Précisions autour de l’effondrement

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Précisions autour de l’effondrement

11 mai 2019 – Sur son site Point de vue d’un astronome (françois-roddier.fr), l’astronome François Roddier expose la “théorie des équilibres ponctués” selon sa méthode qui est d’appliquer aux sociétés humaines et au destin de notre civilisation en particulier certaines grandes lois des “sciences dures” parmi les plus significatives et les plus porteuses de potentialités pour nous du type métaphysique, et notamment de la thermodynamique. On a déjà vu sur ce site plusieurs travaux de Roddier dans ce sens, et constaté combien l’intérêt de son travail était bien de faire constamment le pont entre ses grandes connaissances théoriques, notamment des grands flux dynamiques de ces sciences, avec la situation humaine, politique, psychologique, etc., de l’immense Crise Générale de notre civilisation que nous traversons, que nous suivons quasiment au jour le jour.

(Nous ne dirons jamais assez, le répétant sans cesse, ce phénomène extraordinaire et sans précédent dû aux capacités du système de la communication, sur lequel nous revenons plus loin, de suivre quasiment en temps réel, dans tous les cas pour ceux qui savent rechercher les vérités-de situation, les avancées de cette Grande Crise Générale. C’étaient les premières phrases de l’essai (2003) de PhG, “Chronique de l’ébranlement – Des tours de Manhattan aux jardins de l’Élysée” :

« D'abord, il y a ceci : en même temps que nous subissions cet événement d'une force et d'une ampleur extrêmes [l’attaque du 11 septembre 2001], nous observions cet événement en train de s'accomplir et, plus encore, nous nous observions les uns les autres en train d'observer cet événement. L'histoire se fait, soudain dans un déroulement explosif et brutal, nous la regardons se faire et nous nous regardons en train de la regarder se faire. On sait également que ceux qui ont décidé et réalisé cette attaque l'ont fait parce qu'ils savaient qu'existe cet énorme phénomène d'observation des choses en train de se faire, et de nous-mêmes en train d'observer. »)

Voici donc le texte sur La théorie des équilibres ponctués de François Roddier, paru sur son site le 28 avril comme billet n°140 (repris par le Sakerfrancophone le 5 mai 2019). La théorie est exposée clairement, rapidement et sans complication inutile, le principal étant consacré à ce qui nous intéresse principalement, qui est son adaptation, voire plus simplement son application aux sociétés humaines. 

Cette démarche est évidemment particulièrement adaptée, sinon sollicitée par notre propre situation ; elle trouve aisément sa place dans ce que nous désignons soit comme notre Grande Crise Générale, soit comme la Grande Crise d’Effondrement du Système. De fait et de ce fait, la relation n’est pas seulement exposée en théorie mais bien actualisée, développée chronologiquement dans notre époque, en fonction d’événements déjà survenus et selon l’hypothèse exploratrice d’événements assez proches à venir. Ce que nous avons signalé plus haut comme la capacité prodigieuse de disposer d’un poste d’observation exceptionnel de rapidité et de précision par rapport aux événements grâce à ce que nous désignons comme le système de la communication justifie complètement la démarche.

« On doit au paléontologue américain Stephen Jay Gould et à son associé Niles Eldredge la constatation que l’évolution des espèces n’est pas uniforme dans le temps mais procède par sauts brutaux à des époques particulières. C’est la théorie dite « des équilibres ponctués ». Le physicien Per Bak a montré qu’elle est une conséquence du processus général de criticalité auto-organisée selon lequel les structures dissipatives s’organisent.

» Cela signifie que l’évolution d’une société humaine suit un processus du même type que celui des espèces animales ou végétales. Il est intéressant de comparer leurs évolutions respectives. L’apparition d’une nouvelle espèce animale ou végétale serait l’équivalent de la naissance d’une société nouvellement organisée. Nous avons vu que cette dernière évolue en traversant quatre phases successives qualifiées de phase de dépression, d’expansion, de stagflation et de crises. Ce sont les phases des cycles de Turchin et Néfédov. Il semble qu’on retrouve effectivement ces mêmes phases dans l’évolution d’une espèce.

