Pourquoi Tony Blair n’est-il pas parti en vacances ?

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Le degré d’amertume, de colère, le malaise profond qui caractérisent l’état d’esprit au Royaume-Uni aujourd’hui sont bien résumés par ces deux paragraphes du début de l’éditorial de The Independent (accès payant). La force du propos n’est pas dans le ton mais, de façon plus profonde, dans le sens même des mots et des phrases. Il y a peu de mots et peu de phrases qui expriment avec autant de force le discrédit où est tombé aujourd’hui Tony Blair, l’irritation et le mépris où sa politique autant que son entêtement à rester à son poste sont devenus les premiers sentiments dominant la vie politique britannique.

Voici ces deux paragraphes, dominés par cette idée de dérision complète. Blair a suspendu son départ en vacances parce que la crise israélo-libanaise entre dans une phase critique, — mais c’est justement la raison pour laquelle il aurait dû partir en vacances… C’est retrouver l’avis brutal, d’ailleurs cité ici, du Britannique Mark Malloch Brown, adjoint de Kofi Annan.

« Why did Tony Blair postpone his holiday? The reason given by Downing Street is that the next few days will be “critical” in achieving a United Nations peace deal in Lebanon. But surely that is all the more reason why the Prime Minister should have headed to Barbados without delay.

» The United Nations Deputy Secretary-General, Mark Malloch Brown, was right. The UK should be taking a back seat in the drafting of this resolution. The reasons are both eminently practical. Thanks to Mr Blair, the UK has become a toxic presence in international affairs. As the Prime Minister himself conceded this week, Britain is not seen as “even handed” in the Middle East. Mr Blair's involvement can only make the search for a diplomatic solution more difficult. Of course, the United States, in the grip of the Bush administration, is hardly regarded as an honest broker in the region either. But only America's influence can deliver Israel's agreement on any proposed settlement. »

Ce commentaire de The Independent est méprisant et humiliant pour Tony Blair. Devant de telles attaques (il y en a tant d’autres, comme ces 110 parlementaires travaillistes signant une pétition contre sa politique israélienne), on s’interroge de savoir comment Blair continue à avoir l’impudence de rester en place. La seule réponse est que l’homme, isolé du monde réel par ce qui fait office de Garde Prétorienne postmoderne, ses services de communication, ignore en vérité l’ampleur et l’intensité du sentiment contre lui, s’il peut seulement l’accepter.

Face à un tel climat, on se demande non pas s’il y aura à un moment une rupture, une explosion, mais quand et sous quelle forme l’une ou l’autre auront lieu. L’état de crise de notre système est d’une profondeur imaginable, il est générateur de tensions, — politiques et idéologiques — d’une intensité extrême. Quelque chose doit craquer, disait le titre du film. Quoi, et comment : voilà le mystère.


Mis en ligne le 5 août 2006 à 05H18