Perspectives otaniennes à l’Est (section Ukraine)

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Bon gré mal gré, comme on dit “vogue la galère”, l’OTAN et sa bureaucratie continuent à voguer au gré des perspectives d’élargissement. Il y a une décade d’ici, le NAC (North Atlantic Council) s’est rendu en grandes pompes en Ukraine. Le NAC a été reçu comme il se doit, il s’est réuni solennellement à Kiev et il a reçu, également comme il se doit, la sémillante et ravissante Première ministre d’Ukraine Ioulia Tymochenko. Ainsi a-t-on pu entendre, pour ceux qui écoutaient, son avis sur l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN, ou, plutôt, sur la plan de préparation à l’adhésion (MAP).

D’une façon générale, et pour montrer qu’elle est tout de même «dans le rang», selon le commentaire sarcastique d’une source à Bruxelles, Tymochenko s’est dite favorable au plan d’adhésion. Puis elle a enchaîné, d’une façon séduisante et significativement contradictoire, en revenant aux réalités ukrainiennes et en mentionnant trois choses:

• D’abord, l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN mettrait en cause l’unité de son pays.

• Ensuite, la relation de l’Ukraine avec la Russie est «importante pour l’Ukraine et ne saurait être qu’une relation de coopération».

• Enfin, l’adhésion n’est pas une priorité pour la population ukrainienne qui est plutôt préoccupée par son niveau de vie, ses problèmes de santé et d’éducation, et Tymochenko ajoute que «ce n’est pas non plus une priorité pour son gouvernement…».

Pour poursuivre le commentaire de cette rencontre, la source proche de l'OTAN que nous citons observe que «certains ont entendu ces commentaires de Tymochenko tandis que d’autres ne les ont pas écoutés…». D’autre part, on ne cache pas que Tymochenko pourrait éventuellement modifier son opinion, conformément aux canons otaniens-américanistes si elle s’engageait dans un projet qu’on lui prête de briguer la succession de l’actuel président Viktor Iouchtchenko. On comprend donc que le soutien de cette même fraction otanienne-américaniste au pouvoir politique ukrainien s’accompagne de consignes serrées sur ce qu’il importe de penser, et que cette sorte de pensée va nécessairement dans le sens de l’enthousiasme pour l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN.

Notre source nous explique également que, d’un point de vue plus européen et moins aligné sur les américanistes, qu’on trouve tout de même au sein de l’OTAN, on considère, notamment à la lumière de l’épisode ci-dessus, que l’élargissement est à la fois «un enjeu très important et un important facteur de division au sein de l’Alliance». S’il n’y avait les Américains, cet enjeu de l’élargissement n’existerait pas parce que l’Europe ne s’y attacherait pas une seconde, parce que l’Europe ne cherche pas une confrontation avec la Russie et que l’élargissement a de fortes chances d’y conduire. Il y a une certaine grogne chez certains Européens à cet égard, et l’on peut dire que la mauvaise atmosphère du sommet de Bucarest sur ce sujet perdure. En conséquence, observe encore notre source, «l’avis souvent rencontré à l’OTAN est qu’il n’y aura guère de nouveauté sur l’élargissement, lors des réunions ministérielles de l’OTAN en décembre» Cette prévision est d’autant plus justifiée, bien sûr, que les USA, en pleine transition du pouvoir, seront sans politique définie active en général, et sur ce sujet particulièrement.


Mis en ligne le 27 juin 2008 à 12H22