la Pologne voisine et de la Roumanie voisine. Il lui était donc impossible de mettre un frein aux projets de l’OTAN et tout ce qu’il pouvait espérer, au mieux, c’était d’obtenir des garanties publiques que la Hongrie ne se laisserait pas entraîner dans cet imbroglio. C’est précisément ce qu’il a reçu mercredi, ce que Stoltenberg lui a offert pour tenter d’améliorer la réputation du bloc.
Du point de vue de l’OTAN et compte tenu de l’incapacité de la Hongrie à mettre fin à une intervention conventionnelle en Ukraine et à empêcher d’autres pays de financer les forces armées ukrainiennes, il était plus logique de laisser ce membre capricieux tranquille afin de détourner l’attention des accusations d’intimidation. Faire publiquement pression sur la Hongrie pour qu’elle envoie ses troupes en Ukraine et laisse d’autres transiter par son territoire, malgré l’impopularité de ces politiques dans le pays, pourrait donner lieu à des comparaisons négatives entre l’OTAN et le Pacte de Varsovie.
En conséquence, les Hongrois pourraient dans ce cas se rebeller violemment contre leurs occupants littéraux de l’OTAN et pourraient également bloquer les routes logistiques dont dépendrait cette intervention conventionnelle, créant ainsi bien plus de problèmes de sécurité, de logistique et d’image que cela n’en vaut la peine. C’est pourquoi le choix a été fait de respecter la décision de la Hongrie de rester en dehors du champ de ces activités, ce qui est pragmatique et donne également un faux crédit aux affirmations selon lesquelles l’OTAN est un ensemble de démocraties et non de dictatures libérales.
Orban savait qu’il ne pourrait jamais arrêter ce qui pourrait arriver, c’est pourquoi il voulait seulement obtenir des garanties publiques que les intérêts nationaux objectifs de son pays seraient garantis dans ce scénario. Son précédent conflit avec l'UE au sujet de l'Ukraine visait principalement à garantir publiquement que les fonds bloqués par la Hongrie ne seraient pas redirigés vers ce pays, tandis que le dernier en date avec l'OTAN visait principalement à garantir publiquement que ses troupes et son territoire ne seraient pas utilisés pour intervenir dans ce pays. .
Non seulement il a obtenu ce qu’il attendait des deux, mais il a également convaincu l’UE d’accepter un mécanisme de vérification de l’aide non létale à l’Ukraine et l’OTAN d’accepter que la Hongrie ne finance pas les forces armées ukrainiennes. Ces deux concessions étaient cependant superficielles puisque le mécanisme de l’UE ne contient aucun droit de veto pour interrompre la dispersion continue de cette aide si la corruption devient encore plus incontrôlable, tandis que l’OTAN ne dispose d’aucun mécanisme pour forcer la Hongrie à financer de toute façon les forces armées ukrainiennes.
Ces deux aspects ont été ajoutés à leurs accords respectifs dans un souci d’apparence publique afin de faire apparaître ces blocs interconnectés plus démocratiques qu’ils ne le sont en réalité. L’UE dispose de moyens légaux pour contourner la Hongrie, tout comme l’OTAN dispose de moyens de force, mais ni l’un ni l’autre n’a voulu y recourir car il était plus facile de donner à la Hongrie ce qu’elle voulait. De même, il était également plus facile pour la Hongrie d’accepter ces accords que de résister de manière chimérique à ces deux accords, ce qui pourrait se terminer par un désastre si elle osait le faire.
Contrairement à ce que certains partisans d’Orban à l’étranger auraient pu spéculer sur le fait qu’il aurait été effrayé par la tentative d’assassinat du Premier ministre voisin Robert Fico pour parvenir à ce dernier accord, le dirigeant hongrois n’a rien renoncé à l’exception de ses protestations symboliques et a obtenu tout ce qu’il voulait. L’OTAN détruirait sa crédibilité en revenant sur ses garanties publiques envers la Hongrie, ce qu’elle n’a aucune raison de faire puisque la Hongrie ne fait de toute façon pas partie intégrante de ses plans pour l’Ukraine. Cet accord devrait donc durer.