» La phase de dépression correspondrait à la phase durant laquelle une nouvelle espèce apparait et s’installe dans sa niche écologique. Suit une phase d’expansion durant laquelle les membres de cette espèce se multiplient rapidement. Après avoir atteint une certaine valeur la population se met à stagner. C’est la phase de stagflation durant laquelle l’espèce modifie l’environnement à laquelle elle est adaptée. On entre alors dans la phase de crise durant laquelle, devenue inadaptée, l’espèce finit par s’éteindre pour être remplacée par une espèce mieux adaptée au nouvel environnement.

» La similarité entre les deux processus montre qu’ils sont de même nature. Dans le cas des espèces animales ou végétales, l’information est mémorisée dans les gènes. Il s’agit d’une évolution génétique. Celle-ci est très lente et s’étale sur des millions d’années. Dans le cas des sociétés humaines, l’information est mémorisée dans le cerveau et se transmet par la parole et l’écriture. Il s’agit d’une évolution culturelle. Beaucoup plus rapide que l’évolution génétique, elle s’accomplit en quelques siècles. Ce sont les cycles séculaires de Turchin et Néfédov.

» Les progrès dans les transports et les communications font que l’évolution culturelle s’est encore accélérée. La France d’aujourd’hui vit dans une société dont la culture s’est développée à la fin de la première guerre mondiale et dont les phases n’ont duré que 30 ans. Marquée par la grande dépression de 1929, sa phase de dépression s’étend de 1918 à 1948. Suit une phase d’expansion, connue sous le nom de « 30 glorieuses », allant de 1948 à 1978, puis une phase de stagflation parfois qualifiée de « 30 piteuses ». Elle s’étend de 1978 à 2008. La crise bancaire de 2008 marque le début d’une phase de crise qui devrait logiquement durer jusqu’en 2038.

» C’est durant sa phase de crise qu’une société s’effondre. L’effondrement correspond à ce que j’ai appelé la « falaise de Sénèque » une appellation suggérée par l’italien Ugo Bardi. Cette falaise correspond au palier de condensation des thermodynamiciens. Elle se situe donc au milieu de la phase de crise. Si on applique ce résultat à la société française actuelle, on doit s’attendre à ce que celle-ci s’effondre en 2023, soit à la fin du présent mandat présidentiel. Je laisse mes lecteurs juger de la pertinence d’une telle prédiction.

» À quoi doit-on s’attendre concrètement? La comparaison avec la fin des espèces végétales ou animales nous met sur la voie. Celles-ci s’éteignent lorsque leurs gènes ne sont plus adaptés à l’environnement. Dans le cas d’une société humaine, c’est sa culture qui n’est plus adaptée à l’environnement. C’est bien le cas de la société actuelle, société de compétition dont la principale source d’énergie, le pétrole, s’épuise et dont l’activité modifie le climat.

» De même que la théorie des équilibres ponctués laisse prévoir une évolution rapide des gènes à des époques très particulières, de même elle laisse prévoir une évolution très rapide de la culture à des époques très particulières. J’ai suggéré que notre société actuelle allait s’effondrer en 2023. Cela implique une fin brutale de la culture dominante présente. On pourra alors espérer voir enfin rapidement s’étendre une nouvelle culture, beaucoup moins portée vers la croissance économique et beaucoup plus orientée vers la préservation de l’environnement. »
 

On observera que cette analyse de François Roddier met l’accent sur la culture pour caractériser un effondrement qui, bien que'autorisant une référence au cas français si significatif, devrait affecter “notre société actuelle”, par conséquent prioritairement ce que nous désignons comme le bloc-BAO :

«… [D]e même [la théorie des équilibres ponctués] laisse prévoir une évolution très rapide de la culture à des époques très particulières. J’ai suggéré que notre société actuelle allait s’effondrer en 2023. Cela implique une fin brutale de la culture dominante présente... »

Il faut noter qu’un autre “collapsologue”, Dimitri Orlov, estimait il y a un an qu’il lui fallait revoir ses prévisions, non pas sur le fait lui-même de l’effondrement, mais sur le classement chronologique des phases de l’effondrement. Il plaçait initialement en dernier l’effondrement culturel, envisageant même dans le cas de l’URSS un effondrement n’affectant pas la culture, ce qui a permis une rapide reconstitution de l’ensemble russe...

