Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.
578016 septembre 2023 (19H20) – On connaît le constant intérêt que j’attache au travail d’Alexander Mercouris, que je suis régulièrement sur son programme ‘TheDuran’. Je signale ici sa chronique d’hier, au contenu particulièrement intéressant. Il concerne le discours de Blinken, dont j’avais dit un tout petit mot dans la page précédente de ce ‘Journal’, hier, pour asseoir l’examen de l’illusion qu’entretiennent les Indiens de pouvoir ‘jouer’ en partenariat avec les USA :
« La campagne de redressement civilisationnel que sont en train de mener les États-Unis est complètement foudroyante, grandguignolesque et abracadabrantesque. En a-t-entendu quelques échos ? Il suffit de citer le très civilisé et antirusse Blinken, et tout est dit de ce que vous retrouvez en boucle dans la presseSystème et au sein des hordes de consultants des plateaux-TV. »
Je n’avais pas été plus loin que cette allusion indirecte pour l’exposé de mon sujet qui ne concernait pas ce discours. Mercouris, lui, le prend à bras le corps pour l’analyser. Il le fait avec rigueur, précision et le regard critique qui importe. L’analyse, vraiment d’un très grand intérêt, va de 00 58’ 10” à la fin de la vidéo (01 23’ 10”), soit un bon quart d’heure hautement instructif.
Je mentionne rapidement les points politiques principaux qui sont affirmés derrière les formules ronflantes et creuses et les diverses aspects du simulacre qui sert d’argument politique et historique à Blinken sur le thème “l’ère de la Guerre Froide est finie, nous entrons dans une nouvelle ère”.
• La guerre d’Ukraine n’est plus l’essentiel. Elle doit être fixée par un gel des positions et un cessez-le-feu qui actera la « défaite stratégique » de la Russie qui n’a pas atteint son but principal qui est la conquête totale de l’Ukraine. La Russie n’a jamais au grand jamais affirmé cela mais l’Occident-maladif l’affirme et cela suffit car ainsi en est-il du simulacre.
• Sur ces points précis, on ne se préoccupe pas de savoir ce que pensent et envisagent les Russes, qui refusent catégoriquement l’idée d’un cessez-le-feu gelé et n’envisage d’autre issue que « la victoire », la vraie bien sûr, celle que Shoigou a fixé comme objectif jeudi. “Ainsi en est-il du simulacre”, suite...
• L’Ukraine réduite à une peau de chagrin témoignant de ses terribles revers et de la perte de territoires considérables, restera un avant-poste occidental triomphant et se développera en une « démocratie vibrante » qui fera pâlir d’avis la Russie frustre et rustre qui a été battue partout sous la forme des divers épisodes de la narrative.
• Mais l’Ukraine ainsi réglée n’était qu’une « distraction », résume Mercouris traduisant Blinken. L’essentiel est désormais l’attaque de la Chine.
• Pourquoi la Chine ? Cette puissance, interprètent les américanistes, est directement responsable de la fin de l’unipolarité de la Guerre Froide, qui a maintenu une relative stabilité qui permettait la marche en avant d’un progrès constructif. (Étapes récentes de la stabilité façon-Blinken : Serbie-1999, 11-septembre, Irak-2003, crise des subprimes-2008, Libye, Syrie 2010-2015, Ukraine-2014, Covid-2020... Un calme idyllique.) Les USA ayant donc perdu leur position de seule hyperpuissance hégémonique pour le bien du rest of the world à cause de la Chine, ils entendent régler son compte à cette Chine-là pour rétablir leur primauté-hégémonique si bienfaisante et bvienpensante.
• Observation de Mercouris en forme de commentaire général sur la forme même et l’organisation du gouvernement du système de l’américanisme :
« La direction politique du gouvernement américain est aujourd’hui totalement pénétrée, manipulée et dirigée par les neocon [dont Blinken est] le parfait représentant et l’opérateur... »
Il y a également une appréciation générale de la perception que Mercouris a eu de ce texte du discours de Blinken pour dire que lui-même a eu du mal à aller jusqu’au bout, presque comme s’il était épuisé par cette lecture. Ce qu’il nous suggère ainsi c’est que l’accumulation d’une part de la “connerie politique” (pour paraphraser l’expression de « connerie économique » de Jacques Généreux selon sa thèse que la bêtise des dirigeants est une explication essentielle des actuels évènements), – et d’autre part du recours absolu et intégral au mensonge (simulacre, narrative, etc.) conduit très vite à l’épuisement psychologique de l’auditeur et du lecteur. Cela est pour suggérer dans quel état psychologique, proche de la folie pure et simple, se trouvent nécessairement ceux qui comme Blinken conduisent ces politiques, qu’ils aient ou non obscurément conscience de la bêtise et du simulacre. Cette combinaison épuisante existe sans que nous en ayons nous-même nécessairement conscience et nous accable sans qu’elle affiche sa responsabilité.
