Plongée “tout schuss” dans le cloaque français

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Plongée “tout schuss” dans le cloaque français

28 octobre 2020 – Rassurez-vous, je ne vais pas parler de Codiv19, je veux dire : pas ici, pas pour l’instant, pas pour ce cas, pas dissimulé pour autant qu’on y viendra, et vite... Je vais parler de cet ensemble BlocBAO-UE-France, avec France soi-même en bout de chaîne, pas du tout chaînon manquant pour autant ; en ‘posture verticale’ comme ils disent, c’est-à-dire souveraineté retrouvée et resplendissante, Macron regnante, salons et plateaux (TV) bourdonnant d’avis péremptoires et tenus avec une main de fer dans les bornes bien calibrées de la très-sage parole politique-correcte selon les normes ; sous l’observation très parisienne et plongées dans les jeux drôles, de rôle et d’esprit, affectionnés dans les divers petits postes de “désintox” et autres Fact-Cheking, sentinelles avec portables très chouettes et directement dénonciateur, du type-Yann Barthès (excellent et sympathique garçon), installés dans les courants doucereux-ricanants de la moraline masquée dotée de la vivacité superbe dite du ruissellement ; en plus postes favoris des gros cahiers de pub en dizaines voire centaines de €millions d’annonce, des belles vertus du Corporate Socialism et des grands esprits de la Woke-Ideology...

Et puis, de l’autre côté, les ricanants, les complotistes-perdus-d’avance, les haineux du troupeau français qu’on exhorte à se défendre contre la Modernité dévorante, en lui crachant face rectal qu’il n’a aucune chance de se défendre parce que des pauvres êtres, moutons pas moins, des perdus d’avance, et les mauvais bergers qui continuent à fulminer, à mépriser le troupeau de ces moutons du type-La Boétie, qu’il pourrait au moins avoir le reste de correction raidie de se défendre, qu’il n’a aucune chance parce qu’il pue et qu’à cause de ça il doit tenter sa chance, qu’il gît là, bêlant et sans espoir. Ceux-là aussi, ces entraîneurs de causes perdues (le troupeau moutonier) dont on prend garde à leur maintenir la tête sous l’eau en les insultant parce qu’ils ne resopirent pas, ceux-là aussi, et encore plus, ils traînent leur paquet de fiante sifflante, Yann Barthès invertis mais aussi bien aiguisés...

Mais bon, partie-bile en partie recrachée, je précise que ce dont je vous parle est d’ordre assez général, concerne quelques points bien précis, dont le dernier sera un excellent texte de Bruno Guigue, faisant bilan de l’action civilisatrice, postmoderne, déconstructrice à la mode, concernant la malheureuse Syrie. J’ajouterai sur le chemin quelques précisions venues directement du Système dont les héroïques résistants qui disent s’opposer à lui ne cessent de décrire l’impossibilité inhérente de l’arrêter, tant sa muflerie hurlante est terrifiante, partout identifiée et calibrée, se révèle incroyablement efficace dans son incapacité supposée. Ils méprisent les moutons qui ne font rien et eux-mêmes, flambards comme pas deux, ne font rien en s’en glorifiant. Plus on est de paradoxes plus on rit, surtout quand les paradoxes permettent de se défiler.

Vous contant tout cela, j’ai l’impression de faire rapport d’un rêve, ce qui pourrait être le cas vu mon réveil soudain et si matinal, au cœur de la nuit... Revenons à nos moutons.

Ainsi de tel autrefois-fonctionnaire de l’UE, un pied français l’autre bruxellois, avec lequel j’ai des relations affectueuses qu’entretiennent nos préoccupations et orientations communes ; je l’appelle X pour la commodité et la clarté du propos, parce que ce que je veux vous confier est sérieux, c’est-à-dire éveillé, et non l’objet d’un rêve... X donc, me rapporte qu’il a reçu un téléphone, son interlocuteur, de l’UE justement, interrogeant en X une relation qu’il juge plutôt indépendante donc assez libre, mais bien au fait des choses françaises, pour l’informer de certaines initiatives ou autres françaises.