« Dans mon livre de 2013,  Les cinq stades de l’effondrement, j’ai conceptualisé l’effondrement en cinq étapes : financière, commerciale, politique, sociale et culturelle. J’y expliquais qu’un effondrement se déroulait généralement dans une cascade  canonique, en commençant par le plus fragile (financier) et en se terminant par le plus durable (culture). »

(On pourrait éventuellement opposer à Orlov l’argument suivant : les conditions générales, notamment l’exceptionnalité de l’aspect corrupteur jusqu’à la pourriture la plus profonde de l’époque Brejnev ont achevé de totalement liquider la culture soviétique que Lénine et Staline avaient imposée par le fer et le feu, par la balle dans la nuque et le Goulag, et que Khrouchtchev avait commencé à détricoter à partir de 1956 et la déstalinisation. Les dernières années entre la mort de Brejnev et l’arrivée de Gorbatchev [1982-1985] achevèrent de dissiper les restes de cette pourriture  que Gorbatchev commença à remplacer par de nouvelles conditions [glasnost] suscitant, – involontairement dans le chef de Gorbatchev, – l’effondrement politique et économique et la disparition de l’URSS, et préparant, au long des terribles années 1990, la renaissance d’une culture russe. On peut alors dire que l’effondrement de l’URSS commença par l’effondrement de la culture soviétique, dans une occurrence où, déjà, le système de la communication, en permettant et en diffusant la glasnost, joua un rôle essentiel. Et c’est ainsi que Gorbatchev est un grand homme dans l’Histoire, même si involontairement, même si sa popularité est quasiment proche de zéro dans la Russie reconstituée.)

Finalement, Orlov admet que les effondrements se sont inversés, dans tous les cas pour le premier d’entre eux, l’effondrement culturel, qui touche en premier les pays du même groupe déjà identifié (bloc-BAO), ce qui rejoint le classement de Roddier. Ce qui est notable dans la perception d’Orlov, et qui est d’ailleurs relevé par nombre d’observateurs pour constituer un phénomène remarquable allant dans le sens des propos développés, c’est qu’il existe une intervention humaine volontaire dans la destruction de cette culture (et, d’une façon concomitante, de la société), sans que cette intervention soit explicitée :

« C’est ce que je vois se produire aux États-Unis et, à divers degrés, dans différentes parties de l’Union européenne : une tentative de saper et de détruire la société et la culture commune cohésives avant l’effondrement financier, commercial et politique à venir. [...]

» Les approches prises pour détruire la société et la culture peuvent sembler disparates et manquer d’unité dans leurs objectifs… jusqu’à ce que vous compreniez que leur but est de détruire la société et la culture. »

Culture & système de la communication 

D’une façon générale, il est certain que nous partageons évidemment et totalement l’approche générale, et particulièrement le fait de donner le premier rôle à la culture, à la fois chronologiquement et en importance. (Nous y ajoutons, pour notre compte, l’immense importance de la psychologie, – une psychologie collective qui se retrouve dans des psychologies individuelles assumées et conscientes, – qui participe à cette importance première de la culture dans sa phase d’effondrement, en dénonçant consciemment et explicitement la culture finissante et en appelant de ses vœux une autre culture.)

Cette approche est relativement inédite par rapport à ce qui furent (et restent pour certains) les conceptions dominantes des collapsologues, donnant la priorité chronologique à un effondrement financier. La rapidité extraordinaire des changements culturels entraînant le social et le sociétal constitue un fait majeur expliquant ce changement, renforcé par une sorte de “bulle invulnérable” où s’est réfugié le système boursier-financier qui semble avoir rompu toutes les amarres qui le liaient encore à la vérité-de-situation crisique. Ce domaine sera donc emporté sans qu’il n’ait rien vu venir.

