Pas si loin de l’ultimatum

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Après un petit tour de quelques jours où fut évoquée, au travers de diverses déclarations, la possibilité d’une coopération entre la Russie et les USA dans le système anti-missiles à installer en Europe, et après une réaction finalement très réservée des Russes, les Américains mettent les choses au point. Leur manière est habituelle, — tranchée, sans concession, “conformément aux plans prévus”. Ce n’est pas un ultimatum mais ce n’en est pas si loin ; dans tous les cas, c’est une mise au point qui nous dit qu’il ne semble pas que les Américains abandonneront leurs projets de déploiement.

… Tout cela par la bouche de Eric Edelman, sous-secrétaire à la défense chargé de la politique, comme nous le rapporte une dépêche AFP relayée par Spacewar.com, en date du 3 avril.

«“We want to cooperate with Russia,” said Eric Edelman, undersecretary of defense for policy.

»“But that being said, I don't think if for some reason we're unable to reach a commonly agreed way ahead, that we would want to accede to Russia being able to dictate what we do bilaterally with other countries or what NATO does as an alliance.”

(…)

»The United States believes that the “threat” posed by Iran “starts to mature in around 2015,” Edelman said.

»“And that's one of the reasons we're moving ahead now is we want to have a capability in place to meet that threat and the timeline it's developing on.”

»Edelman recalled that Russia has, under the Anti-Ballistic Missile Treaty, the right to maintain around 100 interceptors around Moscow.

»“I think they've got about, I think 85 or 86 nuclear-tipped interceptors deployed. Don't see how that's been a threat to the stability of Europe over the last 35 years,” Edelman said.

»“The fact that we're going to have potentially 10 ... non-nuclear, non-explosive kinetic vehicles in Poland — I don't think that's a threat to Russia.”»

Les précisions de Edelman sont très intéressantes. Elles montrent que le Pentagone ne pense pas en termes de perception stratégique, dans le cadre politique des relations multilatérales, mais bien en termes techniques bruts de poids de la quincaillerie. Selon cette comptabilité, il a évidemment raison, les antimissiles en Pologne et en Tchéquie ne changent rien à l’équilibre des forces. Mais l’argument qui est discuté aujourd’hui est celui de la déstabilisation géographique. Les Américains l’ignorent complètement, comme si la géographie (et notamment l’Europe) n’existait pas, et comme si seules les armes comptaient. (Les missiles anti-missiles du traité ABM sont contenus dans le seul cadre des relations stratégiques USA-URSS et n’ont rien à voir, au niveau de la perception, avec la situation européenne.)

On avait déjà perçu ce découplage avec la crise des euromissiles en 1977. Les Américains ne voyaient pas, à l’origine, en quoi les SS-20 déstabilisaient la situation stratégique, puisque, en capacités offensives et en mégatonnage, la situation ne changeait guère. Ce fut la perception par les Allemands d’une déstabilisation régionale, géographique, qui les obligea à finalement intervenir.


Mis en ligne le 4 avril 2007 à 17H18