“Mais qu’est-ce donc que la France a à voir avec l’affaire Navalny, qu’elle poursuit férocement en dénonçant les Russes et Poutine, alors que par ailleurs mais pas si loin et même urgemment avec les terroristes tchétchènes, elle a des choses importantes à demander aux Russes et à Poutine ?” Réponse, je crois assez ironique, de X :

“... Eh ben ... ”, – ce qui ne se discute pas.

Le même interlocuteur de X, le brave fonctionnaire UE et bipède, me dit X mon aimable source, est lui-même engagé dans le vaste processus de la jungle kafkaïenne des sanctions antirusses du fait de l’UE bien sûr, notamment à propos de ce type, ce Navalny, dont on ne sait pas très bien ce qu’il faut penser de tout ce qu’il raconte, mais qui est la meilleure raison du monde pour un nouveau TGV de sanctions contre la Russie et Poutine. En retour de sa question, X l'interroge à propos des causes de la politique-UE à l’encontre de la Russie, à propos de Navalny et du reste qu’importe... Réponse à ma source-X de son interlocuteur UE-bipède à ce propos :

“... Eh ben, Eh ben ... ”, – on ne peut être plus clair.

Et là-dessus, je vous dis que j’en ai une autre de cette même source, encore plus récente et plus chaudasse. Suite à l’attentat terrible que vous savez, vous n’ignorez donc pas que Darmanin, Secrétaire du plus haut degré de l’État, très logiquement puisqu’il est question de terroristes tchétchènes que les Russes connaissent sacrément bien, a demandé à son Éminence-président l’autorisation de contacter la partie Russie, très-amie vous savez finalement, pour lui demander son aide. Le Président-Éminence ne se tient plus de joie : il juge l’initiative audacieuse, fort heureuse, et son ministre-Secrétaire de Grand État des plus avisés, et en bonne marche pour incorporer dans son Duché quasiment royal des provinces décevantes, qu’elles soient celles de la Loi-d’I-Ritz et des allées du Comté de Vendôme, et même des Magistrats de la Cité qui se croient juges de tout, ceux-là. Quant aux plumitifs, ils plumitiveront, et ils s’y feront. L’Éminence présidentielle l’affirme, il téléphone lui-même et derechef à son très-grand ami Poutine, de son boudoir-secret du Soft-Palace.

Je poursuis donc avec ma source qui, par divers bruissements, chuchotements d’eau claire et limpide quoique très vive, a poursuivi ses investigations et reçu des témoignages de convenance. Je croirais bien que, du côté des Russes, même si discrètement, on ne s’est pas retenu pour s’épancher... L’on rit bien, sous les perspectives du Palais d’Hiver et dans l’ombre de la Forteresse Pierre-et-Paul.

Bref, les Français, par les Voix que vous savez terriblement hermétiques, interviennent auprès des Russes, en passant par Sa Grandeur, Poutine lui-même. Lui, tout sucre tout miel : “Mais bien sûr, mon Dieu et par Saint-George, certes qu’on vous aidera contre l’ignominie terroriste tchétchène, vous pensez !”

Là, on pense du côté français, on se dit que c’est une affaire qui marche, que la dimension internationale, et en plus avec la puissante et respectable Russie, quel beau coup ! Contre le terrorisme, certes, et pour Macron soi-même, devenue le Lider Maximo antiterroriste de la civilisation ... (Fin de la note de synthèse.)

Maintenant, on revient aux petites voix déjà citées puisqu’on en vient aux détails du voyage de Darmanin. (Je ne sais quand : hier, sans doute, arrivée à Moscou, pour voir les amis là-bas, non ?) “Détails”, “détails”, vous savez bien : ‘The Devil in the detail’ disent les Anglais, et les Français : ‘Le Bon Dieu est dans les détails’... Bref.

Là-bas, à Moscou, dit la petite voix, “la chose a été et continue à être compliquée. Oh, à mon avis, Darmanin aura ce qu’il veut, parce que les Russes savent qu’il y a des choses sérieuses. Mais en attendant, on a bien ri. Il paraît qu’il y a eu l’idée, pour les Français, de rencontrer le directeur du FSB, le chef du contre-espionnage chargé de la lutte anti-terroriste... Mais aussi, de la lutte anti-Navalny, vous savez ?