Il faut noter que les avis convergent également dans le détail des localisations culturelles politico-géographiques. Roddier parle implicitement du cas français comme exemple en évoquant les élections présidentielles  et Orlov parle très précisément de la situation américaniste (avec la possibilité, déjà évoquée, qu’un coup de force de type-téléréalité de Trump reportant l’élection de deux ans dans la même époque, autour de 2022). Dans ces deux exemples, les situations évoquées conduisent à des hypothèses, dans tous les cas dans notre chef, de “guerre civile culturelle” tant les fractures de cet ordre culturel, notamment dans les deux exemples évoqués, sont grandes, beaucoup plus grandes même que les fractures économiques (inégalités de revenus). Pour nous, effectivement, les affrontements culturels, même s’ils sont moins quantifiables et moins “porteurs” d’apparence que les fractures économiques, sont beaucoup plus explosifs alors qu’ils ont acquis une vélocité extraordinaire.

C’est aussi cette vélocité nouvelle qui nous arrête, qui est entièrement due au système de la communication. C’est le point principal où nous voulons en venir. La puissance du système de la communication est telle qu’il ne véhicule plus l’évolution culturelle, il l’impose et même il la crée au-delà même des points que voudraient atteindre de ceux qui veulent cette évolution, introduisant chez eux des déséquilibres psychologiques graves de type schizophrénique et paranoïaque. Autre élément d’une importance absolument considérable, cette puissance et cette vélocité du système de la communication renforcent avec une même force ceux qui s’opposent, le plus souvent en tant qu’antiSystème, à cette poussée incontrôlable.

(On retrouve l’aspect essentiel de l’effet-Janus du système de la communication que nous évoquons si souvent, qui fait que ce système pousse tout ce qui peut être poussé, dans notre cas particulièrement avec des avancées culturelles incontrôlables, dans le sens postmoderne et déstructurant bien entendu, – mais ce caractère-Janus faisant qu’en même temps il renforce avec une puissance et un effet au moins égaux la résistance à cette poussée. Cet effet-Janus doit être constamment à l’esprit parce qu’il est constamment en action. Le système de la communication ne renforce pas le Système avec cette force inarrêtable, il renforce à la fois le Système et l’antiSystème avec cette force inarrêtable égale ; il crée les conditions de la conflagration, de toutes les façons possibles et, plus encore, il en dicte aussi les conditions sinon le contenu.)

Ainsi nous semble-t-il quasiment impossible de connaître quelles nouvelles conditions culturelles peuvent survenir dans la phase d’effondrement qui prendrait nécessairement la forme d’un conflit, puisque le système de la communication, par sa dynamique même dans des conditions conflictuelles, créerait des conditions complètement originales. Si vous voulez une image, ce serait celle qui serait définie par ce qu’on nomme the fog of the war (“le brouillard de la guerre”) : on prépare une guerre, on fait des plans en fonction des conditions initiales, on décide de suivre telle ou telle voie, – mais dès que la violence et la brutalité du conflit éclatent en semant le désordre, tout est plongé dans “le brouillard de la guerre”. Toutes les prévisions deviennent caduques, le mouvement même modifie toutes les conditions fixées et prises comme références au départ.

C’est la même chose dans cet affrontement que nous décrivons, et cela est certainement inédit pour ce qui est de la qualité de l’événement, par rapport aux ruptures civilisationnelles qui ont précédé, qui n’avaient pas cette puissance de la communication, sa simultanéité, son effet instantané... L’effondrement, – car un tel assemblage de chocs et de ruptures ne peut qu’aboutir à l’effondrement et va dans le sens des prévisions signalées, – a donc lieu mais sans qu'on puisse savoir dans quel sens et surtout avec quelle intensité, quelle profondeur, et surtout avec quel processus par rapport aux psychologies, et affectant les psychologies dans une mesure impossible à déterminer par avance

Comme nous l’avons déjà vu plus haut avec l’hypothèse sur l’effondrement de la culture soviétique avant l’effondrement de l’URSS, cette question des psychologies affectées ou pas, profondément ou non, dans quel sens, etc., par l’effondrement, est d’une importance si extrême à notre sens qu’elle détermine tout le reste. En effet, nous pensons que c’est la capacité des psychologies qui déterminera le succès d’une transformation culturelle ou l’autre, dans le chef des pressions du système de la communication. Notre appréciation est optimiste à cet égard dans ce cadre du pessimisme heureux qui nous fait prévoir et attendre l’effondrement du Système.

