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147220 novembre 2012 – Le constat qu’on peut faire des quelques jours qui nous éloignent de la réélection du président Obama (le 6 novembre) est celui, d’une part d’une accumulation d’affaires/scandales qui sont autant de “crises” (le terme demanderait à être révisé) d’une réelle importance, d’autre part de la rapidité de succession à laquelle se fait cette accumulation. Outre le rapport mécanique évident de la chronologie, il y a un rapport à notre sens fondamental entre, d’une part, cette accumulation et, d’autre part, cette succession.
Considérons d’abord la période. Lorsqu’un président des USA est élu, ou même lorsqu’un président des USA en fonction est réélu, il y a une période nécessaire de concentration de l’activité et de l’intérêt du monde sur cet événement. La campagne accomplie, les diverses rumeurs d’October Surprise (un événement extérieur provoqué ou non incurvant brutalement le cours de la campagne) étant nécessairement taries et dépassées, un moment d’observation et un effort d’adaptation se développent autour de la nouvelle impulsion, des changements éventuels d’orientation et des changements de personnel autour et au sein de la direction de la première puissance du monde, avec sa considérable influence. Tout le monde se trouve nécessairement concerné.
Il s’agit d’une période de trois-quatre semaines, parfois plus, parfois jusqu’à l’inauguration du président, pendant lesquelles, en un sens et presque littéralement, “le temps suspend son vol”. (Cette coutume en forme de trêve quasiment structurelle a pris son plein effet depuis les années 1980 et la fin de la Guerre froide, mais l’on en eut des exemples a contrario auparavant, notamment en 1956, où c’est l’élection [la réélection d’Eisenhower] qui sonna, sous la pression des USA, la fin de deux crises [la Hongrie et Suez] qui avaient éclaté pendant la campagne.)… Ce fut même le cas en 2004, avec GW Bush, malgré des conflits en cours (Irak, Afghanistan) ; ce fut même le cas en 2008, malgré l’énorme crise financière. (Pour ce dernier cas : le sommet du G8 à Washington, le 15 novembre 2008, effectivement en pleine crise financière et réuni dans le but de tenter de prendre en main cette crise, fut réduit à rien par la “volonté d'absence ”des USA, occupés à préparer l’administration Obama et nullement disposés à discuter avec le Rest Of the World ; les Israéliens attendirent la fin de l’année [27 décembre] pour lancer leur attaque contre Gaza.)
Cette année, pour cette élection, rien de semblable. Malgré un battage considérable du système de la communication et de la presse-Système autour de l’élection, comme s’il s’agissait de nous rassurer sur l’état du Système, – bien entendu, c’était le but, – l’élection a été immédiatement “déclassée” dans les événements du passé, dès le 9 novembre avec la lettre de démission de Petraeus. La coutume impérative du Système ayant été, depuis que les USA occupent leur position d’influence écrasante, que le résultat de l’élection présidentielle arrêtait le temps autour d’elle et autour de son organisation, le fait est que, cette année, le temps s'est à peine arrêté pour l'élection elle-même, qu'il a même accéléré, aussitôt après, comme si elle n’avait pas eu lieu…
Ce n’est pas la démission de Petraeus qui a brisé cette coutume-trêve bien établie, correspondante aux nécessités politiques d’un temps dépassé, et s’exprimant en un phénomène historico-temporel ; c’est plutôt que cette coutume-trêve a perdu sa légitimité-Système et que le domaine historico-temporel a été bouleversé. Nous ne disons nullement que cette coutume est méprisée parce que les USA sont en déclin accéléré ou en crise terminale, parce qu’ils le sont avec le Système lui-même et avec tous les autres, et principalement les pays du bloc BAO, et que tout avait été fait, avec le battage du système de la communication et la complicité de tous, pour cacher ce fait pendant cette glorieuse période de réélection. La coutume-trêve n’existe plus comme telle parce que quelque chose s’est brisée dans l’ordre supérieur des choses, qui est devenu un désordre, et, à notre sens, un champ d’affrontement titanesque. En d’autres mots, le domaine historico-temporel, le temps historique, s’est révélé, à l’occasion de cette élection, dans son changement fondamental.
