Pour l’Egypte démocratique, Israël est l’“ennemi n°1”

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Voici donc l’Egypte démocratique, telle que nous l’avons voulue, dans tous les cas s’il faut en croire nos beaux discours et l’activisme de nos ONG diverses… Eh bien, la chambre basse du Parlement égyptien issue des élections (démocratiques, certes) vient de voter à l’unanimité (et à mains levées) une résolution déclarant qu’Israël est “l’ennemi n°1” de l’Egypte ; que l’ambassadeur israélien au Caire doit être expulsé ; que l’accord de livraison de gaz égyptien vers Israël doit être dénoncé. C’est ce qu’on appelle une prise de position radicale et remarquable (l’unanimité).

C’est PresTV.com qui se fait un plaisir, on n’en doute pas, d’annoncer et de détailler la chose, le 13 mars 2012.

«The lower house of the Egyptian parliament has unanimously approved a text declaring that Israel is the number one enemy of Egypt and calling for the expulsion of the Israeli ambassador and a halt to gas exports to Israel. On Monday, Egyptian MPs voted by a show of hands on the text of a report, which was compiled by the Arab Affairs Committee of the People's Assembly (lower house of parliament).

»“Revolutionary Egypt will never be a friend, partner or ally of the Zionist entity, which we consider to be the number one enemy of Egypt and the Arab nation,” the report declared, adding, “It will deal with that entity as an enemy, and the Egyptian government is hereby called upon to review all its relations and accords with that enemy.” […]

»According to the results of an opinion poll conducted by Synovate for Press TV and published on October 3, 2011, an overwhelming majority of Egyptians oppose the terms of the country's gas deal with Israel. In the poll, seventy-three percent of the respondents said they were opposed to gas exports to Israel. Only 9 percent said they approved of Egypt supplying gas to Israel, and 12 percent had no opinion.»

…Ainsi en va-t-il de l’Égypte devenue démocratique, avec nos applaudissements empressés. Bien entendu, les experts, après une toux discrète pour s’éclaircir la voix, observeront que le Parlement n’a guère de pouvoir dans cette Égypte démocratique-là (tiens, étrange…), donc qu’Israël n’a rien à craindre… Cela est raisonner tout à fait faussement.

Effectivement, l’Égypte est aujourd’hui dotée de pouvoirs hybrides qui font assaut de faiblesse et qui, de ce fait, se trouvent en permanence confrontés à la tentation de l’irresponsabilité et de la surenchère. Le Parlement n’a guère de pouvoir face aux militaires, mais les militaires eux-mêmes sont loin d’avoir l’autorité et la légitimité qui seraient nécessaires pour imposer une politique. Ainsi ont-ils été les premiers, les militaires, à intervenir (en décembre 2011) contre les ONG américanistes occupées comme d’habitude à fomenter le désordre “au nom de la démocratie”. Ils ont ainsi réanimé la vague constante d’anti-américanisme du pays, qu’ils ont eux-mêmes entretenue en espérant ainsi gagner un peu de légitimité. Ils se sont affirmés fermement contre les USA qui, bien entendu, ont exercé de leur côté leurs habituelles pressions pour obtenir la libération, illégale à partir du moment où il y avait inculpations, des citoyens US des ONG inculpés à l’occasion de cette opération. Les militaires égyptiens ont commencé à céder avec quelques libérations probables sinon déjà décidées, sinon déjà faites, d’inculpés US, craignant de voir le Congrès US supprimer l’aide militaire annuelle US à l’Égypte (près d’$1,5 milliard par an).

Là-dessus, le Parlement a voté pour refuser la poursuite de cette aide, – vote sans conséquence, comme tout ce que fait le Parlement. De là, on est passé à l’épisode de lundi, où l’adversaire est devenu Israël, chose tout à fait naturelle puisqu’Israël est naturellement identifié aux USA. Normalement, les militaires ne devraient pas tenir compte du vote, pour ne pas aggraver encore leurs relations avec les USA, par Israël interposé, – ou bien en tiendraient-ils compte, au moins en partie, par exemple pour ce qui concerne l’accord gazier, pour regagner un peu de popularité et de légitimité ? Tout est possible dans une tendance générale qui va ainsi, d’irresponsabilités et de surenchères des uns et des autres, vers une ligne anti-US et anti-israélienne de plus en plus dure… D’ailleurs, si les diverses directions politiques n’évoluent pas assez vite dans ce sens, on peut compter sur les USA pour exercer une pression insupportable de plus, pour proclamer une exigence inacceptable, etc. et effectivement accélérer le processus par réaction nationaliste exacerbée du côté égyptien.

…Ainsi en va-t-il de notre brillante campagne de démocratisation et d’occidentalisation du Moyen-Orient, faite pour nous attirer les bonnes grâces du Moyen-Orient, exercer notre empire sur lui et apaiser les consciences dans nos salons. Inutile d’affronter le Système ; il suffit de suivre avec attention, et une satisfaction secrète, la façon si efficace avec laquelle il se tire régulièrement des rafales de balles explosives dans les pieds.


Mis en ligne le 13 mars 2012 à 12H09

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