Portrait de soldat (II)…

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Sont-ils dans la même réalité? De quelle réalité parlons-nous ? Qu’est-ce que ça, la réalité? Après le lieutenant général Chiarelli, qui s’écroule devant les journalistes, presque en larmes, à son départ d’Irak, voici le brigadier général Mark O. Schissler, de l’Air Force (toujours U.S., of course). Changement complet de ton. L’un s’effondre, l’autre tient droitement le monde dans ses mains. Avec Schissler, ça va marcher droit.

… Pardon, avec Schissler, c’est la guerre apocalyptique, la guerre de cent ans, la guerre de tous les temps, avec cette angoisse du formidable guerrier du Pentagone : tiendront-ils, à l’arrière, ces connards de civils? Car Schissler, lui, tient et tiendra le temps qu’il faudra, 50, 100 ans, qu’importe.

Ecoutez donc les interrogations sérieuses, contrôlées et martiales du général Schissler, de derrière son bureau blindé (à l’épreuve des véhicules piégés, type-Improvised Explosive Devices) du Pentagone. Car «we're in a generational war» et l’important, «[it’s] to show the errors in Islamist extremist thinking».

Morceaux de gloire dans le Washington Times du 13 décembre :

«The American people need to prepare for a long-duration war against radical Muslims who are set to fight for 50 to 100 years to create an Islamist state in the region, a top Pentagon strategist in the war on terror says.

»Air Force Brig. Gen. Mark O. Schissler said in an interview that the current strategy for fighting Islamists includes both military and ideological components that make it similar to the 40-year Cold War against communism.

»“We're in a generational war. You can try and fight the enemy where they are and where they're attacking you, or prevent them and defend your own homeland,” said Gen. Schissler, deputy director for the war on terrorism within the strategic plans office of the Pentagon's Joint Staff.

»“But that's not enough to stop it. We've got to break the chain, and that's ... the ideology. We really need to show the errors in Islamist extremist thinking.”

»Gen. Schissler said he is concerned that Washington politics is weakening the will of the nation. “I don't care about the politics. I care about people understanding the facts of what's our enemy is thinking about, what's our strategy to defeat them, and for [Americans] to understand that it will take a long fight, mostly because our enemy is committed to the long fight,” he said. “They're absolutely committed to the 50-, 100-year plan.”

»“One of my concerns is how to maintain the American will, the public will over that duration,” he said. America's past wars lasted three to four years and sustaining support for longer wars “is very difficult,” he said.»

Il y a quelque chose de fascinant dans le caractère inaltérable et inoxydable de ce portrait de crétin hurlant avec le plus grand calme. Depuis le 11 septembre 2001, les crétins hurlants se sont succédés derrière les mêmes bureaux blindés du Pentagone, à chaque fois comme s’ils n’avaient pas bougé d’un pouce, — car tout ce que dit Schissler, comme si rien ne s’était passé entre temps, était déjà répété à satiété le 11 dans l’après-midi et le 12 au matin.

Il est complètement étrange et fascinant que Schissler et Chiarelli fassent partie de la même armée, respirent le même air, parlent la même langue. Il est d’ailleurs possible que, dans six mois, s’il est balancé au Pentagone, Chiarelli parle le même langage que Schissler, celui du crétin hurlant avec le plus grand calme.

Ressentez-vous ce que nous ressentons, cet étrange malaise devant cette façon qu’a ce système monstrueux de modeler la psychologie des êtres humains qu’il avale et croque à belles dents technologiquement avancées? Pour vous y retrouver, relisez par exemple James Carroll, qui a si bien écrit à propos du monstre extraordinaire qu’est le Pentagone…


Mis en ligne le 14 décembre 2006 à 12H14