Nous considérons ci-après, sous forme de rappel, les événements tels qu’ils se sont déroulés, pour étayer ce constat, pour l’expliciter, pour l’élargir et le détailler à la fois.
• Il y a eu, à Doha, le week-end du 10-11 novembre, la constitution d’un nouveau monstre servant de portefaix, sous la désignation d’“opposition” syrienne, aux machinations du bloc BAO, du Qatar, etc., contre la Syrie et le régime d’Assad. Les conditions de l’opération furent remarquables (voir le 15 novembre 2012). La secrétaire d’État Clinton fut très active, autant dans la préparation (fin octobre) que dans la réalisation de la chose, ce qui représente une période d’activité diplomatique intense tout au long de la période cruciale, – fin de la campagne/élection/période post-électorale. Vue l’importance de cette crise syrienne dans la diplomatie US, cette activité de la secrétaire d’État est paradoxalement très inattendue, parce que la période électorale est systématiquement une période de gel de la diplomatie US, surtout pour les affaires importantes bien sûr. (L’observation vaut même si Clinton restait à son poste pour le deuxième mandat, ce qui n’est pas le cas, semble-t-il.)
• La démission du général Petraeus de la direction de la CIA a été effective le 9 novembre et a ouvert une crise majeure au sein de l’establishment de sécurité nationale. On en a eu quelques échos, avec des conséquences en cascade (voir le 15 novembre 2012), qui impliquent la stabilité de l’armée elle-même. La crise est loin d’être terminée et s’est installée dans le paysage politique US, elle s’est abîmée dans les batailles des intérêts politiciens. Elle agit comme un cas de gangrène assez important, sinon prestigieux, dans une entité, Washington D.C., généralement très ouvert à cette sorte de diffusion. Il n’échappe à personne qu’elle constitue un cas exceptionnel dans l’histoire des USA, ou dans l’histoire du Système.
• Le cas des pétitionnistes “sécessionnistes”, tel que nous l’avons signalé le 16 novembre 2012, constitue un signe spontané et puissant du malaise intérieur déstructurant aux USA. Que le cas soit complètement ignoré de la presse-Système ne signifie rien qui ne nous soit connu, et constitue plutôt un argument en faveur de son importance. Cette manifestation de la crise intérieure des USA se poursuit et constitue un ferment de plus à cet égard.
• Le cas de l’attaque contre Gaza est le dernier événement en date à “passer outre” à la coutume de la trêve et de la suspension du temps dans la période post-électorale. Là encore, les événements suivent leurs cours, avec diverses arrière-pensées des différents acteurs, mais dans tous les cas sans aucune attention pour les dispositions ordonnées des uns et des autres pour une telle crise, particulièrement de la part d'Israël et des USA. Rien n’indique que cette “crise” à ce moment soit vraiment de l’avantage décisif de l’un ou de l’autre (y compris pour Netanyahou avec ses objectifs électoraux, qui sont encore très éloignés [janvier 2013]), et encore moins pour les Israéliens ; en fait, rien n’indique que quiconque contrôle cette crise, dans un sens ou dans l’autre, et surtout pas ceux qui l'ont déclenchée. La crise ne fait effectivement qu’“ajouter le désordre au désordre”, au Moyen-Orient mais aussi à Washington même. Elle est paradoxalement marquée par la peur israélienne d'une défaite selon les termes des hostilités postmodernistes, – affrontements de type G4G, bataille de la communication, “déploiement” de ministres de pays musulmans, comme le Turc Davutoglu et quelques autres, à Gaza, etc., – et par la possibilité, dans ces circonstances étranges, d'une “après-guerre” se transformant en une crise interne majeure en Israël même.
