Paroles de capo

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Certains esprits jugent que la circonstance de la mort proclamée de Osama ben Laden est une circonstance privilégiée, invitant à déployer les conceptions qui doivent présider aux relations internationales dans notre univers du XXIème siècle. Ils apprécient alors l’affaire ben Laden en corrélation avec celle de l’attaque de Tripoli au cours de laquelle un des fils Kadhafi, et des petits-enfants, ont été tués. L’un de ces philosophes des relations humaines prend ici la parole.

…Il s’agit de Daniel Goure, du Lexington Institue, dont on connaît les attaches, certainement d’ordre intellectuel parmi d’autres, avec Lockheed Martin. Pour Daniel Goure, tuer Ben Laden est aussi nécessaire et légitime que tuer Kadhafi (la proposition est ici éclairée par l’agression contre le fils de Kadhafi, et sa mort, – d’une certaine façon, ça ne sort pas de la famille). L’argument technique est clair et particulièrement entrainant, sinon pétillant pour l’esprit ; il offre l’explication que les systèmes et processus de contrôle et de commandement sont, dans une guerre, un objectif prioritaire chez l'ennemi qu'on veut défaire ; il poursuit par l’observation que, dans ces divers groupes informels et dans les pays faillis des bordures métèques de nos riches contrées, les dirigeants sont eux-mêmes la partie intégrante la plus importante du système de communication et de contrôle ; il conclut, CQFD, que la liquidation physique est dans ce cas un acte d'une authentique légitimité, sinon un acte héroïque selon les principes de la rentabilité du fonctionnement du Système :

«…As is well known after conflicts in the Balkans, Iraq, Afghanistan and elsewhere, U.S. forces are forbidden by a presidential directive from directly and deliberately targeting foreign leaders. But past U.S. air campaigns have blurred the line between attacking functions, command and control, and attacking individuals who direct hostile military or terrorist organizations. For many of this country’s enemies, command and control is vested in the person of the adversary leader and not in facilities or communications systems. Operation Iraqi Freedom began with a massive air strike on the Dora Farm, believed at the time to be Saddam Hussein’s hiding place.

»U.S. and European leaders have repeatedly said that Gaddafi must leave but offered no credible way out. This declaration is based on the recognition that control of the Libyan government and the leadership of Libyan military forces is vested completely in Gaddafi and his family. Absent Gaddafi and the war against the rebels would collapse…»

Pour cette chronique du 2 mai 2011 qui nous éclaire sur l’extension du domaine de la guerre à l’exécution sommaire vécue comme un acte purement technique, Goure a choisi comme titre «It’s Not Personal, It’s Strictly Business». Il s’en explique d’abord dans son entame, et cette explication, en nous éclairant absolument, nous permet de mieux saisir la substance de la pensée : «So said Michael Corleone in the movie, The Godfather, to convince his brother and Mafia associates that it was okay to assassinate a corrupt police captain.»

Cela signifie, par conséquent, que nous fonctionnons exactement comme Cosa Nostra, que BHO est, au milieu des capi des pays du bloc BAO, le capo di tutti capi ; cela signifie également que la violence, l’agression sous toutes ses formes, sont les conditions mêmes du développement et du fonctionnement de notre système, du Système en général. Personne n’a rien à redire à cette interprétation, qui a, de plus, le mérite de retrouver les racines les plus profondes et les plus spécifiques de l’américanisme, et donc du Système. On observera évidemment que ces caractères sont évidemment ceux du système de l'“idéal de puissance” poussé à son extrême.

L’extension de cette interprétation de Daniel Goure implique que le système du bloc BAO intègre naturellement la violence d’agression et la violence arbitraire comme des formes normales de fonctionnement, répondant plus aux lois du profit et du commerce qu’à des références plus complexes et inutilement complexes, comme notamment la question de la légalité dans la guerre. D’une façon plus générale, le point de vue de Goure montre que l’idée de l’existence de la guerre en tant que situation exceptionnelle, à considérer d’un point de vue également exceptionnel, est en train de perdre tout crédit. La conception qui sort triomphante de la liquidation de ben Laden comme de l’attaque contre la famille Kadhafi, selon la plume de Goure, c’est la conception même du business, à la fois l’argument du fonctionnement continu et débarrassé des entraves d’une régulation tatillonne ; l’argument de l’efficacité et de la rentabilité par le choix de procédures et d’actions débarrassées des embarras de procédure, et des freins de considérations annexes fort improductives (le droit, la souveraineté, etc.) ; l’argument de la nécessité de l’élimination de considérations annexes, telles que les spéculations politiques, les références aux relations diplomatiques, etc., qui ont pour effet de retarder l’application des mesures nécessitées dans l’immédiateté d’une situation donnée, dont l’opportunité, en termes de marketing et d’investissement, implique l’action effectivement immédiate. En un mot (ou en huit, plus précisément) qui nous débarrasse effectivement de l’embarras pesant et d’une rentabilité nulle d’une démarche dont l’affectivité n’est sans doute pas absente, «It’s Not Personal, It’s Strictly Business».


Mis en ligne le 3 mai 2011 à 15H50

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