”Alors, les Russes, suaves, ont fait savoir : mais ce type, là, Alexandre Vassilievitch, ce spécialiste, vous savez il vient d’être mis par vos soins sous le régime infâmant de vos sanctions, les françaises, et peut-être bien aussi les UE, peut-être Trump, on ne sait plus très bien. Alors, il est très dépressif, il est plein d’angoisses, il se dit qu’on lui en veut... Est-il encore opérationnel, oh là là ? Vous sera-t-il d’un grand secours, oh mon Dieu... Pauvre Alexandre Vassilievitch ! Oh, écoutez, on va vous arranger une rencontre, tout de même, des pieds et des mains on va faire ! Mais attention, en l’approchant, il est sous sanctions ; certes, d’est pas tout à fait contagieux, pas vraiment Covid, mais tout de même, hein ! Ah, heureusement que ça existe, les sanctions, pour défendre la civilisation, vous et nous ‘partenaires’ et chers ‘collègues’...”

Bref, des tas de choses de cette sorte, aimablement dites sans nul doute, souvent un innocent sourire d’ironie, parfois un qui ne peut pas s’empêcher de pouffer. Mais je suis sûr que tout cela va bien se passer, parce qu’on est entre gens de bonne compagnie, qui mènent des politiques claires et compréhensibles, qui laissent toutes un espace pour le compromis, voilà que ça marche dans notre époque postmoderne.

Ah, je vais même dire un mot de la dernière que m’a filé la petite voix doucereuse...  ... Je ne vais même pas donner trop d’importance à cette dernière confidence-hypothèse, qui n’est d’ailleurs pas mal et pour cette raison, eh bien au contraire je vous la donne tout de même : “Certains disent même que si on avait évité l’une ou l’autre affaire de montage type-Navalny, suivie aussitôt de sanctions antirusses, le FSB aurait pu filer à la DGSI française quelques précieuses indications concernant de terroristes-touristes tchétchènes en balade en France... On dit tant de choses.”

Et puis, je rappellerais bien à mon interlocuteur avec sa voix tantôt si aimable, tantôt doucereuse, tantôt un tantinet moqueuse, – eh bien je lui rappellerais si c’était moi le maître de la diplomatie glorieuse héritée de Vergennes et de Talleyrand, si l’historiette est vraie, je lui rappellerais, hein !, que le comportement russe  à l’égard des minorités opprimées tchétchènes ne fut pas glorieux, alors hein... (On pourrait envisager de nouvelles-anciennes sanctions rétrospectives, non ?) Je trouve qu'avec beaucoup d'intelligence comme j'ai à profusion, on parvient à être aussi bête et aussi coimplètement vain.

Eh bien ! C’est à ce moment, précisément, que je me suis dis à moi-même, mais confidentiellement, off-the-record quoi, que c’était pour moi un devoir en même temps que la raison précise de cette longue digression qui vous permet tout de même de prendre connaissance de ceci qui, si elles sont décrites sous une plume allègre et un peu farceuse, de confidences très sérieuses, qui vous parlent du vrai des préoccupations, réflexions et actes des grands de ce monde (UE, France) en train de se faire se transformer (le monde), passant de sa rondeur presque parfaite, satisfaisant les sachants qui gèrent, en une entité remarquable de platitude, une terre-plate comme le disait l’antique sagesse...

(Vous savez que, tous comptes faits, je trouve l’idée d’une terreplate et le reste s’arrangeant pour tourner autour, eh bien pas si bête que cela.)

C’est à ce moment, précisément, que je me suis dis à moi-même de laisser tomber et laisser toute la place à l’excellent Bruno Guigue, collaborateur de RT-France, dont il nous est dit ceci précisément :

« Ex-haut fonctionnaire, Bruno Guigue est un ancien élève de l’École normale supérieure (Ulm) et de l’École nationale d’administration. Chercheur en philosophie politique, analyste politique et observateur de la vie internationale, il est l’auteur de plusieurs ouvrages et de nombreux articles. Il est actuellement enseignant à l’Université de La Réunion. Dernier titre paru : ‘La fable du libéralisme qui sauve le monde’, publié aux Éditions Delga en 2019. »

Place donc à son texte du 22 octobre 2020 sur l’action de longues années d’infamie, de cruauté, de mensonges et de trahison, du bloc-BAO en Syrie. Cette malédiction syrienne traînera sur ce qu’il reste d’âme au bloc-BAO, et surtout à la France, et participera, je crois fermement et je l’espère ardemment, au processus de désintégration de ce qu’il en reste, – du bloc-BAO et de la France. J’espère que les moutons dévoreront les bergers antiSystème et feront leur office.