Tous ces événements qui sont autant de “crises” majeures ont une particularité commune, qui est celle d’être incohérents entre eux, par rapport à un quelconque projet général, par exemple celui de la “domination du monde” pour faire court, par exemple celui de déstructuration des principes, etc. ; les uns et les autres de ces événements alimentant ou favorisant telle explication, contredisant en même temps, radicalement, telle autre. Cela est dit pour réfuter la démarche tendant à expliquer rationnellement, selon la maîtrise humaine des choses, tous ces événements, et particulièrement tous ces événements entre eux car c’est bien de cette façon qu’il importe ici de les appréhender, dans le flux général de l’Histoire. On est donc conduit à reconnaître une formidable profusion d’événements importants, sous forme de “crises” contradictoires sans aucun doute, dont l’accumulation et l’enchaînement sont inexplicables d’une façon rationnelle, et dans tous les cas contredisant la forme nécessaire, – symboliquement et opérationnellement à la fois, – de ce grand événement de notre “hyperpuissance” du couronnement de l’imperator de Washington D.C. Cette chose, le couronnement, nécessite un temps de silence et de respect fixant les véritables hiérarchies. Ce temps essentiel n’a pas été respecté, il a même été piétiné, lacéré, réduit à rien, il a été détruit et dissout, et pour l’essentiel des agresseurs, par les serviteurs du Système eux-mêmes. Cela est plein d'irrespect et fait s'interroger à propos de l'équilibre des psychologies. (Il est vrai qu'il y a le communiqué de la réunion des ministres des pays de l'UE sur la création de la nouvelle “opposition” syrienne, remise à neuf et repeinte de belles couleurs démocratiques. Un peu d'humour presque surréaliste, – le communiqué en question, croulant sous le poids de sa sublime vacuité, – fait qu'on se dilate un peu la rate.)
Disons qu’il se passe quelque chose d’important et développons l’hypothèse à mesure…
Notre interprétation de cette profusion d’événements, souvent incohérents et d’un intérêt douteux pour ceux qu’on croirait pouvoir désigner comme leurs machinistes et leurs ordonnateurs, renvoie évidemment à la notion fondamentale de “politique-Système” (voir le 17 novembre 2012). Il s’agit d’un courant puissant, généré par le Système et imposant une politique sans le moindre sens pour la raison humain, puisque son but est simplement le mécanisme déstructuration-dissolution. On ne peut donc expliquer, et encore moins comprendre, ces politiques par les habituelles références de la raison, – plus encore, la raison réduite aux acquêts de la période depuis le déchaînement de la Matière, – sauf, bien entendu, à s’en remettre, pour l’explication fondamentale, à ce déchaînement de la Matière.
Concernant la politique-Système, qui est l’accomplissement opérationnel extrême du déchaînement de la Matière, nous écrivions ceci, dans le texte référencé, pour donner une synthèse et une image de sa réalisation. On observera que même un mouvement comme celui de la poussée “sécessionniste” est à finalité déstructurante-dissolvante, mais bien sûr dans un sens vertueux de notre point de vue, jusqu’à prendre une forme d’antiSystème absolument affirmée.
«D’un point de vue opérationnel, on dira que cette politique-Système se manifeste sous la forme d’une politique expansionniste et maximaliste, qui a perdu tout sens de son expansionnisme et qui n’est plus animée que par son maximalisme (sa surpuissance). Les effets de ce maximalisme se manifestent sous la forme exclusive de la déstructuration et de la dissolution. Aucune attention n’est portée à la situation intérieure des différents acteurs (des différents pays) participant à cette politique (en général les pays du bloc BAO), qui deviennent de plus en plus des figurants passifs, sans volonté et sans autre attitude qu’agréer à la poussée de la politique-Système. Cette occurrence est d’autant plus grave que ces acteurs-figurants (les pays impliqués) ont tous des situations intérieures catastrophiques dans la situation générale depuis l’automne 2008.
»Si l’on veut schématiser cette politique-Système, nous dirions que c’est une flèche (figurant l’aspect expansionniste) qui a perdu tout sens tout en conservant sa dynamique exprimée graphiquement par sa pointe. La flèche, avec sa pointe au bout d’un fût normalement droit, et dirigée vers un but précis, – éventuellement la phase figurée par la première “politique de l’idéologie et de l’instinct” de GW Bush, de 2001 à 2007, – a donc changé de forme et s’est déformée (ou reformée, c’est selon) dans le chef de son fût, en une spirale, un tourbillon permanent, qui devient de plus en plus un trou noir en passant de la surpuissance à l’autodestruction, – la phase à partir de 2008, où la politique-Système a dispersé violemment toutes ses attaches identitaires en se détachant, à notre sens décisivement, du seul support américaniste et en s’élargissant aux pays du bloc BAO qui forment la substance du Système. La pointe de la flèche constitue la dynamique initiale de la surpuissance expansionniste, mais sa forme (son fût) puis sa trajectoire changées en un chaos tourbillonnant l’entraînent irrésistiblement vers son autodestruction.»