Le point capital ici est que le système de la communication affectant les deux parties antagonistes à cause de de l’effet-Janusc’est selon les capacités des psychologies de ceux qui en font partie que seront reçus ses effets, dans un sens plus ou moins favorables. Les psychologies les plus fortes les accueilleront à leur avantage, et bien entendu l’on sait où vont nos préférences intuitives : il nous semble effectivement que, par simple proximité des vérités-de-situation et absence en général de servilité fondamentale, c’est-à-dire par une conformation extrêmement structurée et une perception étrangère aux simulacres du Système, les psychologies des antiSystème présentent ces caractères qui font d’elles les manifestation d'une psychologie collective forte.

... Enfin, la question la plus fondamentale, et celle qui n’a pour l’instant pas de réponse, se trouve à notre sens, et selon nos propres approches et conceptions, dans l’origine même des cultures en cours de formation dans leurs affrontements, dans l’hypothèse de l’effondrement, et se modifiant ou s’adaptant par conséquent du fait de cet effondrement. La question concerne alors l’essence et le rôle du système de la communication : s’agit-il simplement de ceux d’une dynamique très puissante mais aveugle (dans ce cas, l’essence n’en est pas une), ou bien s’agit-il d’une essence et d’un rôle spécifiques qui n’ont plus rien d’un aveuglement ? On sait que nous avons toujours avancé l’hypothèse que le système de la communication est quelque chose de spécifique et d’extrêmement complexe, qui joue un rôle autonome fondamental. Pour nous, ce n’est pas un système transmetteur(d’informations décrivant une situation) mais un système transmuteur (de situations décrites par les informations) ; un système créateur et non pas un simple système utilitaire ... (*) 

 

Note

(*) Sur le système de la communication, voir sa présentation rappelée dans un texte du 17 novembre 2018 :  

« [A]ppréciation donnée par PhG le 2 juillet 2018 dans son Journal-dde.crisis, où l’on voit que le système de la communication se différencie décisivement du concept classique de “système de communication” par l’apparition d’une dimension créatrice en lui-même... Le “système de communication” étant un simple transmetteur de l’information sans aucune prétention à l’organisation et à la structuration de la connaissance tandis que le “système de la communication” est un transmuteur qui organise (transmute) l’information de façon à susciter par cette activité la connaissance élaborée à quoi peuvent être utilisées ces informations :

« Ainsi se trouve, je pense, suggérée la véritable définition du système de la communication (et la raison, jusqu’ici assez intuitive, pour laquelle j’ai tenu depuis quelques années à écrire ‘système de la communication’ et non ‘système de communication’). La ‘communication’ dans ce cas n’est pas un simple outil, elle est une matrice féconde. Le système de la communication n’est pas seulement un transmetteur, il est aussi et d’abord un transmutateur ; il ne fait pas que transmettre, il transmute ce qu’il transmet, et pour revenir à notre propos, il transmute les informations en “actes” en même temps qu’il les transmet, par la façon qu’il les transmet, par la dynamique qu’il y met, par la forme même qu’il donne au tout.

» “Je ne crois pas, bien entendu, que cette action soit simplement mécanique et dynamique. Je crois qu’à considérer cette situation sans précédent possible d’aucune sorte, cette action de transmutation exercée par le système de la communication répond à un sens fondamental, dont l’inspiration échappe à tout contrôle humain. Bien entendu je ne parle évidemment pas du contenu des nouvelles (‘Allez jouer avec vos FakeNews’, comme Montherlant disait “Va jouer avec cette poussière”), mais bien de l’essence même de cette forme absolument inédite d’un système agissant directement sur la manufacture de la métahistoire en ignorant superbement, comme l’on méprise, l’histoire événementielle à laquelle nous sommes habitués et dont le Système a si habilement abusé.” »