Semper Phi

(Un ami qui vous veut plutôt du bien.)

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Le théorème de Bachar Al-Assad

Selon l'analyste politique et chercheur en philosophie politique Bruno Guigue, le jeu trouble des Occidentaux à l'égard de forces djihadistes en Syrie a non seulement contribué à prolonger la guerre, mais pourrait également se retourner contre eux.

Prolongée par un acharnement criminel dont Erdogan n’est que l'instrument, la guerre qui sévit en Syrie depuis dix ans a fait l’effet d’un révélateur chimique. Protagonistes embusqués de ce bain de sang, les gouvernements américain, britannique, français, turc, saoudien et qatari passeront à la postérité pour ce qu’ils sont : les bourreaux d’un peuple qui ne leur a rien fait. La tragédie syrienne a dissipé leurs faux-semblants. Elle a exposé au grand jour leurs stratégies les plus retorses. Mais la pire de toutes a consisté à blanchir le terrorisme chez les autres.

Comment résister à la nausée devant la viscosité de ces politiciens qui, à chaque attentat sur le sol français, se répandent en condamnations indignées d’une violence terroriste qu’ils ont nourrie et encensée ailleurs ? On se souvient qu’il n’y a pas si longtemps, la médiasphère occidentale déployait sa fausse dialectique pour faire de la branche syrienne d’Al-Qaïda une respectable organisation combattante. On nous disait que le Front Al-Nosra, c’est ainsi qu’il se nommait, finirait par se «normaliser». Et il faudrait, suggérait François Burgat sur une chaîne publique, négocier pour de bon avec cette organisation destinée à faire partie du «futur de la Syrie».

Son affiliation revendiquée à Al-Qaïda, son idéologie haineuse et sectaire, sa pratique répétée des attentats aveugles frappant les civils, le régime de terreur obscurantiste qu’elle répandait comme la peste partout où ses coupeurs de tête avaient l’opportunité de sévir ? Peccadilles. Une sorte de mutation génétique devait valoir à l’organisation djihadiste concurrente de Daech, pour rétribution de ses services rendus contre Damas, un véritable brevet de respectabilité. C’est ainsi que la diplomatie occidentale faisait des miracles. De son chapeau de magicien, elle sortait des terroristes modérés, des extrémistes démocrates, des coupeurs de tête humanistes, des mangeurs de foie philanthropes.

Cette opération de blanchiment de la branche syrienne d’Al-Qaïda, en effet, se déroulait au moment où cette organisation confortait son hégémonie politique et militaire dans le nord de la Syrie. La prédestinant à jouer un rôle majeur au lendemain de l’effondrement attendu de l’Etat syrien, ce succès lui valait les faveurs des puissances occidentales et régionales décidées à abattre le dernier Etat laïc et progressiste du Moyen-Orient. Peu importaient alors le coût humain et le prix politique de ce consentement anticipé à l’instauration en Syrie d’un pouvoir sectaire et mafieux. La chute de Bachar el-Assad était un jeu, disait-on, qui en valait la chandelle.

Le terrorisme remaquillé pour les besoins de la cause rendait − et il rend encore − des services inespérés à la vaste coalition contre la Syrie souveraine. Cette connivence des États occidentaux et des monarchies pétrolières avec les rejetons frelatés d’Al-Qaïda signait la réinscription simultanée des deux avatars du terrorisme takfiriste dans l’agenda stratégique occidental. La destruction de l’Etat syrien, objectif numéro un de l’axe Washington-Riyad-Paris-Londres-Ankara-Doha, secondé en coulisses par Tel-Aviv, était une fin qui justifiait tous les moyens, et la perspective d’un émirat extrémiste faisait clairement partie du plan.