Notre interprétation de cette série d’événements incongrus par rapport au fonctionnement normal du Système, dans la période “sacrée” qui eût dû être consacrée à la célébration de l’imperator, constitue effectivement «une spirale, un tourbillon permanent, qui devient de plus en plus un trou noir en passant de la surpuissance à l’autodestruction». Le point remarquable, c’est l’accélération extrême du rythme, qui accentue l’incohérence, les contradictions, etc., qui accélère la spirale et le tourbillon, qui précipite la formation du trou noir où la surpuissance tend à s’abîmer dans l’autodestruction. C’est cette accélération qui nous paraît dans ce cas le point le plus remarquable et celui auquel il importe de s’attacher.
Pour nous, il s’agit d’un phénomène de contraction du temps historique, ou d’accélération de l’histoire, devenant ainsi Histoire, ou métaHistoire. Nous avons déjà insisté sur ce phénomène d’accélération de l’histoire (voir le 1er février 2011), estimant par conséquent qu’il était d’ores et déjà en position d’intervention. Il s’agit d’un phénomène qui interfère à un moment sur la politique-Système, en précipitant son rythme, en l’obligeant à l’accélération, donc à mettre à jour de plus en plus évidemment ses contradictions et ses incohérences, donc en accélérant effectivement sa transmutation de la surpuissance à l'autodestruction.
Il s’agit d’une appréciation métaphysique (métahistorique) de la situation, comme nous la poursuivons régulièrement. Cette appréciation correspond à la sorte d’époque-charnière que nous vivons, là où effectivement l’histoire se fait Histoire et métaHistoire, dans les moments d’affrontements fondamentaux. (La citation du comte Joseph de Maistre, valant pour la Révolution française, est évidemment tout à fait opportune : «Sans doute, la Providence n’a pas besoin de punir pour justifier ses voies ; mais, à cette époque, elle se met à notre portée, et punit comme un tribunal humain.») On comprend que le “déchaînement de la Matière”, qui enfante la politique-Système, poursuit une entreprise de déstructuration-dissolution dont l’achèvement est une entropisation qui se confond évidemment, du point de vue de l’opérationnalisation de la chose, avec ce qui se peut concevoir de plus identique au Mal. Les forces qui interviennent contre la politique-Système pour en accélérer l’évolution vers l’autodestruction appartiennent évidemment, elles aussi, au domaine de la métahistoire caractéristique de cette période. Elles agissent pour effectivement accélérer, au moyen de la contraction du temps et de l’accélération de l’histoire, le dérèglement de la politique-Système en précipitant sa transmutation de sa dynamique de surpuissance en une dynamique d'autodestruction…
On observera que cette forme de pensée correspond au propos que nous développions le 27 septembre 2012, concernant la nécessité de penser rationnellement la spiritualité, c’est-à-dire d’accepter, au moins sous forme d’hypothèse, le champ de la spiritualité comme un des aspects de la réalité du monde et non plus comme seulement un élément de la foi selon son entendement actuel, essentiellement religieux. Ce qui nous invite à considérer cette hypothèse (que nous considérons, pour notre part, depuis longtemps), c’est non seulement l’échec catastrophique de la réalité organisée par la seule raison autorisée par le Système (ce qui est d’ailleurs céder à un diktat du Système, donc déjà capituler), ou “la raison réduite aux acquêts de la période depuis le déchaînemenent de la Matière ; c’est aussi et surtout l’incompréhension totale de cette réalité à laquelle nous condamne la décision d’en rester à cette seule raison subvertie pour en juger. Le “risque” que l’on court à poursuivre cette hypothèse, c’est, notamment, de faire se rencontrer la réalité et la vérité, pour mieux apprécier la réalité à la lumière de la vérité.