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1031Ce n’est pas un hasard du calendrier, ni les soirées agréables de novembre à Tel Aviv, qui ont poussé les gens de Lockheed Martin (LM) à y débarquer à la fin de la semaine dernière. Reuters publie le 9 novembre une dépêche contant l’aventure, les dirigeants de LM en Israël, sans aucun doute pour presser de toutes leur chaleureuses forces les Israéliens de passer une commande ferme du JSF, alias F-35. Reuters note que les Israéliens ne sont pas chauds, chauds, face aux enthousiasmes des officiels de LM (et du Pentagone)…
«U.S. officials have predicted a [F-35] sale to Israel may be clinched early next year. Funding for the jets, which will cost $40 million a piece, would come mainly from U.S. defence grants to Israel, which will total $30 billion between 2007 and 2017. Israeli officials have quietly voiced reluctance to be rushed into a deal given ongoing discussions on how many Israeli technologies could be incorporated on the Lockheed planes, their delivery schedule, and pricing.»
La réponse de LM aux hésitations d’Israël est à la fois surréaliste et insolente, mais par ailleurs bien dans la logique de puissance irrésistible du programme que les Américains continuent à présenter. Elle consiste à dire : “les Israéliens verront leurs hésitations à commander l’avion disparaître s’ils commandent l’avion” (mais tout de même, sous-entendu : “car nous aurons ainsi un argument pour l’imposer aux autres”)… «Lockheed Chief Executive Robert Stevens […] said such concerns could be better addressed by finalising a sale. The earlier one can participate in a programme, the greater the amount of participation,” he told reporters.»
La cause de cette poussée de LM auprès d’Israël, telle qu’elle est présentée, semble d’abord être un problème de trésorerie. Dans cette urgence, on distingue deux choses: d’abord que LM n’est peut-être pas en si bonne santé financière qu’on pourrait le penser; lorsqu’un dirigeant d’entreprise s’emploie à démontrer que cette entreprise est en bonne santé, on est fondé à s’inquiéter à son sujet, surtout par les temps qui courent. La deuxième chose est qu’en s’intéressant à la cagnotte israélienne, qui est en grande partie alimentée par l’aide américaine, les dirigeants de LM laissent percer quelques inquiétude sur la pérennité des commandes du Pentagone en y ajoutant la pression d’une entreprise US pour une dépense financée par son propre gouvernement. Là aussi, l’assurance affirmée que le budget du Pentagone couvre LM jusqu’en octobre 2009, avec des perspectives dans le plan quinquennal en cours d’élaboration, suggère à l’inverse des inquiétudes concernant les intentions de l’administration Obama à propos de ce budget.
«Asked if Lockheed was attracted by the fact that Israel has such a large budget available and has managed, so far, to avoid the massive fiscal crunches of the world financial meltdown, [LM senior vice président] Trice said: “Yes.” Stevens said Lockheed's financial prospects looked good thanks to Washington's awareness of ongoing military needs and that fact that the U.S. defence budget has been set through October 2009, with talks under way about the next fiscal year. “Our business remains competitive, and it's healthy and it's strong,” he said.»
Des précisions sont finalement données par Robert Trice sur les difficultés du programme, ce qui complète assez bien le climat général de cette tournée en Israël…
«But Trice acknowledged there were some creaks in the international coalition of F-35 production partners. An early order by Italy, he said, was scrapped as not affordable. And Norway may see domestic political opposition to going through with the F-35, Trice said. An Israeli defence official said Israel still planned to place an order for the plane, anticipating its delivery by 2014. But he said there were also discussions in Israel on alternatives, such as buying more of the mainstay F-16 jets.»
Résumons notre propos, en tentant de traduire ces diverses indications. LM n’est pas en très bonne santé, le programme JSF/F-35 non plus. Une hypothèse sérieuse est que le sort de LM commence à être directement dépendant du sort du programme JSF. Israël est pressé de participer au programme (commande) parce qu’Israël reçoit de l’argent US et que son engagement donnerait un peu d’air à ce même programme. Au-dessus de tout cela, comme l’argument d’extrême urgence, se trouve une immense inquiétude de savoir ce qu’Obama va faire du Pentagone (de son budget) et, par conséquent, du JSF. Une commande israélienne du JSF serait une bonne protection du programme contre des réductions draconiennes, quoi qu’il ne soit pas assuré que cela soit suffisant. La mention qu’Israël serait aussi bien intéressé par des F-16 supplémentaires à la place du JSF est à cet égard une indication intéressante et pas très rassurante pour LM.
Dans le domaine fleuri et abondant du JSF, nous nous trouvons également dans la tension et l’incertitude de la nouvelle administration. Inversement, cette inquiétude palpable de LM est une sérieuse indication que l’administration Obama a peut-être dans ses cartons des mesures radicales à l’égard, ou à l’encontre du Pentagone et de son budget.
Mis en ligne le 10 novembre 2008 à 12H34