Pour le faire aboutir, les puissances étrangères coalisées contre le dernier régime nationaliste arabe se répartissaient cyniquement les rôles. Dans son combat sans merci contre la Syrie, les tueurs d’Al-Qaïda pouvaient ainsi compter sur leurs précieux amis : la Turquie leur livrait des armes, Israël soignait leurs blessés, le Qatar leur versait un chèque à la fin du mois, et le quotidien Le Monde les faisait passer pour des enfants de chœur. Qui se souvient qu’en 2013, lorsque le Front Al-Nosra s’est emparé du village chrétien de Maaloula, ce quotidien osait nier que les extrémistes aient tué le moindre civil, alors qu’on pouvait voir sur la BBC, au même moment, les obsèques religieuses des victimes de cette agression ?

C’était l’époque où la prétendue «coalition internationale», lors de l’offensive de Daech vers Palmyre, s’abstenait de tirer la moindre cartouche, ce sauf-conduit offert aux terroristes illustrant la parfaite duplicité de l’antiterrorisme proclamé à Washington et à Paris. Entre la poussée du pseudo-Etat islamique sur l’axe Palmyre-Damas et celle du Front Al-Nosra sur l’axe Alep-Damas, le rêve des ennemis de Bachar el-Assad semblait alors se réaliser. Mais c’était sans compter sur la résistance du peuple syrien et la loyauté de son armée. La mobilisation générale de la piétaille takfiriste devait coûter un milliard de dollars par an aux pétromonarchies du Golfe. Acheminée aux organisations terroristes par l’intermédiaire de la CIA, cette manne n’a pourtant pas suffi à provoquer la chute de Damas.

Car c’était sans compter, non plus, sur la capacité du gouvernement syrien à nouer les alliances nécessaires avec des partenaires fiables. Afin de desserrer l’étreinte mortifère des sponsors de la terreur, Damas a obtenu le précieux concours de Téhéran, Moscou et Pékin. En réalité, il n’y a jamais eu de guerre civile en Syrie : déclenchée par les puissances impérialistes, cette guerre est d’emblée un conflit international de grande ampleur où une coalition s’est formée pour vaincre la coalition adverse. Sur le théâtre des opérations, aujourd’hui encore, les seules forces en présence sont les bandes armées du takfir sponsorisé d’un côté, agrémentées de quelques forces spéciales occidentales en vadrouille ; et les forces militaires de l’Etat syrien soutenues par leurs alliés russes, iraniens et libanais, de l’autre.

Devant ce constat, tout le reste n’est que littérature. Les distinctions entre rebelles «démocrates», «modérés», «laïcs», «islamistes» ou «djihadistes» sont des stupidités sans nom, dont le seul effet est de jeter un voile pudique sur une nébuleuse terroriste dont l’intention est parfaitement claire : imposer par la force un pouvoir sectaire et collaborateur de l’impérialisme. Si les puissances occidentales et régionales qui ont alimenté ce brasier avaient cru aux soi-disant rebelles modérés, elles n’auraient pas blanchi le Front Al-Nosra, accrédité au tournant de 2014 comme successeur potentiel du régime à abattre, tout en s’interdisant de combattre Daech lorsque cette organisation affrontait l’armée syrienne.

Aujourd’hui encore, les milliers de terroristes qui contrôlent la poche d’Idleb appartiennent au dernier avatar d’Al-Qaïda, Hayat Tahrir Al-Cham, placé sous perfusion militaire turque. Les rotatives de la propagande ont longtemps accrédité la fable d’une guerre civile opposant un régime sanguinaire à une opposition démocratique. Mais tout le monde a compris que la réalité du conflit syrien, depuis dix ans, c’est la lutte qui oppose un conglomérat terroriste sponsorisé et une armée nationale qui défend son pays contre l’invasion étrangère.

Depuis 2011, les avatars successifs de la filiale semi-clandestine de la CIA qui porte la dénomination d’Al-Qaïda ont accueilli en Syrie un flux incessant de mercenaires lobotomisés, avides d’en découdre avec les mécréants et les apostats. Cette injection massive de fanatisme mortifère a eu pour effet de prolonger une guerre qui n’en finit pas. Mais elle a aussi répandu ses miasmes aux quatre coins du globe. Revenant comme un boomerang, elle a frappé partout. Bachar el-Assad avait averti les Européens que leur duplicité finirait par se retourner contre eux. L’ignorance de ce théorème n’en finit pas de présenter l’addition.

Bruno Guigue