La médiocrité et la banalité catastrophique du propos en découlent naturellement et réveillent chez Mercouris de tristes souvenirs. Comme épuisé effectivement, il nous dit :
« ... Et alors, le reste du discours que je ne vous lirai certainement pas est devenu pour moi un objet extrême de dépression pour le jugement qu’on peut avoir sur Blinken et les gens qui l’entourent, et il y a même un passage extraordinaire où il fait des commentaires à propos de son collègue Jack Sullivan [conseiller de Biden et directeur du NSC], détaillant combien Jack Sullivan est un personnage merveilleux qui a réussi à intégrer les politiques extérieure et intérieure des États-Unis, les mettant ensemble dans le trou sans fond que nous voyons et observons...
» Je dois dire alors qu’à certains moments, la façon dont Blinken parle de ses collègues, dont il les couvre d’éloges, m’a rappelé le style des anciens discours soviétiques, il y a si longtemps... »
Leonid-Jack Sullivan-Brejnev ! Tout s’explique maintenant... Pour le reste et pour faire court mais terrifiant, Mercouris nous dit son estimation que cette “politique” exposée par Blinken ne peut se terminer qu’en affrontement à cause de la complète dystopie de perception, entre un Blinken et les autres clones qui suivent en aveugle le simulacre commun restituant ce qui est supposé être la haute pensée du président Biden, – et une direction russe qui tient avec une inébranlable fermeté à la réalité et sa vérité-de-situation et n’accepte absolument rien des épuisantes sornettes américanistes-occidentalistes :
« La première Guerre Froide s’était terminée par une négociation. Celle-ci ne pourra l’être, si l’on suit les positions exprimées par les uns et les autres, que par l’affrontement. »
On en revient donc à ce qui fait notre seul véritable espoir d’une rupture brutale de la situation qui en changerait ce cours qui semble inéluctable : la crise intérieure du pouvoir américaniste. De ce point de vue, bonne nouvelle, – les nouvelles sont catastrophiques. Aux États-Unis rien ne change, sinon de pire en pire, tandis que la ‘soviétisation’ du système mise en évidence par Mercouris se signale également par une “crise gérontocratique” comme en connut l’URSS dans les dernières années avant l’explosion gorbatchévienne, une véritable “paralysie par l’âge”.
En effet, rien ne bouge à cause de cette paralysie mais tout évolue vers une explosion autour du Huntergate (de Hunter Biden) multiplié par le Bidengate. Steven Abramovicz, propriétaire et directeur général du réseau ‘Mill Creek View’ et animateur du podcast qui y est publié, observe dans son interview par ‘SputnikNews’ (beaucoup plus actif sur cette crise US que RT.com) l’étrange situation existant aujourd’hui avec Joe et Hunter Biden :
« Ce qui est particulièrement frustrant, selon Abramovicz, c'est qu'il existe un grand nombre de documents authentiques impliquant la famille Biden et que le parti démocrate et la Maison Blanche continuent de prétendre qu'il n'y a rien.
» “C’est la tragédie de l'Amérique de 2023 : nous n'aurions jamais permis à un Thomas Jefferson ou à un Abraham Lincoln de s'en tirer comme ça. Et nous voici donc dans notre nouvelle ère [de la corruption reconnue et proclamée] avec notre lot actuel de dirigeants”. »
Les documents s’empilent, impliquant et sur-impliquant le père et le fils, et tous les verrous institutionnels que tient la “vieille génération” sont encore plus resserrés dans la panique. Cette “vieille génération” est terrifiée, non plus du seul Trump mais de tout ce qui est neuf, différent, un peu réformiste.
Ainsi doit-on insister, après avoir souvent visité et revisité les scandales Bidengate/Huntergate, sur ceci qui nous apparaît finalement relativement nouveau dans sa réalisation et sa formulation. Cette “crise gérontocratique” est, elle, typique de l’effondrement, comme nous le vîmes en 1985-1991.
« “Fondamentalement, les États-Unis sont pris dans une crise de l'âge de type soviétique”, dit l’historien constitutionnaliste Daniel Lazare. "Rappelez-vous ce que disait Reagan lorsqu'on lui avait demandé pourquoi il ne parlait pas avec les dirigeants soviétiques [d’avant Gorbatchev] : “Parce qu'ils risquent de mourir de gâtisme dans mes bras”.
» Si la réplique de Reagan fait bien fait rire, ajoute Lazare, c'est aujourd’hui des États-Unis que l’on se moque, avec ses législateurs âgés qui s’accrochent désespérément à leur siège au Sénat, sans parler de la “sénilité croissante” de Biden.
» “Après qu'une superpuissance a sombré dans la gérontocratie, comment se fait-il qu'une autre fasse la même chose 40 ans plus tard ? La réponse à cette question est le blocage politique [c’est-à-dire la gérontocratie]”, dit Lazare. “Tout le monde est terrifié par ce que le changement pourrait signifier”. »
Faites-le enfin : comparez cette situation avec les ambitions de l’hyper-neocon Blinken qui écrase Mercouris de sa stupidité et de ses mensonges, – et interrogez-vous. La réponse, mon ami, « is blowing in the wind ».